« Voilà déjà deux semaines que le Maire de la ville a été attaqué. Malgré de nombreuses investigations, les Agents n’ont pas été en mesure de retrouver son fidèle Métalosse. Monsieur le Maire repose actuellement dans l’hôpital du Centre-Ville et c’est son adjoint, Urman Troght qui le remplace dans ses fonctions. »
Une chips après l’autre, Cleve engloutissait son paquet dans des froissements incessants, couvrant sa moquette de miettes salées aussitôt récupérées par la langue gloutonne de son fidèle Peppéroni. Allongée à même le sol, ses pieds battaient la mesure et s’élevaient l’un à l’opposé de l’autre, tandis que ses longs cheveux roux trainaient sur le plancher. Sur le ventre telle une misérable otarie, la larve humaine qu’elle était profitait de son premier vendredi soir d’Octobre au cours d’une sorte de pyjama party improvisée avec son amie Ikiala Rosenbach et… c’est tout. Bon en gros, Cleve s’était faite virer de son dortoir parce que ses camarades voulaient faire la fiesta entre elles, et elle avait dû quémander l’aide de la Topdresseuse pour trouver où crécher. Par chance, les camarades de son amie étaient aussi invitées à la fête, ce qui avait permis aux deux rousses de se trouver entre compatriotes de crinière. Elles avaient donc papoté, regardé la télé, et Ikiala était actuellement en train de dormir profondément sur son lit, les cheveux en bataille.
Cleve jeta un petit regard à la spécialiste des Dragons, puis pouffa de rire et recommença à martyriser son paquet de chips. Des mauvaises nouvelles, il y en avait à la pelle ces derniers jours. Vols de Pokémon. Agressions. C’était devenu une véritable foire sur l’île Lansat ! Par chance, ils étaient ici en sécurité. A l’académie, rien ne pouvait vraiment leur arriver outre les tentatives de meurtre répétées de Melty Potts et les entraînements militaires de Jackie. Cleve était certaine qu’elle avait bien moins de risque de se faire agresser par un dangereux criminel que de décéder lors d’une énième Mission loufoque et rocambolesque au cours de laquelle elle se ferait accourser par des Wattouat, ou bouffer par des Tadmorvsans parler de se faire ensevelir sous de la chiasse de Goelise. Elle bailla ouvertement et posa mollement sa tête sur son oreiller de plumes. Il ne pouvait rien leur arriver. Ils étaient bien trop éloignés de tout ça pour que les événements puissent avoir un quelconque impact sur elle. Oui mais, et le Cirque des Boulons ? *N’y pense pas Clevie* souffla une petite voix dans sa tête. *Après tout, tu n’y étais pas, tu te rappelles ? Tant que tu restes dans l’académie, tu seras en sécurité* « Oui mais supposons que ce genre de choses arrivent… » *Elles n’arriveront pas.*
Peppéroni à côté d’elle tomba dans un bruit sourd sur la moquette, et se mit à ronfler bruyamment. Cleve sentait elle aussi ses yeux la picoter dangereusement, et elle remonta les couvertures sur ses épaules. Oui. Après tout, que pouvait-il leur arriver ?
***
Le lendemain, la rousse alla retrouver Amaoka dans le grand hall du bâtiment principal, juste après son petit-déjeuner. Ikiala continuait de roupiller dans son dortoir, et Cleve avait tout bien rangé avant de s’éclipser discrètement pour son entraînement de tir à l’arc matinal. Elle n’y avait cependant pas croisé Amaoka, et avait donc rapidement pris une douche pour le rejoindre à leur lieu de rendez-vous, non sans oublier de passer par la case « douche » et « baba au rhum ». Comme d’ordinaire, le Roi aux yeux hétérochromatiques était ponctuel, et il l’attendait déjà avec un air nonchalamment décontracté. Vêtue d’un t-shirt large aux couleurs pop, d’un slim noir et de baskets, Cleve avait noué ses cheveux en une longue tresse égyptienne tarabiscotée qui raccourcissait ses cheveux et les faisaient tomber au niveau du milieu de son dos. Son visage s’éclaira d’un sourire lorsqu’elle ne fut plus qu’à quelques mètres de son ami, et elle fit les derniers pas en courant, Pep’ sur les talons.
« Coucou Ama ! Comment vas-tu ? Prêt pour la mission ? » demanda-t-elle d’une voix claironnante en tâtonnant dans sa tresse. Avec un petit « Piaa ! », Lem son Statitik sortit de ses cheveux, et elle le cueillit sur son doigt pour le remettre sur son épaule. Pour une fois qu’elle s’était coiffée, il n’allait pas non plus tout défaire ! Mais visiblement, la tique électrique devait trouver ce nouveau terrain de jeu encore plus à son goût, et il disparut dans les tréfonds de sa chevelure rousse dès qu’elle eut relâché son attention.
Depuis leur précédente mission il y avait de cela un mois, Cleve et Amaoka s’étaient revus à plusieurs reprises. Ils ne manquaient jamais une occasion de se saluer et de discuter lorsqu’ils se croisaient dans les couloirs, et ils se retrouvaient parfois aux aurores pour tirer à l’arc dans les bois. Les choses ayant été mises au clair, les deux archers étaient beaucoup plus proches à présent ; plus encore qu’ils ne l’avaient jamais été, d’ailleurs. Même si, comme la Scientifique l’avait remarqué, elle était peut-être encore plus gênée lorsqu’elle lui parlait. Elle n’aurait su l’expliquer… Elle avait l’étrange impression qu’elle était à la fois heureuse et anxieuse lorsqu’elle le voyait. Pourquoi ? Aucune idée. Cleve n’avait jamais brillé par sa vivacité d’esprit, surtout dans des domaines comme les interactions sociales… Pour le moment cependant, elle se contentait de lui tapoter sur l’épaule avec un air de réprimande particulièrement mal joué. « Pas d’entraînement à l’arc ce matin ? Pas bien, tu vas devenir mollasson et finir par devenir un vieux tout flasque comme Riven Ri-» « Comme qui au juste ? »
Cleve se retourna en sursaut. Diantre ! Voilà que le Vice-Directeur en personne se dirigeait vers eux, les mains dans les poches de son pantalon noir Ralph Lauren –il s’habillait forcément là-bas celui-là !-. Sa chevelure blonde peroxydée avait dû être reteinte récemment puisqu’elle brillait avec autant d’éclat qu’à l’ordinaire. Mais pire que tout, c’était son visage inexpressif et sa gueule à faire fuir un Sharpedo qui lui inspirait le plus d’horreur. Avait-il entendu ? Ahaha, évidemment que oui… « N-n-n-n-n-n-n-n-non rien… » baragouina Cleve en faisant plusieurs gestes de la main, comme si cela allait lui permettre de se justifier. Pas impressionné pour le moins du monde, Rivardi haussa les épaules et son Togepi secrétaire leur tendit leur feuille de route avec un regard mauvais. Puis les deux se détournèrent des élèves et repartirent dans leur bureau.
