Le soleil, la mer, la plage, plein de Pokémon de type eau tous plus mignons que les autres. Je me grattai le flanc, me retournant en maugréant. Les nuages d’un blanc immaculé, la brise chaude, le ciel d’un bleu éclatant. Je roulai sur l’autre côté, serrant un peu plus fort mon oreiller. Un beau jeune homme qui venait me rejoindre sur la plage, s’extirpant des vagues avec classe, une planche de surf sous le bras. Et il courait vers moi avec enthousiasme, j’allais bientôt pouvoir distinguer son visage de plus près lorsque… « Vyyyyy! » Je fus violemment tirée de mon sommeil par les lianes d’Ouji-sama, s’affairant à me tirer hors du lit. Surprise, je sursautai et m’accrochai à mon matelas de façon spontanée, maugréant contre le petit Pokémon plante qui, finalement gagna la partie alors que je me laissai glisser jusqu’au sol, croisant les bras et râlant sur l’attitude inapproprié du petit Vipelierre. Je n’avais pas le droit de dormir, pas le droit de lui faire un commentaire déplacé, pas le droit de remettre ses choix en question, je devais répondre à tous ses petits caprices et je devais même supporter ses sautes d’humeur. Parfois, je me demandais ce que j’avais bien pu faire pour mériter pareil Pokémon, bien que je n’aurais voulu en changer pour rien au monde. Mais ne lui dites pas que j’ai écrit ça, sinon il serait bien capable de s’enfler la tête durant des jours!
Mais pourquoi tu me réveilles si tôt? J’suis certaine que même les Pyroli dorment encore!
C’était très probablement faux, le dortoir des Pyroli se levait plus tôt que n’importe lequel des autres et j’étais bien heureuse de ne pas en faire partie pour être honnête. Mais bref, ce matin là, à ce moment là, j’avais l’impression que je ne méritais pas de subir une injustice aussi monstrueuse que de devoir me lever à huit heures du matin. L’opinion d’Ouji-sama semblait toutefois différer de la mienne puisqu’il se tenait aux côtés d’une pile de matériel divers et tapait régulièrement le sol de son petit pied droit. Encore un truc que j’avais oublié de faire on dirait. Je soupirai, faisant rapidement l’inventaire de mon petit butin, soit de quoi faire quelques éléments de décor pour la compétition de coordination qui aurait lieu dans les prochains jours. J’avais hésité sur ce point aux premiers abords, ne désirant pas non plus en faire trop, mais mon Snivy avait décrété qu’il fallait à monsieur un minimum de décor, sans quoi il n’était pas la peine de s’attendre à ce qu’il daigne monter sur scène. Il était de mon devoir en tant que dresseuse et coordinatrice de tout faire en mon pouvoir pour que la performance soit réussie et donc, par extension, combler toutes les demandes de mon Pokémon. Je me résignai donc à faire ce qu’il me demandait et, avant de commencer la séance de bricolage et de répétition, allai rapidement me laver, m’habiller et manger un petit quelque chose. Je retournai ensuite à ma chambre afin d’y récupérer mes effets, rangés en quelque chose comme six sacs, tous plus gros et plus chargés les uns que les autres. Ce que je voulais faire n’était peut-être pas ce qu’il y a de plus extravagant, mais j’avais prévu du matériel de surplus et je désirais faire quelques essais avant d’arrêter mon choix sur la méthode à employer. À ma très grande surprise… Ouji-sama pressa le pas pour être le premier, bien loin devant moi, me laissant me débrouiller seule avec mon fardeau alors qu’il prenait la fuite vers notre destination.
Mais attends-moi au moins! Ça se fait pas de partir tout seul comme ça sans aider ta dresseuse!
Je pris donc -oh surprise- un certain retard, maugréant alors que je manquais de peu d’échapper quelque chose à chaque deux pas. Il lui aurait suffit ne serait-ce que d’une seule liane pour m’être utile, mais bien sûr son Altesse n’allait pas porter assistance à une simple fille de basse naissance, n’est-ce-pas?! Satané Pokémon de mes deux! Le travail d’équipe il connaissait pas ou quoi? Et puis pourquoi c’était toujours à moi de me taper tout le sale boulot? Je ne l’avais que depuis quelques mois et j’avais déjà envie de prendre des vacances. C’était un véritable calvaire que de devoir l’endurer. J’espérais pour lui qu’il allait livrer une performance exceptionnelle lors du concours de coordination, sans quoi il entendrait parler de moi très longtemps et plus aucun traitement de faveur pour le Prince! D’ailleurs, parlant du concours de coordination. Pendant tout ce temps où je râlais, j’avais fini par gagner le parc et déposer mes bagages sur un banc avant de m’y asseoir pour souffler un peu. J’observai les lieux d’un regard circulaire et, plus loin, je vis une jeune fille qui s’entraînait avec trois Pokémon. Je tendis l’oreille, un peu curieuse, jusqu’à l’entendre discipliner la petite troupe et dire : «Tu seras sur les devants de la scène comme tout le monde ! ». Mes yeux s’agrandirent et de pettes étoiles s’y formèrent. Elle aussi allait participer au concours? C’était donc une occasion en or de me faire une nouvelle amie peut-être bien et de lui donner un coup de main. Et puis, toutes les excuses imaginables me semblaient valables pour repousser à un peu plus tard tout mon travail manuel. Ouji-sama tenta de me retenir en se plaignant, comme à l’habitude, mais je l’ignorai et m’approchai du petit groupe, avec le sourire.
Bonjour! Tu t’entraînes aussi pour le concours? Si tu veux je peux peut-être t’aider. *Petite pause* Oh, et avant d’oublier, je suis Estelle du dortoir Mentali.
La rousse sembla un peu embêtée de me voir arriver comme ça à l’improviste. Remarque j’aurais du y penser, ce n’était pas très correct de ma part de venir déranger quelqu’un en plein entraînement. J’allais m’excuser et repartir comme j’étais venue, mais avec moins d’enthousiasme, lorsque l’adolescente me répondit d’abord hésitante, puis plus confiante. Elle se présenta comme étant Ruby, du dortoir Pyroli. Ouah! Une vraie de vraie Pyroli! La pauvre, je me demandais comme c’était que de devoir suivre chaque matin les entraînements de Jackie. Ça n’avait pas l’air d’être une partie de plaisir et pour une fille qui aimait son petit confort autant que moi, c’était même digne d’un scénario de film d’horreur. Quoi qu’il en soit, elle accepta finalement ma proposition et un large sourire vint étirer mes lèvres. Rester assise à faire des lanternes de papier toute seule semblait terriblement ennuyeux, à comparé l’idée d’aider quelqu’un d’autre avec sa propre routine serait une pure et simple partie de plaisir. Puis, elle me présenta ses trois Pokémons et je les saluai avec le sourire, ravie de faire leur connaissance. Mon propre partenaire décida d’ailleurs enfin de venir nous rejoindre et, à la vue d’un auditoire potentiel, s’était fait plus droit et sérieux. Il avait néanmoins un léger sourire et, bien sur, il faisait tout pour envoyer aux autres une image emplie de classe, de confiance et de supériorité. J’en soupirai presque, pourquoi ne pouvait-il donc pas se comporter normalement? Bref, c’était à mon tour de le présenter maintenant ou il râlerait encore, comme à son habitude.
