Si Calliope s'était imaginée un seul instant que sa matinée allait être chamboulé dans un cocktail de sentiments ? Pas réellement. Pour elle, en quittant son lit, ce samedi matin aurait du être aussi banal que les précédents. Rien d'extraordinaire, juste une routine qui s'était installée progressivement depuis son admission à l'académie et qui prenait, au fur et à mesure que le temps passait, de l'ampleur. Avec ses nouvelles responsabilités de préfète, elle manquait de disponibilité. L'organisation secrète d'un événement pour la fin de l'année en était la cause... Mais rien ne l'empêchait, aujourd'hui, de passer du bon temps avec ses amis. Des amis qui répondaient tous présents, à l’exception d'un. En effet, l'absence d'Alban depuis quelques jours n'avait pas laissé de marbre notre douce médecin, ne faisant qu'accentuer ce sentiment d'inquiétude alors qu'aucune réponse ne lui parvenait malgré ses relances. Et cette mission, alors ? Peut-être devrait-elle s'en préoccuper davantage en s'informant auprès de la direction ? Était-il au moins revenu en chair et en os ? ...
Mais avant, ce matin, la rouquine avait prévu une séance de papotage avec l'une de ses plus proche amie : Max. Une fille charmante, qui avait eu la délicatesse de la soutenir alors que son moral était au plus bas. Qui avait su la conseiller, non pas uniquement pour les sentiments qu'elle éprouvait à Leo alors qu'elle avait des vues sur celui-ci, mais aussi pour des choix emblématiques comme le port de vêtement pour certaines occasions... Comme le ferait une véritable amie, quoi. Alors, forcément, le lien s'était resserré. Était-il solide ? Oui, aux yeux de la préfète. Elle savait qu'elle pouvait compter sur Max, tout comme inversement. Rien ne pourrait remettre ceci en doute. Et pourtant ...
A cet instant précis, Calliope ne savait plus du tout quel était son sujet de conversation avec la jolie rose. Alors qu'elle venait tout juste de terminer sa phrase, son instinct lui intimait de se retourner. Sentant une présence dans son dos, la rouquine désirait tout simplement mettre un nom sur cette silhouette qui l'observait. Malheureusement, à peine avait elle eu le temps de reconnaître Alban que ce dernier s'approchait d'elle. Un peu trop, même. Subitement avenant, il avait essayé de se saisir avec fermeté de la hanche de la demoiselle qui esquivait de justesse, ainsi que le baiser qu'il tentait de lui adresser. Un mouvement de recule arrivé in extremis, permettant d'éviter le drame.
Bon... D'accord. C'était clairement le drame en réalité. Mais ça aurait pu être pire, non ? Un regard en coin et Callie pouvait remarquer le visage de Max se décomposer sur place alors qu'Alban se permettait de rabrouer sa... "fantastique petite amie" ?! Pardon ? Clignant plusieurs fois des yeux, la rouquine avait cru mal entendre. Oui oui, il s'adressait bien à elle. De suite, la préfète des bleues comprenait que quelque chose clochait avec son ami Voltali. Son regard perplexe croisait le sien et tous les deux semblaient essayer de comprendre. Pas la même chose, probablement. Réfléchissant à ce qu'il venait de se passer, à ce qu'il
aurait pu se passer, Callie restait muette. Elle ne réalisait pas encore totalement de l'ampleur de cet acte qui paraissait apparemment totalement anodin pour Alban. A quoi jouait-il exactement ... ?
Consciente des sentiments que Max éprouvait pour ce garçon, Calliope commençait à culpabiliser. Bon, ce n'était pas trop sa faute mais c'était quand même vers elle qu'Alban s'était tourné pour tenter de l'embrasser, se permettant même de faire comme s'il ne connaissait pas son amie dans des postures qui ne le caractérisaient absolument pas. De où venait cette gêne ? Et ces mimiques ? Cette rougeur sur ses pommettes, aussi ?! Alors là, non, c'était trop ! Offusquée, la rouquine prenait une grande inspiration pour intervenir mais son élan était coupé par la petite voix de la rose effritée.
_ Tu … Tu ne sais pas qui je suis ?Mordillant sa lèvre inférieure, Callie regardait de nouveau son amie Max dont les yeux étaient déjà inondés de larmes.