« Heuuu mais attendez ? Vous ne venez pas avec nous ? » commença Cleve malgré la peur qu'il lui inspirait. « Je croyais qu’on devait être accompagnés par un enseignant pour une Mission d’une telle envergure… » -Voyant qu’il se tournait vers elle, elle rougit et regarda fixement ses pieds- « Enfin je veux dire… le professeur Creed qui nous a proposé cette mission avait dit que… il valait mieux qu’on soit… enfin… » couina-t-elle.
« Les règles, c’est moi qui les fait. » trancha le Directeur adjoint. « Enfin, vous n’aurez pas besoin de moi puisque votre voiture vous attend devant le portail de l’école. Amusez-vous bien, donc. Moi je retourne entretenir mon… comment déjà ? Corps vieux et flasque ? » Les commissures de ses lèvres s’élevèrent légèrement comme s’il voulait sourire, mais Cleve n’était pas dupe. Ce type-là ne souriait que lorsqu’il avait une idée sadique derrière la tête. En dehors, c’était une véritable armoire à glace ! Soupirant lorsqu’il se fut éloigné, la rouquine se tourna vers Amaoka. « Bon bah, je suppose qu’on va devoir y aller. » marmonna-t-elle en glissant la feuille de route dans sa poche. « On lira ça dans la voiture ? » Avec l'approbation du Voltali, ils prirent la direction du portail de l'école et laissèrent derrière eux leur chère académie.
***
Au bout de trois minutes de marche, ils furent enfin à bon port et Cleve écarquilla les yeux en voyant l’engin qui les attendait sur le pavé. Une limousine d’une longueur vertigineuse conduite par un chauffeur en costume leur faisait face. Impressionnée, elle grimpa dans le bolide lorsqu’on l’y invita, et s’affala dans les sièges en cuir hors de prix, tout en regardant autour d’elle, surexcitée. Elle n’était jamais montée dans une limousine –et pas souvent dans une voiture, d’ailleurs-, et le spectacle l’enchantait au plus haut point. « Woooh regarde Ama, il y a un mini bar ! » s’exclama-t-elle en passant sa tête dans un mini frigo, tandis que Peppéroni faisait de même avec le mini four à micro-ondes. Amaoka, plus serein –comme à son habitude-, était assis face à elle sans montrer plus d’entrain que de nécessité. Se rendant compte de ce qu’elle était en train de faire, elle rougit un instant et retourna s’assoir sur son siège avant de déplier sa feuille de route.
« Bon alors ! Comme nous l’a dit le professeur Creed, on a une mission de gardes du corps aujourd’hui. Trop cool ! Doooonc, plus précisément, il faudra protéger… oh la vache ! On va devoir assurer la protection du maire adjoint toute la journée ! » -elle se tourna vers son camarade, ébahie- « Wouaaah, je pensais que ce serait juste un petit commerçant local, moi. Et il est dit qu’on va devoir l’accompagner dans son travail aujourd’hui… shopping dans un magasin de luxe pour qu’il se trouve un costume… déjeuner dans un restaurant chic… soin de pieds –yeurk, ça je m’en serai passée-… et puis grande réception dans le plus grand hôtel de la ville ! Ouah tu y crois toi ! On va mettre les pieds dans une soirée mondaine ! Enfin bon, ok, c’est que Lansat donc ce sera forcément pas très huppé mais tout de même ! Tu sais ce que ça veut dire Ama ?qu’on va me filer une robe trop canonIL Y AURA PLEIN DE PETITS FOURS ! »
Cleve était aux anges. Pour elle, il lui suffisait de suivre un vieux crouton toute la journée pour ensuite profiter d’un super banquet à volonté avec flûtes de champagne –bon ok, ils étaient mineurs, ils n’avaient pas le droit… mais le Pechampomy ferait très bien l’affaire !- et surtout, surtout, des PETITS FOURS. Son estomac chantait la sérénade rien que d’y penser. Et puis le déjeuner dans un restaurant de luxe… Ouah. C’était trop !
« Aaaah, c’est autre chose que de devoir s’occuper de Wattouat affamés. » s’extasia-t-elle en s’installant plus confortablement sur la banquette, tandis que la limousine continuait son chemin vers la maison du maire adjoint…
Amaoka était toujours aussi serein aux abords d’une nouvelle mission. Cleve eut un sourire lorsqu’elle le vit, et elle pouffa de rire en voyant le Galvaran et le Nidoran du Topdresseur se chamailler à ses pieds ; enfin, se chamailler était un bien grand mot. C’était surtout Ymir qui courrait après Odin tandis que ce dernier se demandait probablement ce qui se passait, trébuchant parfois sur ses interminables oreilles. Peppéroni aux côtés de la rousse gardait la tête haute et restait immobile, bien décidé à montrer comment un Pokémon digne de ce nom devait se comporter. Il fut cependant distrait par un Papillusion qui passait près de lui et dandina de l’arrière train comme un chiot qui meurt d’envie d’aller jouer. Cleve soupira. Encore une équipe de bras cassés pour une Mission qui ne s’annonçait pas si simple. Par chance, Amaoka était confiant et son calme rassurait la jeune Pokémécanicienne. Ce calme céda bientôt place à la panique lorsqu’elle s’aperçut que Riven Rivardi s’était faufilé sournoisement derrière eux pendant qu’elle était allègrement en train de lui casser du Sucroquin sur le dos. Mazette. Pourquoi les pires situations n’arrivaient qu’à elle ?! Cachée derrière la haute stature de son Lokhlass, la jeune fille acquiesça farouchement de la tête lorsqu’Amaoka demanda au Vice-Directeur si le manque d’accompagnement était bien légal. Enfin… De base, elle n’était pas sûre qu’envoyer des élèves se faire accourser par des Wattouat ou attaquer par des Tadmorv/Goelise/Touristes sauvages était forcément très légal. De même que faire les Gardes du Corps. Ils avaient 15 ans, que diable ! Un peu de logique dans tout ça… mais bon, ces petites Missions leur permettait de gagner un peu de jetons, et finalement, c’était plutôt cool à inscrire sur son C.V. Haussant les épaules, Cleve regarda la blonde peroxydée regagner son bureau, et elle prit la direction du portail principal.
Arrivés devant la voiture qui devait les accompagner jusqu’à bon port, la Givrali fut époustouflée de constater qu’il s’agissait d’une… limousine ! Si elle n’avait pas vu maintes fois ce genre de véhicules dans « Les Feuj de l’Amour » -malheureusement, pour s’intégrer aux Givralis, on devait parfois faire des sacrifices dont les dommages sur le cerveau étaient irrémédiables-, elle n’aurait pas été capable de la reconnaître. On ne voyait pas souvent des voitures à Ecorcia ! Et surtout, les bucherons de sa petite bourgade n’avaient pas pour habitude de monter dans ces voitures. Ce fut donc toute guillerette qu’elle pris place après une inspection poussée du frigo. Peppéroni prenait carrément de la place sur la banquette, mais la limousine était tellement grande que Cleve avait la place de s’assoir confortablement. Amaoka se moqua d’elle lorsqu’elle parla de petits fours, et elle grommela en faisant semblant de bouder. « Gnagnagna, je suis sûre que toi aussi tu vas te jeter dessus. Ce sont des PETITS FOURS après tout ! » déclama-t-elle en levant les yeux au ciel, comme si elle pointait là du doigt une évidence. Elle eut tout de même un sourire et elle attrapa avec un signe de remerciement, le verre que son camarade lui tendait. Sirotant son soda avec une paille qu’elle avait dégotée dans un présentoir en verre, Cleve hocha la tête vigoureusement lorsque le Voltali lui demanda si c’était la première fois qu’elle montait dans une limousine.
