Kalos. Ce territoire magnifique au patrimoine culturel si réputé dans les autres régions. Le mode de vie de ses habitants, ses paysages divers à la beauté égale, ses entreprises florissantes, son style architectural unique et ses diverses activités touristiques. Je me sentais, en un sens, à l’image même de ce pays dont j’étais originaire : raffiné, original, admiré, et aussi beau qu’intéressant ! … Quoi ? Relisez la liste, on n’a pas écrit « modeste » hein.

La lumière bleutée de l’aquarium se reflétait sur les verres de mes lunettes, inondant mon visage pensif alors que je regardais les Lovdiscs et les Poissirènes nager tranquillement dans leur bassin. On m’avait envoyé ici, à la Roche-sur-Gliffe, pour attendre le guide qui allait me mener à la Grotte Etincelante. Nous devions rejoindre un groupe de scientifiques pour les aider dans leurs découvertes, en explorant une partie de la cave qui n’avait été révélé que récemment après un éboulement. Et si j’étais plutôt calme à l’extérieur, j’étais en réalité tout excité. C’était tout simplement mon rêve ! Participer au décèlement d’un objet, d’une roche, qui allait peut-être changer entièrement ce que l’on pensait être la vérité sur la région ! Peut-être que cet artefact, s’il n’était pas mystique et déposé ici par un Pokémon plus ou moins ancien – ou mieux, un légendaire ! –, allait bousculer toutes les études réalisées jusqu’à présent dans la grotte. J’avais terriblement hâte, et je m’impatientais devant mon bocal plein de poissons.

Je sentis finalement une main se poser sur mon épaule après quelques minutes d’attente, qui m’avaient semblé durer des heures. Quand je me retournais, je croisais le regard d’un homme d’une quarantaine d’années, aux cheveux courts bruns et à la barbe fournie, qui me souriait. Il alla pour me tendre la main, mais remarqua Cierge dans mes paumes et se ravisa.

« - Bonjour. C’est donc toi l’élève envoyé par la Pokémon Community ?
- Exactement monsieur. Alyx Levi-Harabo, enchanté. »

Il me mena vers l’extérieur en se présentant comme étant Daniel Templar, un ancien scientifique de labo reconverti en archéologue de l’extrême, et entama les questions habituelles : si j’avais fait bon voyage, si je connaissais bien la région, si j’avais pu goûter aux fabuleuses recettes de poisson qu’on servait ici. Il s’amusa du fait qu’il était certain qu’on lui enverrait un garçon, et qu’il ne s’attendait pas à ce qu’une jeune fille aussi coquette se propose pour un travail a priori difficile dans un lieu peu adapté. Je le corrigeais donc sur mon genre et me délectait de son petit air embarrassé. J’apprenais à m’en amuser, au mieux, ou à l’ignorer, au pire.

Nous arrivions finalement devant une assemblée d’hommes et de femmes accompagnés de Pokémons, certains en blouse blanche en train de vérifier leurs dossiers, d’autres en tenues plus fonctionnelles pour entrer dans la caverne. Mais dans tout le brouhaha déjà puissant qui s’émanait du petit groupe, une voix s’élevait plus forte que les autres. Un vieux type s’époumonait à en devenir rouge et tremblant, postillonnant sur ses collègues qui essayaient de le calmer avant qu’il ne fasse une attaque cardiaque.

« - Mais c’est pas possible !! Qu’est-ce qu’ils ne comprennent pas, ces demeurés !? C’est pas une classe verte ! C’est une découverte monumentale ! Majeure ! Indispensable à la suite de nos études ! Et qu’est-ce qu’ils nous collent ?! Des mioches pour faire le boulot ! C’est n’importe quoi ! N’im-por-te-quoi ! »

J’haussais un sourcil en le regardant faire sa petite crise de nerf. A mes côtés, mon guide se pencha vers moi, son visage se tordant en une grimace particulièrement gênée.

