Procrastination is my sin.
Ashley (ou Ash, tel qu'il préfère être appelé) est un personnage littéralement haut en couleurs qui a pourtant l'étrange particularité de ne pas marquer les esprits. Il attire l’œil puis disparaît de la vue de celui-ci, à la façon d'un mirage, d'un petit quelque chose de potentiellement intéressant mais qui se révèle trop vite ennuyeux à regarder.
Il faut dire que si l'on soustrait son attitude à son physique, Ash est magnétique : les regards sont aimantés sur le cyan qui teint ses cheveux ébouriffés, originellement noirs de jais, et glissent comme de l'eau le long de sa silhouette svelte, à la peau nacrée malgré les heures consumées sous le soleil. Le malheureux a, effectivement, la capacité à attraper des coups de soleil plutôt qu'à jamais bronzer. Ses vêtements peuvent avoir une pincée d’excentricité, aussi, lorsque l'envie lui prend -que ce soit dans les couleurs et ses associations ou dans les formes. Il ne s'impose à vrai dire pas de style particulier, du moment que l'habit reste confortable.
Il aime être libre de ses mouvements, après tout.
Paradoxalement, le jeune homme est d'une inactivité absolument inébranlable : il reste là, debout et droit, musique aux oreilles et immobile comme une statue de pierre en attendant le bus. Ou alors il s'installe, confortablement, et reste aussi longtemps que possible dans cet état de semi-hibernation sans ressentir le besoin particulier de s'occuper ou de gigoter pour évacuer une énergie qu'il n'a pas.
Plutôt que d'énergie, à vrai dire, il serait plus juste de qualifier la chose de motivation. Ash n'a pas de centre d'intérêt particulier et peine de toute façon à s'intéresser à quoi que ce soit durablement. Selon lui, plus c'est facile, mieux c'est : son choix de métier ne tient par exemple qu'à sa capacité innée à user de ses doigts de fée -il n'a jamais éprouvé une quelconque passion à l'idée de s'occuper d'autrui. Il a tendance à fuir les complications comme la peste et les responsabilités comme le choléra. Par extension, il n'est généralement ni hypocrite ni très bavard, les contraires de ces deux derniers points lui coûtant trop d'efforts à son goût.
En revanche, il serait bon de noter que le Dresseur a beau être lent d'action, il ne l'est pas d'esprit. Ça a même plutôt tendance à surchauffer là-dedans : il déteste cela et pourtant, notre masseur en herbe est d'un naturel soucieux et se prend aisément la tête sur des détails. Détonnant avec sa posture de marbre, ses yeux un peu tombants sprintent quasi nerveusement d'un endroit à un autre du décor, pour parfois se fixer intensément sur un point plus ou moins hasardeux de celui-ci. Il analyse constamment son environnement.
Ainsi, il a également cette particularité à faire les choses bien ou à ne pas les faire du tout. Il ne supporte pas les demi-mesures et passe d'un extrême à l'autre parfois sans crier gare. Notamment, dans l'une des rares activités qui a su capter son intérêt : l'exploration. Ash aime se balader en terrain sauvage, que ce soit en bravant la jungle, en escaladant des montagnes ou en se risquant dans les fonds-marins. Ce passe-temps lui prend généralement d'un seul coup, et il peut tout aussi bien y passer des jours que laisser se dérouler des semaines voire des mois sans avoir envie de nouvelles aventures de ce genre.
Par conséquent, le jeune homme a su développer une certaine musculature ; pourtant, sa démarche reste nonchalante et son regard, las, malgré l'éclat tendre qui brille dans le bleu de ses prunelles. Contre toute attente, Ash n'est en effet pas froid et insensible ; simplement désintéressé. Il peut lui arriver d'être maladroit, voire rude, car le social n'a jamais été son fort ; néanmoins il n'a que rarement eu la réelle intention de blesser son interlocuteur.