« Oui ! Je vis à Ecorcia et là-bas il n’y a pas beaucoup de voitures –alors des limousines, t’imagines !-. Je n’étais montée que deux fois dans des voitures avant… et c’était plutôt des tracteurs pour aller chercher du bois dans la forêt. Ah, et aussi une fois pour que mes parents m’accompagnent jusqu’au Port d’Oliville, sinon le chemin aurait pris des jours à pied ! » expliqua-t-elle, en bonne campagnarde qu’elle était. « Ouah tu en as de la chance ! Tu y es monté à quelle occasion ? » demanda-t-elle finalement, curieuse d’en apprendre plus sur le père d’Amaoka et sur les conditions qui les poussaient à monter dans des limousines. Au final, Cleve se rendit compte qu’elle n’en savait pas beaucoup sur la famille d’Amaoka. De mémoire, elle avait entendu dire qu’il était issu d’une famille assez aisée, mais ils n’avaient jamais abordé ce sujet au cours de leurs conversations. Laissant boire Pep’ et Lem’ dans son verre de soda, Cleve se mura derrière un silence, se replongeant dans la lecture de leur feuille de route. En apparence, ça n’avait pas l’air très difficile. Mais pourquoi appeler des élèves uniquement maintenant, alors que l’agression du maire remontait à plusieurs jours déjà ? Y avait-il des raisons qui poussaient l’homme politique à craindre pour sa sécurité ? Avait-il reçu des lettres de menace ? La rouquine bu une nouvelle gorgée, pensive. Après tout, ils n’avaient pas été appelés pour jouer les détectives. Ils se contenteraient de faire leur boulot sans fouiner partout, et tout irait pour le mieux. Il n’allait rien arriver après tout.
Une dizaine de minutes plus tard et la limousine s’arrêtait devant un grand bâtiment que Cleve reconnu comme étant la mairie. Le chauffeur les invita à descendre et leur présenta avec une courbette ridicule, l’adjoint du maire de Lansat. L’homme était grand, maigre, et son hygiène avait l’air particulièrement douteuse. Une odeur de transpiration âcre et forte s’échappait de ses vêtements, masquée à demie par une eau de Cologne au parfum tellement fort que Pep’ fronça les narines. Il avait des cernes et des poches énormes et ses cheveux étaient clairsemés, comme s’il avait perdu pas mal de touffes ces derniers jours. Sa cravate était nouée de travers, ses vêtements étaient froissés et un seul pan de sa chemise rentrait dans son pantalon. En clair, il avait l’air totalement débraillé, comme s’il s’était vêtu à la va vite le matin même, après une très courte nuit de sommeil. Cleve eut du mal à cacher sa déception. Vu son titre et le programme qu’on leur avait donné, elle s’était attendue à une personne de plus « chic » que ça. Elle eut cependant de la pitié pour cet homme dont les yeux fatigués et fuyants ne cessaient de fureter à droite et à gauche, comme s’il risquait de se faire attaquer à chaque instant.
« Bonjour Monsieur le maire adjoint. » le salua poliment Cleve en lui adressant un sourire timide.
Semblant enfin s’apercevoir de la présence des deux jeunes étudiants, l’homme sursauta et les inspecta du regard quelques secondes, avant d’hocher brièvement la tête en guise de salut. Ouais. Pas très loquace le vioque, pensa Cleve en fronçant les sourcils.
« Vous avez dormi dans votre bureau encore aujourd’hui, Monsieur le maire adjoint ? » demanda le chauffeur en faisant une nouvelle courbette.
* Pas étonnant qu’il soit fagoté comme ça et qu’on soit à la mairie alors qu’on nous avait dit qu’on allait le chercher dans sa maison * pensa Cleve en échangeant un regard avec Peppéroni.
Le maire adjoint acquiesça et monta dans la limousine. Echangeant un regard, Amaoka et Cleve prirent sa suite et s’installèrent côte à côte en face de la banquette occupée par l’homme politique. Le trajet se déroula dans un silence assez tendu, uniquement perturbé par les bruits de mastication de Péppéroni –peu avant de se garer, il avait trouvé des biscuits apéritifs au fromage dans un tiroir et leur faisait la fête comme il se devait-. Au bout d’un moment, le maire adjoint décrocha ses yeux de sa paperasse et jaugea une nouvelle fois les deux dresseurs.
« Je croyais que la Pokémon Community était réputée pour avoir deux personnes ayant fait le service militaire. » finit-il par dire. Cleve pensa immédiatement au Général Jackie et à Deaglàn Cadigan. « Et on m’envoi deux… adolescents… » ajouta-t-il avec un profond air de mépris tandis qu’il jetait les derniers mots. Peppéroni s’étrangla avec son biscuit apéritif et Cleve lui tapota dans le dos. Bonjour crédibilité. Ceci dit, cet homme ne lui faisait pas très bonne impression, et elle ressenti une bouffée d’animosité à son égard. Elle échangea un bref regard avec Amaoka, sans qu’ils n’aient besoin de se parler pour se comprendre. Ils allaient devoir le coller 24h/24 jusqu’à ce qu’il retourne à son domicile après la soirée mondaine. La journée risquait d’être vraiment longue…
Au bout d’une vingtaine de minutes cependant, ils arrivèrent enfin dans la boutique dans laquelle le maire adjoint allait acheter sa tenue du soir. Après avoir observé un instant les vêtements d’Amaoka et de Cleve, il décida de leur prêter pour la journée une chemise blanche et un pantalon noir loués dans une boutique pour une somme assez modique. Vexée qu’on l’ait faite se fringuer autrement, Cleve enfila avec mauvaise foi son chemisier blanc dans la cabine d’essayage tandis qu’Amaoka montait la garde devant la cabine du maire adjoint. Après tout, il fallait forcément que quelqu’un s’occupe de sa sécurité pendant qu’il se changeait ! On ne savait pas ce qui pouvait se passer, et la paranoïa du vieil homme commença à contaminer Cleve également. Sortant la tête de derrière le rideau d’essayage, elle appela Amaoka.
« Psst Ama ! J’ai fini si tu veux enfiler ta chemise. Je vais monter la garde pendant que tu te changes. » dit-elle en montrant sa cabine d’essayage et en levant les yeux au ciel, chose qui montrait clairement qu’elle trouvait cette surveillance excessive ridicule. « Pas de tireur d’élite menaçant en vue ? » ajouta-t-elle en faisant signe vers la porte de la boutique. Puis, apercevant soudainement le vendeur de la boutique glisser sournoisement sa main dans le revers de sa veste de costume, elle bondit comme un chat furieux et le plaqua au sol. L’homme, déboussolé, eut un hoquet de surprise ce qui laissa le temps à la rousse de clouer ses épaules avec ses deux jambes, en beuglant « ATTAQUE ARMEE ATTAQUE ARMEE ATTAQUE AR- » « Mais je voulais juste sortir mon mètre… » se lamenta le vendeur en sortant un rouleau de sa veste. « ATTA- ! Ah heu oh… Ahaha, désolée, je suis un peu tendue… »
Se relevant, Cleve se confondit en excuses sous les ricanements incessants de Peppéroni. Tandis que tous riaient de la scène, personne ne remarqua l’ombre qui rodait devant le magasin, et qui, lorsqu’ils relevèrent les yeux en entendant la clochette tinter, avait déjà disparu.