« - Ah euh… Ne fais pas attention à lui. C’est le Docteur Stein… Il est du genre à prendre très à cœur ses recherches et je crois qu’il n’a pas apprécié que votre académie soit sollicitée. Il a déjà fait pleurer trois élèves qui étaient venus pour nous aider… »

Une autre scientifique réussit finalement à lui faire arrêter ses vociférations en nous montrant du doigt. Sans attendre, le vioque lui colla son bloc-notes dans les mains et s’approcha, levant fièrement le menton, la touffe de cheveux bouclés qui subsistait sur son crâne clairsemé voletant au vent alors qu’il s’avançait d’un pas rapide vers nous.

« - Allons bon, encore une gamine. Jeune fille, je suis le Docteur Stein ! Frank Ernest Norbert Stein ! Vous avez évidemment entendu parler de moi pour mes travaux sur la Méga-Evolution.
- Les Méga-Evolutions ont été étudiées par le Professeur Platane, il me sem…
- IL M’A VOLÉ MON TRAVAIL ! Bref ! Plutôt que d’essayer d’étaler votre science, mademoiselle je-sais-tout, mettez-vous au travail ! Vous allez être accompagnée par mes subalternes : Templar, et Sabrina. Moi, je reste ici pour… Superviser. »

Bah voyons. Encore un de ces scientifiques qui refilaient tout le sale boulot à leurs employés ou à leurs collègues. Je n’étais pas spécialement surpris, mais j’étais particulièrement énervé par cette attitude. On n’est jamais mieux servi que par soi-même, et encore plus dans les recherches. Le jour où je deviendrai chef de mon propre labo – et évidemment que cela arrivera un jour –, il est hors de question que je laisse un objet aussi crucial que le diamant que nous allons récupérer entre les mains de qui que ce soit d’autre que moi. Mais après tout, puisque Stein avait fait le choix de ne pas se mouiller, j’allais non seulement lui rapporter la pierre, mais en excellent état. En attendant, on ne m’avait pas spécifié que je n’avais pas le droit de me servir dans la grotte ou de prendre des photos et des notes sur mon iPok…

Nous nous retrouvions donc à l’entrée de la cave. Templar avait rapporté de quoi faire des marques rouge vif sur les murs pour ne pas nous perdre, tandis que Sabrina, une jeune femme visiblement sereine aux longs cheveux noirs, donnait une caresse à un Shaofouine en se proposant pour passer devant en cas d’éventuels dangers. Nous entrions finalement, le lieu sombre uniquement éclairé par la lueur des plantes brillantes ainsi que par la lumière de mon Funécire et des lampe-torches que moi et l’archéologue avions sorties de nos sacs respectifs. Je donnais d’ailleurs la mienne à Sabrina, alors que l’aventurier commençait à parler.

« - Il paraît qu’il y a des Ténéfix un peu partout… D’autres élèves qui ont été envoyés pour nous aider, ainsi que plusieurs personnes de nos équipes de fouilles se sont fait attaquer en entrant ou en sortant de la grotte. Certains ont même perdu les pierres qu’ils avaient pu récupérer… » Daniel se gratta les cheveux. « C’est aussi ça qui rend Stein nerveux. Plus on traîne, et plus nos chances de trouver ce qu’on cherche…
- Se réduisent, oui, c’est bon, j’ai compris, on est pas dans un mauvais film là ! On va les trouver, ces joyaux. Et puis, si votre boss n’est pas capable de contrôler ses émotions, tant pis pour lui ! »

