Lion en cage.

Une cage se définie par bien des manières. La cage est le plus souvent physique. Enfermé dans une salle, une boîte, une caisse ou plus littéralement, une cage. Un enlèvement, une prison ... ils t’enferment physiquement, c’est ton corps, ta chair même qui ne peut s’échapper.

Parfois la cage est métaphorique. La cage dorée, les espoirs que les autres portent sur nous, le besoin de plaire aux autres avant de se plaire à soi même. Parents, proches, amis, tous sont potentiellement des cages qui nous empêchent de nous épanouir.

Puis il existe une dernière cage, plus rare, plus mesquine et maline. Une cage qui piège ton âme, qui piège qui tu es au fond de toi. Elle t’empêche de rêver, te focalise sur une seule chose, un seul objectif. Elle t’enferme dans tes émotions, te retient dans la colère, dans la haine.

Cette cage là, c’est toi. C’est moi. C’est chacun de nous.

Cette cage c’est ces personnes qui arrêtent d’espérer, qui arrêtent de rêver.
Cette cage c’est regarder vers le ciel plein d’étoiles et ne plus réussir à sourire.
Cette cage c’est découper mécaniquement ce qui nous rend le plus fier.
Cette cage c’est refuser les mains qu’on tend.

Cette cage c’est toi. C’est moi.

Cette cage c’est perdre confiance en soi.
Cette cage c’est se perdre.
Cette cage c’est abandonner.

Cette cage, c’est Sirius.

–

La sortie de l’hôpital est rude. Rares sont les personnes à ignorer ce qui est arrivé à Sirius. Il est l’accident. Un nouvel Icare bien plus réel, bien plus proche.

Il est un rappel qu’ils ne sont que des gamins qu’on utilise comme des adultes. Il est un rappel quand à leur faiblesse, leur impuissance.

Sirius la hait. Il hait son incapacité à se battre et à protéger. Il hait la pitié qu’il lit dans leurs yeux. Sirius a toujours aspiré à inspirer. Il a toujours voulu être celui vers qui les regards se tournent. Il y a réussit, dans la plus triste des manières.

Bien loin l’artiste qui dessine les rêves et découpe les nuages. Bien loin celui qui voit plus loin que le reste. Bien loin le rêveur qui s’inspire de tout. Sirius ne remarque plus les détails. Il ne voit plus la feuille qui tombe au coin d’une table, il ne lit plus l’amour dans les yeux d’un couple. Il ne voit plus rien.

Aussi sur qu’il s’est brûlé les ailes, il a perdu la vue.

Cette colère tapie en lui pendant des années, cette rage qu’il pensait de ne pas exister, dévoile aujourd’hui toute sa force et sa laideur et, par les dieux, il est affreux. Lui qui jadis se targuait d’avoir un si joli minois se retrouve aujourd’hui dans un corps fatigué, blessé, brûlé. Lui qui jadis se targuait d’une si jolie pensée se retrouve aujourd’hui dans un esprit brisé, fermé, enragé.

Sirius en est réduit à l’ombre de lui même.

–

Il a été difficile de convaincre le professeur Nahr de sa capacité à assurer ses devoirs lors de l’alternance qu’il demande. Il a subit une batterie de test à l’hôpital, récupéré des certificats. Le dossier a composer pour son souhait fut long et les trois jours qui le séparent de sa sortie de l’hôpital et son départ de Cobaba semblent encore plus long.

Calua est adorable mais elle s’inquiète trop. Ida semble suivre son exemple, ou est-ce l’inverse ?

Tout ce que désire Sirius c’est du calme. Rester seul. Ronger sa colère et sa haine et il sait parfaitement qu’en leur présence, il se calmera parce qu’elles ont cet effet sur lui. Mais il ne veut pas se calmer. Sirius veut se mettre en colère, grogner, hurler. Sirius veut que le monde entier sache à quel point il a mal et à quel point il leur en veut.

