caractère & physique
Abygaëlle est une jeune demoiselle bien complexe, malgré son apparence angélique qui en envoutera plus d’un. A première vue, la jeune dame est plutôt simplette, aux paroles légères et naïves, agrémentées parfois d’une ou deux plaisanteries, parfois maladroites, car oui Abygaëlle est maladroite dans ses mots. La spontanéité, ça la connaît, peut-être même un peu trop, elle dépasse parfois les bornes, dérape sur ses propres pensées et provoque une incompréhension… Ou un malaise, surtout dans ses plaisanteries. Mais attention, cela n’est que la face dévoilée de l’iceberg de la personnalité de la jeune femme.
Dans ses études, Abygaëlle est très sérieuse, toujours concentrée sur l'essentiel et ne laisse rien au hasard. Elle dévoile toute l’intelligence et la réflexion dont elle est dotée, parfois surprenante en montrant une tout autre personnalité. La raison de sa présence ici, elle la doit aux Ricci, à sa famille. Elle ne veut pas les décevoir et fera donc tout pour être “la meilleure”.
Passons à ce qu’affectionne la jeune femme. Premier point, Abygaëlle aime les pokémons. Bien qu’elle n’ait pu sauver qu’un nombre restreint d’entre eux du joug de son père, elle a toujours essayé de les défendre à sa manière : pour elle, les pokémons sont aussi intelligents que les humains, et méritent qu’on les considère comme nos égaux, tout simplement. Côté culinaire, Abygaëlle adore les plats sucrés, les pâtisseries, ainsi que les mélanges sucrés-salés et les épices. Tant qu’il y a du goût, la jeune demoiselle apprécie. Encore son côté simplet qui ressort, certainement. Mais dans la vie d’Abygaëlle, tout n’est pas rose, et Abygaëlle n’aime pas tout.
La plus grande peur d’Abygaëlle, c’est le feu. Un sacré traumatisme qui ne s’effacera certainement jamais, une simple chose qui peut chambouler sa personnalité pendant un temps. Les flammes lui rappellent bien des souvenirs, et malgré la fascination qu’elle éprouve devant cet élément et une volonté inconsciente de vouloir s’en approcher et le toucher, Abygaëlle est terrorisée devant la moindre flamme d’une certaine taille. La flamme d’un briquet ne lui fera éprouver qu’une légère peur, un frisson et une sensation de malaise.
Abygaëlle n’est pas une demoiselle très éloquente. Elle est le cerveau, mais pas la figure, dira-t-on. Ses années passées à rester cloîtrer dans son domaine et son isolement scolaire ne lui a pas donné beaucoup d’occasion de se faire des amis dans sa vie, à part quelques pokémons. Loin de détester les autres, elle est plutôt anxieuse du risque de blesser quelqu’un avec ses mots ou ses agissements. Mais lorsqu’un sujet intéressant à ses yeux est évoqué, elle dévoilera toute sa franchise et son honnêteté, et un sourire se dessinera certainement sur ses lèvres. Avec un peu d’entraînement et de temps, la jeune Abygaëlle pourrait bien développer une éloquence à couper le souffle…
Nous pouvons désormais aborder le dernier point du caractère d’Abygaëlle : son plus grand défaut. Acharnée. Certes, elle est ouverte d’esprit et a un bon seuil de tolérance, mais défendre ses opinions peut l’amener à dépasser les limites et à l’enfoncer dans ses propres torts. Abygaëlle aime avoir raison. Plus que ça, elle déteste avoir tort et peut devenir incontrôlable et imprévisible si d’aventures vous preniez un certain plaisir à le lui faire savoir. Mauvaise perdante, Abygaëlle peut être amenée à contourner les règles, voir à tricher pour obtenir ce qu’elle veut, surtout la victoire. Rusée mais fourbe, toute sa personnalité et ses apparentes qualités deviennent ses principaux travers et défauts au moindre obstacle. En bref, Abygaëlle est d’une personnalité complexe et opposée.
Niveau physique... Un mètre soixante-dix, un corps aussi pâle que svelte, de belles courbes, des formes là où il faut. Abygaëlle n’a rien à envier aux autres, et encore moins avec son visage d’ange. Nez fin, lèvres fines, deux magnifiques yeux bleus en amande, ornés de longs cils noirs, Abygaëlle est une belle et jeune femme.
