Au cours de la classe verte, peu après le boxon général qui s’était produit le jour de la fête du travail -et pour lequel vous aviez tous un peu morflé-, tu avais été désignée, avec un autre élève, pour aider un passionné de 4x4… De trottinette 4x4. Etait-ce là la vengeance et la punition pour vos actes la nuit du premier mai, ou était-ce là un simple hasard ? Tu ne le saurais jamais, mais qu’importe. L’important était cette « mission » que l’on vous avait confiée.

Le deal était simple. John, le passionné de trottinette 4x4, avait besoin de votre avis et de votre aide pour réaliser un parcours en forêt, un peu à la limite du possible. Un truc de dingue, de ouf, extrême, en gros. Les mots d’ordre ? Sécurité, fun, inoubliable. Voilà dans quoi tu t’étais embraquée, Octavia. Et pour cela, tu n’étais pas seule : un certain Nan Bao t’accompagnait. Bao de son prénom, si tu avais bien compris. Alors voilà. Tu étais là.

La forêt s’étendait à l’horizon, tu l’observais depuis le haut de la montagne, point de départ de ce parcours « de fou ». Tu voyais à peine le point d’arrivée, en bas, non loin des chalets qui vous hébergeaient. Oui oui, ceux que vous aviez mis à feu et à peinture, il y a quelques jours. Cynorhodon sur ton épaule, les mains dans les poches, tu attendais. Tu attendais ce fameux John, ce passionné, votre… Coordinateur ? De mission.

Bien que tu sois arrivé avec Bao, vous n’aviez pas vraiment pris le temps de discuter. A vrai dire, le casque qui était encore sur tes oreilles en était la principale raison : s’il t’avait parlé, tu ne lui avais tout simplement pas répondu. La musique, c’est sacré.

Quelques minutes après votre arrivée au point de rendez-vous, un jeune homme, tout à fait normal et dans la moyenne, cheveux bruns, yeux bruns, un peu maigrichon, arriva. Sur sa trottinette 4x4. A cet instant seulement, tu sortis les mains de tes poches, pour retirer ton casque, qui rejoignit son éternelle emplacement d’attente : tes épaules. Rhodon avait bien compris ta manœuvre, et migra vers les poches de ton sweatshirt… Qui retrouvèrent tes mains quelques secondes après. Tu laissas le responsable s’exprimer.

« Bon alors, les jeunes. Vous allez m’aider à sécuriser le parcours pour tout à l’heure. Enfin, pas seulement, puisque vous allez devoir m’aider à le penser. Ca vous branche ? »

Tu haussas les épaules avant d’accorder un regard à ton partenaire de misère. Sécuriser et imaginer. En gros, vous alliez devoir organiser cette merde, quoi. Ca allait être amusant. Tu imaginais déjà les pires routes, les sauts de l’enfer et les pics d’adrénalines que les participants allaient ressentir. Oui, vous pouviez faire LE parcours de l’enfer.

Ton regard se reporta sur l’organisateur. Rhodon s’installait dans ta poche, tu le sentais, il poussait ta main pour être sûr d’être au chaud. Tu lâchas un soupir, toujours en silence, avant de répondre :

« Ca a l’air sympa. De toute façon, on a pas trop le choix, monsieur. »

Face à ton désintéressement de cette mission, Bao prit l’initiative de proposer un plan d’action. Il proposa de partir sur le terrain, et toi sur une carte, au point de départ. Tu voyais la stratégie qu’il voulait adopter, et à vrai dire, elle te convenait. Partisane du moindre effort, hein ?

Tu rendis le regard de Bao, avec un haussement d’épaules, suivi d’un sourire. Un sourire courtois et poli, rien de plus. Tu sortis lentement ton Ipok, tu en profitas pour éteindre ta musique, qui tournait dans le vide depuis quelques minutes déjà. Il voulait ton numéro, hein ? Pas de problème. Tu haussas de nouveau les épaules.