« Ravie de faire votre connaissance. De mon côté par contre il n’y a encore qu’Ouji-sama et moi. »
Suite aux présentations, la Pyroli mentionna que le thème n’était pas des plus aisés pour elle, mais qu’elle avait déjà quelques idées. J’étais curieuse, comme à l’habitude, mais jamais je me serais douté que j’allais avoir droit à un exemple en live de ces dites idées. Le quatuor s’activa sans qu’une seule parole ne soit échangée, au moins ça prouvait qu’ils avaient déjà commencé à s’entraîner auparavant, donc tout n’était pas perdu. Chacun avait déjà un rôle qui lui avait été confié et la petite troupe s’exécuta donc son mon regard… songeur. Je pense que je comprenais l’idée de base, mais dans l’état actuel c’était beaucoup trop brouillon pour être présenté devant un vrai jury, ou en tout cas c’était l’impression que je m’en faisais. Dans les faits, moi-même je n’avais jamais participé à un concours de coordination, mais j’en avais vu plusieurs à la télé et ça ne ressemblait pas à ça. Néanmoins, il y avait un monde d’écart entre être capable de dire que ça n’avait pas le niveau de ce qui passait à la télé et être vraiment capable de produire un numéro digne des prestations télédiffusées. Mais bref, je savais reconnaître une bonne idée lorsque j’en croisais une et celle-ci me semblait pleine de potentiel. Je lui laissai donc la chance de me partager ses idées avant de lui partager donc mes propres réflexions de manière brève, me faisant encore très songeuse, cherchant déjà des moyens de l’aider à améliorer leur performance. Je pouvais d’ailleurs déjà sentir Ouji-sama qui, à mes côtés, devait mourir d’envie d’enseigner quelques uns de ses pas de danse aux Pokémon de Ruby.
« L’idée de base est intéressante. Bien exploitée, ça pourrait faire un super numéro. »
Je l’entendis rire un peu, mais déjà j’étais ailleurs. Mon regard bleuté détailla rapidement chacun des Pokémon, visualisant ce que je pourrais faire à l’aide des ressources que je possédais à l’heure actuelle. Je ne pensais pas faire carrière dans la mode, mais j’avais déjà l’habitude de confectionner mes propres vêtements et donc il me serait aisé de lui donner un coup de main à ce niveau là. Plusieurs autres coordinateurs seraient sans doute tentés de la laisser se débrouiller, voir de nuire à leurs compétiteurs, mais pas une seule fois cette idée ne me traversa l’esprit. Bien sûr, plus tard et à tête reposée je le regretterais peut-être, mais sur le coup ça me semblait génial de pouvoir aider et de me faire une nouvelle amie. Bref, suite à mon silence prolongé du à mes réflexions, Ruby me demanda si j’avais des idées et c’est donc sans attendre que je lui partageai mes idées avec enthousiasme, sans réaliser qu’elle me questionnait sur ma propre performance.
« Oui, j’ai peut-être bien une idée ou deux! Tu pourrais déguiser Pimousse en bourgeon ou quelque chose comme ça et t’habiller en fée du printemps, j’ai sans doute de quoi faire de jolies ailes dans mes sacs, et--»
Une liane vient me heurter le mollet alors qu’Ouji-sama m’offrait un regard condescendant, ses petites pattes feuillues croisées. Il sembla me regarder l’air de dire « t’as vraiment pas compris qu’elle parlait de notre numéro là? » Pour lui, si je parlais du numéro, j’allais forcément vanter ses capacités et ses multiples talents et c’était une occasion à ne pas manquer, surtout pas devant une autre dresseuse Pokémon. C’était presque un peu vexant d’ailleurs, j’aurais préféré qu’au moins mon propre premier camarade me soi un peu plus fidèle et dévoué, mais il faut croire que je n’avais pas tiré le bon numéro pour ça. Je lui jetai un regard noir, gardant pour moi ma petite plainte de douleur. Je n’aurais jamais l’air d’une dresseuse crédible si mon propre Pokémon était celui qui m’imposait la discipline et ce, devant public! C’était frustrant, humiliant et vraiment pas plaisant du tout. Tout ça parce que l’orgueil démesuré de cette petite plante verte ne pouvait pas se passer d’éloges. J’espérais très franchement que, si un jour je finissais par rencontrer un garçon, il ne soit pas à l’image du Vipelierre. Quoi qu’il en soit, je reportai ensuite mon attention vers la rousse, esquissant un sourire gêné et désolé.
« Désolé, je pensais que tu me demandais des idées pour ton numéro. L’enchaînement que j’ai choisi est plutôt simple. Croissance, un peu de danse et ensuite un joli saut acrobatique suivit de quelque chose comme Phytomixeur. Avec un Pokémon de type plante c’est facile de bien représenter le printemps après tout. J'ai aussi prévu accompagner moi-même la performance au violon, je pense que ce sera plus authentique et peut-être que comme ça je réussirai à toucher plus facilement le public. »
« Merci. J’ai aussi très hâte de voir votre numéro sur scène. »
Répondis-je avec le sourire après que la Pyroli m’ait remerciée de vouloir l’aider et nous avait dit qu’elle était certaine que nous allions assurer. Je la remerciai timidement d’un sourire, parce que bon, même si j’aime recevoir des compliments, je n’aime pas montrer que j’aime les recevoir. Elle conclut même en disant avoir hâte de nous voir présenter, comme quoi ça promettait d’être intéressant et Ouji-sama se permit d’acquiescer à ses paroles avec enthousiasme. Oh celui-là, ça lui ferait pas de tort d’apprendre le sens des mots modestie et retenue. D’ailleurs, le Polichombr de Ruby semblait très mécontent. Aurait-il un petit caractère semblable à celui de mon narcissique Vipelierre? En tout cas, ce dernier ne tarda pas à bomber le torse et à sourire face à l’attitude du Pokémon spectre. Ouji-sama n’était pas seulement un Pokémon compétitif, c’était un Pokémon qui savait déjà qu’il était le meilleur, le plus beau, le plus si et le plus ça. Voir un compétiteur s’énerver par sa faute, ce n’était pour lui que manifestation de la jalousie d’autrui et il n’y avait rien pour lui faire plus plaisir. Parfois j’avais envie de lui filer une petite tape derrière le crâne pour le ramener vite fait sur terre, mais jamais je n’aurais osé me montrer violente à l’égard d’un Pokémon. Au lieu de cela, je soupirai tout simplement, enfouissant un court instant mon visage dans la paume de ma main, un peu découragée. Le Pokémon plante me jeta un regard en coin, un peu interrogatif. Pour lui sa conduite était tout ce qu’il y a de plus normale et j’aurais du être fière d’avoir un camarade de sa trempe. Encore heureux que je ne partage pas son avis, autrement nous serions sans doute le duo le plus hautain de tout le pensionnat. Bref, pas besoin de vous parler de son caractère durant cent ans non plus, le personnage est vite cerné. Je reportai plutôt mon attention sur la jeune dresseuse me faisant face et souris, l’écoutant alors qu’elle me demanda si nous allions nous soutenir mutuellement.