Ses prunelles bleues lui viennent de sa mère, un bleu clair profond tirant sur le rosé, un trait obtenu de son père. La pâleur de sa peau est naturelle et entraînée : Abygaëlle essaye de la tenir telle, pour garder un certain charme. Sa famille a toujours eu la peau pâle et certains membres sont albinos, d’autres porteurs du gène, alors personne ne saura jamais si Abygaëlle l’est ou non… Mais elle n’a aucun problème de vision et malgré la pâleur de sa peau, elle n’a aucun problème de santé cutané. Quant à ses cheveux, d’une blancheur à couper le souffle tirant légèrement sur le gris-bleuté, elle l’a hérité aussi de sa très chère mère. Tout comme son corps de rêve d’ailleurs, à la fois entraîné à l’être, et inné à cette très chère demoiselle Ricci.
Revenons un peu sur ses cheveux. Abygaëlle possède une tignasse lisse et très longue, épousant son corps jusqu’au bas de son dos. Cheveux fins, soyeux et volant au vent, il ne lui manquerait plus que deux ailes pour en faire un ange. Sa coiffure est toujours soignée, dégradée à l’avant et une frange lui couvrant légèrement le visage, coiffée sur le côté. Si Abygaëlle aime avoir les cheveux lâchés, il lui arrive parfois de les remonter dans une queue de cheval ou de les tresser pour plus de praticité.
Côté style vestimentaire, Abygaëlle n’est pas très demandeuse. Adepte des robes tout comme des pantalons et tee-shirts, elle arbore diverses tenues en fonction de ses envies… Et de son activité du jour ! Mais quand il s’agit de sorties de loisir, Abygaëlle aime la richesse et la vanité : bijoux, robes, dorures, chaussures haut de gamme, elle ne lésine pas sur les moyens pour mettre ses atouts en valeur. Il n’y a pas à dire, Abygaëlle sait ce qu’elle fait. Mais il existe une parure qu’elle apprécie tout particulièrement : un bijou de tête porté sur le côté, noir, blanc, rouge et doré, offert par sa famille lors de son départ pour Adala: un symbole de famille transmis de générations en générations, ou plutôt deux en réalité, spécialement réuni pour Abygaëlle.
histoire
Cette histoire commence le 10 janvier 2005. En plein centre de Vestigion, de la région de Sinnoh, Abygaëlle poussera bientôt ses premiers cris. Dans la demeure familiale, la grande Daphnée Ricci, originaire de Kalos, alors âgée de 33 ans, fournit les derniers efforts pour faire naître sa seule et unique enfant. A ses côtés, un grand homme de 34 ans, bien assorti à cette dame : Elrick Keelin. Chacun possédait des cheveux blancs, de magnifiques yeux bleus, bien qu’un peu plus violets pour le futur père. Et une peau pâle. Etait-ce l’albinisme qui avait réuni ces deux cœurs ? Nul ne le saurait, mais leur amour était certain… En apparence.
Elrick Keelin était connu dans sa contrée natale, Kalos, en raison de son activité familiale de bijoutier. Mais sa popularité était bien peu connue à Sinnoh, au milieu de tous ces grands visages familiaux. Implanté à Vestigion peu avant la naissance d’Abygaëlle, il possédait déjà une petite entreprise de bijoux de luxe, de créations uniques et magnifiques. Grand fanatique des types feu, il avait imposé leur présence dans la demeure familiale ainsi qu’à son travail, en faisant l'emblème de la famille de Sinnoh. Roitiflam, le premier pokémon d’Elrick, était pour ainsi dire devenu la figure du blason de la maison Keelin de Sinnoh, et la tradition voulait que de parent à enfant se lègue un Roitiflam. Le destin d’Abygaëlle était donc tout écrit pour le père : elle suivrait sa voie, deviendrait une spécialiste des types feu, et donnerait la descendance digne que Daphnée ne lui avait pas donnée. Ainsi, elle deviendrait bijoutière à Vestigion, étendrait l’empire des Keelin que son père lui lèguerait au travers tout Sinnoh, et perpétuerait la richesse et la gloire familiale.