Les débuts de sa vie apparaissent illuminés par les spots et submergés par les vagues d'applaudissements. Un peu plus chaque soir et chaque soir et un peu plus suffocant ; brûlé vif sous les feux des projecteurs.
Ash n'a, d'aussi loin qu'il s'en souvienne, jamais aimé cela.
Il était, néanmoins, trop jeune pour oser exprimer son avis -plus particulièrement face à l'enthousiasme écrasant de Kalisto. Grande extravertie de nature, cette dernière était toujours là pour l'encourager et faire peser sur ses frêles épaules les attentes d'une mère enjouée -cela, sans vraiment s'en rendre compte. L'enfant n'avait rien contre cette danse, en vérité, bien qu'il n'ait jamais eu de facilité ou de talent particulier en cette discipline : c'était simplement sa façon qu'il avait de modifier les classiques, de rendre les chorégraphies plus dynamiques, qui plaisait au public. Alors, que ce soit sur l’Étoile d'Unys où travaillait son père ou à tout autre endroit de Volucité, il finissait inévitablement sur le devant de la scène, parfois accompagné de sa mère, d'autres fois de danseuses professionnelles de Nihon Buyô.
Il ne s'en est jamais plaint, tout renfermé qu'il était.
Son plus grand réconfort résidait en la Nanméouïe qu'il avait un jour attrapé sous la supervision de son paternel, Ronald : aussi effacée que l'était ce dernier, elle demeurait douce dans son attitude comme dans ses intentions et savait remonter le moral du petit Ash. Elle le suivait comme une ombre, n'intervenant que lorsque c'était absolument nécessaire car elle comprenait le besoin de respirer qu'avait alors le jeune fils de la famille Ciaan.
Tel qu'il était parti, à vrai dire, Ashley aurait certainement pu passer toute sa vie à jongler entre ses représentations de danse et l'école sans jamais se plaindre.
Il en fut autrement, toutefois. Cela n'aurait pas été intéressant dans le cas contraire, n'est-ce pas ?
La passion et l'amour s'étaient volatilisés de la vie de couple de ses parents, qui décidèrent en conséquence de divorcer : tout se déroula à l'amiable, sans agressivité ni rancune particulière.
Ce fut malgré tout un coup très dur à encaisser pour l'enfant, alors âgé de quatorze ans.
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C'est suite au divorce qu'Ash se vit offrir le choix de partir avec sa mère, qui prévoyait de retourner habiter sa ville natale, ou de rester avec son père à Unys. Trop habitué à devoir répondre aux attentes de Kalisto, c'est finalement elle qu'il décida de suivre -le cœur traînant et les pas lourds d'amertume.
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Rapidement, paradoxalement, Ash commença à s'éloigner de sa mère. De moins en moins enclin à suivre ses cours de danse japonaise traditionnelle à Rosalia, il faisait en revanche des escapades régulières à Doublonville -qui plus est, en compagnie de personnalités peu recommandables.
A savoir, la Team Rocket.
Rien de bien exceptionnel, cependant, car il n'était qu'un sbire des plus communs et ne faisait qu'exécuter des méfaits simples et sans réelles conséquences : c'est-à-dire traîner en ville en groupe et chercher des noises aux habitants, pour de temps à autre leur soutirer à l'insu de leur plein gré un peu d'argent -jamais beaucoup. Sans aller jusqu'à soutenir les plans de la Team Rocket, le garçon appréciait la liberté que ce groupe lui offrait, tout autant que cette liberté de mouvement qu'il avait en tant qu'un de leur membre les plus lambdas. Certains n'étaient pas des mauvais bougres, d'ailleurs, et il parvint à s'y faire quelques amis.
Cela, au détriment de sa Nanméouïe qui supportait très mal ses agissements et tentait, lorsqu'ils étaient seuls, de le dissuader de poursuivre sur cette voie.
En désespoir de cause, le jour de son seizième anniversaire, Kalisto essaya de renouer des liens avec son fils en l'amenant au Parc Safari. Une bonne occasion de passer du temps en famille et de chercher à remettre son enfant sur le droit chemin... En théorie.
