Nénucrique, le 11 novembre
J'ai retrouvé ce cahier qu'on m'avait offert il y a environ un an, je pense. Il traînait au fond d'un des tiroirs de mon bureau. Les feuilles sont blanches, j'ai hésité à m'en servir pour dessiner, mais bon, je vais me contenter d'une introduction pour le moment. On verra bien ce qu'il en adviendra.
Son apparence est cependant un peu trop kitsche pour que j'ose l'emmener à l'extérieur.
Nénucrique, le 13 janvier
Voilà. Je hais ma prof de sciences. Il ne me reste plus qu'à ne jamais oublier mon classeur pour pouvoir me cacher derrière à chaque cours. Je me maudis d'avoir posé la question la plus idiote de mon existence. J'aurais mieux fait de me taire. Je vais passer une année merdique.
Pessimisme.
Nénucrique, le 28 mars
Quand je revois comme j'écrivais l'année dernière, j'ai envie de rire. J'ai gagné encore un an, il y a quelques jours. Pourtant, dans ma tête, j'ai du mal à me dire que c'est le cas. J'ai l'impression de ne pas avoir assez mûri pour me considérer comme telle.
Nénucrique, le 5 avril
Chouette, mon ordinateur est « emprunté » par mon frère. Je vais me faire chier. Remarque, s'il veut trouver des informations sur ma vie ennuyeuse, il cherche au mauvais endroit. En faite, rien que le fait de chercher est une erreur.
Quand même, je devrais penser à activer les mots de passe. C'est dans ces instants-là qu'on regrette de ne pas en avoir mis un. Même s'il n'y a rien dedans, on sait jamais.
Pacifiville, le 14 avril
C'est une jolie ville, je l'accorde. Les pilotis sont justes impressionnants, mais... Il n'y a rien à faire. Vraiment rien. Je ne capte même pas de réseau avec mon smartphone.
Enfin, c'est marrant la façon de voyager d'une plateforme à l'autre. La sécurité, on repassera, mais c'est quand même bien fait. On se sent proche de l'océan, l'endroit porte bien son nom. Sur ce, je vais observer les Corayons. Il y en a vraiment beaucoup, ici. Et ils sont vraiment mignons.
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L'eau est fraîche. Mais mon maillot de bain est tout au fond de ma valise. J'irai faire trempette demain. On peut louer des pédalos un peu plus loin. J'ai déjà parcouru la ville dans les moindres recoins. C'est vraiment minuscule.
Enfin, franchement, c'est sympa l'endroit. Je vais tenter de gribouiller un peu le paysage, je pense. S'il y a une ville que je voudrais vraiment visiter, ça serait plutôt Romant-Sous-Bois. Mais c'est à Kalos, et c'est loin. Environ une dizaine d'heure en avion. Mais cette ville me donne vraiment envie, l'arène qui s'y trouve à l'aire magique.
Nénucrique, le 28 avril
Je m'ennuie en cours de françaais. Allez savoir pourquoi j'ai ce cahier sur moi. Ah oui, je rentre des « vacances » et je n'avais pas envie de ranger mon sac. Le préparer ses affaires à sept heures et demi du matin alors qu'on manque d'être en retard, ce n'est pas forcément le plus reposant.
Nénucrique, le 2 mai
Faire ses choix et une chose, ne jamais en avoir eu l'occasion en est une autre. ─ Ally Condie
Je comprends parfaitement le sens de cette phrase. Mais dans notre vie à nous, est-ce seulement possible de ne pas en faire ? Je regrette souvent mes choix. Il y a de ces jours où je voudrais m'enterre sur place, disparaître et ne jamais avoir à revoir certaines personnes tellement je suis en train de mourir de honte. Je voudrais que certaines choses n'arrivent plus jamais. C'est souvent le cas, pourtant, d'autres apparaissent.
Si quelqu'un ou quelque chose décidait tous nos choix à notre place, que ce soit pour le meilleur ou le pire, on ne pourrait pas regretter vu que ça aurait été notre destinée quelle que soit la manière, non ? Mais d'un côté, c'est une facette de la liberté dont on dispose qui disparaîtrait. Et je ne supporterais pas ça, même si je n'aime pas non plus avoir des responsabilités.
Indécision et hésitations.
Nénucrique, le 20 mai
En mai, fait ce qui te plaît. Je voudrais bien. Mais non.
Mars, avril et mai, c'est les mois du printemps, non ? Et on associe en général le printemps au chant des oiseaux, aux accouplements. Comment dire, quand je regarde par ma fenêtre... Ici, on différencie les saisons surtout par la température. Au niveau du paysage, en hiver, c'est surtout un peu de blanc qui recouvre les bâtiments, et du verglas qui vous permet d'observer les gens faire des glissades et des galipettes. Et de vous retrouver les fesses au sol aussi. On va passer sur le fait que ça caille. Et en été, ça n'est pas rare de voir un groupe de personnes se baladant avec un parasol dans les bras, en direction de la crique.