La naissance d’Abygaëlle fit surgir une dépression sévère à Daphnée. Incapable de tenir son enfant ou de lui apporter un peu d’attention, Abygaëlle était élevée par une gouvernante et quelques pokémons. Son père veillait de près à ce qu’elle reçoive une éducation digne des Keelin, car elle était destinée à devenir l’héritière de la famille. Elrick dut endosser le rôle de Daphnée en tant qu’époux Ricci, et se rendre aux réunions familiales à Kalos, tout en conservant son rôle d’héritier Keelin de sa propre famille. Incapable de concéder sa fille à la famille Ricci, sa seule solution était de concevoir un second héritier, à son image. Mais les autres tentatives du couple pour avoir un second enfant se soldèrent toutes par un échec : Abygaëlle grandit dans les bras d’une gouvernante bien aimante, entre les cris de démence d’une mère enfermée, les grognements d’un père mécontent, et surtout, des soirs infructueux du couple. Même si l’esprit d’Abygaëlle était encore jeune et innocent, ses yeux ne pouvaient pas oublier ce qu’ils avaient vu, et ces souvenirs qu’elle savait quelque part dérangeants ne pouvaient s’effacer.
Au cours de sa quatrième année, Abygaëlle eut la malchance d’essayer de trouver sa mère. Un soir, échappant à la vigilance de sa gouvernante, elle s’introduisit dans la pièce sombre et lugubre où sa mère était détenue probablement contre son gré. La petite se figea sur le pas de la porte. La pièce sombre, éclairée par la lumière artificielle du couloir, dévoilait une pièce semblable aux plus lugubres des contes. Les fenêtres étaient fermées et scellées, obstruant le moindre rayon de lumière extérieure. Le regard parcourant la pièce, Abygaëlle découvrit tour à tour, une vieille commode griffée, un miroir brisé, un peu de poussière par-ci par-là, un grand lit baldaquin sans rideaux sur lequel était étendu quelque chose, ou plutôt quelqu’un : une femme. Elle était semblable à une poupée de cire, à la peau pâle, les joues creusées, de longs cheveux blancs disposés sur le lit comme de cheveux d’anges, des cernes visibles, des yeux vides fixant le plafond. On pouvait entendre la respiration lente et difficile d’une femme souffrante. Abygaëlle eut cette force d’enfant innocent et s’approcha lentement. A proximité de Daphnée, elle l’observa longuement, elle la décrivit. Abygaëlle lui ressemblait, c’était certain. Même malade, elle était magnifique et presque irréelle. C’était la première fois qu’elle voyait sa mère, tout semblait comme dans un conte de fée… Jusqu’à ce claquement de porte… Et le noir complet.
Depuis ce jour, Abygaëlle fut élevée exclusivement sous le joug d’Elrick. Pour ainsi dire, la gouvernante fut renvoyée pour négligence et remplacée par une éducatrice Keelin. Ainsi, Abygaëlle devait être élevée pour devenir la seule héritière des Keelin, de la bijouterie et des espoirs de son père. Autant dire que l’éducation était un enfer réel. Entre bonne conduite et lavage de cerveau, Abygaëlle ne savait plus quoi penser. Son seul repli était dans le petit coffret laissé par sa gouvernante qui contenait pleins de belles choses, dont des photographies de Daphnée jeune aux côtés de ses amis, des bijoux, des petits mots… Elle résistait au joug de son père par les simples souvenirs de sa mère.
N’était-ce pas suffisant d’être harcelée à l’école ? D’être malmenée pour ses cheveux blancs, sa peau pâle, sa fatigue et ses peurs sans pouvoir être protégée par son nom ? Fallait-il encore qu’on en fasse de même à la maison ? Ne pouvait-on pas laisser cette enfant tranquille, qui n’avait rien demandé ? Pourquoi fallait-il toujours évoquer la maladie de sa mère, dire qu’elle avait gâché un couple merveilleux en tombant dans la démence ? Fallait réellement plaindre Elrick, qui n’avait aucun scrupule à maltraiter autant sa femme que sa fille ? Pouvait-on simplement laisser Abygaëlle pleurer dans son coin, la laisser tranquille, une fois dans sa vie, faire ce qu’elle voulait sans personne pour l’en empêcher ? Ne pouvait-elle pas juste vivre, un jour au moins, avec un semblant de liberté sans qu’on lui coupe brutalement les ailes ? A défaut, ne pouvait-elle pas juste… Au moins rêver ? Sans personne pour l’arrêter ? Sans peurs pour la freiner dans son élan…?
