
Son Bonbon Rage piquait vraiment beaucoup. Et Hilda, tête posée sur ses genoux, appréciait le sien en silence, laissant sa dresseuse caresser sa tête, ses doigts passant de part et d’autre de la perle rouge ornant son front sans jamais la toucher. La Persian détestait ça. Et la brune, déjà habituée à devoir faire attention quand elle caressait la tête de Sphax, qui devenait violent quand quelqu’un touchait sa corne, avait inconsciemment adopté ce réflexe pour ne pas agacer sa féline. Ariania, pendant ce temps, continuait à réfléchir à la question que lui avait posée Aileen. La brune n’était pas pressée, de toute manière. Elle appréciait le silence, et ça lui permettait de jauger sa camarade pour imaginer quel serait le meilleur parcours pour elle. Au vu de son énergie sans fin pendant les entraînements, Pokéathlète. Sa bonne humeur perpétuelle, qui tapait sur les nerfs de quelques filles du dortoir, la poussait vers le parcours Coach. Avec un entrain pareil, elle saurait motiver les Pokémon qu’elle avait sous sa garde à donner le meilleur d’eux-mêmes, non ? Cependant, elle semblait se soucier énormément des autres, et pourrait avoir des habilités pour partir vers le parcours Médecin. Sauf que ces parcours, autant l’un que l’autre, exigeaient beaucoup de travail. Ce n’est pas parce qu’on travaille les muscles qu’on abandonne la cervelle… Sa pile de bouquins de médecine en étaient la preuve, et trop souvent, elle avait vu Stella plongée dans ses devoirs à une table de la salle commune. La Coordination, autant oublier, Ariania ayant elle-même admis qu’elle n’avait pas la patience pour créer, performer, ou s’occuper à temps plein des Pokémon des autres. Scientifique, le problème avait été résolu. Restait le Topdressage. Ranger pouvait être susceptible de lui plaire, mais elle se heurterait au mépris violent et affiché d’Ace Creed, ce qui l’agacerait et risquerait de lui créer des ennuis. La stratégie, beaucoup trop de travail et de trucs à retenir, beaucoup trop de modération pour une impulsive comme elle. La spécialisation ? Ca pouvait lui convenir… Elle parvenait à une impasse. Heureusement pour elle, ce fut à ce moment précis qu’Ariania prit la parole.
Et elle voulait… De l’action. La Pyroli se fit violence pour ne pas éclater de rire. Un parcours qui ne ressemble à aucun autre, et où elle peut utiliser ce qu’elle a appris auprès du Général Jackie pour se sortir de mauvaises situations. Un parcours qui la dépayserait, où aucune journée ne se ressemblerait, où elle aurait son lot de sensations fortes, entre courses-poursuites, labyrinthes, courses haletantes, trucs à récupérer… C’était tellement cliché. Tellement cliché que la préfète faillit esquisser un sourire mélancolique. Étrangement, en voyant Ariania, elle avait l’impression de se voir deux ans auparavant, quand elle avait choisi son parcours sans l’ombre d’une hésitation. Elle aussi voulait de l’action, du dépaysement, quelque chose qui lui procurerait sa dose d’adrénaline en passant, chaque jour, plus près de la mort. Elle avait monté les grades, et ses rêves s’étaient brisés tandis que sa motivation changeait. D’aventures, elle ne voulait plus. Elle voulait maintenant de la justice. De mercenaire solitaire qui n’accepte que le plus juteux des contrats, elle avait radicalement changé de bord, pour se tourner vers la police internationale, afin de lutter contre les organisations criminelles qui, impunément, menaçaient, volaient, tuaient, et brisaient des vies. Comme la sienne.
« Je ne pense pas que ça te convienne, mais il existe le parcours de Ranger, à l’académie. C’est classé dans le Topdressage, et chez les Pyroli, tu peux y retrouver Hope Spettell, par exemple. Tu sais, la petite blonde ? Enfin bref, les rangers protègent l’écosystème et sont amenés à voyager partout pour défendre les Pokémon dont ils ont la charge. Généralement, c’est plutôt choisi comme spécialité secondaire, comme a fait Idalienor, justement. Sinon… »Un instant, Aileen hésita. Était-ce une bonne chose de projeter Ariania dans un monde aussi dur ? De lui parler du parcours d’espionnage et de la confronter sans préparation à la vraie vie ? Sur ses genoux, Hilda ronronna, amusée, et Aileen lui caressa la tête. Il le fallait. Ariania était venue lui demander de l’aide, et son rôle n’était pas d’entraver sa route, même pas pour la protéger. Si elle devenait espionne, de toute manière, elle serait assez grande pour se protéger toute seule. Comme elle.