Dans la limousine, Cleve écoutait avec attention les petites bribes de son passé qu’Amaoka voulait bien lui révéler. Au final, ils n’avaient jamais réellement parlé de leur famille, leur village, et ces vies qu’ils avaient laissées de côté pour venir en démarrer une nouvelle à l’académie. Comme toute Givrali qui se respecte, Cleve était curieuse ; elle voulait en apprendre toujours plus sur Amaoka. Savoir ce qu’il avait vécu avant d’atterrir sur Lansat, pourquoi il avait décidé de recommencer quelque chose ici… savoir également s’il avait eu des amis dans sa ville natale. Et surtout, des amies… La rousse avait du mal à se l’avouer, mais elle pensait parfois aux gens qu’Amaoka avait côtoyés avant elle. Elle ne ressentait pas vraiment de jalousie, mais elle ne pouvait cacher le fait qu’elle était envieuse. Pourquoi ne s’étaient-ils pas rencontrés avant ? Pourquoi avait-il tissé des liens avec d’autres gens avant elle ? Elle soupira sans pour autant oser en demander plus sur le père d’Amaoka. PDG de quelle entreprise ? Pourquoi avait-il parlé au passé ? Elle eut simplement un sourire quant à l’anecdote concernant le whisky. Elle n’avait jamais bu d’alcool, mais elle se souvenait des réactions de certains de ses camarades lors des vacances d’hiver sur la Montagne Willia. Certains en avait profité pour aller tâter du bar, passant outre la vigilance –que dis-je, l’indifférence- de Riven Rivardi, et le résultat n’avait pas été triste. Des élèves qui ne marchaient pas droit, et des filles qui étaient tellement achevées le lendemain matin qu’elles avaient plongé leur tête dans la neige froide telles des autruches dans le but de dessoûler –ce qui entre nous, n’était pas forcément une bonne idée-. Pourtant, ils n’avaient pour la plupart bu qu’un verre ou deux ; mais à cet âge-là, la résistance à la gueule de bois devait être pratiquement nulle. Enfin bon…
Ils parvinrent au bout d’un moment à la Mairie, où l’accueil qu’on leur réserva fut assez froid. Par chance, Linord -le chauffeur de la limousine- avait un humour assez prononcé et était plutôt sympa. Il ne cessait de faire des grimaces à Peppéroni et Cleve par-dessus l’épaule du Maire-adjoint, ce qui faisait beaucoup rire la Givrali. Ils prirent donc la route vers la boutique de vêtements de luxes, et une fois encore, Monsieur le Maire-adjoint fit preuve de tact et de prévenance à leur égard. Haussant les épaules, la rouquine avait enfilé son petit chemisier blanc et était sortie de la cabine pile au moment où Amaoka rangeait son pistolet imaginaire. Pouffant de rire lorsqu’elle prit son tour de garde pour lui laisser l’opportunité de se changer, elle reprit rapidement son sérieux au moment de charger sur le pauvre vendeur qui voulait simplement… dégainer son mètre si on le croyait. Se confondant en excuses, Cleve fit maintes courbettes tandis que Linord et Amaoka se moquaient allègrement d’elle. Faisant mine d’être faussement courroucée, la Givrali tira la langue à son camarade Voltali ; après tout, lui aussi s’était précipité hors de sa cabine pour lui prêter main forte, elle n’avait pas été la seule à avoir son moment de solitude. Ne cessant de se taquiner l’un l’autre –ce qui était tout sauf professionnel-, Cleve et Amaoka suivirent l’homme politique et son chauffeur jusqu’au restaurant. La rousse eut un léger sourire moqueur quant à la remarque de son camarade, et elle ne put qu’approuver ses dires. On aurait dit que le restaurant avait été taillé à même le grand lustre du hall de l’académie ! Des lumières, des spots et des néons partout. La rousse hésitait entre chic à l’extrême ou boîte de nuit. Les deux pouvaient convenir, et la jeune fille plaqua sa main sur sa chevelure pour s’assurer que Lem ne s’était pas déjà fait la malle pour pomper toute l’électricité qui était utilisée à outrance dans cette enseigne. La tique électrique était cependant encore bien accrochée à ses cheveux, mais tant de lumière et d’électricité le rendaient tout euphorique. Il ne cessait de faire des petits bourdonnements comme si ce trop-plein d’énergie l’avait transformé en réveil matin. Peppéroni grimaçait quant à lui, faisant de son mieux pour ne pas renverser les tables qui croulaient sous l’argenterie et des décorations surchargées.
« Vous avez bien de la chance Linord, je vendrai ma salopette pour une paire de lunettes de soleil. » chuchota Cleve au chauffeur, de façon à ce que seuls Amaoka et Linord ne l’entendent.
Le chauffeur esquissa un sourire amusé et réajusta la paire de lunettes de soleil qu’il portait en permanence –*comme dans les films*, songea Cleve avec amusement-.
« Elle est très bien votre salopette Miss Carter. » la taquina-t-il en les accompagnant jusqu’à la table.
Tous quatre prirent place sur une table décorée à outrance, et les serveurs leur apportèrent des menus calligraphiés avec délicatesse. Avant de choisir, le Maire-adjoint se détourna d’eux pour répondre brièvement à un appel téléphonique, et Linord en profita pour leur indiquer que l’académie l’avait prévenu que les frais de mission seraient aux frais de la Pokémon Community, et non pas à ceux des élèves. Rassurés quant à cette information cruciale, les deux étudiants commencèrent à dévorer des yeux leurs menus, bientôt rejoints par le Maire-adjoint. Le nez dans sa carte, Cleve écouta attentivement Amaoka lui conseiller sur des intitulés saugrenus –elle arrivait à en déchiffrer seulement la moitié !- et ils essuyèrent de nouveau une remarque sarcastique de la part du Maire-adjoint. Dieu qu’il était désagréable ! Mais le Topdresseur était loin d’avoir dit son dernier mot, et il lui répondit sur le même ton, avec un brin d’insolence dans la voix. Peppéroni souffla des narines –ce qui indiquait qu’il approuvait sa réaction, dans le cas présent-, et Cleve regarda tour à tour l’homme politique et son ami, en ayant envie de disparaître dans le mur. La situation était extrêmement tendue, et elle s’éclaircit la gorge pour essayer de détendre l’atmosphère.