Elrick s'entraînait tous les jours avec ses pokémons, si on pouvait appeler ça un entraînement… Lorsque ce n’était pas son Roitiflam qui se défoulait sur des pokémons plus faible, c’était Elrick en personne qui les frappait, comme il savait si bien le faire… Mais un jour… C’en était trop.
Abygaëlle s’opposa à son père. Pour la première fois, elle affirma son nom. Elle en appela au nom des Keelin et des Ricci. Elle avait beaucoup lu là-dessus, elle savait qu’il s’agissait là de deux familles puissantes et que, réunies, elles étaient bien plus fortes que séparées : son pouvoir était donc, en théorie, plus fort que celui de son père. Mais la seule reconnaissance qu’elle eut fut en cette gifle qu’elle n’oublia jamais. Les paroles de son père résonnent encore aujourd’hui dans sa tête, et hante parfois ses nuits. “Pour qui est-ce que tu te prends, gamine ? Tu es sous mon toit, tu es mon sang, tu m’appartiens. Ne t’avise jamais de me défier, je pourrais faire bien des choses qui hanteront à jamais tes jours.” Mais est-ce que cet enfoiré s’arrêta là ? Non. Bien au contraire. Certes, Abygaëlle continua de lui tenir tête, et le menaça même, mais sa réaction fut au-delà de l’imaginable. Sans amour ni considération, il jeta Abygaëlle dans une de ces pièces sombres de l’appartement, proche de celle dans laquelle était sa mère. La porte fut fermée dans un claquement sourd et verrouillée. Un bruit qu’Abygaëlle grava dans sa mémoire, qui anima une terreur en elle. Elle se rua vers la porte, implora le pardon, hurla qu’elle ne recommencerait plus, mais ses appels à l’aide restaient sourds aux oreilles des occupants.
Une journée passa, la porte s’ouvrit une première fois. Il y eut une question, simple, directe. “As-tu compris la leçon ?” Abygaëlle hocha faiblement la tête, les larmes aux yeux, la fatigue creusant son visage, le corps animé dans un frisson de terreur. Mais lorsque Elrick frappa ses pokémons devant la fillette pour qu’elle comprenne, Abygaëlle s’opposa à nouveau… Et le retour dans cette pièce sombre et vide fut rapide. Deux longs jours passèrent. Abygaëlle avait probablement perdu toute force de se battre. Elle rampait presque, dans le noir, pour trouver la nourriture peu goûteuse qu’on lui proposait, et retournait dans un coin de la pièce, recroquevillée, se bouchant les oreilles. Elle était probablement à côté de la chambre de Daphnée, elle entendait les cris, les râles, les crises de démence, comme si elle était à côté d’elle, lui murmurant à l’oreille. Elle entendait même le grincement de la porte, dont seule une personne avait le secret. A la fois terrifiant et malaisant, ce grincement rappelait la souffrance à venir… Oui, Abygaëlle entendait Elrick se rendre tout aussi régulièrement dans la chambre de sa femme, pour une raison inconnue.
Au terme de ces deux jours, Abygaëlle se résigna. Son regard était vide lorsqu’elle devait observer Elrick maltraiter ses pokémons, ou lorsque son Roitiflam se défoulait. Impossible de détourner les yeux, elle n’en avait ni la force, ni l’envie, comme si Elrick se tenait là, à la surveiller. Les cris des pokémons qu’elle défendait, des amis qu’elle avait vu grandir au sein de la demeure, restèrent silencieux aux oreilles de la Keelin. Abygaëlle était détruite, elle n’osait plus défier son père : il s’en était assuré, la menaçant régulièrement, lui rappelant de quoi il était capable.
