27 juillet, après-midi. C'est triste. Tout était définitivement trop triste. Ce monde, cette vie, cette ambiance, ces événements s'étant enchaînés si rapidement. Ruby ne cessait de se rappeler à quel point elle avait été impuissante face à la Team Rouage ; cette impuissance lui tirait ouvertement la langue et lui sapait plus que jamais le moral. Recroquevillée sur son lit, dos au mur, la Pyroli avait encore une fois passé les derniers jours à déprimer. Cela aurait sans doute pu être pire, bien pire même puisqu'elle a au moins eu la chance de retrouver ses Pokémons. Et la suite ? Et le reste ? Qu'avait-elle fait, au final ? Rien. Avec ou sans elle, tout cela n'aurait changé. Bien que les objectifs de la Team Rouage paraissaient encore assez éludés, ils étaient néanmoins un peu plus clairs qu'auparavant, quoique... Tout cela n'avait été que source de conflits, d'ennuis, de démence et j'en passe. Comment est-ce que tout le monde pouvait se porter à priori bien après tout ça ? Comment est-ce qu'ils arrivaient à faire abstraction de ce passé douloureux ? Voilà le type de questions qui la rousse se posait présentement sans même y trouver la moindre réponse. Le noir total. Elle se sentait comme oppressée, piégée par une matière à la fois invisible et impalpable, mais qui était pourtant bien présente. C'est comme si qu'elle était prise au cœur d'un étau dont la constitution était régie par les limites de son imagination. Sans savoir comment en sortir, elle se débattait néanmoins mais de la plus inutile des façons, puisque sa solitude actuelle et sa perte de confiance faisaient d'elle un pantin désarticulé, ou quelque chose qui s'en rapprochait énormément. N'ayant ni la force de bouger, de parler, ou de manger comme il le fallait, Ruby passait ses journées à phaser sur son état de plus en plus déplorable, ne se contentant que du minimum de sommeil et de nourriture pour pouvoir se maintenir en vie. Tout cela devenait une véritable corvée pour l'étudiante qui n'avait donc pas avancé ses affrontements tests, malgré que ceux-ci soient désormais au bord de l'achèvement. Ce n'est pas comme ça que le grade 3 allait être atteint. En parlant de ça, cette pensée déboucha sur un nouveau questionnement de la dépressive : à part son arrivée définitive dans le monde scientifique, qu'est-ce que cela allait signifier pour elle ? Une progression dans un univers ô combien hasardeux sans réelle débouchée future certaine ? Non merci. Le refus de grandir s'emparait alors d'elle, se mêlant à tout le schmilblick déjà présent. Rien de mieux pour la faire phaser encore plus.
En fin d'après-midi, elle se décida néanmoins de bouger. Ce fut d'abord le bras, celui-ci aussitôt allongé jusqu'à l'iPok posé sur la table de chevet. Une fois l'appareil attrapé, Ruby rétracta son bras et ramena la machine vers elle, observant celle-ci d'un œil – puisqu'elle avait la tête enfouie entre ses genoux, seul une pupille dépassait – dénué de la moindre émotion. Le néant absolu. C'est comme si qu'elle venait à nouveau de se perdre dans ses pensées, alors qu'elle semblait encore maîtresse d'elle-même. On ressentait néanmoins la fatigue en elle, notamment par ses gestes lents ou encore par les immenses cernes se dessinant sous les yeux éclatés de la rousse. Pour sûr qu'elle aurait dû dormir davantage, mais l'envie lui manquait. De plus, lorsqu'elle y arrivait, il fallait forcément qu'un sempiternel cauchemar lui rappelle son impuissance lors de son kidnapping. Qui sait ? Peut-être bien que sans ce mystérieux individu de la Team Rouage, elle serait encore à croupir dans la cellule commune. Pire encore : peut-être qu'elle partagerait la folie de ses camarades. Oui, je parle bien de ces camarades-ci, qui ont réussi à se calmer, eux. Leur demander ? Oui, mais comment ? Toute volonté de communiquer avec le monde extérieur semblait absente. La Pyroli vivait désormais telle le plus isolé des ermites, sans personne pour lui parler ou même l'observer. Était-elle si insignifiante en ce monde ? Il fallait croire que oui.