« Si ça t’aide en tant que futur Ranger, ça me dérange pas. Je suis un peu obligé d’être ici à cause du 1er mai donc bon. J’suis Coordinatrice, alors je suppose que je suis plus utile de loin… ? M’sieur, vous avez des cartes ? »

Pendant que tu posais ta question, tu prêtas ton Ipok à Bao pour qu’il enregistre son numéro et qu’il récupère le tien. Ce fameux John fouilla un instant dans son sac à dos, et en sortit trois cartes. Il t’en tendit une, ainsi qu’à ton coéquipier, et garda la troisième pour lui.

« Bon les jeunes, je vais descendre jusqu’à l’arrivée et faire une première reconnaissance… Bao, c’est ça ? Je compte sur toi du coup. Octavia, tu t’occupera aussi de faire le tracé sur la carte, histoire qu’on en garde une trace. Je viendrais épauler le jeune Ranger sur le chemin. »

John en profita pour te donner un numéro pour le contacter en cas de problème, ainsi qu’à Bao. Tu étais responsable de l’organisation, en somme, comme une Coordinatrice dans un concours de prestance. Une chance, en quelques sortes. Tu te trouvas un rocher à approximativement plat, et tu posas la carte, avant de sortir un surligneur. Tu hésitas un instant avant de lancer :

« Eh, si je me souviens bien, l’Ipok permet de faire une conversation à trois non ? En vocal aussi ? Ce serait plus rassurant de vous avoir en ligne pendant tout l’aménagement, on sait jamais. Et ce sera plus rapide que des messages ou de vous appeler à chaque fois chacun votre tour, non ? »
« Ouais, bonne idée jeunette ! On va faire comme ça. »

Il brancha son oreillette avant de constater que vous n’étiez pas équipé. Un léger soupir passa entre ses lèvres, puis il vous tendit des oreillettes sans fil. Au moins, vous pourrez communiquer. Tu repéras le point de départ sur la carte, marqué par un gros A vert, et l’arrivée, B, en rouge. Le chemin semblait long et bien difficile. Tu adressas un regard aux deux autres personnes.

« Si vous avez un problème, je peux envoyer mon Fantyrm en reconnaissance. Ca paye pas de mines. Et au besoin il peut rejoindre un poste de secours. C’est quand vous voulez. »

Tu t’assis par terre, à côté du rocher qui te servait de table rudimentaire. Par mesure de sécurité -et pour rassurer ces deux personnes-, tu rangeas ton casque dans le sac que tu avais emmené, avec de quoi grignoter et de quoi boire. Tu dévisageas Bao et John, qui s’apprêtaient à partir. Tu ne savais pas ce qu’il fallait faire, hein ? Etait-ce à toi de donner les indications, ou à eux de décider ? Avec les positions GPS de chacun, il serait facile d’identifier les obstacles et d’adapter le trajet si nécessaire. La mission semblait facile… Mais tu savais qu’elle ne le serait pas : la forêt de Gratia était remplie de pokémons sauvages, et le terrain était facilement glissant par temps de pluie. Heureusement, il faisait beau, mais il avait plu il y a peu de temps…

Après tout le remue-ménage d’organisation pour la préparation du circuit en trottinette électrique, Bao partit en éclaireur, avec John à sa suite. Tu étais enfin seule, en haut. C’était agréable, et d’autant plus si tu n’avais pas eu cette mission à faire.

Le silence radio était présent. Ils avaient certainement eu la bonne idée de couper leur micro afin de ne pas monopoliser l’appel en cas d’urgence. Assise sur ton rocher, tu avais pris un instant pour observer la carte. Eh, mais en fait, t’avais rien à faire ? T’étais le centre d’appel secours, le joker, le standard « Point Informations et Indications ». Tu haussas les épaules, tant mieux, n’est-ce pas ?

Tu fouillas ton sac pour en sortir un jus de fruit et une pâtisserie chocolatée. Et dire que parfois, les gens appelaient ça une chocolatine. Un pain au raison s’appelait-il une raisintine ? Non mais franchement. Pain au chocolat. Cette réflexion te fit sourire en silence. Aaaaah, tu avais l’air bien idiote comme ça, seule, à sourire pour rien.

