Comme elle s’y attendait, Loan n’était pas du tout d’accord avec elle. Son regard s’était fait un peu plus dur alors que les mots sortaient sans qu’il n’y réfléchisse. Cinq minutes ? Comme s’il était assez stupide pour ne pas voir qu’elle déprimait depuis des mois ! Elle avait beau rire et sourire, il suffisait de la regarder quand elle pensait que personne ne le faisait pour comprendre que ce n’était qu’une fragile façade. En bref, il fallait qu’elle arrête ses bêtises et qu’elle en parle à quelqu’un. Oui, mais à qui ? A Orren ? A Djelly peut-être ? Alors qu’ils déprimaient encore plus qu’elle ? A Ghost ? Hors de question, elle avait sa fierté, qui s’était beaucoup écornée, mais qui était encore présente. Ou … A lui ? Non, peine perdue. Elle pouvait lui parler de tous ses problèmes, sauf d’un seul, qu’elle considérait comme étant celui qui lui bouffait le plus le moral. A savoir, amour ou pas amour ? Jeu ou pas jeu ? Et s’il s’enfuyait en comprenant qu’elle ne voulait plus jouer et qu’elle voulait des trucs plus sérieux, comme, par exemple, une relation, des sentiments, tout ça ? Bon sang, et elle qui s’était promis de ne pas devenir mièvre et stupide comme les autres filles, voilà que c’est raté. Puis, continuait-il, les autorités compétentes se chargeaient de retrouver les Pokémon volés – cela lui tira un léger sifflement de mépris. Tu parles. Entre Rivardi seul à bord et Cadigan absent depuis plusieurs mois, et la police clairement dépassée par les évènements depuis l’incendie, il n’y avait personne pour traquer la Team Rouage.
« Merci … C’est gentil. Enfin, je crois. »
A l’entendre, il ne la trouvait ni nulle, ni inutile, sentiment partagé aussi bien par ses Pokémon que par les autres Pyroli. Tu parles. Sans s’en rendre compte, la brune fixait le vide, ses doigts caressant doucement la peluche que le Voltali venait de lui offrir. Ce dernier était en train de déballer son propre cadeau, et avec un temps de retard, Aileen se rendit compte qu’il y avait une tasse de trop. Il n’y a que huit Eeveelutions. C’était quoi cette neuvième tasse ? Oh … Oh, mince, les Lovdisc ! Se sentant rougir brutalement, elle tourna la tête en se demandant si elle pouvait s’enfuir en courant. Loan, lui, attrapait la tasse du bout des doigts pour la lever en souriant, et Aileen était persuadée qu’il allait se moquer d’elle. Ce qu’il ne fit pas, faisant grandir sa méfiance paranoïaque. Puis, sans prévenir, ses doigts glissèrent sur sa joue en une douce caresse, alors qu’il reprenait la parole d’une voix toute aussi douce. Surprise, elle tourna la tête vers lui. C’était bien la première fois qu’il lui parlait comme ça. Cependant, il n’avait pas fini, lui demandant si elle voulait être sa … Sa True Lovdisc. Le regard de la brune tomba brièvement sur la tasse avant de remonter vers ses yeux.
« Tu te fiches de moi, là, c’est ça ? »
Elle n’avait pas pu retenir la méfiance agressive dans sa voix, et s’en voulut aussitôt en voyant de la peine dans ses yeux. Mais alors qu’elle cherchait un moyen de s’excuser en lui disant qu’elle était un tout petit peu à cran, une voix énervée s’éleva dans sa tête. Une voix qu’elle n’avait entendue qu’une seule fois, quand Grimm avait, par mégarde, relié tout le monde, le soir où elle s’était infiltrée sans faire exprès dans la chambre de Loan. « BORDEL MAIS TU LE FAIS EXPRÈS OU QUOI ?! » Si Aileen ne sursauta pas, elle ne put cacher sa surprise, surtout que, par mégarde, Grimm lui envoya toutes les petites attentions que le Voltali avait eues pour lui, en profitant pour lui envoyer ses pensées. Mécontente qu’on ose ainsi rentrer dans sa tête, la brune tourna la tête pour envoyer son regard le plus hostile à un tas de neige. Le flot s’arrêta soudainement, car les deux starters, cachés derrière, avaient bien senti son exaspération. Il n’empêche … Qu’ils avaient raison. L’un comme l’autre ne voulaient pas continuer le jeu, en le continuant quand même par peur de la réaction de l’autre. Quels idiots ! Sans répondre, elle attrapa son œuf et sa petite peluche pour les ranger dans son sac, sentant la tristesse de Loan, persuadé qu’elle allait partir. Puis elle attrapa le paquet posé sur ses genoux pour le poser derrière elle, avant de lever son regard le plus sérieux vers lui.
« J’en ai marre de ce jeu. Il est vraiment nul. Mais j’en connais un beaucoup plus amusant. »
Puis, ne sachant pas trop comment s’y prendre, elle choisit la voie la plus directe en posant ses mains sur la jambe du Voltali, pour se redresser vers lui et poser ses lèvres sur les siennes, fermant les yeux pour ne pas rire nerveusement. Elle sentit vaguement que, après un léger temps de surprise, le Voltali passait ses bras autour d’elle pour la rapprocher de lui, lui permettant de passer les siens à son cou en les enlevant de ses jambes. Une grosse partie de ses problèmes venaient de s’envoler d’un seul coup. Se détachant de lui – il faut bien qu’elle respire de temps en temps ! – elle l’embrassa à nouveau furtivement avant de se rasseoir. Contre lui. C’est son petit ami maintenant, alors elle a le droit. Son petit ami … Gnihihihiiii ♥. Attrapant les tasses pour les tirer vers elle, elle attrapa la Pyroli et la Voltali, laissant Loan récupérer son thermos.
« Nos starters sont très mal élevés. Il va falloir qu’on fasse quelque chose contre ça, je déteste qu’on fouille ma tête de cette manière. »