Car Ash passa la journée à esquiver sa mère et ses leçons de moral, empruntant des sentiers ardus, et y rencontrant par là-même un Ponyta... Aux particularités étranges. Notamment celle de sauter comme un Chevroum, d'une façon tout à fait comique, pour escalader des rochers escarpés -le tout avec une facilité désarmante. Cet étrange Pokémon déviant attira de fait l’attention de l'adolescent qui employa son temps à ruser et à le pourchasser dans l'espoir de l'attraper.
Objectif auquel il parvint finalement, et qui fut en conséquence son unique prise du jour. Pas des moindres, néanmoins, selon lui.
Après quoi la routine reprit. Nym et le Pokémon nouvellement attrapé -Diaz, s'entendaient plutôt bien : ce dernier se révélant toutefois d'une couardise à toute épreuve, il fut bien vite considéré par son Dresseur comme inutile de le traîner en combat. A la place, tous deux, parfois accompagnés de Nanméouïe lorsqu'elle se sentait d'humeur aventureuse, s'échappaient de temps en temps en pleine nature -afin de l'explorer. Une activité qui, inconsciemment, éloigna Ashley des activités de la Team Rocket.
Quoi que pas de toutes, bien sûr.
En effet, il fut un jour inclus à une opération un peu plus grosse, un peu plus conséquente et un peu plus organisée : le vol des œufs de la Pension Pokémon, au sud de Doublonville. Ce jour-là, Nym et Ash se fâchèrent au point qu'elle lui refusa toute aide concernant cette initiative ; une première, malgré les relations tendues qu'ils subissaient depuis ces quelques années. Cela n'empêcha pourtant pas Ashley d'apporter sa contribution au plan, qui s'avéra au final être un succès resplendissant et sans accrocs.
Ce qui n'avait pas été prévu, en revanche, ce fut que l'un des œufs que portait le garçon éclose sur le chemin du retour.
Incident qui déplut quelque peu à ses camarades, car le nouveau-né posa son tout premier regard sur Ash et s'y attacha de fait aussitôt -à la façon des poussins qui s'imprègnent du premier être vers lequel leurs yeux se lèvent. C'était un Stari tout ce qu'il y avait de plus normal, ceci-dit : alors, exceptionnellement, les supérieurs laissèrent couler et permirent à Valissir d'être adopté plutôt que revendu comme les autres.
A défaut, la naissance permit quoi qu'il en fut de réconcilier un tant soit peu Nym et Ash, car il leur fallait coopérer pour élever le bébé Pokémon ; ni l'un ni l'autre n'avait d'expérience en la matière.
Le petit Pokémon prouva d'ailleurs très vite que ces gens de la Team Rocket avait eu tord de le considérer comme un « simple Stari » : il était un véritable génie du combat.
Si bien que, malgré lui, Ash commençait à se faire repérer de ses supérieurs, respecté de ses pairs et admiré de ses cadets. Rien de bon en perspective pour un adolescent dont le but avait été de s'effacer dans cette masse qui lui offrait paradoxalement tant de liberté.
Petit à petit, il fit en sorte de s'éloigner, de devenir solitaire, dans l'espoir de se faire oublier. Ses agissements réservés eurent l'effet inverse, ironiquement, car il se forgea alors une réputation de dresseur aussi mystérieux que talentueux. De quoi lui tirer un rire creux et amer.
Raison pour laquelle il tenta une fois encore de déplaire à la Team Rocket. Pour cela, il rejoignit la Pension Pokémon et se fit volontaire pour aider, bénévolement, le couple de personnes âgés qui le gérait. Il s'y adapta étonnement vite, se découvrant à cette occasion une capacité certaine à masser efficacement les Pokémon. Ce talent, couplé à sa nature tranquille, lui valut rapidement d'être apprécié par les gérants de la Pension -qui ignoraient, naturellement, qu'il faisait partie de ceux qui leur avaient dérobé leurs précieux œufs plusieurs mois auparavant.