« Ahaha heuu… Disons que je suis extrêmement allergique aux arachides Ama, je ne peux pas prendre celui-là vu qu’ils indiquent qu’il y en a… Par contre, les Toast de Foie Gras de Carnarticho et sa sauce aux Baies Repoi, avec les Noix de Kokiyas et la purée de Tamato me disent bien… C’est bon ? » demanda-t-elle en essayant de ne pas accorder trop d’attention à Peppéroni qui bavait allègrement sur son pantalon de costume loué, la tête sur ses genoux comme un chien. Suivant les conseils du Voltali, elle finit par prendre un plat qu’il avait déjà goûté et qui ne contenait pas de cacahuètes, et ils attendirent patiemment qu’on vienne leur servir. Pendant ce temps, le Maire-adjoint croisa une autre personnalité importante de l’île, et après avoir brièvement dialogué, il décida de changer de table pour pouvoir passer son repas en plus « charmante » compagnie. Il resta cependant à deux tables seulement de ses gardes du corps, de façon à ce qu’ils puissent intervenir à tout moment. Ce court moment de répit ne fut pas malvenu, et Cleve pu se détendre. Avec Linord, Pep et Amaoka, le repas allait être bien plus agréable ! Ils commencèrent donc à papoter joyeusement, piochant dans leurs assiettes par intermittence. Le repas était succulent et Cleve ne regretta pas son choix. C’était la première fois qu’elle mangeait des mets aussi délicieux, et le dressage des assiettes était à tomber par terre ! Elle apprécia tout particulièrement les sortes d’arabesques dessinées sur le coin des assiettes à la crème de vinaigre de baie Remu, et elle consentit à partager un peu de chaque plat avec son goinfre de Lokhlass. Ils discutèrent ensuite de la soirée qui allait se tenir dans quelques heures seulement –juste après le soin de pied si l’on en croyait l’emploi du temps-, et Linord en profita pour les taquiner tous les deux.
« Il y a une tradition, les jeunes. » dit-il entre deux bouchées de Steak de Tauros. « Les gardes du corps doivent TOUJOURS ouvrir le bal. Ou alors avoir au moins une danse devant tous les invités. Ça permet aux hommes politiques de frimer, en gros. Comme des exhibitions d’esclaves –sans vouloir vous offenser-. Vous verrez que vous ne serez pas les seuls, et qu’ils vont vous tanner pour que vous fassiez quelques pas de valse ou de tango. Vous savez danser la valse ou le tango au moins, non ? »
Cleve eut un air scandalisé et elle commença à chercher frénétiquement sur son iPok des tutoriels pour apprendre à exécuter l’une ou l’autre de ces deux danses, sans se rendre compte du fait que Linord se moquait clairement d’eux. Evidemment, il n’y avait pas pareille tradition. Et d’ailleurs, ils seraient sans doute les seuls gardes du corps de la soirée ! Après tout on était sur Lansat, pas dans un film d’action quelconque. Ils bavardèrent encore un peu jusqu’à ce que les assiettes soient complètement vides. Après avoir pris un dernier dessert –une Panna Cota à base de Baie Willia avec coulis de Framby qui était à tomber par terre-, ils sortirent enfin du restaurant –Cleve et Amaoka furent rassurés d’avoir la confirmation par le gérant qui prenait la note, que l’académie avait déjà réglé les soucis d’argent- puis remontèrent dans la limousine, direction le soin des pieds. Ils parvinrent dans l’institut de beauté deux heures plus tard –diantre que c’était loin pour pas grand-chose-, et ils durent accompagner le Maire-adjoint dans ses petites séances de bien-être, ce qui comprenait des massages –dieu merci, il avait une serviette autour de la taille, mais Cleve continuera de dire plusieurs mois après que ce fut le spectacle le plus choquant auquel elle ait assisté-, soins de pieds –avec des petits Ptitard qui venaient manger les peaux mortes, ce qui devait chatouiller horriblement-, et soin du corps en général, avec Aromathérapie de Pokémon Plante tels que des Roselia. Les soins durèrent plus de quatre heures et Amaoka et Cleve commençaient à trouver le temps fichtrement long. La rousse soupira plusieurs fois au cours de la séance, et elle levait les yeux en l’air.
« On s’ennuiiiiiiie… » marmonna Cleve tandis qu’un Altaria chantait une belle mélodie pour endormir le Maire-adjoint et lui faire retrouver un peu du sommeil qu’il n’avait pas eu cette nuit. « Au moins dans la précédente Mission, on avait pas le temps de se poser un instant. » Elle eut un sourire au souvenir de cette journée particulière où les Wattouat leur avaient clairement mené la vie dure. « Mais au moins on est tous les deux, ça fait passer le temps un peu plus vite. » ajouta-t-elle alors à demi-mot, en rougissant jusqu’aux racines de ses cheveux roux. Qu’est ce qui lui avait pris de dire un truc pareil ? Pourquoi même y avait-elle pensé ? Perdue dans ses pensées, elle sursauta lorsqu’elle vit un homme avec une capuche sur la tête passer devant la fenêtre sur laquelle donnait leur salle de repos –avec vue sur la mer, ce qui apaisait sûrement les clients-, et elle attrapa la main d’Amaoka sans réfléchir.
« Tu n’as pas l’impression d’avoir déjà vu ce type plus tôt dans la journée ? » demanda-t-elle au Voltali. Mais le temps qu’il tourne également les yeux vers la fenêtre, la silhouette avait déjà disparu. Etait-ce seulement une fausse impression ou avaient-ils réellement déjà vu ce type quelque part ? Cleve eut un frisson qui lui parcourut l’échine. Cette mission était-elle aussi anodine qu’elle n’y paraissait ?
Le restaurant était vraiment agréable, une fois qu’on s’était accommodé à la luminosité atroce et à la musique classique de fond –sérieusement, qui faisait encore ça de nos jours ?!-. Cleve engloutissait ses plats avec appétit, et Peppéroni ne cessait de la pousser du bout de son museau arrondi pour avoir une fourchette de ci ou de ça. Par chance, Lem était un peu moins vorace, et il se contentait de circuler sur la table du déjeuner en piquant du jus sur les lampes –allumées en pleine journée !- et les sortes de guirlandes lumineuses sophistiquées qui décoraient les nappes. L’annonce de la danse agita grandement la tablée, et la plupart des personnes présentes se tournèrent vers le trio d’un air courroucé, marmonnant des sermons envers les « jeunes de nos jours ». Amaoka avait recraché la moitié de son verre d’eau par les narines, mais Cleve était trop choquée par la danse du soir qu’elle n’y prêta même pas garde. Peppéroni, qui commençait à apprécier Amaoka depuis le temps –heureusement, cela faisait quand même un an qu’il l’avait vu pour la première fois-, lui tapota gentiment dans le dos avec sa nageoire. Cleve ressassait donc encore sa panique lorsqu’ils montèrent dans la limousine pour une longue balade, mais la vision du centre de soin lui fit oublier ses soucis actuels. Elle redoutait les soins de pieds du Maire adjoint encore plus que le tango avec Amaoka ! Enfin peut-être pas, finalement… Elle ne savait pas danser. Elle serait forcément ridicule si elle s’essayait à quelques pas lors d’une soirée mondaine devant tout un tas de personnalités de l’île ! Et après ce fiasco, impossible de trouver un travail, elle en était persuadée… Mais actuellement, elle n’avait pas la tête à y penser, et, assise sur un banc aux côtés d’Amaoka, elle surveillait le Maire adjoint en train de se faire masser par des Pokémon aux gestes graciles.
