
| I can't help falling in love with you Alban Abernaty & Max Arago
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Elle était si belle.
Avec son visage pâle et ses grands yeux ambrés qui regardaient le monde comme s’ils s’émerveillaient de chaque petit détail. Avec ses mèches d’un rose de pêche qu’elle remettait parfois derrière son oreille, l’air de rien. Avec ses lunettes aux montures rouges qui agrandissaient de façon comique son visage, et qu’elle replaçait régulièrement puisqu’elles glissaient sur le bout de son nez. Avec tous ces gestes maladroits qu’elle faisait sans les contrôler, et qui la mettaient dans l’embarras. Avec cette habitude qu’elle avait de regarder autour d’elle comme un petit animal apeuré dès qu’elle faisait une bêtise. Avec sa manie de toucher du bout des doigts le pendentif Jirachi qu’il lui avait offert, ou encore la barrette de fleur de Gracidée qui maintenait ses cheveux. Tout, tout chez elle lui plaisait.
Elle était si belle.
Mais elle n’était pas à lui.
Accoudé sur le canapé, sa main soutenant son menton fuyant, Alban observait Maxine s’afférer autour de la table à manger. Il ne savait pas ce qu’elle était en train de faire - ou ce qu’elle était en train d’essayer de faire -, mais sa maladresse habituelle venait de la rattraper. C’était drôle à quel point elle pouvait être adorable, quand elle piaillait d’embarras comme un petit oisillon qui se serait coincé entre deux brindilles de son nid. Elle avait ce quelque chose de craquant qui le faisait réellement fondre. Mais il n’avait pas le droit de la regarder autrement que comme une amie. Après tout, n’était-ce pas lui qui avait imposé sa vision des choses à la Givrali, lors de cette soirée du Nouvel An ? A l’époque, il avait eu les yeux tellement rivés sur Calliope qu’il n’avait même pas pu remarquer ce que Max attendait de lui. Avait-elle un jour désiré plus que de l’amitié, entre eux ? Même ça, il n’aurait su le déterminer. Il avait fait l’idiot, à courir après la silhouette insaisissable de Calliope. Il n’avait fait attention à rien d’autre autour de lui. Peut-être avait-il blessé Max, ce soir du Nouvel An. Peut-être avait-il éradiqué le peu de sentiments qu’elle avait commencé à nourrir à son égard. Toujours est-il qu’à présent, il ne restait plus rien.
Maxine était une fille intelligente. Maxine était une fille qui n’avait pas besoin de lui pour continuer de plaire et d’exister. Elle s’était sûrement intéressée à d’autres personnes que lui, depuis qu’il l’avait repoussée sans même se demander si elle nourrissait un espoir ou non quant à une possible relation. Et à présent qu’il avait envie de l’avoir rien que pour lui, voilà qu’il devait subir les conséquences de ses erreurs passées.
Car il ne voulait plus être « juste un ami » pour Maxine. Il l’avait compris depuis plusieurs mois déjà, mais se refusait à se l’avouer. Il s’était senti égoïste, de désirer alors qu’il avait rejeté. Maxine n’était pas un objet qu’on pouvait repousser et dont on pouvait disposer à sa guise. Elle n’était rien de tout ça. Et lui, ne voulait pas risquer de la blesser.
Alors il avait essayé d’éliminer ces sentiments. Il avait essayé de se changer les idées. De s’intéresser à d’autres filles, pour tenter de trouver du réconfort auprès d’autres bras qui voudraient bien de lui. Mais s’attacher à une personne par défaut lui était impossible. Il avait beaucoup trop de respect pour autrui, et beaucoup trop de valeurs pour pareil égoïsme. Alors il n’avait jamais pu aller plus loin que l’action de songer qu’une fille était jolie. Il n’avait jamais pu répondre aux avances qu’on lui faisait parfois de façon bien trop évidente pour qu’il ne le remarque pas. Il n’avait jamais répondu à ces baisers qu’on lui volait parfois. Et surtout, il n’avait jamais pu s’ôter le visage de Max de l’esprit.
