L'air frais lui faisait le plus grand bien et la tendresse de l'iode lui chavirait le cœur tandis que ses mains moites tenaient toujours plus fort les écailles de Sheitan.
Cela allait devenir une habitude, à force.
Le Léviator se mit à hurler tandis que l'ombre du Ronflex dont la rousse devait s'occuper aujourd'hui se profilait sur les rives, attendant les consignes sous l’œil bienveillant de Karma et de Chayana.
Et Salomé, elle, avait l'esprit tantôt sur Adala, tantôt auprès de Maya.
Les notes marines ne parvenaient pas à lui ôter les paroles de Cobal de son crâne, et cet espoir offert la bouffait alors que la journée n'était pas même terminée.
Qu'en serait-il de demain ? Et des jours suivants ?
Elle laissa son front reposer contre le corps serpentin du titan des mers, sans même lever la tête face à son cri qui n'en finissait pas de lui vriller les tympans, la hantant pendant de longues secondes encore après avoir mis pied à terre.
Sans réfléchir, elle attrapa son iPok, essayant de mettre au service du Ronflex de Paul les quelques compétences médicales qu'elle possédait.
Mais on savait tous bien comment cela allait finir, encore une fois ; Chayana et Karma qui feraient tout le travail avec la rousse en simple spectatrice, aujourd'hui plus que jamais.
Le ressac vint chatouiller les pattes du Ronflex, lui un peu trop penché vers la mer, lui riant face à l'immensité de l'eau et la pâleur de son écume qu'il tentait de saisir à l'aide de ses pattes malhabiles.
La Macronium leva les yeux au ciel tandis que ceux de la gitane dérivés obstinément vers l'écran de l'iPok, s'arrêtant enfin pour lire différentes informations entourant tour à tour les attaques Damoclès puis Malédiction.
Elle redressa enfin la tête, souhaitant commencer par ce qui lui semblait le plus aisé.
— Damoclès, c'est dans le même genre que Plaquage, non ? Fais celui-là en premier, Chayana. T'auras qu'à t'occuper de Malédiction, Karma.Le Kungfouine approuva d'un vif hochement de tête avant de s'asseoir auprès de Salomé qui étendait ses jambes dans le sable froid en ce mois de février. Elle l'observa, se rappelant qu'un peu plus tôt, Aoi était à sa place.
D'instinct, elle caressa l'absence signalée par la Griffe Rasoir depuis quelques heures déjà, croisant l'horizon de ses prunelles carmin pour n'y rencontrer que le soleil qui l'éblouissait un peu plus à chaque seconde.
Elle se contentait d'observer, comme à son accoutumée, la pédagogie mise en place par son assistante chromatique qui prenait peu à peu sa place, qui l'avait toujours prise, laissant la Macronium courir à gauche puis à droite, elle en contraste total débordant d'énergie face à un Ronflex amorphe et lent au possible.
Le voilà qui donnait de puissants coups d'épaules contre les arbres égarés, les déracinant ici et là, sûrement conformément aux instructions de son professeure du jour ; la Macronium aurait-elle eu une Défense suffisante pour résister aux assauts répétés du Pokemon du Stratège ? Salomé préférait ignorer la réponse à cette question, aussi les laissait-elle déraciner hêtres et chênes sans se soucier de l'écosystème, avec seulement des sourcils froncés et bras croisés de Karma pour tout commentaire.
La suite, elle la connaissait ; ce n'était qu'une question de temps avant que Chayan n'attire son attention pour lui signaler que le Ronflex maîtrisait désormais une nouvelle capacité, faisant ainsi la fierté de son dresseur et affirmant un peu plus la réputation de Salomé dans le domaine médical à l'académie.
Comme toujours, ça ne manqua pas mais nul applaudissement aujourd'hui, juste Karma qui se préparait à entrer en piste pour tordre le cou à Malédiction.
Car Salomé n'avait aucune diable idée de sa manière de procéder.
Elle se redressa quelque peu, attisée par la curiosité plus que par l'ennui et le poids trop lourd de Maya.
Le Kungfuine se mit face au Ronflex, le saluant brièvement avant de finalement reprendre sa position précédente, assis, yeux fermés, comme pour l'une ou l'autre de ses méditations, non sans avoir invité le type Normal à l'imiter.
La terre trembla brièvement tandis que tout le poids du monde semblait s'être abattu sur le sol, soulevant Algernon qui grattait les cailloux de quelques centimètres à peine, battant frénétiquement des ailes sous la surprise pour finalement opter pour la voie des airs plutôt que celle de la terre, moins dangereuse au vu de des circonstances, sûrement.