L’après-midi fut ennuyeuse, mais les commentaires du Voltali par moments faisaient rire la Pokémécanicienne. « Et dans les oreilles. » répondit-elle en chuchotant puisque Linord était à côté d’eux –même si, en toute franchise, le chauffeur de limousine les écoutait avec un petit sourire en coin, comme s’il se retenait d’éclater de rire-. Elle pouffa silencieusement en continuant d’observer la silhouette endormie du Maire adjoint ; reposé, il avait presque l’air moins hautain. La remarque suivante d’Amaoka et sa main sur le haut de sa tête la firent cependant rougir, et elle baissa la tête pour que ses mèches viennent camoufler ses joues écarlates. Elle avait une tresse ce jour-là et ne put donc pas disparaître totalement derrière son rideau de cheveux, mais le Voltali eut assez de tact pour détourner les yeux et faire autre chose. Avait-il remarqué ou était-ce une pure coïncidence ? Cleve se posait un tas de questions jusqu’à ce qu’elle surprenne l’homme devant la fenêtre. Son sursaut ne passa pas inaperçu, mais Amaoka et Linord ne captèrent pas ce qu’elle venait de voir. Elle était effrayée, c’était le cas de le dire. Etait-elle trop paranoïaque ? Ou y avait-il quelqu’un qui rôdait autour d’eux ? Amaoka la taquina et lui toucha l’épaule, ce qui la rassura un peu. Oui. Elle devait rêver, ça ne pouvait pas être autre chose, voyons. Le Topdresseur avait raison. Les vapeurs et les fragrances devaient lui monter à la tête. Derrière un nuage de brume, tout paraissait plus effrayant ; elle s’était simplement trop laissée bercer par les soins des Roselia et avait eu une absence, c’était tout.
Après la sieste du Maire adjoint –qu’Amaoka s’était fait un plaisir de réveiller-, ils prirent de nouveau la route pour une boutique de vêtements de luxes. Comme toujours, l’homme politique était désagréable au possible, et il balança une nouvelle pique aux deux étudiants. Cleve haussa les épaules, suivie de près par Peppéroni. Elle passa sa main sur l’encolure de l’immense Pokémon Transport dans le but de le calmer, car vu la tête qu’il tirait, il aurait certainement gobé entier le Maire adjoint. Elle eut un léger sourire à cette pensée ; le Maire adjoint, englouti à demi par Pep’. Elle continuait encore de rire lorsqu’ils arrivèrent dans la boutique, mais perdit immédiatement son sourire lorsqu’on parla de lui prêter une… robe ?!!
Attendez attendez attendez. Cleve Carter ne portait PAS de robes. Ou alors ça se serait su, mais ce n’était pas son genre, voyons. Où allait-elle accrocher ses clés et ses tournevis, si elle n’avait pas de ceinture ? Et puis même, où mettre ses Pokéballs ?! Un peu tendue, la rousse se tourna vers Amaoka, une expression de détresse sur le visage. La blague de son ami ne parvint même pas à la détendre, et elle le regarda en essayant de lui lancer des signaux HELP HELP HELP tandis que la vendeuse l’entraînait dans une cabine d’essayage par le bras. Pour un peu, elle se serait accrochée au rideau par les griffes, mais la poigne de fer de la dame de la boutique l’en dissuada –la vache, elle était fichue comme un Mackogneur celle-là ! Sûr qu’elle aurait pu rivaliser au bras de fer avec Jackie !-. Avec un regard expert, la femme jaugea Cleve et la fit tourner plusieurs fois sur elle-même en tâtant son ventre et ses bras pour en sonder l’épaisseur. Puis, après avoir farfouillé dans ses étalages, elle sortit une belle robe sur cintre qu’elle tendit à la rousse.
Hébétée, Cleve regarda le vêtement et ses yeux emplis d’interrogations firent passer un message clair à la vendeuse : Comment diantre cette chose-là s’enfilait ?!
Prise de pitié, la vendeuse l’aida à passer sa robe. Elle lui remonta la fermeture, arrangea vaguement ses cheveux puis, estimant qu’une tresse n’irait pas avec la tenue, elle lui détacha les cheveux et les lui ramena sur l’épaule. Le résultat était surprenant, mais Cleve ne se reconnaissait pas dans ce reflet qui la regardait d’un air ahuris. Ses longs cheveux qui s’arrêtaient au niveau du bas de son dos en règle générale, étaient remontés jusqu’au milieu de son dos car ils avaient bouclés à cause de sa tresse. Une élégante robe noire avec un décolleté droit en dentelle affinait sa silhouette, et la coupe juste au niveau de ses genoux avec quelques froufrous vaporeux lui donnaient l’air d’une danseuse. Les bretelles, fines et noires, étaient brodées de quelques perles argentées. Pour autant, la robe convenait parfaitement à une fille de son âge, sans être trop sophistiqué. Elle n’avait pas la prétention d’être devenue un véritable canon de beauté avec cette robe. Mais elle était mignonne dedans, il fallait l’avouer. Pour une fois, elle se trouva jolie. Ses grands yeux ambrés s’accordaient avec les teintes sobres de la robe, et on lui donna même une paire de chaussures à talons de très petite taille –elle n’avait que 15 ans, que diable !- pour parachever le tout. On aurait dit une véritable gosse de riche, affublée ainsi !
Gênée au possible, Cleve sortit de la cabine et alla rejoindre Amaoka et les deux autres hommes. Elle capta un instant le regard d’Amaoka, mais, sans qu’il n’ait pu lui dire un mot, ils furent forcés de retourner dans la limousine. Elle avait cependant eu le temps d’apercevoir la tenue de soirée de son camarade, et elle ramena nerveusement ses cheveux d’un côté de son épaule. Elle était paniquée, il n’y avait pas à épiloguer là-dessus. Le Voltali était magnifique ; il paraissait tellement à l’aise habillé ainsi, qu’elle se faisait vraiment l’impression d’être une campagnarde.
* Cleve la campagnarde ne devrait pas porter de robe… * marmonna-t-elle pour elle-même, tandis que Peppéroni mâchonnait le haut de son crâne, intrigué par ces drôles de bouclettes.
Puis, après un trajet silence qui parut une éternité, ils parvinrent à la salle de fête. Cleve resta près d’Amaoka, suivie toujours par son fidèle Peppéroni, et ensemble, ils collèrent au Maire adjoint comme les bons gardes du corps qu’ils étaient. La soirée était à l’image de tout ce qu’ils avaient pu voir au cours de la journée ; excessivement décorée et surchargée d’objets inutiles. Il y avait des gens en robes et en costume partout, et ils riaient en buvant des flûtes de Champagne et en se gavant de… « Des petits fouuuurs ! » souffla Cleve à Amaoka en lorgnant les plateaux que transportaient des serveurs.
Ils avaient énormément mangé le midi, mais la vue des petits fours la firent saliver. Cependant, elle se rappelait également d’une remarque de Linord, et elle se tourna timidement vers Amaoka.
« Heuuu… Je suppose qu’il va falloir qu’on danse avant d’avoir droit à des petits fours. Alors heu… Comment on dit déjà ? Ah, oui. Veux-tu être mon cavalier ? » couina-t-elle en donnant une main au Voltali.
