
Le voyage en bateau c’était plutôt bien passé. Eryn avait l’habitude des longs voyages, inévitables quand elle voulait aller voir son cousin à Kalos ou sa cousine à Johto, alors qu’elle-même vivait à Sinnoh. Mais ce n’était peut-être pas le cas de Mikato, aussi Eryn était-elle restée prudente pour le cas où sa camarade aurait eu le mal de mer. Heureusement, Mikato semblait en être épargnée, et ce fut sans encombres qu’elles arrivèrent à Carmin sur Mer, où une limousine avec chauffeur les attendait. Eryn avait tiqué en entrant dans la limousine. Qui avait les moyens de leur payer un truc pareil ? Pas l’école, en tout cas. Enfin, d’un côté, ça l’arrangeait. La marche était longue jusqu’à Céladopole, alors qu’en voiture, il ne leur fallut que quelques minutes. Elles furent déposées devant la pension-crèche, et Eryn, charmée, regarda les environs. C’était tellement fleuri ! Mikato la tira de ses songes en l’attrapant par la manche, et les deux filles entrèrent dans la pension, où elles furent immédiatement accueillies par les bébés Pokémon dont elles devraient s’occuper dans les jours à venir. Elle se retint de lâcher une critique acerbe en voyant l’homme qui les guidait repousser un peu trop brutalement à son goût un petit Mystherbe, d’autant plus qu’il venait de les introduire dans une salle d’attente, où elles n’eurent même pas le temps de se poser, car elles furent conviées à entrer dans un bureau. Le plus beau bureau qu’il lui ait été donné de voir. Il ressemblait à un petit jardin, et s’il n’y avait pas eu le bureau de bois clair près d’une fenêtre, la Mentali aurait vraiment pu se croire en extérieur. Son attention se reporta sur une femme en kimono qui venait de se lever pour les accueillir avec le sourire, et le cœur de la coordinatrice rata un battement, avant de repartir à toute allure, tandis qu’elle rougissait bêtement.
Dame Erika ! La championne d’arène de la ville !
Trop intimidée pour parler, Eryn ne put que se taire et laisser parler la championne. Cette dernière se présenta, plus pour Mikato que pour elle, vu qu’elle avait bien compris qu’Eryn savait qui elle était rien qu’en voyant son regard plein d’étoiles. Elle leur dit aussi être la propriétaire de l’endroit, ce dont Eryn ne doutait pas. Une pension-crèche réservée aux Pokémon Plante, c’était forcément l’œuvre de la championne. La ville de Céladopole était devenue, peu à peu, un havre de verdure, grâce à l’influence d’Erika, championne de la ville, qui avait décidé d’ouvrir son arène à la périphérie de cette dernière. Ses actions avaient permis une reculée successive du béton et un retour en force de l’herbe, des arbres et des fleurs, qui se mariaient agréablement à la pierre des chemins de la ville. L’arène d’Erika était un havre de paix pour tous les amoureux du type Plante. Pour tous les gens comme la petite Mentali, qui n’était là que depuis quelques minutes, et qui se sentait déjà à sa place ici. Elle adorait cet endroit. Vraiment. Et le sourire de la championne lui prouvait que cette dernière l’avait bien remarqué.
« Je sais que le ton de l’annonce était très pressant, aussi ne puis-je que vous remercier d’avoir accepté de venir. Cependant, d’autres écoles ont reçu mon message, et ont envoyé ici des duos d’éleveurs. Aussi ai-je décidé de scinder un peu le travail pour ne pas trop surcharger tout le monde. Venez, je vais vous faire visiter, et vous expliquer en quoi consistera votre travail. »Dans un frôlement d’étoffes de kimono, la championne de la ville sortit, suivie par les deux petites élèves qui regardaient partout à la fois. La pension semblait être divisée en plusieurs salles, même si Eryn ne voyait pas comment l’endroit était organisé. Finalement, une petite observation lui suffit. Le long de l’immense pièce principale, qui servait un peu d’aire de jeu aux bébés Pokémon, de nombreuses stalles étaient installées. Il ne lui fallut pas longtemps pour comprendre que derrière chaque stalle se trouvait une pièce servant de chambre aux Pokémon, et que la stalle n’était là que pour cacher les portes et prévoir une double sécurité pour empêcher les Pokémon franchissant la porte de s’enfuir dans l’aire de jeu au beau milieu de la nuit. Les stalles, peintes et décorées, se fondaient parfaitement dans le paysage et ne dénaturaient pas la pièce de jeu, savamment décorée par de l’herbe et des arbres. Curieuse, la Mentali se pencha pour caresser l’herbe, et sourit en la sentant véritable sous ses doigts experts. Erika n’avait pas lésiné pour le bonheur de ses petits protégés. Cette dernière, justement, pointait le doigt vers la double porte par laquelle elles étaient entrées.