J’étais assez mal placé pour critiquer, mais moi au moins, j’essayais de faire un travail sur mes accès de colère, ce qui n’était visiblement pas le cas de tout le monde. Mais je laissais les humeurs du vieux schnock à l’entrée, me concentrant sur notre mission. Sabrina en avant, nous avancions jusqu’au passage révélé par l’éboulement. Là, encore plus de végétaux luisants nous entouraient, leur lumière démultipliée par la présence de dizaines de cristaux dans les murs, de tailles et de couleurs diverses. Les deux adultes éteignirent les lampes, puisqu’on y voyait plutôt bien. Tout était même aveuglant… Je commençais à toucher doucement les pierres, prenant celles qui étaient tombées au sol dans ma main. Autour de nous, seuls quelques cris de Pokémons résonnaient dans le silence des longs couloirs de roche, et en levant la tête, Templar nous désigna du doigt une demi-douzaine de Chovsourirs dormant paisiblement au plafond. Je me relevais en prenant garde à ne faire aucun bruit pour ne pas les paniquer, et avançait avec mes compagnons dans la suite des galeries, posant Cierge sur mon épaule le temps de faire quelques photos et vidéos des lieux. Tout semblait comme magique, et surtout, je me disais que cela devait faire plusieurs dizaines d’années que personne n’était passé par ici, voire que ce sol n’avait tout simplement jamais été foulé par l’Homme. Je faisais part de ces pensées à mes accompagnateurs, réfléchissant à haute voix en émettant la possibilité d’un trou dans une paroi par lequel des Pokémons auraient pu entrer ou sortir pour, peut-être, aller chercher de quoi manger, puisqu’il ne semblait pas y avoir de baies ou autres végétaux comestibles dans la grotte en elle-même – et je doutais que manger du lichen brillant soit une bonne idée…  –. Je prélevais aussi, discrètement, quelques échantillons que je fourrais dans mon sac. Pour des études personnelles ultérieures, bien sûr…

Cela faisait plusieurs minutes que nous marchions. Le Shaofouine de Sabrina avait facilement fait fuir ou mis KO les Pokémons les plus agressifs qui barraient notre route. Des Machocs territoriaux ou des Grindurs nous tombant dessus un peu n’importe quand, mais aucune difficulté particulière. J’étais même plutôt surpris que tout se passe aussi bien, et mes coéquipiers semblaient tout aussi perplexes. On nous avait annoncé des obstacles et des créatures beaucoup plus agressives. Mais avec l’initiative de Templar de noter notre avancée sur les murs et les rochers, et l’efficacité du compagnon de la scientifique, nous arrivions sans doute presque à notre but. L’excitation montait à nouveau en moi à mesure que nos pas se dirigeaient vers le joyau tant convoité. Un tel objet était si précieux… J’avais hâte de pouvoir le prendre entre mes mains et le placer dans le sac de l’archéologue, qu’il avait ramené spécialement pour cela. Nous nous arrêtions devant une ouverture plus fine, mais largement assez grande pour que nous puissions y passer. J’y allais en premier, puis Sabrina et enfin Daniel. Et ce qui nous sauta aux yeux fut du plus bel effet : un cristal d’un rose des plus purs, brillant de mille feux, sagement incrusté dans une roche elle-même parsemée de plus petits diamants dont l’éclat semblait terne face à celui de notre artefact tant convoité. Je m’en approchais, lentement mais sûrement, le prenant tout d’abord en photo alors que Templar préparait son sac, le posant par terre. J’avançais mes mains, hésitant, avant de prendre la pierre, la tirant un peu avant de constater avec surprise qu’elle n’était pas si profondément encastrée.

« - Le trou formé est parfait… Pile à sa taille ! Comme s’il avait été fait spécialement pour le cristal, c’est incroyable ! »

Je laissais les deux adultes s’approcher, et si l’aventurier était aussi émerveillé que moi et prenait le joyau pour aller le déposer dans son sac, Sabrina semblait plus soucieuse, levant sa main pour se gratter le menton alors qu’elle se penchait sur le trou pour l’observer plus attentivement.

« - Je veux bien admettre que la nature fait parfois des choses incroyables… Mais ça, ce n’est pas naturel. Ca a été rajouté par quelque chose ou quelqu’un…
- Un humain ? » disais-je, venant étudier de plus près la marque. « Mais personne n’est venu ici depuis des décennies… Voire jamais.
- Et… Si c’était un Pokémon… ? »

Nous nous retournions ensemble vers Templar, qui montrait du doigt un groupe de Ténéfix, certains nous guettant de l’autre côté de l’ouverture, d’autres déjà entrés et visiblement peu prêts à coopérer. J’avais soudainement un doute, et visiblement, la scientifique tout autant. En chœur, nous saisissions une autre pierre précieuse dans la roche, pour constater exactement le même type de trou, taillé spécialement pour tenir sans retenir les diamants.