Malaise. Malaise intense. Jamais Cleve ne s’était sentie aussi observée et jugée par les gens qui l’entouraient. Les regards s’étaient tournés vers elle tandis qu’elle tendait sa petite main fragile à Amaoka. Cette silhouette si gracile et pourtant si étrange ainsi vêtue ; exit les salopettes de bricoleuse, la robe était de mise. Elle ne s’était jamais sentie mise aussi à nue ; cette robe n’était-elle pas trop courte ? Ne risquait-on pas de voir ses sous-vêtements ? Elle tira nerveusement sur le rebord de froufrous, et réajusta ses bretelles de perles argentées. Ses cheveux se baladaient nerveusement et courraient le long de son dos, indisciplinés. Ces boucles si étranges qu’elle arborait la rendaient encore plus bizarre ; différente. Elle essaya d’esquisser un sourire, mais sa mâchoire était étrangement crispée. Elle sentait Peppéroni la regarder, la gueule dans le plateau de petits fours –le bougre n’avait pas besoin de danser la valse pour pouvoir se servir allègrement, chanceux qu’il était !-. Amaoka était face à elle, et ses yeux hétérochromatiques étaient inexpressifs. A quoi pensait-il ? Et puis, sans un signe avant-coureur, l’expression du Voltali se radoucit. Un sourire se dessina sur ses lèvres, et il lui prit la main doucement. Leurs doigts se rencontrèrent et s’imbriquèrent, comme s’ils avaient toujours fait cela. Etroitement serrés, ils transmettaient à leurs possesseurs respectifs diverses informations. La température de leurs mains en indiquait long ; ils étaient paniqués, stressés, nerveux. Et pour autant, cette petite sensation électrisante n’était pas désagréable. Cleve se surpris à rougir encore plus. Mais elle parvint à hocher la tête doucement lorsqu’Amaoka l’encouragea avec les petits fours, sans pour autant le regarder dans les yeux.
Et puis, sans se soucier du monde autour d’eux, ils se dirigèrent sur la piste de danse.
Les couleurs et les sons semblaient s’être éteints brusquement. Cleve ne pensait qu’à Amaoka, ne voyait que lui ; Etait-ce une chose étrange ? Elle-même n’aurait su le dire, mais elle se laissa guider par les mains de son camarade. Elle acquiesça lorsqu’il lui souffla de lui faire confiance, et elle ferma les yeux un instant. Puis, la musique s’éleva dans ses oreilles, doux carillon apaisant, et elle se sentit tirée en avant par le jeune garçon. Ses pas suivirent ceux d’Amaoka. Il savait la guider et la rassurer ; le contact de ses doigts lui disait de ne pas s’inquiéter, tandis que ses paumes l’entraînaient. Cleve sentit une main glisser sur sa hanche, et elle frissonna ; comme si elle était en train de faire et de vivre quelque chose d’interdit. Pour autant, sa robe virevoltait au rythme des pas de l’archer, et ses pieds parvenaient à suivre la cadence de mieux en mieux. Loin de se débrouiller comme une véritable danseuse, la rousse arrivait quand même à ne pas écraser trop copieusement les chaussures de son partenaire. Elle fit un pas sur le côté, tournoya, se laissa guider par Amaoka, et parvint à esquisser un sourire. A présent qu’elle faisait abstraction de ce qui l’entourait, elle se sentait sereine. Le moment était agréable, plaisant, et elle se risqua à poser légèrement son front sur l’épaule de son ami. Puis, comme si brusquement le monde s’était écroulé, la musique s’arrêta, et les lumières se rallumèrent autour d’elle.
Elle voyait à présent la centaine de paires d’yeux qui la jaugeaient. Certains convives avaient des sourires attendris, tandis que d’autres étaient légèrement réprobateurs. Surpris, pour la plupart. Le maire adjoint était quand à lui assez pincé qu’on ne s’occupe pas de sa sécurité, ce qui pouvait être compréhensible. Mais Linord n’avait-il pas dit que cette mascarade était de mise ? Que l’homme politique en serait fier ? « Tu veux dire… qu’il s’est moqué de nous ? » demanda Cleve la bouche pendante, tandis qu’Amaoka regardait ailleurs. Un rire s’échappa des lèvres du Voltali, et la rousse se surpris à faire de même. Ils étaient tellement naïfs ! Les larmes aux yeux, Cleve tendit la main vers Peppéroni qui revenait vers elle en trottinant joyeusement. Pendant ce temps, Ama était parti chercher des petits fours, et elle attendit patiemment qu’il revienne avec son plateau, ravie de pouvoir enfin goûter à ces petites douceurs. Le temps ne fut pas long, et bientôt, le jeune garçon lui présenta une assiette couverte de mets qui avaient l’air plus délicieux les uns que les autres. Bon prince qu’il était, le Roi en proposa un à Pep’ qui le goba avidement, le recouvrant au passage d’une bonne dose de bave. Hilare, Cleve approcha sa main du plateau tout en écoutant les commentaires d’Amaoka… qui s’arrêtèrent brusquement.
« Hm ? » demanda-t-elle en penchant la tête sur le côté, un sourire au lèvre, la main figée dans le vide. Puis, suivant la direction qu’indiquait son ami, elle le vit. Cet homme. Emmitouflé dans ses habits noirs, un masque blanc sur le nez. Le sang de Cleve ne fit qu’un tour. Elle l’avait vu, ce type-là. Roder près du Centre de Soins. Et puis, à mieux y repenser, également dans le restaurant, et dans la rue lorsqu’ils se dirigeaient vers les tailleurs du Maire adjoint. Que faisait-il ici ? On n’était pourtant pas dans une soirée déguisée. Décidemment, son comportement était louche, et Amaoka en pensait de même. « Je… je ne sais pas… oui, on devrait retourner le voir, on ne sait jamais… » murmura Cleve en se mordillant l’index et en marchant directement d’un pas assuré vers l’homme politique. Ils n’étaient plus qu’à quelques mètres du maire adjoint lorsque l’inconnu déboula brusquement vers eux. Amaoka l’appela aussitôt, et il se tourna vers les deux adolescents, ses yeux inexpressifs cachés par son masque de Venise.
Interdite, Cleve observa l’échange entre Amaoka et l’inconnu, puis elle se figea lorsque ce dernier porta la main à sa ceinture. Il n’allait quand même pas… devant tous ces gens !
Vif comme l’éclair, Ymir revint auprès de son maître, tandis que les deux Pokéballs de l’inconnu volaient dans leur direction. Peppéroni s’était interposé entre sa petite humaine et les Pokémon adverses, mais il recula d’un pas en grognant lorsque dans un éclair de lumière apparurent un Elekable et un Alakazam. Ce type savait ce qu’il faisait ! Il avait délibérément appelé deux Pokémon qui avaient l’avantage face au Lokhlass et au Nidoran. Dans le but de rattraper le coup, la Pokémécanicienne fit reculer Peppéroni et appela Curly.