Son corps était piégé dans une boucle infernale, marqué au fer rouge du nom des Keelin, et surtout, du nom d’Elrick. Mais son esprit, lui, ne demandait qu’à s’évader de cette prison dorée. Abygaëlle n’avait jamais eu d’amis, et ce n’était pas pour déplaire à Elrick. Il put aisément la retirer lentement de l’école, pour des raisons familiales que les professeurs n’osaient contredire… Jusqu’à ce qu’un jour, elle n’y aille tout simplement plus. Elrick s’assura aussi qu’Abygaëlle de rejoindrait pas les Ricci, en prétextant mille et une excuses pour ne plus se rendre aux réunions de famille, et garder son enfant sous son emprise.
Les nuits où Elrick ne veillait pas, Abygaëlle sortait de sa chambre. Quitte à vivre dans un enfer, autant choisir lequel. Et celui de la chambre de sa mère semblait très paisible. La première nuit, elle se posa à côté de la porte, et se contenta d’observer. Avait-elle peur de sa mère ? Le souvenir d’il y a quelques années était encore présent, trop présent. Mais la voir dormir, apaisée que cette torture soit terminée, rassurait un peu l’enfant. Les nuits qui suivirent, Abygaëlle osa s’approcher et, doucement, elle lui parla, comme on parle à un parent dans le coma, qui ne vous répondra jamais.
Une nuit, elle crut percevoir une réponse, quelque chose. Elle n’insista pas, et au fur et à mesure, les longs monologues devinrent des courtes conversations, puis des réels échanges. Alors, Daphnée, aussi faible fut-elle, lui raconta à quoi Kalos ressemblait, ses amis, sa famille, et comment, dans sa jeunesse, elle avait été heureuse. La nuit suivante, Abygaëlle lui ramena ce petit coffret et put enfin avoir l’histoire derrière ces souvenirs. Daphnée lui parlait de ses voyages, ses découvertes, et le monde magnifique qui ne demandait qu’à être étudié et protégé. Un rêve lointain auquel s'accrochait désormais Abygaëlle, qui avait bientôt quatorze ans. Elle ne voulait plus devenir une Keelin, mais rester une Ricci, jusqu’au souffle qu’elle expirait. Ces discussions réussirent à raviver un peu Abygaëlle. Mais toujours sous l’emprise d’Elrick, elle ne pouvait pas changer son destin. Elle devait attendre sa majorité, quelque chose, pour fuir avec sa mère, et vivre à nouveau libres.
Abygaëlle n’eut pas besoin d’attendre une opportunité, ni sa majorité. Le destin d’Elrick le rattrapa bien vite. Etait-ce pour tout le mal qu’il avait fait autour de lui ? Pour ces jours de maltraitances assénées à sa femme, sa fille et ses pokémons ? Nul ne le saurait, le secret était avec lui enterré.
Abygaëlle avait presque quinze ans, lorsqu’une nuit, en plein été, le pire se produisit. Aussi anodin ce drame puisse être, il traumatisa profondément Abygaëlle. Alors dans sa chambre, en train de rêver d’une liberté qui ne tarderait plus à arriver, Abygaëlle fut réveillée par le Feurisson de son père. Irritée par les odeurs qui émanaient de l’extérieur de la pièce, le Feurisson réveilla rapidement la jeune Ricci. Le noir complet avait laissé place à une lueur à la fois chaude et dansante. La jeune fille ne comprenait pas ce qu’il se passait. Dans la panique, elle tomba de son lit, et respira de la fumée. Irrités, brûlés, ses yeux brûlaient, elle respirait difficilement, elle avait l’impression de suffoquer. Elle ne savait pas où elle était. Les craquements, les bruits étranges, méconnaissables, l’agitation, et les cris arrivèrent à ses oreilles. Rêvait-elle ? Etait-ce un simple mauvais rêve ? Abygaëlle avait envie de se recoucher, de tout oublier, mais elle dû se rendre à l’évidence, ce n’était pas un rêve. La douleur le lui rappelait. Avec mal, et aidée par le pokémon, elle se dirigea vers la porte, la poignée brûlante, et l’ouvrit. Là, une scène indescriptible. Des flammes, de la fumée, des silhouettes qui passaient en trombe. Les domestiques, certainement. La fumée allait bientôt avoir raison des petits poumons de l’enfant, ou plutôt de la jeune femme. Incapable de pousser un seul cri, la gorge sèche, les poumons irrités par les particules de l’incendie, Abygaëlle fut sauvée par le Feurisson, qui poussa un Grondement, résonnant dans toute la demeure pour signaler la position de l’enfant, et qui la protégea de toutes ses forces jusqu’à l’arrivée des secours.