Alors il s’enferme et refuse les mains qu’on lui tend.

Alors il s’enfuit, à des kilomètres de Cobaba, à Irisia.

Il est probablement trop tôt, mais il s’en fiche. Tout ce que veut Sirius c’est comprendre comment combattre. Comprendre comment ne plus être inutile. Comment ne plus être le premier à tomber.

Il y a tellement de promesses qu’il a détruites avec cet accident. Il n’a pas sut protéger Alex, alors que les explosions la terrifient. Il n’a pas sut protéger Calua, qui est son petit morceau d’étoile. Il n’a pas sut éviter à Soleil de se blesser. Il n’a pas sut empêcher ses pokemons de s’inquiéter. Il n’a pas put combattre comme il l’a promit à Ginji.

Il a fait tout faux.

Tout et complètement faux.

Il est une horrible personne.

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Le voyage est semblable à tous les autres. Long et peu intéressant. Sirius le passe les yeux dans le vide, dans une espèce de demi sommeil qui lui promet un peu de repos sans les cauchemars.

Il fait chaud et ça brûle. Sur ses épaules, sur son dos, sur ses côtes. Pourtant Sirius ne retire pas le col roulé qu’il porte.

Quel allure a-t-il aujourd’hui, avec ses cheveux rasés maladroitement, son col roulé et sa gueule de cadavre ?

Il fait peur aux gamines qui venaient jouer avec lui, il fait peur aux dames qu’il charmait avec soin. Mais ce Sirius là n’est pas intéressé par pareil singeries. Il ne cherche plus qu’une chose qu’il a si longtemps négligé. Sirius veut le pouvoir, Sirius veut la force. Sirius veut frapper aussi fort qu’on l’a frappé.

Le Sirius d’autre fois aurait admiré la beauté de la petite ville d’Irisia, ses jolies petites maisons et l’ambiance toute conviviale qu’il y règne. Il aurait prit la légèreté de Chuck, le champion, pour une saine connaissance de ses capacités. Il aurait put rigoler joyeusement avec l’homme et il aurait été ravi d’être sous sa tutelle, convaincu d’apprendre d’un véritable maître.

Le Sirius d’aujourd’hui ne voit que le silence pesant et tendu. Il ne remarque que la précarité des habitations et l’aspect un peu sauvage du coin. Il voit la légèreté du champion comme un manque de respect envers ce qu’il vient chercher ici. Il ne peut que se renfermer, aussi dur que la pierre et ne laisse pas un sourire se dessiner sur ses lèvres.

Le champion n’est pas ravi. Ça se lit dans le froncement de ses sourcils, dans son ton devenu sec. Ils visitent l’arène, rapidement et Sirius découvre sa chambre pour les deux semaines à venir. Un tatami. Posé dans un coin de la grande salle. Aucune intimité, aucun espace personnel. Sirius voudrait hurler. La salle de bain ne le rassure pas plus, simple jet d’eau à l’arrière de la primaire arène.

- Tu es ici pour devenir un homme. Tu es ici pour t’endurcir. Dis adieu à tes petits conforts de princesse et devient un roi. Dis adieu à ta faiblesse et dis bonjour à la force. Suis mes conseils gamin et tu deviendras grand.

Les paroles du spé type claque dans la salle.

- Sois toujours en quête d’amélioration, sois toujours en quête de la perfection et de l’équilibre. Tu vas quitter ton état de petit garçon et devenir un homme. Soit fier de recevoir l’enseignement du disciple d’Aldo !

Il frappe son torse nu fièrement et pointe une des cascades.

- Enlève ton haut et va là dessous jusqu’à ce qu’on te dise d’en sortir. Endurcit ton corps pour endurcir ton esprit.

Sirius hésite un instant et son regard alterne entre le champion et la cascade. Retirer son t-shirt ? Enlever la protection qui retire les brûlures aux yeux des autres ? Il n’en est pas capable. Vraiment pas. Alors il n’enlève pas son haut et s’installe sous la cascade sous le regard surpris de Chuck. Il hausse les épaules et le laisse faire.

