La foule était dense pour ce premier jour de pré-rentrée. Comme lors de l’année passée, d’innombrables nouvelles têtes se déversaient dans les allées parfaitement entretenues en piaillant comme de beaux diables. Ils étaient pour la plupart fraîchement débarqué du Port –l’odeur ne trompait pas-, et avaient hâte d’obtenir leur premier Pokémon pour pouvoir enfin se latter les uns les autres à coups d’attaques Tonnerre –les piaillements incessants ne trompaient pas-. Et on pouvait les comprendre. Qui donc aurait pu avoir mieux à faire que d’envoyer combattre ces charmantes bestioles jusqu’à l’agonie, déclenchant par la même occasion les réactions les plus virulentes des manifestants « A bas les utilisateurs de Pokémon » ? Un soupir s’échappa des lèvres de Cleve, et la rouquine réajusta son sac à dos sur son épaule en continuant de maugréer.
Agacée par tant de frivolité en ce premier jour de Septembre (« Eh les gars, arrêtez d’être si joyeux. C’est la rentrée. LA RENTREE. Mais qu’est ce qui ne va pas chez vous ?! »), la Givrali voulu se retourner pour leur dire à tous de fermer leur grande gueule de faire un petit peu moins de bruit si possible, mais les deux têtes de plus qu’elle de la plupart des nouveaux l’en dissuadèrent. Elle n’avait même pas retenu le faciès de tous ses camarades du premier semestre (et on ne parlait même pas du second semestre…) qu’on lui rajoutait encore des trombines. Décidemment, cette école voulait sa peau !
A ses côtés, Peppéroni -son fidèle Lokhlass un petit peu trop mère poule- se pavanait comme s’il était le maître des lieux, heureux d’être de retour dans son royaume. Son imposante stature intimait le respect aux nouveaux arrivants, qui s’écartaient de lui comme s’il était entouré d’une puissante aura mystique. Pep’ pensait que c’était parce qu’il était impressionnant et majestueux. Cleve pensait simplement que les newbies ne voulaient pas se faire écrabouiller par les quelques tonnes du gros derrière de son Lokhlass. Se chamaillant donc comme de coutume via le Casque Traducteur de Cleve –une invention de son cru qui lui permettait de traduire les cris des Pokémon en langage humain via un logiciel complexe de reconnaissance de sons-, les deux compères batifolèrent en se donnant des coups de coudes amicaux. Ils en étaient encore à décider qui avait raison –enfin, c’est ce que le Casque Traducteur semblait vouloir dire, même s’il était encore bien loin d’être au point- lorsqu’Andreas Heartnett déboula comme une fusée dans un nuage de fumée violette.
Des cris s’élevèrent des rangs adjacents tandis que le bellâtre faisait son apparition, bras écartés, rose au coin des lèvres. Une pirouette plus tard et l’enseignant se retrouvait devant la rouquine, s’inclinant comme s’il présentait devant un jury de coordinateurs. Pep’, que la brusque arrivée d’Andreas avait un peu surpris, donna un coup de patte un peu trop puissant dans le coude de Cleve, l’envoyant valser en roulé-boulé dans un bosquet d’hortensias. Avec un « Bwarf ! » étouffé, la deuxième année se releva couverte de feuilles et de pétales tout en lançant un regard courroucé à son compagnon. Feignant l’indifférence, Pep’ tourna la tête et se mit à gratter nerveusement le sol de son museau pour y trouver un Aspicot.
« Caaaaaaarter ! » déclama la voix chantante d’Andreas. Il humecta un bout de tige de sa rose puis la glissa derrière l’oreille de Cleve –qui dû se retenir pour ne pas lâcher un borborygme dégouté- et fit une nouvelle pirouette. « Tu es convoquée chez le Collectionneur, charmante demoiselle. Il faut que tu y ailles le plus rapidement possible d’après ce que le Vice-Directeur m’a dit. »
Cleve perdit le peu de couleur qu’elle avait –ce qui, en raison de son teint déjà blanc de base, la faisait paraître presque transparente-. Convoquée le premier jour ? Qu’avait-elle fait ? Avait-elle fait une bêtise son premier jour de rentrée ? De souvenir, elle avait simplement pensé qu’elle aurait bien voulu cramer l’école à l’aide de Ritsu –son Goupix- pour ne pas avoir à retourner en cours, mais on ne pouvait pas lire dans ses pensées, hein ? Et puis il fallait être sérieux, personne n’était assez stupide pour croire qu’elle l’aurait vraiment fait !