Rapidement repérée par les pompiers alors qu’elle était tirée par son pokémon, Abygaëlle fut sauvée in extremis d’un incendie potentiellement mortel. Lorsqu’elle ouvrit les yeux, quelques jours s’étaient écoulés, et l’environnement n’était plus l’enfer brûlant d’une maison en feu, mais bien l’ambiance calme et neutre, presque froide, d’une chambre d’hôpital. Abygaëlle ouvrit les yeux sur un nouveau monde puisque, à côté d’elle, une personne familière lui tenait la main. La jeune fille eut bien du mal à reconnaître sa mère, qui avait repris des formes, du poil de la bête comme on dit, des yeux semblables à des perles de saphir brillants de mille feux, un léger sourire bienveillant, et une main tenue si tendrement pleine de chaleur maternelle, comme jamais Abygaëlle n’en avait eu. Bien plus fort que l’étreinte de sa gouvernante, bien plus puissante que ce qu’elle avait pu avoir auparavant, elle venait de trouver une mère comme elle n’en avait jamais eu, comme cette femme, cette Daphnée sur les anciennes photographies. Elle avait de nouveau les cheveux courts, cheveux qu’Abygaëlle tenta d’effleurer, ne serait-ce qu’un peu.
“Tu aimes…? Je n’étais pas sûre de la longueur, mais avec l’incendie, je n’avais pas trop le choix. Comment tu te sens, ma petite Abygaëlle ?”
Les larmes roulèrent sur les joues de la jeune fille. Elle n’avait pas les mots. Tout simplement, elle ne pouvait pas s’exprimer. Sa voix, cette si belle voix, si chaleureuse, si apaisante, était bien loin des soupirs rauques qu’elle avait toujours entendus. Elle avait l’impression de découvrir pour la première fois la mère qu’elle avait toujours eu, comme une nouvelle née présentée au monde, lovée dans les bras de sa mère encore fatiguée par l’épreuve qu’elle venait de vivre. Abygaëlle eut l’impression que toutes ces années qui lui avaient été volées sans scrupules lui avaient enfin été rendues. Enfin, elle vivait, le puzzle était complet et… Elle vivait, elle respirait.
L’absence de son père ne la frappa pas tout de suite, ni les bandages sur les bras et le cou de sa mère. Mais Abygaëlle était une jeune fille intelligente. Elle fit rapidement le rapprochement les jours qui suivirent. Jamais Daphnée ne s’était laissée abattre par le décès de son mari, si un jour elle l’avait aimé. Abygaëlle était libérée du joug d’un père tyrannique, d’un homme aussi mauvais que manipulateur, d’un monstre que personne ne regretterait. Le Feurisson qui avait sauvé Abygaëlle tenta de s'approcher de l’enfant, mais le réflexe de la Ricci fut si fort et empreint de terreur qu’il ne put que rester prostré dans un coin. Le feu. Les flammes. Abygaëlle les fixait avec une peur immense. Le traumatisme était réel… Jamais elle ne put tendre les bras vers ce sauveur, malgré les larmes sur ses joues. La mère d’Abygaëlle demanda à ce qu’on trouve une famille magnifique pour ce pokémon, et tous ceux qui avaient pu s’en sortir… Elle était peinée, mais c’était là le prix à payer pour pouvoir vivre calmement.
Malgré cela, Abygaëlle riait du fait que son père, adorateur des types Feu, aura finalement brûlé vif. Etait-ce là l’oeuvre d’un de ses pokémons, trop souffrant de cette maltraitance, ou était-ce un accident ? Le secret serait désormais enseveli sous un tas de cendres, qui a probablement déjà été emporté par le vent. Tout un monde s’offrait à Abygaëlle et ses traumatismes feraient partie de son quotidien. Le noir, la nuit, la solitude, les pièces closes, les espaces étroits, le feu, les flammes, les braises… Tout aurait raison d’elle un jour, mais elle devrait vivre avec, cela l’en rendrait plus forte.