« Cette porte-là permet d’accéder à l’extérieur de la pension, aussi est-elle toujours fermée à clé par le personnel. On vous fournira sous peu un jeu de clés à chacune, aussi, n’oubliez pas de toujours verrouiller derrière vous quand vous sortez hors de la pension. Il y a peut-être un sas de sécurité pour empêcher les fuites de bébés Pokémon, et l’endroit a beau être surveillé, un accident peut très vite arriver. » Elle pointa le doigt vers une stalle, au-dessus de laquelle une assiette et des couverts en bois étaient accrochés.
« Ici, c’est la cuisine. Vous n’aurez pas besoin de cuisiner quoi que ce soit, le personnel s’en occupera pour vous. C’est cependant là que vous pourrez récupérer la nourriture des Pokémon qui vous seront attribués aux différentes heures de repas, ainsi, bien évidemment, que votre propre repas préparés par ce même personnel. Et pour terminer la visite, je vais vous emmener à l’extérieur. »Erika reprit sa route, et les deux filles la suivirent à nouveau. Sortant un passe de sa manche, la championne ouvrit une des stalles, et les laissa passer avant de passer à son tour, pour refermer la porte en bois de la salle et ouvrir celle qui menait à l’extérieur. A nouveau, la Mentali resta sans voix. L’endroit était magnifique. Très bien éclairé grâce au soleil d’après-midi, très peu venteux, plein de jeux… C’était un grand parc pour Pokémon, clôturé de tous côtés et protégé par des caméras de surveillance à 360° astucieusement placées en haut de pylônes de bois. Erika prenait la sécurité de sa pension très au sérieux. La sécurité, et le confort : l’endroit regorgeait de jeux, de verdure, d’eau, de buissons, pour que les Pokémon se sentent à l’aise et en sécurité même quand ils sortaient en extérieur.
« Voici le parc extérieur. Maintenant qu’il recommence à faire chaud, on pourra bientôt l’utiliser, mais pour le moment, les portes restent verrouillées pour ne pas tenter nos petits pensionnaires. Comme pour la porte d’entrée, on vous remettra une clé à chacune si nous estimons que le parc peut être utilisé sans risquer la santé des Pokémon les plus faibles. »« Dame Erika ? » La championne se tourna vers un homme qui s’approchait d’elle.
« Excusez-moi, dame Erika, mais des dresseurs commencent à se masser aux portes de l’arène pour vous affronter. »« Très bien. Dites-leur que je suis à eux dans un moment, le temps d’attribuer leurs affectations à ces deux demoiselles. »Et d’un pas tranquille, elle repartit vers l’intérieur de la pension, les deux filles sur ses talons. A l’intérieur, elle s’arrêta quelques secondes, le temps de prendre un Doudouvet dans ses bras pour le câliner et le reposer au sol, faisant sourire la Mentali émerveillée. Un Doudouvet ! Elle avait toujours voulu en avoir un ! Quand elle se redressa, Erika tendit vers elles une feuille de papier, qu’Eryn attrapa mécaniquement pour soulager la championne.
« Pour le moment, vous vous occuperez des Nenupiot et des Chlorobule, qui se trouvent dans le box 4. Leurs habitudes et régimes alimentaires sont inscrits sur cette feuille de papier. Il est possible que vos affectations bougent à nouveau, et j’en suis désolée par avance, mais comme on ne sait pas vraiment combien de bénévoles disponibles nous avons à notre disposition, c’est un peu le chaos. » Erika soupira, avant de sourire à nouveau.