« Bien sûr que si! Et je ne manquerais ton passage pour rien au monde, d’autant plus que j’avais déjà prévu regarder tous les autres. Je regarde les concours de coordination à la télé depuis toute petite alors voir un concours en vrai, c’est trop génial! »
On retourna ensuite sur le cas de mon starter qui prenait un malin plaisir à attirer toute l’attention, surtout quand on parlait de lui. Il se sertit même de son plus beau sourire de tombeur, pour les jolis yeux de Ruby. Pas croyable, il était pas capable de la mettre en veilleuse plus de quatre seconde et quart ou quoi? Quoi qu’il en soit, je me devais de répondre à la Pyroli et c’est donc ce que je fis, ignorant royalement les regards en coin fortement désapprobateurs que me lançait le principal concerné. Si je pouvais tenter une fois de plus de le faire redescendre de son petit nuage, je n’allais pas m’en priver. Et puis Ruby avait le droit d’en connaître plus sur son vrai caractère, autrement Ouji-sama en profiterait pour en faire une de ses fans et il valait mieux éviter de gonfler d’avantage l’orgueil de la plante verte.
« Au départ je voulais lui donner un surnom simple. J’avais pensé à Liane, mais monsieur trouvait que ça ne lui rendait pas justice. Il aimait bien son Altesse Royale, mais c’est beaucoup trop long et il y a toujours bien des limites à se foutre de la gueule des gens. Alors je l’ai surnommé Ouji-sama, ce qui veut dire Prince, parce que c’est exactement ce qu’il est. Un petit prince capricieux et narcissique, mais je l’aime comme ça. »
« Vyyyy! » me répondit-il d’un air furieux, me tournant ensuite le dos comme s’il me boudait alors que, pour ma part, j’en ris un peu. Oh aller, l’amour vache parfois ça fait du bien, et puis malgré tout on tenait beaucoup l’un à l’autre, ce n’était juste pas toujours apparent. Et puis il me pardonnerait bien vite lorsque viendrait le temps de sa petite séance de massage du jour, à la fin de la journée. Et sans doute même avant cela si je lui laissais la chance de briller devant public, son passe-temps favori.
Après que je lui eu parlé de ma passion pour la coordination depuis toute petite, Ruby me dit que pour sa part ce n’était pas pratique courante dans l’endroit d’où elle venait. Je me dis que ce devait être un peu dommage pour elle quand même. Qu’aurait été ma vie sans les concours télévisés, les films et les séries télés? Parce que bon, les gens ont tendance à l’oublier, mais les Pokémon qui jouent dans ce genre de chose sont souvent des Pokémons de coordinateurs. Chaque matin je me levais plus tôt pour aller les regarder et chaque soir je tentais de me soustraire à la surveillance de Leuphorie pour en visionner d’autres. Bien sur il y avait aussi les combats, mais ça me plaisait moins. Je n’avais jamais apprécié la vue de Pokémon blessés et il était rare, pour ne pas dire impossible, que les différents combattants s’en sortent indemne. Quoi qu’il en soit, de là à dire que j’avais de l’expérience dans la coordination, c’était peut-être un peu exagéré. Je n’avais jamais participé à un concours auparavant, n’ayant reçu mon premier Pokémon qu’au début du semestre. Dans mon enfance j’aimais bien m’occuper du Goupix de mon père sinon, mais entre mettre au point un numéro et simplement brosser un Pokémon, il y a un monde d’écart. Je rectifiai donc le tir, prenant un petit air gêné et me grattant l’arrière de la tête.
« Je n’irais quand même pas dire que j’ai de l’expérience, ce sera ma toute première participation dans un concours. Mais oui, je suis une fan de coordination. »
Vint ensuite le sujet d’Ouji-sama et la Pyroli mentionna qu’elle tenterait d’en tenir Hex éloigné, sans quoi ils risquaient de ne pas s’entendre. J’acquiesçai, moi non plus je n’avais pas envie qu’un conflit se déclare. Ruby était sans doute l’une de mes premières amies à la Pokémon Community et je n’avais pas envie qu’un différent aussi bête nuise à notre amitié naissante. Puis, elle poursuivit en disant qu’on les aimait comme ça et, une fois de plus, mon avis rejoignait le sien. Même qu’elle n’hésita pas à dire que son Pokémon faisait un peu partie d’elle et c’est avec un doux sourire que je jetai un regard en coin à mon Vipelierre.
« Ouais, je comprends tout à fait. C’est la même chose avec mon petit prince. »
Je la regardai ensuite aller s’occuper de ses autres Pokémons et ne pu m’empêcher de me dire que j’avais bien hâte d’avoir d’autres camarades moi aussi, pour faire grandir notre petite famille. Parce que bon, j’aimais beaucoup Ouji-sama et il me gardait très occupée, mais en même temps je pense que ça ne lui ferait pas de mal d’avoir un véritable ami. Surtout que ça lui ferait quelqu’un d’autre que moi à embêter. J’espérais quand même que ce serait un Pokémon avec un peu de caractère pour savoir s’imposer plutôt que d’embarquer dans le jeu du prince, peut-être comme ça apprendrait-il à devenir un peu plus humble et ça ne serait pas de refus. La jeune fille fit ensuite une proposition qui me surprit, mais j’haussai les épaules et embarquai dans son jeu alors que j’attrapai Ouji-sama pour participer au dit câlin de groupe en riant. Puis, une fois qu’il fut terminé, je me reculai et entreprit de passer à la prochaine étape de notre préparation au concours de coordination.