–

Dis comme ça, passer une semaine sous le jet d’eau d’une cascade pendant 10 heures chaque jour, ça semble long, chiant mais pas si pénible. Sirius vous dirait le contraire. Le t-shirt se colle à la peau, aux plaies brûlantes et chaque soir, retirer le t-shirt est un calvaire. Il a comprit depuis longtemps le pourquoi du rudimentaire de la douche. Après une journée sous une eau aussi claire, la dernière chose que l’on souhaite faire, c’est se mettre sous l’eau.

Chaque heure, chaque minute est douloureuse. Mais pas seulement à cause de ses blessures. Le fracas de l’eau contre ses muscles, ses épaules, est tout aussi douloureux que la pierre glacée et dure sous ses cuisses en tailleur. La concentration pour tenir son dos parfaitement droit pour éviter de se recevoir un coup de bâton du sensei est insoutenable. Il ne peut penser à rien d’autre que sa position, que sa douleur. Il est dans une sorte d’état second qui le laisse insatisfait.

Insatisfait et étrangement calme.

Son incapacité à penser se réveille la nuit où il se réveille après être tombé de fatigue. Il est épuisé mais la crainte des cauchemars le laisse éveillé dans les heures les plus sombres de la journée. Il ressasse alors, la haine, la colère, la faiblesse, l’impuissance. Il remarque à peine les muscles qui se dessinent plus fortement sur son corps. Il remarque à peine la fluidité de ses mouvements. Il se concentre sur une seule chose.

Il ne combat pas.

Il ne progresse pas. Et il en veut terriblement à son maître de stage pour ce qu’il considère comme une si grosse perte de temps.

Chaque jour est plus difficile, le manque de sommeil combiné à la difficulté de l’exercice le rend irascible, taciturne. Il ne répond que par le sarcasme ou par la violence, il n’est plus poli, il n’est plus respectueux.

Lentement, Sirius redevient celui qu’il fut avant d’arriver à l’académie.

Plutôt drôle non ? Au final, il devient exactement ce que son père veut qu’il soit. Mais pourquoi est-ce qu’il s’en souci encore ? Pourquoi n’arrive t-il pas à arrêter d’avoir ces mots et ces obligations dans la tête.

Pour une famille qui ne l’aime pas.

Même à l’hôpital il ne l’intéresse pas. Même aux portes de la mort il ne l’intéresse pas.

Il n’y arrivera pas.

Jamais son père ne sera fier de lui.

La colère fait bientôt place à une mélancolie triste qui dure un jour à peine où Sirius reçoit plus de coups de bâton qu’il n’en a jamais reçu. Mais ça ne l’atteint à peine. Les mouvements sont mécaniques et les mots vides. Il se mure dans un silence glacial et cette nuit là, s’endort sans soucis.

Le lendemain réveille la rage. Une semaine qu’il est là à ne rien faire. Il explose. Complètement. Comme il a jamais explosé avant ça. Il hurle, frappe tout ce qu’il peut toucher. Chuck est tout aussi explosif que lui et les mots fusent. Bon à rien, incompétent. Les mots claquent plus violemment qu’une gifle et il ne faut que quelques minutes d’un silence tétanisé pour que Sirius se décide. Il attrape son sac et quitte l’arène sous le regard stupéfait du champion.

–

- Pourquoi viens-tu ici Sirius ? Tu n’es ni un dresseur, ni un spécialiste combat, ni même un athlète.

Sirius déglutit, le regard perdu dans l’eau qui s’écoule autour de lui.

- Je dois devenir plus fort. J’ai des personnes à protéger et j’en suis incapable. Je ne veux plus être celui à qui on doit faire attention, je ne veux plus ralentir les autres. Je veux gagner. Je veux les protéger.

Il n’y a que pour cette raison que Sirius aurait accepté qu’on lui retire ses pokeballs.