« Pour le moment, ces petits polissons dorment encore, ça vous laisse le temps de vous promener à votre aise et de faire connaissance avec les autres. On vous donnera des badges avec vos prénoms inscrits dessus, par ailleurs. Ce n’est vraiment pas très classe comme manière de procéder, mais c’est plus pratique pour mémoriser les noms de chaque personne… Et vu que chaque école semble s’être donné le mot pour envoyer un binôme, vous en aurez bien besoin. Tiens, d’ailleurs, en voilà une. Isabella ? » Une fille blonde, qui venait d’entrer, se dirigea avec le sourire vers la championne. Elle avait l’air très gentille, à première vue, et quand elle lui envoya un sourire éclatant de gentillesse, Eryn ne put que lui sourire à son tour.
« Les filles, je vous présente Isabella Forsyth. Son frère Tarquin et elle sont les premiers à être arrivés, il y a de ça une semaine. »« Bonjour ! » La blonde leur fit un nouveau sourire.
« C’est un plaisir de vous rencontrer. Vous allez voir, on se plaît vraiment ici ! Si vous avez besoin d’aide, n’hésitez surtout pas, après une semaine passée ici je connais les lieux comme ma poche ! »« Je te remercie de ta gentillesse, Isabella. Sur ce, je dois vous laisser. Le devoir m’appelle, et il n’attend pas. J’espère que vous vous plairez ici ! »De son pas calme, Erika quitta la pension pour retourner à son arène. Eryn, conquise par la douceur de la spé type Plante, la regarda partir du regard, et quand elle se retourna, Isabella avait disparu. Mince alors. Elle qui voulait lui demander des explications sur les horaires et tout ça ! La voyant passer dans son champ de vision, Eryn se dirigea vers elle, veillant à ne pas bousculer les petits Pokémon qui jouaient autour d’elle.
« Isabella ? » La blonde se tourna vers elle.
« Pardon de te déranger, mais tu voudrais bien nous parler du rythme de la pension ? »« Oh, oui, bien sûr, et tu ne veux pas du thé avec ? » Elle leva le nez, méprisante.
« Je ne suis pas votre nounou. Maintenant, pousses-toi, j’ai du boulot. »« Mais… Tout à l’heure, devant Erika… »« Oui, justement. Devant Erika. Je n’ai pas de temps à perdre à parler avec les gens de ton espèce. »Blessée, la Mentali recula d’un pas. Des gens de son espèce ? Pardon ? En quoi cette péronnelle s’estimait-elle supérieure à elle ? Les sourcils froncés, la Mentali serra les poings, regrettant que Cael ne soit pas là pour balancer à cette idiote méprisante quelques phrases de son cru pour la déstabiliser, quand elle-même n’était bonne qu’à rougir et bafouiller. Refusant de céder au mépris de la blonde, elle se renforça et ne bougea pas.
« Les gens de mon espèce connaissent au moins la politesse, ce qui ne semble pas être ton cas. »« Ce que tu es naïve. » Isabella reposa sa caisse pour se tourner vers elle.
« On est dans une pension de luxe, ma grande. De luxe. Si tu penses qu’Erika t’embaucheras parce que tu en rêves, tu te fais des illusions. Ici, c’est la loi du plus fort qui prime. Or, les plus forts sortent de l’école Crève-Cœur. Mon frère et moi sommes majors de notre promotion, et nous comptons bien nous tailler une bonne place ici. Alors tâche de rester à ta place, car si tu te mets en travers de notre chemin, nous écrabouillerons ta misérable petite école. »« Bonne chance, dans ce cas. Le gouvernement et la Team Rouage ont essayé, et dans les deux cas, ce sont les élèves qui les ont écrabouillés. Si tu penses être plus forte qu’eux, tente donc ta chance… Mais ne viens pas pleurer si ta naïveté est brisée par la réalité. »Lui tournant le dos, la Mentali retourna vers Mikato qui, de là où elle était, avait pu entendre toute la scène. S’asseyant sur un banc, pour caresser la tête d’un petit Bulbizarre qui venait vers elle pour avoir des câlins, elle se tourna vers sa camarade Mentali, quelque peu hargneuse.
« J’ai comme l’impression que nous allons devoir nous serrer les coudes, parce que les autres duos présents ici se croient dans un battle royale et ont la ferme intention de nous évincer… Avec le sourire, évidemment. »