Puis merde, pourquoi pas ? C'était une manière de procéder comme une autre, qui porterait sûrement ses fruits à terme. Il n'y avait plus qu'à espérer que le Ronflex maîtrise Malédiction avant de s'endormir, pari risqué alors que la somnolence le gagnait peu à peu pendant que Karma rôdait autour de lui pour le maintenir éveillé par intervalles réguliers.
Encore une histoire de concentration, hein ?
Elle étouffa un bâillement tandis que l'envie de rentrer la gagnait, espérant que le Kungfouine en finirait vite pour pouvoir oublier au mieux cette Saint-Valentin.
Il n'y avait que Maya pour l'égayer et ça aussi, ça lui était refusé, aujourd'hui comme pour tous les jours à venir.
Le soleil s'était couché tandis que Karma secouait Salomé dans tous les sens, lui pointant du doigt le Ronflex désormais assoupi.
— C'est bon ?Elle ne fit pas attention au hochement de tête positif du Kungfouine, préférant jeter un coup d’œil à son iPok pour voir à quel point ces conneries lui avaient bouffé sa journée de Saint-Valentin.
Ce n'était peut-être pas plus mal.
Avec un peu de chance, Aoi et Faulkner seraient rentrés à cette heure-là.
Elle se leva, époussetant ses vêtements pour regagner sa chambre à l'académie.
***
Quelques pas furtifs en direction de son lit, et voilà la rousse qui s'échouait dessus, non sans un regard vers le verre explosé de l'ampoule recouvrant le sol ainsi que les débris de porcelaine comme simples vestiges de la tasse éclatée. La rose écarlate et fanée siégeait entre tout ce beau monde.
Elle n'avait pas eu la foi de nettoyer après le passage de Cobal et ne l'avait toujours pas.
Le sommeil attendrait ; voilà qu'on toquait à sa porte, elle se redressa, évitant à nouveau ce sol miné pour se diriger vers l'entrée et découvrir une Quitterie moins timide que d'ordinaire et plus affirmée.
Elle l'aurait presque oubliée, avec tout cela.
Cela la changerait presque de l'année dernière et de sa rupture avec Ana.
La rousse n'avait pas réfléchi à l'après en compagnie de la Givrali ; juste s'exhiber aux yeux de Ranya en compagnie de cette demoiselle, c'était là la seule idée viable qui lui avait traversé l'esprit au nouvel an.
Voilà qu'elle se retrouvait à devoir supporter sa présence, agréable certes, mais la gitane aurait préféré rentrer en compagnie de Ranya dans son lit plutôt que de Quitterie.
Donner le change, encore.
Jusqu'à quand ?
Elle s'en soucierait plus tard, revêtant son plus beau sourire, celui-là même qui lui avait permis d'attraper Ana, celui-là même qu'elle réservait à chacune de ses proies, s'adaptant à la situation nouvelle, se préparant à entrer en piste, encore une fois, sur une musique qu'elle serait seule à entendre.
— Si ça se passe dans ta chambre, je serais ouverte à toutes les propositions, s'amusa-t-elle tout en sachant pertinemment qu'elle risquait d'attiser le rouge aux joues de Quitterie,
de films, bien sûr.Parce qu'Ana ne lui avait pas suffi, il les lui fallait toutes.
Alors pourquoi ne pas s'amuser, encore une fois, comme l'année dernière ?
Rien de sérieux, pas de prise de tête, juste un plaisir commun à partager.
Pas de fleurs à lui offrir, pas de chocolats, rien, si ce n'est du verre brisé et des pétales fanés, quelle triste Valentine elle faisait là. La rousse n'avait pas anticipé la venue de la Givrali, n'avait pas même espéré celle de Ranya pour lui réchauffer le cœur, se contentant de celle de Cobal pour l'étouffer avant de lui redonner un peu d'air à inspirer.
— En plus, c'est le bordel ici, fit-elle en lui montrant le désordre ambiant entre la tasse brisée et l'ampoule explosée,
Django était intenable aujourd'hui... La Saint-Valentin avec Phoën, ça a toujours le don de le stresser.N'importe quoi.
Il n'y avait qu'aux côtés de son amant que le chromatique était pleinement épanoui et ce n'était certainement pas dans sa nature de semer le chaos mais davantage dans celle de Faulkner, éternel absent, ou à défaut d'Ankou, tapi à l'ombre de toute lumière.
— Tu es prête ?Elle avait plus qu'attendu pour le voir, ce film.
Elle attrapa la main de la jeune fille, l'emprisonnant sous sa paume chaude, ses doigts à la recherche de la douceur de sa peau. Toujours ce même sourire de feu au bord des lèvres et ces étoiles qui dansaient dans les yeux :
— Promis, on fera en sorte que cette Saint-Valentin soit inoubliable pour toi.Pour Salomé, c'était déjà le cas.
HRP :
Utilisation d'un Bon Leviator.