Ginji Labelvi Feat. Raudhr Akai « Pas de sushi. »
Tiens, il porte un drôle de prénom, Sushi-man. C'comme la région de Rhode, mais avec un « heure » en plus ! Mais du coup, ça s'écrit pareil ? Rhoder ? Raudheure ? Rödheer ? Ah ! Son nom est aussi étrange que son corps est inconfortable. Comment ça, il n'est pas censé l'être ?!
Après m'être levé, avec une gêne non dissimulée, et enquis de la position de nos cibles, Sushi-man demande à son Caninos s'il est capable de localiser le Branette grâce à son odorat. Oh ! Bonne idée ! Avec ça, on devrait pouvoir retrouver leur trace !
« -Ah, pas bête ! » je me redresse fièrement, et prends un ton solennel « Fyrn, on te suit ! »
Nous nous mettons presque aussitôt en marche, suivant de près les pas du Pokémon Chiot. Le fait qu'il garde constamment la truffe plaquée au sol est plutôt bon signe, la piste de Voodoo doit être vraiment très récente...
« -... Tiens, d'ailleurs, je me demande quelle odeur un spectre peut avoir. J'ai pas souvenir d'avoir déjà décelé une fragrance quelconque de la part d'un de mes Motisma... » un bref instant de réflexion suffit à répondre à moitié à ma question « Ah ! C'est vrai, Caninos est réputé pour son odorat. Je crois même que le Pokédex en fait une mention spécifique... »
J'attrape mon Ipok d'une main, et scanne rapidement le chien, habitué au geste. Il ne faut pas bien longtemps à la page pour se charger, et afficher l'information voulue, que je lis à haute voix.
« -" Caninos a un odorat très développé. Ce Pokémon n'oublie jamais un parfum, quel qu'il soit. Il utilise son puissant sens olfactif pour deviner les émotions des autres créatures vivantes."» je marque une courte pause « … Wow ! Je pensais pas qu'il était balèze à ce point. C'est sûr qu'on peut pas rivaliser... »
Pas le temps de plus poursuivre nos investigations, Fyrn a déjà fini les siennes : nous voilà arrivés devant le... Cabinet de Ghost. Ah bah, du coup, j'avais raison. Voodoo a simplement emprunté un chemin détourné... Grr ! Il m'a eu, le vil ! Enfin, tant que nous l'avons rattrapé à temps...
Rôdeur n'attend pas bien longtemps pour frapper à la porte, et l'ouvrir. Il entame une phrase d'excuse polie, mais s'arrête en plein milieu, éveillant ainsi ma curiosité. Qu'est-ce qu'il se passe ? Passant un coup d’œil au dessus de son épaule, je reconnais bien rapidement le Docteur Ghost, posé sur une chaise à côté de Voodoo, et tenant dans ses mains une boîte à sushi..
… Qui n'en contient plus qu'un seul.
Et là, c'est comme si le temps lui-même se fige. Mes yeux ne regardent plus que ce dernier reliquat, vestige d'un délice auquel nous ne pourrons probablement jamais goûter, puisque déjà, il s'élève à hauteur des lèvres de l'homme qui nous fait face. Alors que, dans un même mouvement, le psychologue a tourné vers nous un regard interrogateur, il a saisi ce sublime et vertueux sushi, tout en mâchant les dépouilles de ses prédécesseurs, et a, dans une ascension fugace et éphémère, porté le dernier fragment de notre quête à sa bouche. Je n'ai même pas le temps d'esquisser un geste, un mouvement, ou même d'entreprendre ne serait-ce qu'un déplacement d'un iota, que le mal est rapidement accompli.
Sous nos yeux effarés, le dernier sushi est avalé.
Et après déglutition, le Docteur prend la parole.
« -... Hmm... Bonjour ! Vous aviez pris rendez-vous ? Je suis en pause déjeuner là, vous pourriez revenir d'ici un quart d'heure, si possible ?