« - Je crois que c’est leur garde-manger… »

Sans que nous ayons le temps de réagir, l’un des Ténéfix se jeta sur le sac de Templar, qui était encore posé par terre, et le tira par la lanière. Le Shaofouine de Sabrina fit ce qu’il put pour tenter de l’arrêter, mais son attaque rata. Je me souvenais que les Pokémons de type combat n’avaient aucune chance face à ceux ayant l’attribut spectre, à moins d’user de techniques spéciales… Et on était assez mal, du coup.

« - Eeeeh ! C’est à nous ! »

Sans réfléchir, je me mettais à courir, fouillant dans mon sac pour trouver la Pokéball que je voulais. Sortir Héraclès ici aurait été une grossière erreur : le Coupenotte étant à la fois brutal et stupide, il n’aurait fait que foncer dans le tas et se perdre dans les nombreux couloirs qui composaient la galerie. J’entendais derrière moi mes deux compagnons qui courraient eux aussi. Et Daniel, il n’avait pas de Pokémon, lui ?! Ah bah ça valait bien le coup de se revendiquer super archéologue aventurier, même pas foutu d’avoir un truc utile ! Je vous jure… Je m’arrêtais à peine une seconde pour tirer la ball de mon sac, relevais la tête… Et là, c’est le drame. Je voyais le Ténéfix portant le sac tourner dans un autre passage, tandis que ses petits camarades étaient bien décidés à nous empêcher de le suivre, se postant tout le long du couloir pour nous bloquer le passage. C’était bien notre veine de tomber sur des Pokémons avec une logique de groupe ! Je sortais Europe, mon plan pour attraper le petit voleur avec ses lianes tombant peu à peu à l’eau. Elle jaugea vite fait la situation et émit une sorte de petit cri que l’on aurait pu traduire par « Oh, c’est pas bon ».

« - Alyx ! Poursuis-le, on va les retenir. » lâcha Sabrina alors que son Shaofouine semblait se concentrer.

Je vis Templar sortir une sorte de vieux fouet, terriblement cliché, alors que la scientifique et son acolyte prenaient une pose de combat. Je me disais qu’elle aurait été à sa place chez les Pyroli, avec quelques années de moins… Ni une ni deux, je montais sur ma Cabriolaine, serrant Cierge contre moi alors que je lui ordonnais de courir dans la masse d’ennemis, en même temps que les trois autres se jetèrent sur eux pour tenter de les empêcher de me suivre. Après quelques petits sauts et des virages négociés de justesse, nous étions à nouveau à la poursuite du chapardeur, qui traînait à toute allure le sac où reposait le joyau. Il était hors de question que je le laisse s’en emparer, et encore moins le dévorer ! Mon honneur était en jeu, là ! Ma réputation auprès des gens, en tant que scientifique, et surtout auprès du vioque qui nous attendait dehors et qui allait sans doute s’arracher les quelques cheveux lui restant en hurlant si on ne lui rapportait pas ce diamant ! La course était rapide, Europe faisant tout ce qu’elle pouvait pour garder le cap. Nous passions par des endroits totalement éclairés par les végétaux lumineux, suivies de zones sombres où seul l’éclat des yeux de notre voleur se faisait voir. Je n’aimais pas l’admettre mais j’étais terrifié. Là, tout seul dans une grotte inconnue aux nombreux passages, à me perdre dans ses couloirs à la poursuite d’un Pokémon que les rumeurs décrivaient comme une créature angoissante qui volait l’esprit des gens fixant ses yeux dans l’ombre… Je baissais la tête contre ma type plante dès que nous passions dans un endroit peu éclairé. Je ne voulais pas perdre mon âme, moi ! Et je n’avais rien pour tout illuminer ! A part Cierge…