Leur relation avait pourtant atteint un état de stabilité relative. Alban avait essayé de masquer cette jalousie qui grondait en lui dès lors que Max parlait à un autre garçon. Dès lors qu’un garçon la regardait d’un peu trop près. Dès lors qu’un garçon s’intéressait à elle. Et des personnes comme ça, il y en avait. Car Max attirait les regards. Car Max était jolie, gentille, intelligente et attachante. Alban était loin d’être le seul à avoir remarqué la Givrali. Mais il était persuadé d’être le seul à la connaître et à la vouloir pour des raisons nobles.
Les choses avaient néanmoins dégénérées lors de leur arrivée sur Touga. Il ne savait pas pourquoi. Ni comment. Mais les faits étaient là ; ils s’étaient entredéchirés, sans même échanger un mot. Et c’était peut-être ça, qui avait été le plus destructeur. Le silence de Max lorsqu’il lui avait demandé d’une voix suppliante si elle voulait qu’il parte. Dans ses mots, il avait tenté d’avoir une réponse. Une seule. « Ne pars pas. Reste avec moi. » Mais elle ne l’avait pas dit.
Et après tout, comment l’en blâmer ? Il n’avait pas le droit d’exiger qu’elle pense ce genre de chose ; encore moins qu’elle les lui dise. Peut-être avait-il espéré, au fond. Mais son silence avait été lourd de significations. Si elle ne voulait pas qu’il reste, elle voulait donc qu’il s’en aille, n’est-ce pas ? Il n’avait jamais eu l’occasion d’avoir une réponse à cette question. Et ne l’aurait probablement jamais, d’ailleurs. Puisque depuis, le silence avait continué de s’immiscer ; poison sournois qui détruit tout sur son passage.
Perdu dans ses pensées, Alban réagit trop tard lorsque Max se tourna vers lui. Détournant les yeux automatiquement, il se sentit rougir. Avait-elle remarqué qu’il était en train de la dévorer des yeux ? Probablement que oui. Comment aurait-il pu ne pas le voir ? Gêné, Alban lui tourna le dos et s’allongea sur le canapé de façon à disparaître totalement de son champ de vision. Il ne voulait pas qu’elle le surprenne à l’observer. Qu’en penserait-elle ? Bah. Probablement ne lui dirait-elle rien, comme depuis deux semaines. A part quelques formules de politesse qu’ils s’échangeaient plus par convention que par réelle envie, ils ne dialoguaient de toute façon plus.
Se rongeant le bout du pouce, Alban ferma les yeux. Il aurait tant voulu que les choses redeviennent comme avant, avec Max. Pouvoir lui parler naturellement. Pouvoir la faire sourire et rire à ses blagues imbéciles. Pouvoir simplement se tenir à ses côtés, sans ressentir une vive douleur lui enserrer le cœur. Il avait envie d’être avec elle. Il en avait tellement envie…
Son iPok vibra un coup. Son qui indiquait qu’il avait enregistré une alerte dans son calendrier. L’ouvrant d’un geste machinal, Alban se redressa vivement. Ah oui. Alex et Aaron avaient absolument insisté pour qu’ils aillent camper dans la Grotte Luminescente, tous les quatre. Une perspective qui ne l’avait pas trop emballé, puisqu’il préférait éviter de sortir avec Maxine le plus possible. Quoi qu’il en soit, les deux roux ne lui avaient pas donné le choix, et Alban avait fini par accepter. Néanmoins, il était déjà 19h, heure à laquelle ils avaient prévu de partir, et ni Aaron ni Alex n’étaient dans la hutte.
Tentant d’appeler sans succès son meilleur ami, Alban haussa les épaules. Que pouvaient-ils faire ? Où étaient-ils ? Le châtain avait peur qu’à force de tarder, ils se retrouvent pile dans les horaires de patrouille de Jackie. Si on les surprenait hors de leur hutte après l’heure réglementaire, ils risquaient gros. Mieux valait se diriger directement dans la grotte pour ne pas croiser les Professeurs, non ? Maugréant, Alban reçu un texto d’Aaron qui lui disait de partir avec Max vu qu’il était proche du point de rendez-vous avec Alex. Alban sentit son humeur devenir massacrante. Ah. Ces idiots n’étaient-ils pas au courant qu’il y avait UN PEU un froid entre Max et lui ? Et que de ce fait, c’était totalement stupide de leur dire de se rendre dans la grotte tous les deux ? N’avaient-ils pas réfléchi avant ?