Après d'énièmes réflexions, la dépressive sortit de sa position fœtale et pianota quelques mots sur son iPok, rassemblant ses dernières doses de courage pour y parvenir. Aileen, Orren, Kaeko, Estelle, Ginji, Heath... Tant de personnes auxquelles elle aurait aimé parler pour apaiser sa conscience. Pourtant, elle ne pouvait pas le faire. Son courage en vacances ne lui permit que d'écrire quelques mots sur l'appareil électronique, dans l'espoir de les envoyer à quelqu'un par la suite. Combien de fois supprima-t-elle son message avant de le réécrire ? Pourtant, le contenu n'en différa pas tellement. À chaque fois, elle ne réussit qu'à écrire un appel à l'aide, une demande sérieuse exprimant son envie irrépressible de se confier. Luttant de toutes ses forces contre son indécision, Ruby parvînt néanmoins à appuyer sur le bouton d'envoi. Premier destinataire ? Orren. Le contenu du message était simple, bref et n'en disait que très peu jusque là.
Ruby L. Jones - 27/07/2015 ; 18h56
 | Orren, est-ce que je peux te parler ? C'est important, j'ai besoin de me confier. |
Une fois le message prétendument envoyé, l'iPok grésilla durant quelques secondes, si bien que Ruby fut obligée de la lâcher, par peur de subir une quelconque décharge. Ses soupçons s'apaisèrent néanmoins lorsque la machine certifia que le message avait été envoyé. L'appareil fut alors reposé à son emplacement d'origine tandis que la rousse se vautra pitoyablement sur son lit, la tête plongée dans l'oreiller, alors que chaque seconde la rendait plus impatiente encore. Elle voulait une réponse mais n'en aura pas, pour la simple et bonne raison que Xi le Motisma, sur obligation de Hex, avait déjà infiltré l'iPok de l'étudiante dans le but de le pirater sans que l'humaine ne soit au courant de rien. De ce fait, elle attendit encore et encore, en l'attente d'une réponse de la part du préfet Voltali, et ce jusqu'à ce que la fatigue ait finalement raison d'elle.
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28 juillet, aux alentours de trois heures du matin. Encore et toujours le même cauchemar. Ruby se trouvait au centre d'une pièce aux murs blancs, sans la moindre fenêtre ou porte. Impossible dans sortir. Aucun son ne lui parvenait. Elle cherchait bien évidemment à s'en échapper, en vain puisqu'il n'y avait réellement aucune issue. Après maintes et maintes tentatives d'évasion, une tâche noir faisait toujours son apparition au milieu d'un des quatre murs. Cette tâche semblait vivante, s'étendant intelligemment sur toute la surface du mur comme un être consciencieux l'aurait fait. Après ce mur-ci, le plafond, puis le sol. Prise par l'habituelle panique, Ruby se recroquevilla littéralement dans un coin de la pièce, à l'opposé de cette tâche noir qui recouvrait peu à peu la surface immaculée. La jeune tremblait, sanglotait et s'agitait, ne sachant désespérément pas quoi faire face à cette menace. Enfin, la tâche parvînt à toucher un premier pied de la rousse, le recouvrant partiellement puis totalement malgré les cris poussés. L'invasive matière continuait de progresser inlassablement, prenant davantage possession de l'humaine sans défense. Tout son corps se fondait désormais aux murs peints de noir. Ce fut bientôt au tour de son visage puisque la sombre matière ne tarda pas à atteindre la base du coup de la rêveuse, s'emparant alors de son visage avec lenteur et sadisme. Et comme d'habitude, lorsque Ruby ferma les yeux, elle plongea dans l'inconscience la plus totale, ne se rappelant que de cette étrange forme de vie qui la sortit de sa torpeur, mais cette fois-ci dans le monde réel.
En sueur, haletante et accoudée sur son lit, la miss venait en effet de s'échapper du même cauchemar pourtant si peu terrifiant à première vue. Simple syndrome d'une combinaison entre le stress, la solitude et la peur. Elle le savait très bien mais ça ne rendait en rien cette expérience moins traumatisante. Cherchant aussitôt de réconfort, elle se tourna rapidement vers son iPok mis en veille, qu'elle ralluma aussitôt afin d'en consulter les messages. Rien du tout. Absence totale de réponse. Il n'y avait que son message dernièrement "envoyé" à Orren. Une nouvelle masse de questionnements parvînt alors à la rousse : était-il occupé ou bien ne voulait-il tout simplement pas lui parler ? Aurait-elle réellement dû envoyer ce message ? N'était-ce pas trop bizarre ? Devait-elle réellement déranger son entourage avec ses problèmes, mais surtout avec ses aveux ? Aucune réponse à son cogito.