« Hrm. Pardon, je réfléchissais. Je disais donc, mis à part ranger, il y a un autre parcours qui pourrait te plaire. Je dis ça, parce que tu as dit toi-même qu’il te fallait de l’action et du dépaysement, au lieu de rester cantonnée à la même chose. Or, ranger, c’est sympa, mais sans vouloir vexer ceux qui suivent ce cursus, au bout d’un moment, ça doit être lassant, même si effectivement ça fait voyager… Enfin bref. Tu as déjà entendu parler de la filière espionnage ? »Le regard d’Ariania s’était illuminé. Elle avait éveillé son intérêt, et ne pouvait plus faire marche arrière, maintenant. Bon, eh bien, ça ferait un espion de plus dans le parcours, maintenant… Et un deuxième dont elle connaîtrait l’identité, en plus de Loan. Pour ce que ça importait, de toute manière… Ce n’est pas comme si elle allait s’amuser à les faire chanter, quoi. Elle avait autre chose à faire de ses journées.
« D’après ce que j’en sais, l’espionnage est un parcours caché dont les étudiants sont officiellement coachs ou médecins, sans doute parce que ce serait contre-productif pour eux de hurler sur tous les toits qu’ils sont espions, je pense. Ils n’ont pas de cours officiels, du coup je suppose qu’ils les reçoivent par iPok. Le parcours a été créé par le gouvernement il y a deux ans, et c’était deux types du nom d’Aaron Olsen et de Jenner Jefferson qui étaient à sa tête, du coup Rivardi et Cadigan, les anciens directeurs, ont nommé Jackie et Hortense comme profs pour empêcher le gouvernement de placer ses fouineurs un peu partout. Quand Olsen et Jefferson ont été arrêtés pour avoir fait rentrer la Team Rouage dans l’école - » La brune se tut et serra le poing de colère.
Vesta. C’était à cause de ces deux connards imbus de pouvoir qu’elle ne reverrait jamais sa Ponyta. Doucement, la langue râpeuse d’Hilda sur son poing fermé la ramena à la raison, et elle rouvrit la main pour la poser sur la tête de sa Persian.
« Pardon. Vieux souvenirs… Enfin, je disais, quand Snow a pris la tête de l’académie, Jackie et Hortense sont restés à la tête du pôle d’espionnage, et selon les rumeurs, il est vachement plus sûr maintenant. Et j’imagine que pour les futurs recruteurs, avoir été formé par le Général Jackie en personne doit témoigner de la qualité de l’espion qu’il va embaucher pour une mission. Je pense que ça pourrait te convenir, vu que tu aimes l’action, et que tu dis vouloir te battre sans toutefois passer ta journée à faire ça. A mon avis, ça devrait te demander de la réflexion, des capacités d’adaptation et de réaction, de l’intelligence, et une bonne dose de courage, aussi. Mais bon, pour ça, tu n’es pas Pyroli pour rien, j’imagine… »La brune esquissa un sourire. Ca ferait du bien aux espions d’avoir une pile électrique comme Ariania dans leurs rangs. Ca décoincerait un peu cette bande de péteurs qui, pour certains, s’estimaient meilleurs que les autres car ils réussissaient à cacher leur véritable parcours aux autres. En parlant de ça…
« Si tu deviens espionne, il te faudra une spé de couverture. Entre nous, je te conseille coach. Ca te permettra de te défouler, et il y aura moins de trucs à potasser que chez les médecins. Demande à Ida, pour voir… » Elle se fendit d’un nouveau petit sourire.
« Et promis, si tu choisis cette spécialité, je ne dirai à personne que tu es une espionne. Parole de préfète. Ce serait dommage que ta scolarité vole en éclats à cause de moi… »Oooooh non. Elle allait surtout tenter de la retrouver dans les entrées informatiques du pôle d’espionnage afin de la prendre sous son aile. Elle s’en voudrait vraiment beaucoup si Ariania se mettait en danger à cause d’elle…