Δ ELEMENTS VARIATION. 25 OCTOBRE 2016. |
Tu quittes la compagnie du préfet Blackhart après l'avoir salué d'un dernier mouvement de tête et tu prends la direction du chalet dans lequel tu seras désormais pensionnaire. Tu espères que les choses se passeront mieux ici que dans les entrailles du dortoir Noctali – mais il serait malgré tout difficile de faire pire pour toi. Tu mordilles vaguement tes lèvres, tiquant comme toujours lorsque tu es angoissé à travers ce geste. Tu récupères au passage Evoli et Mascaïman, que tu positionnes sur tes frêles épaules couvertes d'ecchymoses et tu marches rapidement en direction du chalet que l'on t'a attribué quelques moments auparavant. Tu te demande s'il est habité ou si tu seras seul à l'occuper – tu n'as pas pensé à demander ni au référent, ni au préfet. Surtout au préfet d'ailleurs, puisque la discussion avec le référent Roseverte a été pour le moins expéditive. Tu parviens rapidement devant la porte et, ramenant délicatement ta respiration serrée par l'angoisse à un rythme normal, tu frappes au bout de quelques instants de gêne et d'attente contre le bois de l'unique entrée du chalet. Une personne répond rapidement, trop rapidement d'ailleurs pour que tu parviennes à surpasser la surprise qui se dresse devant toi. Tu frémis, et tes lèvres tremblent légèrement pendant que tu essaies de trouver un moyen efficace d'entamer la conversation. Mais tu n'y parviens pas, tu n'y parviens plus. Il n'était plus là, lorsque tu le cherchais pour réaliser de bonne grâce le défi qu'il t'avais lancé cet été, et le voilà maintenant. Lui en veux-tu pour autant, Ciel ? Pas vraiment. Tu sais ce que tu vaut, et tu vaut bien mieux que lui. Il a dû le comprendre au cours de l'été et tu ne peux pas lui en tenir rigueur. Alors, pourquoi ce mutisme soudain ? Oh, tu n'as jamais été très loquace mais tu t'es toujours arrangé pour être chaleureux et au moins saluer les gens. « … » Et c'est l'automne, dans les airs comme dans ton cœur. Si les mèches orangées qui se dessinent devant tes yeux n'ont pas les effluves de l'automne, elles en ont la mélodie, triste et belle à la fois. Un reste de mélancolie t'étreint brusquement, avant de partir flotter au gré du vent, comme les feuilles mortes dont la bicoloration de menthe et de tagerine s'accorde parfaitement avec ton nouveau colocataire… Et toi. Tu baisses brièvement tes yeux voilés d'angoisse et de douleur vers le sol, pour éviter de croiser le regard d'Aaron auquel tu ne sais pas quoi dire. Pourquoi es-tu venu ici, déjà ? |
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Δ ELEMENTS VARIATION. 25 OCTOBRE 2016. |
Le temps s'est figé et il n'y a plus que cette musique de nostalgie qui change autour de toi. Tes oreilles bourdonnent, pourtant, et tu voudrais pouvoir être partout et nulle part à la fois, du moment que tu n'aurais plus à être en face de lui. Tu frémis, tu ne saurais dire si c'est de honte ou de froid, et tu fixes le sol comme s'il s'agissait de la chose la plus passionnante au monde. Tu n'oses pas le regarder et pourtant, malgré tout, tu relèves le regard en l'entendant parler. Des excuses, pourquoi, comment ? Devrais t-il, lui, te demander pardon pour s'être rendu compte que tu es minable, pitoyable et instable ? Tu clignes douloureusement des yeux mais, tout en proie à la honte, tu ne parviens pas à articuler une seule parole pour retenir ses intentions qui, aussi honorables soient-elles, ne sont pas nécessaires. Et ton cœur se meut, changeant brutalement de saison pour passer de l'automne à l'hiver. C'est le froid qui te guide désormais, ce froid des montagnes qui te glace le sang et te gèle les os depuis bientôt sept ans. Ton regard planté dans celui de ton nouveau colocataire s'embrume davantage, soucieux de l'avenir et de ce qu'il vient de faire envers toi. Pourquoi s'est-il excusé, alors qu'il n'avait pas la moindre raison de le faire ? Tu es perdu, et tu pinces tes lèvres à coup de dents pour tenter de chasser la sensation désagréable qui domine tes pensées. « Je… Crois que oui. » Tu réagis à sa toute dernière phrase avant qu'il ne se décale de la porte pour te permettre d'entrer et d'accéder à ta chambre dans le chalet. Ton cœur s'emballe et tu ne prends pas la peine de regarder les décors de la pièce commune – tu auras tout le loisir de les observer plus tard, tu n'es pas assez concentré pour le moment. Marchant d'un pas chancelant derrière Aaron, les jambes en coton, tu cherches tes mots pour exprimer tes émotions et ton ressenti, mais rien d'intéressant ne parvient à franchir la barrière de tes lèvres. « Tu n'étais pas obligé de venir… Ne t'en fais pas. Et… Sinon… Comment ça va depuis ? » |
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