-... »
Aucun son, aucun mot, aucun cri ne suffirait à transmettre cette douleur qui déchire actuellement mon cœur.
Et mon estomac.
La bouche béante, ma stupéfaction laisse rapidement place à un geste, entamé mécaniquement, sans la moindre volonté ni âme, et visant a simplement saisir la poignée de la porte, pour, lentement, et avec le plus grand désespoir du monde, la refermer, cloîtrant à jamais cet odieux spectacle auquel nous avons fait face.
Ce qui suit, c'est un long silence, religieux, presque digne d'un enterrement, et finalement interrompu par le seul bruit caractéristique de mon ventre. Ce dernier me sort brusquement de ma stupeur, mais pas de mon abattement, et je passe délicatement une main dépitée dessus comme pour interrompre son cri incessant.
« -... Beuh... C'est... » je laisse passer quelques secondes de silence, ne sachant comment décrire mon ressenti immédiat, pour finalement baisser piteusement la tête « … Désolant. » je soupire « Et il y a même pas la moindre trace de ma Pachirisu... »
Pff. Comme si assister en direct au meurtre du dernier représentant d'un peuple de sushi ne suffisait pas ! Il faut aussi que je perde White Lady, pour qui j'ai précisément fait tout cela. Enfin, un peu pour moi aussi, je dois le reconnaître, mais quand même...
« -... Gnn... Paaa.... »
.. Oh. Quand on parle du Lucario ! Depuis l'autre bout du couloir, c'est un petit écureuil blanc que l'on entend galérer, vraisemblablement attelée à pousser une boîte bien trop grande pour elle le long du parquet. Je tourne vers ma Pachirisu un regard d'abord étonné, puis intrigué, alors qu'elle semble à peine réaliser notre présence.
« -... White Lady ? T'étais passée où ? » je fronce les sourcils, et me dépêche de la rejoindre « … Et qu'est-ce que tu trimballes ? »
Elle paraît plutôt confuse, ne s'attendant probablement pas à nous croiser ici, et affiche même une expression légèrement paniquée lorsqu'elle me voit saisir le contenant qu'elle transporte avec elle.
« -Pachi!
-T'inquiètes pas, je regarde juste !... MAIS ?! T'as réussi à trouver une boîte de sushi pleine ?! »
White Lady se fige, et détourne le regard. A son air contrarié, je comprends sans trop de mal qu'elle souhaitait la garder entièrement pour elle... Mais je n'y fais pas trop attention, et observe surtout avec intérêt la fameuse boîte, apparue comme un cadeau d'Arceus lui-même.
« -Elle était au réfectoire ? »
Elle hoche lentement la tête, les pattes croisées, et les yeux rivés sur le mur à côté de nous.
« -Cool ! Ils ont dû refaire une fournée après notre départ. Ou alors, il en restait une, mais ils avaient oublié de la poser sur le présentoir... Eh, Sushi-man, t'as vu ça ? » je me tourne vers l'adolescent, et lui montre la boîte « Il y en a bien une dizaine à l'intérieur ! Voire une quinzaine ! T'en veux ?
-Chirisu! »
… Ah. Évidemment, White Lady fait sa rabat-joie. Son piaillement indigné est plutôt significatif de son avis sur la question, auquel je me permets de ré agir immédiatement. Sans lâcher la boite, je me penche un peu en avant, et m'adresse à elle avec le ton le plus doux que je puisse lui offrir.
«-Écoute, comme tu as réussi à trouver cette boîte, et qu'elle ne suffira de toute façon pas à nous caler, je t'emmènerai directement au meilleur restaurant asiatique de Lansat dès qu'on en aura terminé avec ! Ça te va ? Comme ça, tu pourras t'en goinfrer à volonté. » je me redresse «... Et moi de-même. Après tout ça, hors de question de m'en contenter de trois ou quatre ! »
Même si elle aurait clairement préférer garder la boîte pour elle, la Pachirisu paraît accepter le compromis d'un nouveau hochement de tête. Un grand sourire se dessine sur mon visage, alors que je me tourne avec enthousiasme vers l'adolescent.