Bref. Tu prenais un goûter improvisé. Tu hésitais à sortir ton Ipok, ou plutôt à l’utiliser, pour être précise, afin de regarder des vidéos. Mmmh… C’était très risqué, surtout que tu étais en appel. Qu’importe, tu le fis quand même. Tu commenças à regarder ce que tu avais pour t’occuper. Tiens, si tu regardais les petites annonces, les news les plus ridicules. Mh. « Un Laporeille frappe son propriétaire ». Pfff… « Un Polarhume a transformé son parc en aire de jeu glaciaire, en plein été ». Mh… Rien d’intéressant. « Demain aura lieu la rencontre annuelle du Rugby-pokémon. Les organisateurs ont décidé d’interdire les pokémons massifs, de plus de 90 kg, comme Tyrannocif ou Tranchodon ». Ah ! Pas étonnant l’année dernière…

« Octavia, tout se passe bien à la base ? »

Aaaaaah ! Tu sursautas presque. Purée. Tu savais que ce n’était pas une bonne idée. Tu lanças à Bao :

« Ouais. Disons que je m’emmerde un peu mais je m’occupe. »

Mh. Tu entendais des parasites sur la ligne. Tu ouvris l’écran de la conversation. Tiens. Bao avait coupé son micro mais pas John. D’ailleurs le tien était toujours activé. Devais-tu l’éteindre ? Et s’il t’arrivait un truc et que tu n’étais pas en mesure de le réactiver ? Non, laisse-le comme ça, c’est très bien. Bao reprit la parole… Et ce fut bien comique, un soupir amusé passa tes lèvres.

« Je m’attendais à un truc comme ça. Tu penses pouvoir gérer le terrain seul ? J’suppose hein… »

Bon, les vidéos de Cassoulet attendraient. C’est fou comme après l’ouverture de Galar, et le buzz des Curry pokémons, le cassoulet était revenu en force. Aaaah, toi qui voulait voir la tête des pokémons et des dresseurs mangeant des immondices… Dommage. Un clic et la vidéo était enregistrée dans « A voir plus tard ». Bao avait besoin de toi.

Ensemble, le tracé de la route se passait plutôt bien. Entre tes indications sur la vue aérienne et schématique que tu avais, et les indications sur l’état actuel des choses par Bao, le circuit était plutôt bien organisé. Tu traçais la route sur la carte, il faudrait le baliser, certainement.

Ensuite, Bao te rejoignit. Sur la route, la voix de ce cher John reprit. Génial, il vous avait abandonné pour flirter avec quelqu’un. Pfff… Tu aurais dû t’en douter, il avait bien l’air pressé. Ta naïveté te surprendrait toujours, Octavia. La suite te surprit autant qu’elle te semblait logique. Tu éteignis le son de John, complètement embarrassée par ce qui venait de se passer. Franchement… Y’avait des choses à ne pas faire. Enfin, Bao te rejoignit.

« J'espère que c'est une blague...! C'est pour l'aider avec ses trottinettes qu'on est là, et il nous lâche comme ça, sans pression »
« Je m’y attendais, tu sais. Demander deux étudiants pour ce genre de trucs, il aurait pu le faire tout seul, il vit ici. »

Tu haussas les épaules. Au moins, vous faisiez ce qu’il y avait à faire. Et puis étant presque une heure de colle, mais en plein air, tu devais faire au moins les choses… Un minimum. Tu regardas la carte. Un soupir passa tes lèvres.

« J’suppose que t’as pas les balises à mettre sur le chemin ? A moins qu’il ait eu l’intelligence de te les donner avant de se barrer ? Qu’on en finisse rapidement, ce serait cool, tu vois. »

« En finir rapidement ». C’était le mot. Poser les balises, puis attendre le retour de John pour lui faire un compte-rendu. Mais est-ce que vous deviez signaler cet imprévu au professeurs ? Si oui, maintenant ? Ou plus tard ? Sérieusement, laisser deux adolescents seuls dans une forêt, alors qu’ils n’ont qu’un pokémon chacun… Il faut être complètement taré.

Bao était visiblement exaspéré contre John, alors que toi, tu t’en fichais, tout simplement. Tu avais l’habitude de ce genre de comportement, et puisque tu n’avais pas eu le choix que de venir ici, tu n’allais pas te plaindre que votre surveillant se soit barré.