Ah, attendez. Accouplements. Selon une étude, les french kiss ont tendance à devenir plus commun durant la période du printemps. C'est trop charmant. Surtout quand vous voyez le couple tirer sur les vêtements, comme s'ils voulaient les faire tomber.
Frimapic, le 29 juin
Sérieusement ? On me prévient trois heures avant le départ qu'on part en voyage. Je dois me préparer en express. Et... Bon, récapitulons depuis le début. Nous sommes actuellement en période de vacances scolaires d'été et mes parents ne trouvent pas un meilleur lieu de vacance que Frimapic ?! Comme si j'avais envie de me rouler dans la neige en plein été. À tous les coups, je vais me chopper un rhume. ... Bon, ok, je tombe autant rarement qu'une personne a de chance de tirer le jackpot au loto.
Le paysage est beau. Et... C'est tout.
J'ai aucune envie d'aller visiter un temple avec des statues bizarres. Même si je sens que je vais y être forcée. J'ai juste envie de rester dans le lit de l'hôtel avec un chocolat chaud et trois couvertures supplémentaires.
Frimapic, le 30 juin
Je ne veux pas partir. Je n'ai pas envie de passer chaque nuit dans un hôtel différent. Je n'ai pas envie de quitter ma couverture, je n'ai pas envie de me lever à sept heures du mat' au milieu des vacances pour à tous les coups visiter à nouveau un lieu paumé.
Charbourg, le 30 juin
Musée, blablabla, blablabla, blablabla... On est venu à Sinnoh pour ça ? Non, mais ils avaient qu'à se bouger le cul et marcher quelques minutes depuis chez nous s'ils voulaient visiter un musée. Comment ça, c'est pas la même chose à l'intérieur ? Rien à fichtre, je reste à l'hôtel.
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Le paysage me déprime. On dirait qu'il ont construit la ville dans un cratère, si ce n'est pas le cas.
Dans l'avion en direction de Céladopole, le 15 juillet
Rêver, c'est le bonheur ; attendre, c'est la vie. ─ Victor Hugo
On voit les nuages. On dirait que c'est le pôle Nord qui se trouve sous nos pieds. C'est tellement épais qu'on ne peut rien voir du dessous. Il n'y a pas d'oiseau non plus. Mais au décollage ou à l'atterrissage, la vie semble si petite, quand on voit le sol s'éloigner de nous. En quelque sorte, on serait en train de voler. Mais ça reste plutôt effrayant quand on pense qu'il y a parfois des avions qui crashent. Des gens qui meurent à cause de ça.
J'attends la fin du voyage. Je m'ennuie.
Céladopole, le 17 juillet
Il y a quelques mois, une prestation destinée à promouvoir une certaine académie avait eu lieu dans cette ville. Ma tante n'avait pas manqué l'occasion d'en parler à mes parents. Les conversations entre ma mère et sa sœur sont en général plutôt intéressantes. Mais le flot de paroles est tellement conséquent qu'il faut bien se concentrer pour comprendre. Passer du coq à l'âne, une capacité dont je ne semblais pas avoir héritée. Souvent, je préfère plutôt passer du temps avec ma cousine.
Bon, il faut avouer qu'au départ, leur histoire avec l'école Pokémon, ne m'avait pas plus attiré que ça. Mais j'ai trouvé tout à l'heure un prospectus qui concerne cela.
Ce que j'aime bien, c'est que ce soit un internat. Ça peut sembler bizarre, mais d'un côté ça offre un peu plus de libertée dans certains domaines. Et c'est ça que j'apprécie.
Céladopole, le 19 juillet
Au final, cette histoire n'a pas tardé à attirer l'attention de mes parents. Ouais, mon frère fait du badminton et sort avec des amis. Oui, il a une vie sociale active. Et... ? Je cite : « Pokémon Community pourra t'aider à t'épanouir et construire un futur stable. » Sincèrement, ils auraient pus trouver mieux comme excuse. Je me suis mordu la langue pour ne pas leur répondre ce que je pensais. Enfin, au final, je me retrouverai dans quelque temps sur l'île Lansat.
Je sais pas vraiment pourquoi j'ai accepté. C'est une fois seulement que je leur ai dis que ça pourrait me plaire, que j'ai regretté. J'ai l'impression de m'être engouffré quelque part qui ne me correspondra pas. Enfin, on verra bien.
Poivressel, le 28 août
Il est trois heures du matin, j'arrive pas à m'endormir. Je n'ai pas osé dire à mes parents que ça ne me tentait plus autant. Mais je crois que c'est juste le stress. Je viens de vérifier mon réveil, normalement, il devrait sonner. Normalement. Ce qui me fera... Trois heures et demi de sommeil. Ouais, je n'ai pas encore préparé mon sac. C'est pour ça.
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Je suis sûre d'avoir oublié quelque chose. Le bateau s'en va dans quelques minutes. Mais je suis quasi certaine d'avoir oublié quelque chose. Je ne sais pas quoi. ...