« Tu veux qu’on regarde ce que j’ai dans mes sacs de matériel pour préparer des costumes? Sinon j’ai peut-être un thème musical qui pourrait vous convenir quelque part sur mon iPok si tu n’en as pas et je suis certaine qu’Ouji-sama aimerait vous aider avec la chorégraphie. »
Suite à cette courte étreinte, je me sentais encore plus enthousiaste que d’habitude, ce qui ne serait pas pour nous nuire dans la poursuite de nos objectifs actuels. Puis, je proposai mes deux options à Ruby et elle me répondit seulement que c’était une bonne idée, ou l’art de répondre « oui » à un choix de réponse. Mais bon, dans ce cas là je me dis que c’était sa façon à elle de me demander ce par quoi je préférais débuter et donc, comme à mon habitude, c’est bien sûr avec les costumes que je décidai de commencer. La Pyroli me remercia et ajouta ensuite qu’elle ne savait pas si elle pourrait me rendre la pareille aujourd’hui, mais qu’elle le ferait un jour et je souris intérieurement. Peut-être avais-je réussi à trouver quelqu’un qui pourrait m’aider à préparer mes petites lanternes de papier? À deux le travail serait fait beaucoup plus rapidement et il faut dire que c’était une tâche plutôt redondante, soit exactement le genre de trucs que je n’aime pas faire. Déplier la lanterne, s’assurer qu’elle est en bon état, y fixer la petite lumière, passer le filage et l’attacher avec les autres à la banderole. Puis répéter ces étapes, une bonne centaine de fois. Autrement dit, de quoi me faire lancer tout ce beau matériel au bout de mes bras en criant au bout de vingt minutes. Et en plus de m’épargner une partie du travail, j’allais pouvoir m’amuser comme une petite folle à aider Ruby. Au fond, de mon côté il n’y avait que des bénéfices. Après pour ma nouvelle amie, si elle aimait s’occuper des lanternes il n’y aurait pas non plus de mauvais côté pour elle.
« Ne t’en fais pas, tu pourras peut-être m’aider plus tard avec mes lanternes de papier, pour mon décor. Je reviens, je vais chercher mes sacs de matériel. Et cette fois tu viens avec moi, petit prince! »
Le Vipelierre aurait normalement maugréé, mais curieusement pas cette fois. Il avait une jeune femme dans son auditoire, hors de question de paraître faible et de me laisser porter plus de sacs que monsieur et ses lianes, voyons. J’en soupirai de découragement, mais en même temps je n’étais pas mécontente de cette aide et nous allâmes retrouver mes six sacs remplis à craquer. Il tenta d’en prendre quatre, mais le contenu de l’un d’entre eux se déversa au sol et, finalement, il préféra délaisser ce sac et repartir avec seulement trois d’entre eux, me laissant le soin de ramasser son gâchis. J’en eu envie de crier, saleté de plante verte de mes deux! Et, pourtant, je ramassai le tout en vitesse et pris les sacs restants pour retourner auprès du petit groupe et déposer les sacs devant eux, débordant de petites merveilles de toute sorte. Il y avait différents tissus, des boutons, des fermetures éclair, différents petits accessoires, un mini-kit de couture, des bandes élastiques et j’en passe. La Pyroli m’invita à aller m’asseoir, mais pour ma part j’étais en plein élan créateur et donc je m’agenouillai plutôt devant mes sacs pour commencer à y fouiller. Deux d’entre eux étaient quand même dédiés à mon matériel pour faire les lanternes donc je les mis un peu à l’écart, mais sinon avec le reste nous avions de quoi faire. Toutefois, il y a bien quelqu’un qui accepta l'offre de la dresseuse et ma petite plante verte alla donc s’asseoir aux côtés de Ruby avant de lui décocher un charmant sourire et de lui offrir l’une des petites fleurs artificielle qu'il avait dérobé dans l’un de mes sacs. Pour ma part, j’avais les yeux rivés dans des avalanches de tissus et manquai donc la scène, mais répondit distraitement aux dernières paroles de la Pyroli.
« Ça me fait plaisir de t’aider, ne t’inquiète pas pour ça. As-tu déjà des éléments de costumes ou en avait tu déjà prévus quelques uns? Ça m’aidera à mieux déterminer ce dont nous avons besoin. »
J’étais plongée dans les tissus jusqu’au coude. Du bleu, du rose, du turquoise, du lilas, un peu de vert, encore du turquoise, de l’argent, un foulard blanc et bleu, et ainsi de suite. Parfois s’en était à se demander comment j’avais fait pour ramasser tout ça et, surtout, les entreposer. Enfin, à la maison j’avais mon walk-in pour ça, mais ici à la Pokémon Community on ne disposait pas d’autant d’espace et j’avais donc du faire preuve de beaucoup d’ingéniosité. J’étais d’ailleurs bien déçue de ne pas avoir pu emporter ma machine à coudre avec moi, mais c’était un sacrifice nécessaire j’imagine. Quoi qu’il en soit, nous avions du pain sur la planche et j’avais demandé à Ruby ce qu’elle avait déjà de prévu niveau costume, me faisant plutôt songeuse alors qu’elle me répondit. Une robe au design printanier c’était quand même bien. Personnellement j’avais opté pour un yukata fleuri, mais le choix d’une robe était plus féminin et sans doute plus léger, ce qui était un choix judicieux. Vint ensuite un petit moment de silence où je glissai distraitement un : « C’est un très bon choix, et je suis sure que tu seras mignonne dans une robe. » tout en poursuivant mes recherches. Si elle m’avait dit la couleur ça aurait facilité le travail tout de même, mais j’arrivais à m’en faire une petite idée si cela se rapportait au thème du concours, soit le printemps. Puis, elle ajouta avoir également la fleur offerte par Ouji-sama et je relevai mon regard céruléen vers eux, agrandit par la surprise. La plante verte affichait un air fier et satisfait et la Pyroli avait glissé ledit végétal artificiel dans sa chevelure rousse.
« C’est qu’il n’en rate pas une… »
Puis, Ruby reprit la parole et mon attention se reporta sur elle avec plus de sérieux alors qu’elle me dit mal s’imaginer ses Pokémons vêtus de costumes. Mes pensées tombèrent donc tout de suite en mode accessoire alors qu’elle dit la suite. Hex était déjà un tissu hanté. Ainsi il avait déjà l’air plutôt diaphane et cela me rappela la neige qui tombait parfois encore au début du printemps. Légère, elle fondait dès qu’elle touchait le bitume. Et la Pyroli n’avait-elle pas dit elle-même qu’il représenterait l’hiver dans leur numéro? C’était une piste à exploiter. Quant aux deux autres, Pimousse déchirerait vite fait les habits et Mist préférait rester discret. Donc pourquoi ne pas plutôt employer du maquillage pour Pimousse? S’il arrivait à déchirer du maquillage, il aurait alors toute mon admiration, même que j’avais un petit produit miracle qui permettrait au maquillage de tenir. Enfin, tout ça ne seraient que des propositions quand même, je n’allais pas non plus forcer Ruby à se servir des trucs que je lui proposais. Je replongeai donc dans mes sacs quelques instants à la recherche de ce que je voulais pour Hex, ce qui ne me prit que quelques instants. J’en ressorti donc fièrement un foulard argenté bien qu’un peu transparent et surtout très léger, brillant légèrement, et serti d’une broche en forme de flocon de neige, décoré de petites pierres du Rhin blanches.