Alban se massa les tempes. Heureusement que Chell était parti voir Nolan ou Marie. Sinon, il aurait sans doute pété un plomb.
Prenant néanmoins sur lui pour avoir un ton de voix calme, il prit son courage à deux mains et se tourna vers Max.
- Maxine.Sa voix paraissait incroyablement rauque, comparé à d’habitude.
- Aaron et Alex sont déjà à la grotte, apparemment. Ils nous ont dit de les rejoindre directement là-bas. Vu l’heure, on ferait mieux d’y aller maintenant si on ne veut pas tomber sur une patrouille. Tu es prête ?Sur ses mots, il se redressa et déposa ses Pokéballs sur la table. Aaron et Alex leur avait dit de n’emporter aucun de leurs Pokémon, pour une raison qu’il ne s’expliquait pas. Quel était le problème à les avoir sur eux ? Bah… Tant pis, après tout. Alban n’était pas l’organisateur de ce fiasco. Si ça tournait mal, Alex et Aaron pouvaient être sûrs qu’il ne se gênerait pas pour le leur faire remarquer. M’enfin.
Attrapant son sac de camping, quelques vivres pour la soirée et ce qu’il avait préparé pour passer une nuit de camping tout confort, Alban ouvrit la porte de la hutte et invita Max à sortir avant lui. Puis, verrouillant la hutte, il prit le chemin de la Grotte Luminescente, marchant aux côtés de la rosée.
Le trajet se fit dans un silence relativement gênant. Ne sachant trop que dire à la Givrali, Alban se contenta de lui signaler la direction de temps à autres. Pas la balade la plus agréable de leur vie, en somme. Ils parvinrent néanmoins au bout d’une bonne dizaine de minutes - qui parurent durer des heures - à la grotte. De là, Alban sortit sa carte téléchargée sur iPok et alluma sa lampe torche pour se repérer dans les lieux. Geste bien inutile, vu l’endroit où ils se trouvaient.
Malgré son humeur maussade, Alban ne put s’empêcher de trouver l’endroit magnifique.
Les rochers lisses étaient bordés de mousses étranges qui diffusaient une lumière tantôt bleue, tantôt jaune, tantôt mauve. Les jeux de couleurs étaient exceptionnels, et ce patchwork de points lumineux donnait l’impression de marcher entre des aurores boréales. Emerveillé par la beauté de cette grotte, Alban en oublia presque qu’il était là avec Max. Se tournant vivement vers cette dernière, il bredouilla donc deux trois mots inintelligibles avant de pointer une direction du doigt.
- C’est par là, baragouina-t-il maladroitement.
Puis, sans se retourner, il marcha vers l’endroit du campement.
Au bout de quelques minutes, ils parvinrent enfin au point où Aaron et Alex leur avait donné rendez-vous. Alban était sûr qu’il s’agissait de cet endroit car il voyait la croix caractéristiques qui était marquée au sol, entre les mousses. En outre, lorsqu’il leva la tête, il vit cette ouverture qui permettait d’avoir une vue imprenable sur le ciel étoilé. Nul doute qu’il s’agissait de leur campement. Déposant donc ses affaires, il commença à poser les couvertures par terre et à installer confortablement un coin où ils pourraient pique-niquer, avant de s’allonger et de dormir à la belle étoile. Bien. Malgré le froid qui s’était abattu dans la grotte et qui n’avait rien à voir avec la météo de Touga, Alban parviendrait tout de même à passer une bonne soirée. Enfin… Si Alex et Aaron se dépêchaient d’arriver.
- C’est bizarre, ils sont en retard. Tu crois qu’ils se sont perdus ?Il dégaina son iPok pour essayer d’appeler Aaron. Sans succès. Ah ? N’avait-il aucun réseau, par là ? Bon. S’ils patientaient quelques minutes, leurs amis finiraient bien par arriver, non ? En attendant, mieux valait meubler du mieux qu’il le pouvait.
- Tu… n’as pas trop froid ?Sur Touga ? Alors que même à la nuit tombée, il faisait encore 25°C ? Question stupide, mon pauvre Alban. Certes, aux alentours de 3h du matin, la température commençait à se rafraîchir, mais bon… Décidément. La stupidité n’avait pas de limites.