Des valises, encore des valises, toujours des satanées valises! Mon bateau partait le lendemain pour Kanto où je devais aller passer quelques jours avec mon père et ma grand-mère. De belles vacances en perspective, même si je les avais revus il n'y a pas si longtemps. Enfin, une partie de moi avait peur de leur avis sur ce qui s'était passé avec la Team Rouage, mais en même temps je n'y arrivais pas. Ils voulaient ce qu'il y avait de mieux pour moi et, en même temps, avaient toujours voulu m'encourager à faire mes propres choix. Je ne pouvais plus quitter Lansat et son Académie, plus après tout ce temps. C'est donc le coeur léger que je remplissais mes bagages, sur un fond de musique folk entraînante que je chantais à tue-tête, dansant ça et là en attrapant un Pokémon au passage. Oui bon, quand je me laisse aller, ce n'est jamais à demi! J'étais complètement dans mon monde, tant et si bien que je ne remarquai que l'on avait cogné à la porte que lorsqu'Ouji-sama, mon starter, ouvrit cette dernière. Oups! Je me jettai sur la chaîne stéréo, baissant le son avant de gagner la porte en vitesse, prenant la place du Servine au regard perçant et royal. Qui pouvait bien venir me rendre visite? Oh... Oh.
Ces cheveux bleus, cet air coupable et intimidé, la pauvre tremblait même. Malgré tout, avant que je ne puisse placer un seul mot, la voilà qui prenait la parole, mentionnant qu'elle savait que je n'étais pas contente de la voir. Ouais, je mentirais en disant le contraire. Je lui en voulais toujours pour ce qu'elle avait fait à Leo, mais en même temps c'était à lui de voir s'il voulait la pardonner ou pas pour ça, pas à moi. Mon avis sur la question était, pour sa part, déjà formulé. Pourtant elle avait continué, libérant une fois de plus un véritable flot de parole, sans me laisser m'exprimer. Peut-être était-ce une habitude chez la jeune fille? Qui sait. Dans tous les cas, elle regrettait terriblement. J'avais raison, elle aurait du lui écrire aussi. Tous les mots du monde n'effaceraient pas ce qu'elle avait fait, mais elle regrettait et je ne pouvais pas douter un seul instant de sa sincérité. Je le méritais cent fois plus? Là je ne sais pas, ça ne me semblait pas juste. Moi aussi, je lui avais causé sa part de douleur et là encore, il n'y avait rien à dire pour rattraper le passé. Le regard de Calliope? C'était elle, la rousse que j'avais écartée? Et si je ne l'avais pas fait? Si j'étais arrivée une seconde trop tard? Est-ce qu'il l'aurait embrassé en retour si l'occasion s'était pressée contre ses lèvres? Bien sûr, je me renfrognai.
La jeune fille s'était alors inclinée, tout le poids du monde sur ses frêles épaules. À ce rythme, je la sentais prête à fondre en larmes, mais ça ne l'empêcha pourtant pas de continuer, de s'excuser juste une fois de plus, directement sur le pas de la porte, là où tous les passants pourraient encore la voir. J'appréciais le geste, mais ce n'était pas bien. Ce n'était pas comme ça que je voulais que ça se passe. Délicatement, je m'approchai donc, déposant une main sur son épaule, pour l'encourager sans m'imposer à se relever pour me faire face. Je n'arrivais pas encore à lui sourire, mais je ne présentais pas non plus de signes d'animosité. J'étais prête à laisser la chance au coureur, mais il faudrait un peu plus pour me convaincre. Ou, plutôt, il me faudrait un peu autrement.
- Entre, je te sers un thé. Enfin, un thé glacé plutôt. J'ai presque fait exploser la bouilloire la dernière fois alors, on m'a interdit d'en refaire...