A la sortie de l’hôpital, Abygaëlle s’installa avec sa mère, Daphnée avait bien besoin d’elle. Elle avait vécu des années sans voir la lumière du jour, sans connaître l’extérieur, sans vivre réellement. L’appartement était petit mais fonctionnel. Nourrie par l’héritage des Keelin, Abygaëlle pouvait vivre décemment avec sa mère, sans craindre de devoir trouver un emploi. En parallèle, les Ricci étaient présents dans ce drame et aidaient Daphnée comme ils pouvaient. Si Daphnée avait montré des signes d’amélioration dans sa pathologie, le deuil de son mari ne tarda pas à aggraver les choses. L’annonce d’une fille saine et sauve passa du présent au passé, et la douleur d’avoir perdu son mari remplaça la joie d’avoir pu garder une enfant.
Abygaëlle s’occupait de soigner les brûlures de sa mère, tout comme elle soignait son esprit, autant par des médicaments que par sa présence et ses mots, mais il était difficile de concilier vie de famille et vie sociale, en plus des études qu’elle avait. Elrick devint un sujet tabou au sein de la maison. Si Abygaëlle lui vouait une haine sans pareil, Daphnée l’aimait plus que tout au monde. Un amour que jamais Abygaëlle ne pourrait comprendre. Il n’y avait rien à expliquer. C’en était ainsi. Daphnée aura eut une vie très compliqué… Mais elle restait la mère d’Abygaëlle et ne la jugerait pas. Elle se contenterait désormais d’écouter ses plaintes, de hocher la tête et de lui sourire à l’évocation de son mari, si cela lui apportait un peu de repos.
Au terme d’une année à soutenir sa mère et à mettre sa propre vie de côté, Abygaëlle eut la visite de quelques Ricci et Keelin. S’ils ne pouvaient trouver une demeure digne de Daphnée, ils affirmèrent pouvoir au moins alléger leur peine et leur quotidien. D’une part, Daphnée fut entourée de quelques amis de longues dates, revenus de Kalos spécialement pour cette femme magnifique, et de l’autre, Abygaëlle reçut une lettre des Ricci. Lorsqu’elle l’ouvrit, elle y découvrit une chance d’avenir qu’elle n’aurait jamais pu espérer : rejoindre Adala, la Pokémon Community, et apprendre, s’éduquer, évoluer, dans une académie aux possibilités infinies. Prendre en main son destin, une chose à laquelle elle aspirait depuis si longtemps.
Abygaëlle fondit en larmes, tout simplement. Lorsqu’elle demanda quand pourrait-elle partir, une femme qui portait le nom Ricci lui souffla simplement : “Quand tu seras prête”. Abygaëlle partit une semaine plus tard, et promit à sa mère de garder le contact et de revenir aussi souvent que possible.
La Pokémon Community aura été la plus belle opportunité de la vie d’Abygaëlle : elle reçut son premier pokémon qu’elle espérait tant, un Mucuscule de la part du collectionneur. Un pokémon pour lequel elle se prit d’affection dès le premier jour. Le temps passa, et la vie d’élève à la Pokémon Community plaisait à Abygaëlle. Peu après avoir reçu son starter, elle fit la rencontre d’une Frissonille lors d’une des sorties proposées par l’académie. Avec deux compagnons, la jeune femme sentit rapidement le poids des responsabilités, et de l’autonomie, mais cela ne l’empêcha en rien de briller dans sa scolarité. Après beaucoup d’efforts et d’attention, la Mucuscule évolua en Colimucus, et peu de temps après, la petite Frissonille, épanouie dans cette nouvelle vie, évolua en Beldeneige. Le temps semblait passer incroyablement vite pour Abygaëlle, et sa rencontre avec un Corayon de Galar accentua cette sensation. Il demandait des soins particuliers dont elle n’avait pas l’habitude avec ses deux premiers pokémons, mais Abygaëlle s’attacha si vite avec lui qu’elle ne put se résoudre à le laisser dans sa peine. Le temps semblait enfin ralentir doucement à mesure qu’Abygaëlle s’habituait à la Pokémon Community. Et peu de temps après sa première année, le Corayon de Galar évolua en un magnifique Corayôme. Aujourd’hui, après un peu plus d’un an dans cette nouvelle vie, et un déménagement d'Adala vers Leiar, Abygaëlle tient son destin entre ses propres mains, loin de la réputation, des rumeurs et des a priori sur sa famille.