« -C'est ok ! On va trouver un coin où s'asseoir ? »
Comme je pense savoir où en trouver un, je prends les devants de l'expédition, et me dirige d'un pas assuré vers l'extérieur du bâtiment. Il devrait y avoir un banc, juste dehors ! La cadence de mes pas doit bien montrer à quel point j'ai hâte d'enfin pouvoir manger ces sushis, pour lesquels nous aurons tant attendu, mais ne m'empêche cependant pas de distancer mes partenaires, vers lesquels je me tourne tout en reculant.
« -Ah ! Au fait, Reaudeur ! Je crois pas t'avoir dit mon nom. Môa, c'est Ginji ! Et notre sauveuse, c'est White Lady. Et, euh, juste comme ça, il s'écrit comment, ton prénom ? »
Juste au moment où je m'apprête à percuter une porte, je fais volte-face, et d'une pression du pied en bas de celle-ci, l'ouvre. Une fois à l'extérieur, je la retiens avec le coude le temps que les autres passent, et indique d'un mouvement du menton le banc en bois qui se trouve juste là. Et libre, en plus ! Ah, il semblerait qu'enfin, le sort nous soit favorable.
Très rapidement, nous prenons place dessus. Je m'assois au centre, et soulève avec hâte le couvercle, pour dévoiler sous nos yeux ébahis ces divins sushis. Allez ! Ne perdons pas plus de temps ! Qui sait, une nouvelle catastrophe pourrait nous tomber dessus. Tendant fièrement la boîte vers Sushi-man, je le laisse piocher dedans pour lui et ses Pokémon, puis fais de même avec White Lady. Une fois que nous sommes tous armés et prêts à attaquer, je donne le signal d'ouverture.
« -Bon appétit ! *gnom* »
… Ouiiiii ! J'ai pu ! J'y suis arrivé ! J'ai mangé un sushi ! Raaaah, qu'est-ce que c'est bon ! Il n'y a même pas besoin de le tremper dans de la sauce soja ou de le mélanger à du wasabi, l'assaisonnement est parfaitement dosé et le sushi est entièrement prêt à être dégusté, comme chez les véritables chefs cuisiniers ! Vite, il m'en faut un autre... Tiens ?
« -Oh ? C'est bizarre, d'habitude, Mama Odie ne met pas d'étiquettes sur ses boîtes. » remarquant un bout de papier collé en dessous, je la soulève, et lit ce qui est marqué dessus « … Peter Ironspear. Tiens, c'est le nom d'un mec de mon dortoir ! Très sympa, ce type, on prend souvent le petit-dej ensemble. » ne réalisant pas vraiment ce que cela signifie, je pioche un autre sushi dedans, que j'enfourne aussitôt, et mastique « … » mon air pleinement satisfait laisse peu à peu place à de la perplexité, alors que je relis une nouvelle fois l'étiquette sous la boîte « … ² » les neurones de mon cerveau se connectent, et je lance subitement un regard déconcerté à White Lady « … Tu les as volés à Peter ?! »
Prise sur le fait, la Pachirisu se fige, et détourne légèrement le regard, crispée. Ca, ça ne veut dire qu'une seule chose : COUPABLE !... Et du coup... Que nous sommes aussi impliqués dans le crime ?! Brusquement paniqué, j'observe les nombreux sushis restants dans la boîte, et me tourne vers mon complice involontaire.
« -Ah ?! Qu'est-ce qu'on fait ?! On peut pas les lui manger ! Peter, il est sympa ce type, je veux pas lui piquer sa nourriture ! Mais euh, il doit déjà nous en vouloir là, si ça se trouve il est en train de les chercher... Est-ce qu'il a vu White Lady les lui prendre ?! Aaaah, Sushi-man, t'as une idée ?! »
@Eques sur Never-utopia.