Je détournai le regard, un peu gênée de ce petit aveux, passant au passage la main derrière ma nuque en une mimique qui ne venait pas de moi, de façon inconsciente. Je refermai derrière elle et la guidai jusqu'au salon, là où mon starter attendait, assis majestueusement dans un fauteuil au dossier haut, toisant notre invitée de son regard le plus hautain, faisant dos à un feu brûlant soudainement dans la cheminée. On avait une cheminée?! Couché sur lui se trouvait le pauvre Chidori que le Servine caressait d'une liane, lui donnant un petit coup sur la tête au passage chaque fois que le petit Pichu essayait de bouger. Il se prenait pour quoi, un parrain de la mafia?!?!! Oh et puis zut, je decidai de l'ignorer et de proposer une place sur le divan à la demoiselle aux cheveux bleu, ce n'était pas la première fois qu'il me faisait un truc du genre. Je m'excusai et allai préparer les verres, la laissant sous la garde impérieuse du petit prince. À mon retour, je plaçai le verre de la jeune fille sur la table basse, devant elle, et allai m'installer en face avec le mien, sur un autre fauteuil. À peine avais-je déposé mon verre sur la table qu'Ouji-sama s'en emparait d'une liane experte pour le boire, comme si je n'avais été qu'une bonne venue les servir pour qu'ils puissent avoir leur conversation sérieuse entre eux. Non, mais ça va pas à la fin!
- Ouji-sama! Laisse partir Chidori, le pauvre. Et c'est entre elle et moi, tu n'as pas besoin de t'en mêler, espèce de diva!
Mon starter fit une moue pincée, Chidori pris la fuite vers la chambre et le serpent se fit plus effacé, sans pour autant quitter son siège. Enfin, la discussion sérieuse pouvait commencer. Je tournai mon regard chocolat vers la givrali, me demandant par où je pourrais bien commencer. Aller, ce devrait sortir de toute façon.
- J'apprécie le geste, celui d'être venue me voir. Ce n'est pas tout le monde qui aurait pris la peine. Petite pause. Tu sais, je mentirais si je te disais que je ne t'en veux pas, ce que tu as fait était mal et Leo en a été profondément blessé, mais je crois aussi que ce n'est pas à moi de te pardonner pour ça, mais bien à lui. S'il ne t'en veut plus, je m'inclinerai et en ferai de même, tout simplement. Pour ma part, tu ne m'as rien dit de vraiment vexant alors, voilà.
Je n'avais pas terminé, mais je m'interrompis quelques instants. Je voulais formuler les choses comme il se doit, parce que la suite me paraissait importante et que je voulais l'aborder de la bonne façon. Hors de question de faire une erreur ici.
- Je me doute que ça va paraître... Enfin, j'ai du mal avec les gens qui disent ça, parce que la plupart du temps c'est faux, mais je comprends. J'ai déjà eu un copain, avant... Enfin, il y a plusieurs mois. Il a du quitter l'académie, obligations familiales, c'est tout ce que je sais. Du coup, d'une certaine façon, ça aurait pu être moi. J'aurais pu me retrouver dans la même situation que toi. Et si ça l'avait été, j'aurais sans doute fait presque exactement la même chose que toi. Enfin... Moi je l'aurais frappé. Du coup j'imagine que je ne suis pas vraiment mieux!
Conclus-je d'un sourire, mon regard un peu timide pour le coup. Malgré tout, ça ne m'empêcha pas de retourner ensuite mon attention vers la demoiselle avec un air adoucit et l'esquisse non-aboutie d'un sourire.
- Tu as l'air de te torturer déjà bien assez comme ça sinon, je suis pas sadique au point de vouloir en rajouter une couche. Et puis j'aimerais m'excuser aussi, mes paroles ont été... Rudes. J'ai parlé sans savoir vraiment, la maladie ce n'est jamais une mince affaire et je m'en voulais un peu d'avoir juste, balayé ça du dos de la main sans savoir ce que tu as. Même qu'à dire vrai, je ne te connais pas du tout. Pourtant, tu as l'air de connaître Leo depuis un moment, non? Si ce n'est pas... Enfin.... Vous étiez...?