Soudain, l’idée me vint. Nous étions dans une grotte remplie de cristaux aux facettes multiples qui réfléchissaient à la perfection la moindre source de lumière. Elle nous semblait évidemment suffisante, mais en réalité, les plantes luisantes étaient peu nombreuses : seulement, leur lumière était réfléchie par les fameux diamants. De plus, les yeux des Ténéfix eux-mêmes en étaient devenus à force de manger des pierres précieuses. Et ils passaient aussi leur temps dans ce manque de lumière, leurs yeux n’étant donc plus habitués aux fortes lueurs. Alors sans aucun doute qu’une lumière beaucoup, beaucoup plus forte pourrait au moins un temps étourdir l’un de ces Pokémons… Ca allait être un test, mais j’espérais que cela marcherait. J’attendais que nous passions dans un coin plus sombre mais que je savais rempli de joyaux pour ordonner à Europe de fermer les yeux sans s’arrêter – elle émit d’ailleurs un petit bruit qui voulait sûrement dire « Hein ? Mais ça va pas ! »  –, et dire à Cierge d’utiliser Flash, alors que je me cachais à nouveau contre la Cabriolaine.

L’effet fut immédiat, et comme je l’avais espéré. La lumière émise par mon Funécire, déjà vive en elle-même, fut multipliée par les faces des diamants, illuminant le couloir rocheux pendant une brève seconde. J’entendais alors un cri de Pokémon et le son d’une chute d’un petit corps, mais aussi du sac. Je demandais à Europe d’attraper ce dernier avec une liane et de me le donner. Je ne m’approcherai même pas en rêve de cette bestiole de l’enfer ! J’ouvrais aussitôt le contenant pour constater, rassuré, que le joyau était là. Et sans traces de dents, s’il vous plait ! Une mission réussie… Enfin presque. Il fallait encore retrouver Sabrina et Templar, et quitter ce lieu. Je rebroussais chemin, essayant de me repérer grâce aux bruits des combats. Ce n’était pas évident, la grotte était grande et les bruits y étaient amplifiés. Je paniquais dès que j’entendais le Ténéfix laissé derrière se relever et courir après nous, suppliant Europe de courir plus vite. Je tiens à mon esprit, à mon corps et à mon cristal, merci.

Nous nous arrêtions en voyant plus loin les deux adultes et le Shaofouine devant un parterre de Pokémons assommés. D’autres encore debout étaient efficacement repoussés avec les moyens du bord. En m’apercevant, et surtout en remarquant le sac dont je serrais fermement la bandoulière passée à mon cou et mon épaule, ils semblèrent soulagés et éjectèrent les quelques Ténéfix restants pour venir à ma rencontre. Et vous savez, dans les films, quand le héros est heureux de retrouver ses coéquipiers après avoir été séparés, et que vous hurlez « Y’EN A ENCORE DERRIERE TOI ! » alors qu’ils sont en train de s’embrasser et se serrer… C’est exactement ce qu’il s’est passé. Je descendais de ma monture pour que nous puissions repartir, quand tout à coup, une main griffue attrapa la lanière du sac et tira dessus, me faisant tomber en arrière avec Cierge dans mes bras. Le Ténéfix déboussolé par Flash plus tôt n’avait pas dit son dernier mot, et était bien décidé à récupérer sa nourriture, quitte à devoir m’étrangler au passage. Je paniquais, essayant de ne pas croiser son regard tout en tirant le plus fort possible sur le sac, essayant de repousser la bête à coups de pied. Daniel et Sabrina durent repousser les renforts qui venaient aider leur camarade, le Shaofouine et Europe faisant ce qu’ils pouvaient pour les empêcher d’approcher, et ce qui me sembla des heures ne dura en réalité que quelques secondes, avant qu’un coup de botte de Templar n’envoie voler mon agresseur plus loin, le séchant définitivement. Non, ce n’est pas bien de taper des Pokémons, mais quand ils essaient de tuer une ravissante princesse… Y’a des exceptions.