« Ceci pourrait peut-être faire l’affaire pour Hex. Et pour Pimousse je devrais avoir du maquillage dans l’un de ces sacs, du vrai maquillage de scène. J’ai même le spray qui doit aller avec, à base d’alcool et de latex. Suffit de vaporiser le spray, attendre que l’alcool s’évapore, maquiller et remettre un peu de spray. Comme ça le maquillage résistera aux frottements et à l’humidité et il y aura beaucoup moins de chance pour qu’il ne déteigne sur ta robe quand tu le tiendras dans tes bras. Peux-tu m’aider à chercher le tout? Je sais plus où j’ai mis ma trousse. Je pourrai même te montrer comment faire un beau maquillage si tu veux, comme ça le jour de la compétition tu pourras le refaire sans moi. »
J’avais donc réussi à trouver quelque chose qui, selon moi, pourrait convenir à merveille pour le petit Hex qui devait représenter l’hiver, dans le numéro de Ruby pour le concours de coordination. Toutefois, la réponse de la Pyroli à l’évocation du maquillage ne fut pas celle que j’espérais alors qu’elle me dit que Pimousse n’aimerait pas cela non plus. Mon expression se modifia quelque peu pour devenir blasée alors que je ressortis de mes sacs et entreprit d’y remettre ce qui en avait débordé durant mes fouilles. Si on ne pouvait utiliser ni costume, ni accessoire, ni maquillage, il fallait se rendre à l’évidence. Je voulais bien aider et me montrer généreuse envers la dresseuse qui s’y connaissait moins en coordination, mais à ma connaissance je n’étais pas encore capable de miracle. Et puis bon, c’était un Grindur, pas un Métamorph. Il ne servait plus à rien de chercher la trousse de maquillage maintenant si nous ne comptions même pas en faire l’usage. Je poussai un léger soupir, me demandant ce que nous pourrions bien faire dans pareil cas de figure. Parce que bon, il ne fallait pas que je me laisse abattre pour si peu, n’est-ce pas? Une véritable coordinatrice devait être capable de produire une performance exceptionnelle et ce, peu importe les conditions auxquelles elle était confrontée. N’était-ce pas mon but? Celui de briller de mille-feux sur les devants de la scène alors qu’un jour, je deviendrais l’idéal que désireraient atteindre les autres jeunes filles? Oui, c’est l’objectif que j’avais décidé de me fixer, le cœur battant à tout rompre et la tête pleine de rêves. Et puis bon, une fille comme moi, je ne me voyais pas faire grand-chose d’autre pour être tout à fait honnête. Je n’étais pas assez intelligente pour me lancer dans la science et mes nerfs n’étaient pas assez solides pour les combats Pokémon. Je détestais voir ces êtres que j’aimais tant être blessés et donc, j’aurais eu tant de mal à envoyer mes propres compagnons à la bataille alors qu’il y avait un risque bel et bien réel. Une poké-athlète? J’avais remercié le ciel maintes et maintes fois déjà de m’avoir épargné un passage au dortoir Pyroli, ce que je n’aurais jamais pu endurer. À la place je m’étais retrouvé chez les Mentalis, le dortoir des jolies filles qui se démarquaient par leur beauté et leurs manières plutôt que leur intellect et leur curiosité, ou encore leur énergie et leur détermination.
Mais qu’est-ce que j’étais en train de faire là moi? Aller, je ne pouvais pas me laisser démonter par cet échec mineur quand même. Je n’allais quand même pas remettre en question mes choix de vie jusqu’à maintenant simplement car j’étais complètement à la rue et que je pataugeais comme dans de la mélasse pour savoir sur quoi enchaîner les préparatifs, n’est-ce pas? Tout viendrait se mettre en place avec un peu plus de temps et d’expérience. C’était ma toute première compétition, ce ne serait pas nécessairement représentatif de ma carrière à venir. Je devais me recoller un sourire sur ce visage tout mignon et faire mieux! Je redressai mon regard céruléen et croisai les iris d’Ouji-sama. Il s’était fait plus sérieux durant un instant, me fixant avec appréhension alors que je le cru presque capable d’entendre mes monologues intérieurs. Heureusement ce n’était pas le cas et la vue de sa riche teinte de vert ainsi que de sa prestance naturelle m’empli de sérénité. Il y avait bien un truc que je savais faire, même si je ne le faisais pas très bien, et c’était m’occuper de mon Pokémon et même, comme je le prouvais à l’instant, m’occuper des autres. C’est avec cette nouvelle confiance qu’une illumination me frappa et, rapidement, toute trace de doute se dissipa. Les costumes et les accessoires n’étaient que l’un des aspects de la mise en scène. Si les diverses techniques de ses Pokémons étaient bien exploitées, les spectateurs et, espérons-le, le jury ne seraient pas incommodés par l’importance moindre accordée à l’esthétique. Je tournai donc mon air rayonnant vers la Pyroli, reprenant la parole avec aplomb alors que je savais vers quoi nous devions enchaîner les préparatifs.
« Si on ne peut pas utiliser de costumes, d’accessoires ou même de maquillage, même avec toute la bonne volonté du monde on ne peut rien faire de plus pour Pimousse. Mais bon, heureusement il n’y a pas que ça qui compte et on a encore plein de possibilités devant nous. As-tu choisi les techniques que tu comptes employer sur scène? »
Nous avions délaissé le côté purement esthétique et nous penchions plus à présent sur le contenu de la performance. Lorsque je lui demandai si elle avait une idée des techniques qu’elle utiliserait, la rousse sembla un peu embêtée. Hésitait-elle à me révéler le contenu de sa performance, ou était-ce plutôt qu’elle ne savait pas encore ce qu’elle voulait présenter? Dans tous les cas, je m’apprêtais à lui dire que ce n’était pas grave et qu’elle n’était pas obligée de me partager le tout, mais la Pyroli entrepris de me répondre et je me fis donc attentive. Ruby dit n’avoir que quelques idées, mais c’était déjà beaucoup mieux que rien du tout. Elle me dit en premier lieux avoir décidé de se reposer sur Mist pour l’éclairage et le son plutôt que sur l’équipe technique et j’agrandis quelque peu les yeux sur le coup. Mais au font, mis à part l’éclairage, j’avais moi aussi décidé de prendre moi-même soin du son via mon violon alors je pouvais comprendre, bien que le but recherché n’était pas le même. Je voulais livrer une performance plus authentique, autrement j’avais une confiance totale en l’équipe technique. En même temps ce n’était pas comme si j’avais d’autres choix. Et puis de toute façon, tout le monde viendrait pour admirer la performance d’Ouji-sama donc tant que c’était bien éclairé et que je ne me trompais pas dans ma musique, tout irait pour le mieux.
