Δ ÉCOUTES LA FORÊT QUI POUSSE PLUTÔT QUE L'ARBRE QUI TOMBE. 19 SEPTEMBRE 2016. |
Tu n'es pas resté longtemps dans ta chambre, cette nuit bien moins encore que toutes les autres. L'œuf s'est mis à bouger il y a quatre ou cinq heures alors que tu terminais un cours et tu ne tiens pas à le voir éclore au beau milieu du dortoir, entourés par des topdresseurs abrutis qui te considères comme une sous-race du dortoir. Oh, en dehors des périodes ou la douleur des coups et de leur acharnement te rattrape, tu te fiches bien d'eux et de leurs pensées même si tu cherches à les éviter par simple question de bon sens mais il ne s'agit pas de toi ici. Tu tiens à protéger la vie contenue dans cet œuf et en conséquence, l'Evoli qui en sortira viendra bien au monde au cœur de la nature plutôt que dans ce dortoir composé en majeure partie d'étudiants méprisant les filières autres que le topdressage. Tu t'es ainsi éloigné après l'appel commun, comme tu le fais chaque soir et tu as préféré le silence de la Petite Jungle à la compagnie d'Alyx ou des autres étudiants Noctalis. Tu as pourtant repéré quelques éléments sympathiques comme Sirius ou Lucas mais l'appel de la solitude est plus fort que tout, ce soir plus que les autres. Tu as donc contourné le complexe des bâtiments académiques pour aller te réfugier au cœur des bois après t'être esquivé de la zone des dortoirs. Derrière les structures d'internat des Givralis et des Mentalis, tu as pris le chemin de la petite Jungle en compagnie de Sobek et tu as soigneusement évité de prendre les sentiers menant au bois de brume. Cet endroit, de nuit comme de jour, ne t'inspires plus confiance depuis le jour ou tu t'es perdu jusqu'à arriver dans un cimetière ou tu as du rester enfermé en compagnie d'une jeune fille presque aveugle. Tu n'as guère de courage ou de bravoure, il faut bien l'admettre, et c'est la raison pour laquelle tu préfères aller dans des bois au sein desquels tu pourras te repérer sans encombre. Tu es faible et lâche Ciel, mais prudence n'est-elle pas mère de sûreté ? Ou est-ce un proverbe inventé par des couards, pour rassurer d'autres couards sur leur condition ? Tu n'en as pas la moindre idée mais tu comprendrais parfaitement que ce soit le second. Il n'y a que la lâcheté pour apaiser la lâcheté et seule la poltronnerie peut répondre à la poltronnerie sans la vexer. La coquille protégeant l'embryon émets donc des sons depuis quelques heures. De légers cris aigus s'en échappent depuis qu'un trou, à peine plus gros que la moitié de la phalange de son auriculaire, l'a percée sur le haut. Un coup de pattes ou de museau, tu ne saurais dire mais de fins craquements se font également depuis ce moment et tu sens que l'éclosion est proche. Ce n'est qu'une question d'heure et, si tu as de la chance, ton nouveau compagnon verra le soleil pour la première fois de sa vie au petit matin. Tu te cales en hauteur après avoir escaladé le fût d'un chêne rouvre. Tu es arrivé à une quinzaine de mètres du sol, là ou commencent à se former les branches les plus épaisses et ou se dresse la couronne qui te permet de poser la coquille en sécurité en étant sûr qu'elle ne chutera pas. De là, observant l'œuf qui est à la peine plus grand que la paume de ta main et pas plus large que la longueur de ton majeur, tu le surveilles sans voir les heures défiler. Tu es presque surpris par le soleil et tu redresses agilement sur ta branche sans même en attraper une autre pour te tenir lorsque tu le vois poindre à l'horizon. Tu observes l'aurore qui teinte les environs de rose, d'orange et d'azur et tu t'étonnes de ne pas avoir entendu les pyrolis exécuter leur entraînement matinal. Tu es loin, peut être trop, de l'académie il faut le dire. L'Evoli a bientôt fini d'éclore mais tu sais parfaitement que tu ne dois pas lui venir en aide. Tu risquerais de le blesser ou de le couper en cassant un morceau de coquille d'une part et d'autre part, lui faciliter la tâche le rendrait sûrement feignant. Tu as lu ça, tu ne sais plus trop dans quel livre – il faut dire que tu as consulté énormément d'ouvrages sur l'élevage – mais tu prends comme un devoir de te fier à ce que tu as lu tant que ce soit un minimum sérieux, quand bien même tu ne parviens pas à te rappeler la source. Les jappements se sont fait surraigus et on doit facilement pouvoir les entendre à plusieurs mètres à la ronde. La tête et la moitié avant du corps sont déjà à l'air libre et il ne reste plus au jeune pokémon qu'à décoller ses pattes arrières de la coquille pour venir complètement au monde. Tu peux dire en tout cas que ce sera un jeune gueulard, vu la puissance avec laquelle il donne de la voix. C'est à ce moment là que tu remarques une ombre blanche se faufiler dans ta direction. Elle court rapidement, aboyant également de son côté comme pour répondre aux appels du nouveau-né et, intrigué en constatant qu'il s'agit d'un Caninos chromatique et aussi albinos que Sobek, tu prends le reste de la coquille et le jeune Evoli dans tes bras, poses ton Mascaïman sur ton épaule avant de te laisser glisser prudemment le long du fût de l'arbre, exécutant la manœuvre réalisée en sens inverse quelques heures auparavant. « Eh, qu'est-ce que tu fais là, toi ? » Il jappe de plus belle et pour satisfaire ce qui semble être sa demande, tu lui présente le nourrisson pokémon avec un sourire tout en t'agenouillant. Ce dernier d'ailleurs, sûrement encouragé par la présence aussi proche d'un autre animal, se débarrasse du reste de sa coquille d'un simple coup de pattes et achèves ainsi le processus natal. Tu souris en caressant le haut du crâne du Caninos avant de redresser la tête en entendant un craquement de branche. Une jeune fille se dresse à quelques mètres de toi et tu quittes ta position accroupie pour être debout face à elle. « Oh, euh, je suis désolé. C'est votre pokémon ? Il a du être attiré par mon Evoli en train de sortir de l'œuf. » Et revoilà la gêne. Tu parles d'une voix un peu étranglée, en tentant malgré tout de sourire à l'adolescente mais la timidité ou l'angoisse de l'inconnu te trahit et se lit trop facilement sur ton visage. Bien joué Ciel, bien joué. |
© GASMASK |
- Oublie l’entraînement pour aujourd'hui Apa. Laisse les dormir pour aujourd'hui, je vais sortir Smaug, à toute à l'heure.
- Oui, c'est mon pokemon. Smaug. Je suis en train de le dresser pour devenir sauveteur, je suppose que ça marche assez bien. Max Arago, Givrali archéologue. Enchantée vous deux !
- C'est joli ici, tu viens souvent ? Oh et tu peux me tutoyer ! Je suis pas si vielle.
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