« Vite, fais donc quelque chose, sombre idiote ! » pestait son esprit. En regardant droit dans les yeux son amie, la rouquine tentait de lui transmettre sa propre incompréhension face à cette situation et qu'elle n'y était pour rien. C'était forcément une... blague ? Non. C'était trop cruelle de la part d'Alban. Mais à quoi jouait-il, bon sang ? Et par Arceus, qu'il était terriblement crédible en plus ... Mais Max le savait. Elle devait avoir suffisamment confiance en elle, non ? Après tout, Callie tenait trop à Leo, elle connaissait ses sentiments profonds pour le préfet et elle ne pouvait s'en permettre d'en douter... D'avoir le moindre soupçon... Certes, sa relation avec Alban avait toujours été... ambigu. Sauf que ça s'arrêtait là. Ils étaient amis, de très bon amis. C'est tout. Et là, en une fraction de seconde, le Voltali remettait tout en doute.
Calliope perdait le contact avec Max, cette dernière détournait les yeux. Le cœur de la rouquine se serrait dans sa poitrine, un cri de douleur insupportable et inaudible. La situation était pesante, beaucoup trop tendue... La préfète regardait de nouveau Alban, qui restait là, comme un abrutit. Elle s'attendait à ce qu'il réagisse, qu'il brise d'un coup cette comédie loufoque afin de soulager les cœurs. Mais non. Il semblait sérieux... Quelque chose clochait. Il se rapprochait un peu plus de Callie, comme un instinct protecteur qui ne lui appartenait pas. Ce n'était pas son rôle à lui. Ce n'était pas les bras de Leo...
_ A-Alban ... commençait Callie, la voix toute tremblante.
La rouquine cherchait ses mots. Mais son esprit trop confus ne l'aidait pas. Max revenait à la charge, semblant avoir eu ce même élan de lucidité : Alban n'était pas dans son assiette et elles devaient agir. Lançant un regard dans sa direction, la demoiselle se contentait d'hocher positivement la tête pour dire qu'elle était d'accord avec cette proposition. Au moins, Max trouvait les mots. Elle arrivait à s'exprimer. Elle ne restait pas plantée là, à ne rien faire. Elle, elle cherchait des solutions.
« Petite sotte ! » grondait avec violence son esprit.
*PAF*
Une masse venait de s'abattre sur le visage d'Alban qui disparaissait du champ de vision de Calliope. Cette dernière n'avait rien vu venir et tendait les bras en avant par réflexe afin de rattraper son ami. Mais devant elle, et de dos, elle reconnaissait la silhouette imposante du lion. Leonidas était là. Et vu la réaction qu'il avait, ça voulait dire qu'il avait tout vu. Absolument
tout.
Callie se stoppait dans son élan. De toute façon, le blond avait fait le nécessaire pour ressaisir le Volatli et lui cracher son venin. C'était percutant. Déstabilisant aussi. Et sans savoir pourquoi, la rouquine se sentait... bête. Comme si elle avait fait une bêtise et qu'elle venait d'être prise en flagrant délit... Alors que non... Il n'y avait rien. Rien à se reprocher. D'où venait ce sentiment, exactement ? Le crainte de croire que Leo pouvait se permettre de penser qu'elle lui faisait des infidélité, peut-être ? Jouant avec ses doigts une fraction de seconde, elle finissait par se décaler de quelques centimètres sur le côté, tout en se mettant sur la pointe des pieds afin de voir par-dessus l'épaule de son petit ami. Sa main allait rencontrer son épaule. Mais il était stoïque. Impossible de le tourner vers elle afin qu'il lâche sa proie. Pendant ce temps, le cœur de la préfète ne cessait que de faire des montagnes russes et le rythme de celui-ci venait de se caler sur un rock endiablé.
_ Leo ... soufflait doucement la demoiselle.
Leo, lâche-le. quémandait-elle tandis que tous les regards curieux étaient tournés vers eux.
Mais il n'y avait aucune réponse. Juste des menaces, furieuses. Des paroles qui grondaient avec force, à tel point que Calliope lâchait l'épaule et se reculait d'un pas, tremblante. Callie était sienne, avait-il dit. Hors contexte, cela l'aurait fait fondre, vous l'imaginez bien. Ça lui faisait plaisir, forcément... Cependant, c'était particulier. Il la défendait, certes. Sauf qu'elle ne tolérait pas spécifiquement ce genre de comportement. D'autant plus que cela ne ressemblait clairement pas à Alban. Et pourtant, elle ne bronchait pas. Elle restait juste en retrait, voyant bien qu'il était impossible de dégager Alban de la gueule du lion.