Bao ne tarda pas à te signaler que non, il n’avait pas les balises. John était parti avec ? Un oubli ? Ou était-ce parce qu’il comptait revenir, et nous empêcher d’avancer… ? Tu ne savais pas trop mais qu’importe… Bao trouva ce dont il avait besoin au parking. Oh, tu n’avais pas vu ça comme ça. Pardon John, Octavia a été médisante à ton sujet. Bao revint donc et entama la seconde partie du plan. Il t’expliqua qu’il se chargerait de baliser et sécuriser le terrain. Une heure serait suffisante ? Mmmh… D’accord. Soit, c’est lui qui allait s’amuser à crapahuter de toute façon. Héhé… Tu n’allais pas te salir, ça non. Ton rôle ? Faire un rapport à l’académie. Et laisser un mot à ce très cher John.  Soit. Cela t’occuperait.

« Si tu veux. N’hésite pas si t’as un problème. On a déjà eu assez de contretemps comme ça. »

Sur ces dernières indications, Bao retourna dans la forêt. Tu pris tes premières minutes pour commencer à rédiger ce que tu comptais laisser à John. Pourquoi pas un « Eh, p’tit con, tu te rends compte de ce que tu as fait ? ». Non, non Octavia. Un peu de tact. Tu haussas les épaules. Tu sortis une feuille et un stylo.

« Monsieur John. Non. John. Nous avons sécurisé le circuit et nous l’avons balisé comme vous nous aviez demandé. Hélas, votre absence nous a bien mis en retard… Et nous ne sommes pas sûr si le tracé vous convient. Vous devrez tout simplement faire avec, après tout, vous nous avez quitté.
La prochaine fois, pensez à couper le microphone de votre téléphone, afin de ne pas choquer des enfants innocents… Et d’être enregistré. Bao et moi-même allons faire un rapport à l’académie afin de leur signaler cet imprévu.
En espérant que vous vous portez bien en notre absence,
Au plaisir de ne jamais vous recroiser.
Octavia. »

Et voilà. Bon… La colère avait un peu atteint ta plume élégante à la fin, mais tu n’en tiendrais pas rigueur. Tu étais restée polie. Hélas, ta relecture fut interrompue : tu entendis Bao crier, puis paniquer. Tu soupiras.

Tu ne sus pas dire si c’était son incompétence qui t’indignait e plus, ou cette absence d’expérience en combat. Franchement, qui ne s’était pas amusé, une fois dans sa vie, à faire un combat pokémon… ? Incroyable. Tu soupiras, te relevant et récupérant au vol ton Ipok et ton sac :

« J’arrive. Rhodon, pars devant je te rejoins. Et te perds pas en route ! »

Ton Fantyrm fit une petite pirouette en l’air avant de partir devant. Tu étais certes seule maintenant, mais l’urgence était d’envoyer ton Fantyrm en soutien. Tu ne servirais à rien contre un pokémon.

Rhodon arriva au bout d’un bon quart d’heure, alors que toi, tu arrivas vingt minutes après le signal de Bao. A peine arrivé, Rhodon utilisa Harcèlement sur le Chapignon. A ce niveau-là, ton pokémon parut être une fusée face au Chapignon.

Cinq minutes passèrent où Rhodon fixa le Chapignon et esquiva ses attaques, ou du moins, essayait. Il ne tentait pas plus d’attaque, pourquoi… ? Lorsque tu arrivas, complètement épuisée, tu te ruas vers Bao. Ok, il avait l’air bien… Enfin, « bien ». Ca pourrait être pire, n’est-ce pas… ?

« Il me faut une info. Est-ce que ton pokémon l’a attaqué directement ? Tu sais quel talent il a ? Ce genre de pokémon a souvent un talent de merde qui empoisonne, endors ou paralyse ceux qui le touche. »

Voilà, tu commençais à paniquer. Enfin, du moins, tu étais sur les nerfs. Même sous l’effet de Harcèlement, le Tropignon restait un problème. Le Sonistrelle était mal en point, mais tu n’avais rien pour l’aider. Tu adressas un regard à ton pokémon. Rhodon avait eu le bon réflexe. A croire que les entrainements et les apprentissages entre vous deux avaient porté ses fruits. Mais il n’allait pas pouvoir résister à un Chapignon bien longtemps. Après tout, il était, au moins, niveau 23, non ? Soit plus haut niveau que Sonistrelle ou ton Fantyrm. Aaaah… Youpi ? Un appel à John, ou un hurlement pour la Pokemon Community était peut-être de rigueur… ?