Elle poursuivit ensuite avec le prochain Pokémon, répétant qu’elle comptait l’utiliser pour représenter la fragilité du printemps. Pour finir, la Rousse évoqua la possibilité d’user de l’attaque Ténèbres et je me fis songeuse, mais acquiesçai. Oui, bien utilisée dans une mise en scène cela pourrait s’avérer très intéressant. Le petit fantôme en fit même une démonstration et un sourire étira mes lèvres. Oui, c’était une très belle technique et je l’admirai, tout comme Ouji-sama qui semblait moins amusé tout à coup et était revenu se poster à mes côtés. Lui aussi avait levé les yeux vers la technique d’Hex et semblait la scruter avec intérêt. Dès que l’idée d’avoir de la compétition se faisait ressentir, la petite plante verte recouvrait toujours un grand sérieux et une détermination à toute épreuve. La Pyroli mentionna qu’elle pensait s’en servir pour recouvrir les projecteurs et j’espérai simplement que la visibilité serait tout de même bonne. Ici au grand air il y avait encore suffisamment de luminosité pour nous permettre de voir, mais dans une salle de spectacle fermé le résultat ne serait pas le même. Soit ce serait encore mieux, soit les gens devraient plisser les yeux pour essayer de comprendre ce qui se passait. Puis ce fut le tour du Balbuto qui devait s’occuper de l’apparition de la Lune, ce qu’il fit avec brio. Le résultat était très réussi, bien que le lien avec le printemps n’était pour l’instant pas très évident, mais c’est là que Pimousse intervenait. Il effectua son Miroi-tir et fracassa la voute céleste créée par les autres Pokémons de Ruby. La dresseuse s’inclina alors et c’est avec le sourire que je me mis à l’applaudir, imitée par Ouji-sama qui semblait toutefois moins enthousiaste que moi.
« C’était super! En fait c’est peut-être moi qui devrais demander ton aide. Sur scène ce sera surement encore mieux. Quant à notre démonstration, il n’en tiens qu’au petit Prince de décider, bien qu’il ne dit jamais non quand il a une chance d’avoir un public. »
Il bomba le torse de fierté et cela me fit sourire un peu alors que je récupérai mon iPok avant d’y chercher l’enregistrement de ma chanson, au violon. Il ne m’aurait pas dérangé de la jouer sur place, mais l’instrument était resté dans ma chambre et je n’avais pas envie de la faire attendre, sans oublier que de toute façon je pouvais avoir la chanson sans bouger de là. Une fois la chanson trouvée, je laissai le temps à mon camarade de se préparer et, de mon côté, fit une rapide présentation du numéro aux quatre autres.
« Notre numéro pour sa part représente la floraison et la pousse des plantes après la fin de l’hiver. C’est le renouveau de la vie en quelque sorte. Je vais accompagner la performance moi-même au violon, mais je ne l’ai pas emporté avec moi alors il faudra se contenter de l’enregistrement pour aujourd’hui. C’est quand tu veux, Ouji-sama. »
Sur ce, le Pokémon plante me fit un petit signe et je lançai la musique, suffisamment forte pour que tous les gens présents puissent l’entendre distinctement. Le Snivy débuta sa routine au sol, comme nous l’avions convenu, et se releva doucement en dansant, s’accompagnant de la technique Croissance. Il semblait alors plus beau qu’il ne l’était déjà et se laissait bercer par la musique, effectuant avec passion la chorégraphie que j’avais mise au point. C’était un numéro qui se voulait plein de douceur et peut-être un peu d’espoir. Il commençait au sol et finirait par s’approprier jusqu’au ciel, tel un grand arbre majestueux qui veillerait silencieusement sur la foule. Puis, au bout de quelques instants alors que sa prestation se faisait chargée de plus d’énergie, il effectua un saut, ou plutôt une attaque charge vers le haut, tournoyant gracieusement sur lui-même telle une ballerine. Le mouvement se fit de plus en plus rapide et, bientôt, une multitude de feuilles d’un somptueux vert vinrent virevolter dans l’air à ses côtés. Ici, en extérieur, il n’y avait aucune raison de se priver sur le volume de la technique et le Phytomixeur avait naturellement une envergure très impressionnante lorsqu’effectué par un Pokémon de la taille d’Ouji-sama. Voilà donc ce qui conclut l’enchaînement alors que le Vipelierre rejoint le sol avec élégance pour saluer la foule improvisée, entourée d’une nuée de feuilles tombant doucement, se laissant dévier par la légère brise de l’extérieur. Je fus la première à applaudir, ne pouvant m’empêcher d’encourager mon Pokémon qui, selon moi, avait bien du talent pour réussir à effectuer un tel numéro. Enfin, du moins ça c’était mon avis, mais bref. Je me tournai ensuite vers Ruby, fière de la performance de mon camarade.
« Voilà, ça ressemblera environ à ça. Qu’en penses-tu? »
Nous avions fait notre petite prestation pour le plus grand plaisir de notre auditoire. Enfin, il aurait été plus juste de dire qu’Ouji-sama avait étalé ses capacités. Pour ma part, je m’étais fait simple spectatrice puisque n’ayant pas mon violon avec moi. Il m’avait suffit d’appuyer sur un ou deux des boutons de mon iPok et le tour était joué. Néanmoins, ce n’était pas la plante verte qui allait s’en plaindre puisque, grâce à cela, il aurait l’attention et les bons commentaires de tous, seulement pour lui. Mais bon, ce n’était pas si mal, après tout il méritait effectivement d’être félicité et encouragé. Une fois le numéro terminé, je me tournai vers Ruby avec appréhension. Elle était la première à voir ce que j’avais préparé et son avis comptait beaucoup pour moi. C’était une façon de valider mon travail et de savoir que j’allais dans la bonne voie, ou au contraire une alarme qui pourrait m’avertir qu’il valait mieux tout modifier plutôt que de présenter cela devant public. La Pyroli dit d’abord que c’était magnifique et j’eu envie de lâcher un petit cri de victoire enthousiaste. Toutefois, je savais aussi qu’il était trop tôt pour me réjouir et j’attendis donc la suite, bien que pour moi c’était déjà mission accomplie. J’avais bien fait d’attendre puisque la phrase suivante commença avec un « malgré tout ». Mais qu’est-ce que ça voulait dire ça?! Malgré tout quoi? Je me sentis tomber des nues en un temps record, un peu hébétée. Forcément, je me posais tout plein de questions. Mais elle avait quand même dit que nous avions l’air faits pour la scène…mais sa façon de le dire me portait franchement à confusion. J’étais encore dans mes réflexions lorsqu’une voix extérieure à mes monologues intérieurs vint retentir dans mon esprit, me faisant sursauter.