Si seulement, rien de tout cela se serait produit... Il n'y aurait pas eu de quiproquo. Max ne serait pas en larme. Leo ne serait pas en rage. Alban ne serait ni perdu, ni amoché. (#paf) Et Callie ne serait pas en panique. Finalement, le blond se retournait enfin. En une enjambée, le voilà déjà en train d'enlacer fermement la rouquine, comme s'il ne voulait pas la laisser s'échapper. Et elle se laissait faire. Les deux mains dans son dos, elle ne bougeait pas, sa tête plaquée contre son torse à écouter les battements de son cœur. Ils étaient saccadés. Derrière, Max devait aider Alban à reprendre ses esprits. Le silence était présent. Puis il y avait des murmures qui s'élevaient dans les airs. Les témoins commençaient à piailler. Et soudain, dans le couloir, au loin : le tonnerre. La voix de Roseverte résonnait, générant un léger sursaut à la demoiselle encore prisonnière dans les pattes du lion.
Elle ne lui en voulait pas... Du moins, pas vraiment. Callie n'était pas pour ce genre de violence, surtout quand celle-ci n'était pas méritée. Et dans ce cas de figure, c'était délicat. D'un côté, Alban avait quand même essayé de l'embrasser sans même y être invité. Alors, forcément, cela génère de la jalousie. Et ça, oui, elle le savait que Leo était jaloux. Cela créait une sensation de sécurité mais aussi particulièrement flatteur. Dans un sens, la jalousie prouvait que l'on tenait à l'être aimé. La rouquine aussi, pouvait éprouver ce genre de sentiment. Mais au point de blesser un autre ? Certainement pas. Et surtout, Alban restait son ami. Alors, pour le moment, Calliope n'avait pas de mot. Elle se laissait faire aussi quand il venait à peine déposer ses lèvres au coin des siennes. Le référent des Phyllali avait été trop rapide, il traînait déjà Leo au loin. (J'ai une image trop drôle de la façon dont Roseverte peut "traîner" les étudiants... XD) Un dernier regard significatif au blond (comprenez ici : on en reparle plus tard et putain, qu'est-ce que je t'aime #paaaaaf) ainsi qu'un discret signe de main et un sourire en coin, et Callie retrouvait les deux autres.
Du revers de la main, la demoiselle essuyait le coin de ses lèvres, gardant encore l'exquis goût du lion sauvage. (Si, je vous assure que c'est vrai ! èé) Puis, elle s'intéressait au visage tuméfié d'Alban. La paume de sa main rencontrait cette joue fragilisée, mais avec bien plus de délicatesse que tout à l'heure. Son regard trahissait son inquiétude.
_ Tout va bien ? demandait-elle à Alban.
Non, forcément. Est-ce que ce simple coup de poing lui avait au moins remis les idées en place ? A voir la stupeur et l'incompréhension dans le regard du Voltali, la rouquine jugeait que non. Sans prévenir, sa main quittait la joue et glissait le long de son bras, l'effleurant du bout des doigts, afin de se saisir de son poignet. Elle ne réfléchissait pas aux gestes, à comment ils pouvaient être interprétés. Alban restait son ami, pourquoi devrait-elle faire attention à ce genre de chose ? Peut-être parce qu'il n'était pas lui, justement. Qu'il la prenait pour sa petite amie et que ça faisait souffrir Max ? Trop tard. Elle le tenait et l’entraînait à sa suite, Max juste à côté.
_ Inutile de voir Needle, ce serait une perte de temps. Allons voir Ghost, directement.Calliope avait une idée bien précise dans la tête et elle comptait bien l'accomplir. Voir l'infirmière pour soigner un bobo à la tête ? C'était plus l'intérieur de cette dernière qu'il faillait s'inquiéter. Et donc, un psychologue semblait bien plus approprié. Un à un, ils passaient les couloirs tout en évitant les regards trop insistants de leurs camarades qui stoppaient leur occupation afin de se pousser pour les laisser avancer. Une fois devant la porte, la préfète des bleues abattait sa main libre sans ménagement et entrait sans prévenir.
_ Q-que .... ! Miss Pryde, mais qu'est-ce que..._ Un cas d'urgence, monsieur._ Pour les crochets du droit, c'est à l'infirmerie que ça se passe. Ici on... commençait Ghost en lançant un regard au garçon.
_ Ce n'est pas pour ça. Callie lui coupait la parole. Puis elle prenait un air beaucoup plus sérieux.
Nous avons un cas particulier ici, monsieur. Alban a... une sorte d'amnésie. De faux souvenirs, pour être exacte.(c) Alban