Une nouvelle routine, paisible, s'installait pour l'adolescent qui avait fini par apprécier cette occupation. C'est durant cette période qu'il se réconcilia lentement et sûrement, mais surtout définitivement, avec Nym.
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Arriva alors la goutte d’eau qui fit déborder le vase.
La Team Rocket, persuadée qu'il s'était rapproché des gérants de la Pension dans le but de soutirer des informations et de prévoir un plan permettant le vol des œufs
et des Pokémon qui y étaient déposés, lui proposèrent un genre de promotion -un rôle plus important au sein de leur groupe, en tout cas.
Cette fois, Ashley décida précipitamment de quitter la Team Rocket : une mauvaise idée, générée par l'impulsion et l'envie soudaine de se détacher une bonne fois pour toute de la bande criminelle. Il fut dès lors -ironie du sort- cette fois très mal vu des membres qui décidèrent en conséquence de lui mener la vie dure chaque fois que son chemin croiserait le leur.
On n'abandonnait pas la Team Rocket impunément.
Occasionnellement pourchassé, c'est durant l'une de ces courses-poursuites que Diaz évolua sans crier gare en Galopa : l'évènement eut de quoi réjouir l'adolescent car un tel Pokémon, pouvant servir de monture et atteindre des pics de vitesse incroyable, lui permit à plusieurs reprises de s'échapper de beaux pétrins par la suite.
Ces mauvais traitements poussèrent en tout cas bien vite sa mère à l'inciter à déménager plutôt qu'à continuer de subir pareil quotidien : cette dernière avait beau ignorer une majeure partie des méfaits de son fils, elle devinait que rester plus longtemps au sein de Johto pourrait lui attirer des ennuis plus grands à la fois avec la Team Rocket et avec la police, si cette dernière remontait certaines pistes jusqu'à lui.
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C'est ainsi qu'Ashley finit par déménager à Lansat, île a priori relativement tranquille, et qu'il choisit d'y exercer le métier de masseur. La profession se révélant encore peu exercée dans cette ville, il fut contraint de passer par un petit boulot au Centre Pokémon le temps de se faire une renommée un peu décente, se contentant par conséquent de revenus modestes quoi que suffisant pour le train de vie qu'il menait.
C'est à dix-neuf ans qu'il apprit, durant un appel téléphonique avec sa mère, que cette dernière avait retrouvé l'amour.
Étrangement, il fut difficilement réjoui par la nouvelle -et ce, probablement parce qu’il n’avait jamais imaginé qu’en plus d’être brisée, sa famille se reconstituerait avec une autre. Cela lui semblait anormal.
Ses visites chez sa mère se firent par conséquent relativement clairsemées : il ne croisa que très rarement son beau-père et sa belle-sœur, choisissant de les tolérer plutôt que de les accepter totalement, et se faisant aussi distant qu’il était possible de l’être.
Intention quelque peu difficile à suivre, toutefois, depuis que Kalisto et le fameux Marcus décidèrent de se marier et de partir en lune de miel. L’occasion parfaite pour eux de lui envoyer sa nouvelle petite sœur, Shana, en ajoutant qu’elle allait d’ailleurs intégrer l’académie de Lansat.
Même aujourd'hui, peu importe sous quel angle il abordait la situation, Ashley ne se sentait pas vraiment de prendre sous son aile Shana -ni qui que ce soit, en fait. Cela n’avait rien de personnel : ce n’était pas sa faute si leurs parents avaient refait leur vie à deux. Néanmoins l'idée ne l'enchantait, qui plus est quand il ignorait s'il était doué pour s'occuper d'un enfant, et qui plus est alors qu'il ne la connaissait pas (et n'avait rien fait pour).
Le jeune homme consulta sa montre, puis soupira.
C’était l’heure.
Il se leva, enfila un manteau et sortit de chez lui. Les personnes originaires de Johto arrivaient du Port Ouest, si ses souvenirs étaient justes.