Je dévisageai d’abord Ruby, puis ses Pokémons un à un avant de finalement arrêter mon regard sur le Baltoy. Ainsi ça venait de lui? Je me fis un peu gênée quand même, ne sachant pas trop sur quel pied danser après ça. Et puis, s’il était capable de parler directement dans ma tête, peut-être était-il aussi capable d’entendre mes pensées? Sur le coup c’était de quoi me rendre franchement mal à l’aise. Enfin, vous pouvez comprendre ça, vous aussi vous êtes un peu comme ça à lire tout ce que je pense et ce que je vous confie, alors vous devez bien comprendre pourquoi je n’avais pas envie que le premier Pokémon venu puisse tout venir lire à mon insu quoi. C’est simplement quelque chose de logique et je ne pense pas que qui que ce soit aimerait que sa tête puisse être disséquée de la sorte. Voyant sans doute l’air étrange que je devais avoir, Ruby s’excusa si son Pokémon m’avait surpris et je souris pour dissimuler ma gêne, me grattant également l’arrière de la tête.
« Ce n’est rien, je suis vraiment très flattée par le compliment. Simplement… »
Je me demandai comment aborder la question qui me tracassait le plus, jetant un regard en coin à Mist, me demandant si ça aussi il pouvait l’entendre. Ouji-sama, pour sa part, me jeta un regard intrigué, n’ayant probablement pas compris toutes les subtilités de la scène si je puis dire. Il semblait d’ailleurs un peu mécontent que j’aie quelque chose à redire, mais je décidai néanmoins de l’ignorer pour cette fois et simplement poser ma question.
« Est-ce qu’il peut aussi lire les pensées ou peut-il seulement projeter les siennes? »
Ouji-sama entendit la question que je posai à vive-voix et son regard se modifia immédiatement alors qu’il vint se dissimuler derrière mes jambes, laissant seulement dépasser une partie de sa tête pour garder un œil sur Mist. De son côté, la Pyroli eut un geste affectueux pour son Pokémon, mais que je devinais être également empreint d’un peu de réprimande. Il était vrai que, pour elle, ça deviendrait vite compliqué de ne pas effrayer les gens avec un Pokémon possédant une telle capacité si le concerné usait de ce don de façon trop invasive. Ruby entreprit donc de m’expliquer comment le tout fonctionnait, de façon honnête, claire et rapide. Je lui étais pour le coup assez reconnaissante et l’écoutai donc avec attention. Ainsi il pouvait lire les pensées, mais seulement si on y pensait suffisamment fort. Tant mieux quoi. Et puis de toute façon, s’il avait pu absolument tout entendre de tout le monde et ce, tout le temps, bonjour le mal de crâne quoi. Je n’aurais pas voulu être à sa place. Puis, elle ajouta que de toute façon son Pokémon était plus du genre à garder le tout secret, n’étant pas très bavard. Oui c’était un peu rassurant ça aussi, mais c’était le genre de choses auxquelles je ne pouvais pas faire 100% confiance, par simple mesure de précaution. Elle termina en disant ne pas chercher à savoir ce que pensaient les autres et je la remerciai d’un simple sourire, mon malaise s’étant à peu près dissipé dans son entièreté maintenant. Je baissai mon regard vers mon Snivy qui décida alors de se détacher de moi pour aller s’asseoir sur le banc avec le reste du groupe, ce que je décidai de faire également. Une fois de plus, il me faisait bien rire celui là. Il était le premier à se vanter et à bomber le torse, mais dès que quelque chose l’inquiétait il revenait se cacher dans les jupes de sa dresseuse. Quoi qu’il en soit, ce n’est qu’après une longue réflexion que la Pyroli reprit la parole, s’excusant et manifestant l’espoir que ça ne m’ait pas trop dérangée. Je souris et la rassurai donc sans plus attendre.
« Ça va, pas besoin de t’excuser et puis au moins maintenant je suis au courant. Et de toute façon je pense bien pouvoir vous faire confiance alors, je ne m’inquiète pas trop. »
Ouji-sama acquiesça un peu à contrecœur, prêt à se ranger à mon opinion, mais encore un peu intimidé. Un vrai gamin celui-là et je l’attirai contre moi avec un air moqueur pour le serrer dans mes bras et le forcer à se détendre un peu quand même. Gêné d’être ainsi traité comme un enfant devant une autre dresseuse, il se défit rapidement de mon emprise pour reprendre son air assuré et, déjà, tout l’épisode de la lecture de pensées semblait être oublié. C’est fou ce qu’il lui en fallait peu pour passer d’un état à un autre. Je n’avais pas un Pokémon, j’avais une petite Drama Queen! D’ailleurs, mon regard bleuté tomba comme par hasard sur le sac contenant mon matériel, pour mes banderoles de lanternes de papier, et je poussai presque un soupir de découragement. Avec tout ça, je les avais complètement oubliées celle-là, bien trop enthousiaste à l’idée de m’occuper de tous les autres aspects de la performance. Mais bon, mon décor n’allait pas se préparer tout seul, bien que j’aurais beaucoup aimé. Ça aurait pu faire comme dans la Belle et le Absol, avec les Pokémons changés en objets ménagers qui auraient pu s’occuper de tout à ma place. Euhm! Est-ce que je viens vraiment de penser à ça moi? Espérons que le Baltoy n’ait rien entendu quand même parce que c’était franchement con comme idée. Bon aller, il était temps de se mettre au travail et, au fond de moi, j’espérai qu’elle me propose son aide. Mais je ne le pensai pas trop fort hein! Ou peut-être que si en fait… Mais comment faire pour connaître le volume de ses propres pensées dites moi?!
« Il me reste encore à préparer mes guirlandes de lanternes pour ma part, pour le décor. En fait j’étais même venue ici pour cela donc, ça ne te dérange pas que je commence tout de suite? »
La Pyroli sembla sincèrement soulagée lorsque je lui dis lui faire confiance, sans oublier que pour moi ce n’était pas un grand problème. La vérité c’est que ça me mettait un peu mal à l’aise, mais c’était ma première amie ici et je ne voulais pas m’en séparer pour une chose comme celle-là. J’avais donc choisi de lui faire confiance parce que, de toute façon, c’était bien la seule chose que je pouvais faire dans pareille situation. Malgré tout, la jeune fille sembla éprouver le besoin d’exprimer son soulagement et les craintes qu’elle avait eu de vive voix. Ça ne devait pas être une partie de plaisir tous les jours si elle avait ces craintes là chaque fois qu’elle rencontrait quelqu’un de nouveau. J’entrepris donc de la rassurer une bonne fois pour toute, m’armant d’un sourire radieux.