Soudain, elle releva la couette lui servant habituellement de protection face aux divers suceurs de sang nocturnes et quitta son lit, traînant des pieds jusqu'à ce qu'elle se rende dans la salle de bain. Sa main droite se porta au mur le plus proche qu'elle tâta jusqu'à trouver l'interrupteur. Clic. Une lumière allumée. Ruby s'approcha alors du miroir disposé au dessus du lavabo et s'y regarda durant quelques longs instants. Une mine fatiguée, des cheveux en bataille, un air triste... Voilà à quoi elle ressemblait actuellement. Pitoyable. C'était tout bonnement pitoyable. Si elle en avait eu la force – mais surtout la nourriture suffisante dans l'estomac – pour sûr qu'elle aurait vomi, répugnée par l'état dans lequel se elle trouvait. Pourtant, lutter lui paraissait bien trop dur. Tout ce qui était à sa portée à l'heure actuelle, ce fut de tourner le robinet pour que de l'eau fraîche en coule et de s'en asperger le visage. Ses iris remontèrent aussitôt vers le miroir, dans l'espoir d'y apercevoir une mine un peu plus claire que la précédente. Raté. Rien n'avait changé, si ce n'est que – pendant une fraction de seconde – la rousse crut apercevoir le reflet de son starter dans la vitre. Son rythme cardiaque s'accéléra aussitôt, ses lèvres s'entrouvrirent alors qu'elle cherchait à prononcer une phrase construire. Un seul mot ne sortit, ou plutôt un seul nom.
– Hex...?De toute façon, pourquoi est-ce que son starter s'amuserait à lui causer une telle frayeur ? Mauvais, ok. La limite était néanmoins toute tracée dans la tête de la jeunette. Le Branette tenait à sa dresseuse, c'était l'évidence même. Dans ce cas, pourquoi la tourmenter ainsi ? N'arrivant guère à trouver de réponse à ce raisonnement, Ruby en conclut hâtivement qu'il s'agissait d'une simple hallucination. Par conséquent, elle fit lentement demi-tour et retourna au lit en soupirant, priant néanmoins pour ne pas être à nouveau réveillée par l'effrayant cauchemar. Heureusement pour elle, ce ne fut pas le cas. La tourmentée se rendormit donc sans la moindre difficulté et resta dans les bras de Morphée encore quelques heures.
C'est avec beaucoup de retard que le soleil la réveilla. Pour cause, il était déjà plus de quinze heures. Encore dans le gaz, la Pyroli eût néanmoins pour premier réflexe de consulter à nouveau son iPok. Encore une fois, elle n'y trouva aucune réponse, de quoi la faire douter encore plus qu'avant. Elle parvînt ainsi à la conclusion la plus logique selon elle : Orren ne voulait plus lui parler. Tristesse ô combien absolue. Blessée, elle serra l'appareil contre sa poitrine, se mettant à pleurer à chaude larme. Alors que son estomac venait de grogner il y a peu, la voilà à ne plus avoir envie d'ingurgiter le moindre aliment. Elle souffrait, c'était évident. Pourtant, il n'y avait personne pour lui venir à l'aide, si ce n'est le Branette opportuniste qui se posta à l'autre bout du lit en toisant sa dresseuse d'un air qui se voulait le plus compatissant possible. Il s'agissait actuellement de la seule et unique compagnie de la dépressive, autant ne pas faire une croix dessus. Elle demanda d'ailleurs à son spectre de se rapprocher. Une fois que le Pokémon fut à portée, elle l'enlaça sans sommation, se mettant aussitôt à pleurer à chaudes larmes. Hex ne pouvait pas être plus fier de lui que présentement. Son objectif principal semblait désormais lui courir sur la patte, presque prêt à lui manger dedans.
– Je me demande bien ce que je ferais sans toi... Merci d'avoir été là quand il le fallait, même si j'ai pu te dire des choses que je regrette, avant le kidnapping. Merci d'être encore et toujours présent pour moi...La poupée hantée poussa un râle de satisfaction, enlaçant sa dresseuse de ses bras rembourrés, la rendant presque captive bien qu'elle se soit jetée ici volontairement. Sans qu'elle ne le remarque puisqu'elle fermait désormais les yeux, Hex s'enticha d'un immense sourire qui était tout sauf gentil ou compatissant. La première étape de son plan avait été accomplie avec brio sans que le seul danger voisin et proche, à savoir Mist, n'ait pu s'en mêler...
Dernière édition par Ruby L. Jones le Jeu 6 Aoû - 23:18, édité 1 fois