Bien peu chamboulé par les états d’âmes de Cleve, Andreas continuait sa diatribe en ponctuant ses fins de phrases par des baisers envoyés dans le public.
« Normalement, ta référente aurait dû venir te l’annoncer elle-même, mais tu connais Janice. Elle est tellement bizarre… On ne peut pas lui faire confiance après tout, elle aurait été capable d’oublier. Heureusement que Rivardi a pensé à moi, il n’a choisi que le meilleur voyons. Pas cette péronnelle d’Ace, mais moi. »
Cleve se fichait bien de ce que le référent des Voltalis avait à raconter, et elle le bouscula à moitié pour se ruer vers les souterrains, déclenchant des cris scandalisés. L’ancienne Cleve aurait fui aussi vite que ses jambes le lui aurait permis pour s’éloigner de l’école et retourner dans son Ecorcia natale. La Cleve d’après vacances avait bien changé et avait muri ; au lieu de pratiquer la théorie de l’autruche, elle allait zigouiller le Collectionneur et toutes les preuves de ses malheureux méfaits. Pas de témoin, pas d’accusation !
Effectuant un dérapage contrôlé dans un des couloirs du dédale que constituaient les souterrains, Pep’ sur les talons, Cleve se rua vers le Collectionneur. Par chance, les portes de la grande académie avaient ouvert il y avait à peine une dizaine de minutes, et les nouvelles têtes étaient encore trop émerveillées par le parc –et Timothy Forest qui se faisait accourser par son Brutapode- pour penser à chercher le chemin qui menait aux souterrain. La rouquine fut donc la première à débouler devant le vieux geek-aux-cheveux-gras-et-lunettes-triple-foyer de l’académie. Le souffle coupé, elle dégaina son arc et fit mouche se positionna devant son interlocuteur en essayant d’afficher une mine interrogative et polie « MEC TU VIS TES DERNIERS INSTANTS ALORS FAIS TES PRIERES ! Heum. *tousse* Hihi, bonjour. ».
« Ah… Miss Carter… » l’accueillit-il de son habituelle voix mystique. « Je ne m’attendais pas à ce que vous veniez si tard. »
Cleve haussa un sourcil. Tard ? Tard ? Les portes avaient réouvert depuis quinze minutes à tout péter, et elle avait couru dès lors qu’elle avait reçu le message. Et malgré ça, il lui disait qu’elle était en retard ?
« J’avais prévenu Janice qu’il vous faudrait revenir ici avant les vacances d’été, mais apparemment, le message ne vous est pas parvenu… »
Cela se tenait, pensa Cleve. Après tout, Janice Jauplin, sa référente, avait autant de mémoire qu’un vieil Escargaume rabougri.
« Parce qu’avec vos résultats et votre rapide progression, il a été décidé de vous remettre ceci comme cadeau. » poursuivit le Collectionneur, en tendant à la rouquine une Pokéball flambant neuve. Intriguée et étonnée, la Givrali s’en saisit sans vraiment savoir ce qu’il convenait de faire. Si elle avait bien deviné, il s’agissait d’un nouveau Pokémon. Mais pouvait-elle en recevoir un second du Collectionneur, juste parce qu’elle avait « progressé » ? Ça lui paraissait totalement aberrant.
« Heu… merci. » répondit-elle donc en glissant la Pokéball dans sa poche, sans l’ouvrir. Elle ne savait pas vraiment ce qu’elle contenait, mais elle avait peur d’appuyer sur le petit bouton qui libèrerait son prisonnier. L’avait-elle réellement mérité ? Etait-ce « juste » ? Elle s’inclina donc légèrement devant le Collectionneur pour prendre congé, et tourna les talons pour retrouver la lumière du soleil.
« Je pense que cette petite boule d’énergie vous sera particulièrement utile pour vos recherches mécaniques. Après tout, on manque toujours d’électricité à portée de main. »
Cleve se retourna, mais déjà, le Collectionneur s’était muré derrière son demi-sourire et ses silences angoissants. Alors, la rousse se détourna définitivement et rejoignit le parc.
[Topic Terminé]
[RP d'obtention du Statitik de Cleve par accès au Grade 2]