« Ne t’inquiète pas, nous sommes des amies, n’est-ce pas? Je ne vais quand même pas te laisser tomber pour si peu. »
Puis, nous changeâmes de sujet afin d’évoquer celui des lanternes que je comptais préparer, en guirlandes, pour mon propre numéro à la compétition de coordination. Je lui demandai donc si ça lui dérangeait que je commence tout de suite, espérant malgré tout qu’elle se propose d’elle-même de m’aider. Fort heureusement, c’est effectivement ce qui se produisit. Au départ, Ruby se proposa simplement, puis elle le décida carrément, sans se soucier de ce que moi j’en pensais. La rousse me demanda simplement des explications sur la marche à suivre et me dit qu’elle allait se débrouiller ensuite. Je répondis à son sourire d’un autre sourire et la remerciai avant de lui fournir lesdites explications.
« Merci beaucoup! C’est super simple tu vas voir, je les ai achetées déjà faites, y’a qu’à déplier les lanternes et les fixer comme il faut sur les lumières de Noël. Comme ça elles seront éclairées et attachées ensemble super facilement et ça fera de jolies guirlandes. Et si Mist veut nous aider, il y a assez de lanternes pour tout le monde. »
Je sortis donc le matériel des sacs afin que nous puissions nous mettre à l’ouvrage et même Ouji-sama s’avança afin de faire sa part. Remarque, à bien y penser ce n’était pas si surprenant. Ces éléments de décor étaient ceux qui l’entoureraient durant sa performance et donc, pour lui, tout se devait d’être parfait. Il était si concentré à la tâche que ça me rappela un peu mon père, lorsque nous préparions mon anniversaire. Il prenait toujours un après-midi de congé et, toute la famille ensemble, nous préparions les différents préparatifs. Ma grand-mère était aux fourneaux avec Blissy et mon père et moi étions assis au salon, éclairés par la lumière du soleil, entrant par une fenêtre ouverte. Et, ensemble ainsi qu’avec l’aide de Vulpix, nous mettions au point toutes les décorations en lien avec le thème de l’anniversaire. Il y avait eu la féérie Jigglypuff, le royaume des Vulpix, le bal des Kirlia et j’en passe. Mais, chaque fois, mon moment préféré était l’après-midi, avant que n’arrivent les invités. Un peu rêveuse et me concentrant sur ma tâche, je pris tout de même la peine d’ajouter quelque chose.
« Chaque année j’en faisais avec mon père pour mon anniversaire, pour décorer le salon avant que mes amies arrivent à la maison. Ce n’est rien de bien compliqué. »
J’avais donc expliqué grosso modo la technique à Ruby et cette dernière comprit rapidement. Remarque, le contraire m’aurait étonné car bon, non seulement c’était ridiculement facile, mais également la rouquine me semblait être une personne débrouillarde, d’autant plus qu’elle était une Pyroli. Ma nouvelle amie ne manqua d’ailleurs pas de faire remarquer que j’avais dit vrai, ajoutant que c’était simple une fois que l’on avait compris la technique. J’acquiesçai avec le sourire, heureuse d’avoir rencontré une personne capable d’être si heureuse avec si peu de choses. J’avais trop souvent tendance à oublier les petites victoires de la vie et à me concentrer plutôt sur tous les trucs qui auraient pu être mieux, c’était donc rafraîchissant pour moi de voir quelqu’un de plus simple. Mine de rien, je réalisai que je gagnerais à apprendre d’elle alors que je m’affairai moi aussi à cette tâche, bientôt rejointe par Ouji-sama et Mist. En petit groupe, les choses allaient beaucoup plus rapidement que si j’avais été toute seule et je me dis que ça avait vraiment valu la peine que je lui file un coup de main. Certains pourront vous dire qu’il est déloyal d’attendre quelque chose en retour lorsque l’on aide quelqu’un, mais moi je vous répondrai que ces gens ne sont pas réalistes. Et puis bon, au final Ruby s’était offerte elle-même de m’aider, je ne l’avais pas exploitée et je ne lui avais rien demandé contre sa volonté, alors où donc était le mal là-dedans? Quoi qu’il en soit, tout ça pour dire que nous terminâmes dans un temps record. Un sourire illuminait mon visage et des étoiles brillaient dans mes yeux alors que j’admirais tout ce que nous avions accompli. Mon amie me demanda s’il y avait un problème quelque part et je fis donc une vérification rapide, juste au cas.
« Tout me semble en ordre, on a déjà fini! Si j’avais du faire ça toute seule, ça m’aurait facilement pris trois ou quatre fois plus de temps. Merci beaucoup! »
Oui parce que bon, le calcul était vite fait. J’aurais commencé pleine d’enthousiasme, accompagnée d’Ouji-sama, puis le Pokémon plante en aurait eu marre après six ou sept lanternes. À partir de là, j’aurais été complètement démotivée et en aurait fait quelques unes avant de toute remettre à plus tard et, la veille de la compétition, j’aurais très probablement réalisé, paniquée, que je n’avais presque rien de fait. Et là j’aurais passé une nuit blanche à tout terminer et nous n’aurions même pas eu le temps de pratiquer, et malheureusement je n’exagère même pas. En fait, ma nouvelle amie venait de m’éviter bien des ennuis. J’entrepris de ranger tout le matériel dans les sacs appropriés, maintenant enthousiaste et pleine d’entrain, fière des progrès accomplis.
« Avec ça, je devrais être prête pour le concours. On a bien travaillé aujourd’hui, ça mérite une petite récompense, n’est-ce pas? »
Je me tournai vers le reste du petit groupe, un sourire malicieux sur le visage, laissant aisément deviner que j’avais une idée derrière la tête. Mon Snivy, habitué à ce genre de petites récompenses bien méritées, ne pu dissimuler son enthousiasme. Je laissai échapper un petit rire, amusée par sa réaction. Autant parfois il agissait comme un prince qu’en d’autres instants il avait l’air d’un véritable enfant. Néanmoins, il demeurait d’agréable compagnie et il s’agissait d’un ami très fidèle. Si un jour je venais à recroiser le collectionneur, je devrais m’assurer de le remercier en bonne et due forme. Sans lui et son quiz bizarre ainsi que mortellement ennuyeux, jamais je n’aurais pu faire la connaissance d’Ouji-sama et, sans lui, ma vie n’aurait jamais été la même. Mais bon, ça lui fait bien assez de fleurs comme ça, pas besoin de continuer à le vanter sinon il va encore s’enfler la tête. Je poursuivis donc, partageant finalement mon idée à Ruby et ses Pokémons, bien que Mist soit peut-être déjà au courant de mes intentions.
« J’ai repéré un marchand de glaces l’autre jour alors, si ça vous dit, après que je sois allée remettre tout ça au dortoir Mentali on pourrait peut-être se payer un petit quelque chose? »
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