Le petit chaton psychique se matérialisa face aux deux opposants. Face aux deux immenses Pokémon adverses, l’équipe formée par les Pokémon d’Amaoka et Cleve faisait pâle figure. Mais ils n’avaient pas le choix… Après tout, du côté de Cleve, il n’y avait que Biske et Pep’ qui étaient bons en combat et faisaient une taille assez imposante. Cependant, ils seraient totalement inefficaces face à cet Elekable ! Il n’était même pas utile de songer à Lem et Ritsu ; les deux étaient encore trop petits, trop jeunes pour pouvoir mener un véritable combat. Cherryl était aussi imprévisible qu’il avait un mauvais caractère ; Cleve risquait de créer bien plus de dégâts qu’autre chose. Restait donc Curly, son minuscule Psystigri, qui était pourtant un combattant hors pair. Il l’avait déjà montré à de nombreuses reprises, et il se dressa courageusement face à ses opposants, attendant les ordres de sa dresseuse.
Derrière eux, le maire adjoint avait rejoint Linord et il se cachait derrière lui, tremblant des pieds à la tête. « Faites quelque chose bon sang ! » cria-t-il à ses deux gardes du corps, tandis que la foule s’était écartée, prise de panique. « Pep’, protège le Maire adjoint ! » demanda Cleve à son colosse de glace. Aussitôt, celui-ci érigea une barrière de givre entre l’homme et ses gardes du corps. Face à l’inconnu, il y avait donc Ymir et Curl, puis Amaoka et Cleve, et enfin, cet immense bouclier étincelant. L’inconnu ne semblait pas s’attendre à ça, et il siffla d’un air vaguement impressionné.
« Il vaut mieux que Curl s’occupe de l’Alakazam… Ymir ne serait pas à son avantage… » souffla Cleve à son camarade, avant de réfléchir au premier assaut. Un rapide coup d’œil autour d’elle lui donna une indication de tout ce qu’elle pourrait utiliser dans cette salle de réception. Le combat allait commencer… Elle n’avait jamais fait de double avec un autre dresseur, aussi préféra-t-elle se concentrer sur un seul des Pokémon adverses, en espérant qu’Amaoka ferait de même. Deux combats simples au lieu d’un double, en somme ! Mais les deux étudiants n’étaient pas assez expérimentés et coordonnés pour combattre réellement comme une équipe. Allaient-ils s’en sortir malgré tout ?
« Curl, utilise Choc Mental sur les chaises ! » cria-t-elle à son Psystigri, qui releva aussitôt ses oreilles pour déclencher son pouvoir psychique. Immédiatement, les chaises et plateaux se mirent à léviter et à déferler sur l’Alakazam, qui mis sa main devant lui et parvint à arrêter l’attaque. Puis, en agitant sa seconde cuillère, il renvoya une Rafale Psy sur le Psystigri. « Mur Lumière ! » lui intima Cleve. « Puis contre-attaque avec Implore et Voix Enjôleuse ! »
Le Mur Lumière s’éleva au dernier moment, atténuant la puissance de l’attaque Rafale Psy. Cleve et Curl furent cependant poussés vers l’arrière, comme s’ils luttaient contre une bourrasque de vent. Aucun dégât grave n’était à signaler, et le petit Psystigri pu contre-attaque. Grâce à Implore, il parvint à s’emparer de la Cuillertordu de l’Alakazam. Ainsi, le boost de puissance du Pokémon adverse fut neutralisé, et Curl avait maintenant un avantage dans la main. Déclenchant Voix Enjôleuse, il frappa de plein fouet l’Alakazam qui grimaça de douleur.
A ses côtés, Cleve entendait Amaoka donner ses indications également. L’Elekable et le Nidoran paraissaient avoir des puissances qui s’équilibraient malgré leur différence de gabarit. Quoi qu’il en soit, il était difficile à l’inconnu de gérer deux combats à lui seul, et Cleve était bien décidée à tirer parti de cet avantage. Ordonnant une nouvelle attaque Choc Mental, elle fit pleuvoir des chaises sur l’Alakazam, et le Pokémon jaune disparu sous une pluie de gravas et de poussières. Esquissant un sourire, Cleve cru un instant avoir l’avantage, mais elle aurait dû se douter que ça paraissait trop facile. Cet homme était quelqu’un d’expérimenté et de bien plus fort qu’eux deux ; elle aurait dû le savoir, et pourtant, elle fut surprise par l’assaut suivant. Comme dans un film au ralenti, elle sentit une ombre sur sa gauche, et elle tourna la tête, les yeux écarquillés. Elle entendit à peine la mise en garde que lui hurlait Linord. Elle était tellement absorbée par le combat qu’elle n’avait même pas vu que l’inconnu avait sorti un troisième Pokémon. Un immense Métalosse dont le poing métallique s’élevait au-dessus de sa silhouette frêle.
Peppéroni ouvrit la gueule, mais il était trop loin et trop occupé à protéger le Maire adjoint ; il ne put rien faire. Curly, qui avait entendu le cri de Linord, se retourna juste à temps pour voir sa dresseuse valser à une vitesse fulgurante à l’autre bout de la pièce. Son corps fin fut projeté et elle glissa sur plusieurs mètres, renversant chaises et Pokémon des convives au passage. Des femmes hurlèrent tandis que la petite rousse était inerte sur le sol, la joue tuméfiée, en sang. Curly se précipita vers elle, mais l’Alakazam qui avait lancé Abri pour se protéger des projections de mobilier réapparut brusquement derrière les décombres de bois. Profitant de toute la poussière déplacée par l’attaque du Psystigri, il le prit par surprise et lui lança une Coupe Psycho. La rafale psychique transperça la chair, et une entaille profonde apparut sur le corps de Curly. Il eut un air surpris, et porta ses pattes sur sa fourrure tâchée de sang. Aussitôt, une nouvelle vague de chaises et de tables s’abattit sur lui, et il fut projeté au loin, tout comme sa dresseuse. Il tomba évanoui sous le choc, et Peppéroni se précipita vers ses deux amis pour les protéger contre l’inconnu.
Cleve ne savait pas ce qui se passait autour d’elle. Elle ne voyait plus rien, et entendait un mélange de bruits confus. Amaoka était-il encore dans la partie ? Elle ne le savait pas, mais tout son corps était douloureux.
« Et une de moins… » entendit-elle de la voix rauque de l’inconnu, suivi par un rire tonitruant et dément. Ces notes agressives lui vrillèrent les tympans, et elle parvint à bouger quelques doigts. Bordel que ça faisait mal ! Elle en aurait pleuré de douleur si elle avait pu esquisser ne serai-ce qu’un geste de plus. Mais, comme si sa conscience s’évaporait progressivement de son corps affaibli, Cleve se sentit partir. Dans sa tête, elle appelait Peppéroni et Curly, mais aucun son ne franchit ses lèvres. Curly… Que lui était-il arrivé ? Elle avait cru entendre le cri de son Pokémon… Qu’avait-elle fait ? Pourquoi avait-elle accepté cette mission, et l’avait-elle tant prise à la légère ? La douleur physique n’était rien comparée à tous les remords qu’elle avait. Dans sa chevelure, elle entendit Lem s’agiter et essayer de la faire se relever en posant ses petites pattes velues sur sa nuque. La tique électrique l’appela plusieurs fois dans son jargon Pokémon, la voix presque suppliante. Mais il n’y avait plus rien à faire. Elle avait perdu. Et dans sa chute, elle avait entraîné ses Pokémon. Elle était impuissante. Maintenant, elle n’était plus rien.