« - Ca va ?! Tu n’es pas blessé ?
- Ca… Ca ira, je crois… Mais le diamant ?! »

Nous ouvrions le sac et soupirions de soulagement. Il n’avait pas été abîmé, pas griffé ni dévoré, et attendait aussi sagement qu’un bébé Pokémon dans les bras d’une Infirmière Joëlle. Je me relevais en tremblant, appuyé sur la Cabriolaine, et confiait le sac à l’archéologue, laissant Sabrina rebrousser chemin jusqu’à retrouver les marques que nous avions faites et qui nous indiquaient la sortie. Nos yeux eurent quelques difficultés à s’adapter à la lueur du jour, mais nous étions plus que ravis d’être aveuglés par autre chose que le lichen brillant se reflétant sur des cristaux. Les scientifiques qui s’étaient installés plus loin s’étaient tous assis sur des chaises pliables, autour de tables où reposaient leurs plans et leurs notes, certains riant, d’autres s’inquiétant de ne pas nous voir revenir alors que cela faisait déjà un petit moment que nous étions rentrés. En nous voyant, tous se levèrent pour venir nous demander comment nous nous sentions, mais ils furent tous repoussés par le Docteur Stein, qui n’en avait apparemment rien à faire de notre état, malgré nos regards fatigués, nos respirations haletantes, nos cheveux en bataille et nos habits abîmés.

« - Alors, vous l’avez ?! Le joyau, vous l’avez, n’est-ce pas ? Ou est-ce que vous êtes aussi inutile que les autres gamins qui sont venus avant v-AÏE ! »

Alors que je m’apprêtais à lui dire d’aller effectuer une activité d’adulte impliquant son fondement, Europe me devança et décida que c’était le bon moment pour évacuer le stress général et encorner le postérieur du pseudo-scientifique. Cela suffit à faire lâcher les nerfs de tout le monde, et l’assemblée éclata de rire. J’étais même certain d’en entendre certains chuchoter qu’il n’avait eu que ce qu’il méritait, ce vieux. Templar se décida finalement à se séparer de son sac, en sortant le cristal rose devant lequel chacun s’émerveilla, avant qu’il ne soit bien évidemment arraché de ses mains par Stein qui le porta jusqu’à une petite tente pour l’étudier. Après quelques félicitations et un grand verre d’eau ou deux pour nous et nos Pokémons, je me dirigeais discrètement vers la table où reposaient toutes les notes de recherche du vieux chercheur, et les prenais en photo avec mon iPok. Quoi ? Là au moins, il pourrait se plaindre que quelqu’un a réellement volé son travail !

« - Je t’ai vu. »

Je me retournais et offrais un sourire tout innocent à Daniel, qui préféra en rire, me faisant un petit signe en mettant le doigt devant ses lèvres pour me dire qu’il n’en parlerait à personne. Puis il me complimenta brièvement sur mes choix dans la grotte et mon courage d’aller récupérer l’objet, me confiant qu’il n’avait eu aucun doute sur un élève de la Pokémon Community, puisqu’il y avait envoyé sa fille et que même si les décisions prises par la direction faisaient parfois un peu peur, il était convaincu qu’elles aidaient les élèves à se forger et devenir des adultes accomplis et encore plus efficaces que les précédentes générations.

« - Et maintenant, si on allait manger un morceau tous les trois ? »

Sur le chemin pour repartir du campement, Templar et Sabrina ne cessèrent de me vanter les fantastiques recettes de poisson de la Roche-sur-Gliffe et à quel point j’allais être heureux d’y goûter. J’avais l’impression que la recherche du cristal était déjà finie depuis bien longtemps, et j’étais content de pouvoir repartir de cet endroit. Non sans avoir fait signe à Europe avant, qui donna un coup de sabot dans le piquet de la tente de Stein, la toile blanche s’écroulant sur lui. Ses cris de rage et les rires de l’équipe sonnèrent pour moi comme la douce fin de la mission que l’on m’avait donné et qui, malgré tous les obstacles, avait été menée à bien.