Voilà. Après de longues minutes, tu étais arrivée, essoufflée. Clairement, tu étais à bout, mais le regard que tu adressas à Bao et son pokémon suffit à comprendre qu’ils étaient dans un état bien pire que le tien.

Bao te signala que le Chapignon avait le talent « Pose Spore ». Ah, génial. C’était ce que tu pensais. Rhodon ne pourrait utiliser que Harcèlement. Voilà qui t’emmerdait bien. Avec le recul, le collectionneur t’avait fait un petit cadeau empoisonné : Rhodon prendrait énormément de temps à évoluer, et en attendant, il n’aurait que des attaques de merde… Mais c’était le prix à payer pour avoir un pokémon puissant au bout de ce long chemin.

Ton partenaire de galère avait l’air de céder facilement à la pression, ce n’était pas bon du tout. Et il voulait devenir Ranger ? Eh, coco, il va falloir se réveiller. Son Sonistrelle semblait bien plus réactif et combatif que lui. A peine eut-il évoqué une attaque, que son pokémon y retourna. Etait-il idiot ou simplement un peu trop téméraire ? Vous aviez déjà eu de la chance que ce dialogue puisse se faire, le Chapignon avait l’air sonné… Mais cela ne dura pas. Un Mach Punch dans la face, et Sonistrelle était hors combat. Putain.

Tu lâchas un soupir que tu n’eus le temps de réprimer. Dans quelle galère tu t’étais mise encore… ? Tu dévisageas ton pokémon, qui jaugeait son adversaire. Il savait très bien que Sonistrelle n’étant plus là, ce serait à son tour dans très peu de temps. Harcèlement ? Vive-attaque ? Etonnement ? Morsure ? Non, certainement pas.  Un estimation rapide s’imposait. Harcèlement était une attaque faible, mais à répétition, et sans contact. A l’inverse, Vive-attaque était la meilleure. Elle frappait toujours avant. Mais c’était une contact, comme Etonnement, qui pourrait potentiellement apeurer le Chapignon. Rhodon était rapide. Il n’avait rien à craindre…

Tu serras les dents lorsque tu vis un Mach Punch arriver vers ton pokémon. Sauf qu’il n’y eut rien. Pas de contact, pas de bruit. Elle s’arrêta simplement. Attends, quoi ? Tu pris quelques secondes…

Mais oui, putain ! Ton Fantyrm était de type spectre : il ne craignait ni les attaques Normales, ni les attaques Combat. Plus résistant aux attaques Plantes et plus sensible aux attaques Ténèbres. Voilà qui était prometteur. Ok.

« Rhodon ! Etonnement. On enchaînera avec Vive-Attaque, et Harcèlement pour être sûr. »

Tu expiras longuement. Ton Fantyrm serait empoisonné, endormi ou paralysé dès lors qu’il aura utilisé Vive-Attaque, ensuite, le temps serait à la rapidité. Tu retenais presque ta respiration.

Rhodon s’élança pour utiliser Etonnement, qui ne loupa pas. Simplement regarder ton pokémon suffit à comprendre que désormais, cela ne pourrait aller que de pire en pire. Ce n’était pas le poison, mais une paralysie. Purée. Tu aurais préféré ce que Sonistrelle avait subi. Le Chapignon fut effectivement apeuré, et ne contra pas. Vive-Attaque loupa, comme tu t’y attendais désormais : Rhodon tenta de s’élancer mais sa paralysie le rattrapa. Chapignon utilisa Mach Punch de nouveau. Coup de chance.

La suite fut étrangement un mélange de chance et de mauvaise fortune. Rhodon utilisa Harcèlement, qui frappa, et assura la continuité de dégâts, malgré sa paralysie. Chapignon utilisa Vampigraine, Rhodon recommença avec Etonnement. Ca passait, mais le Chapignon n’avait pas peur : Rhodon était trop lent.

« Continue avec Vive-Attaque, tant pis, on a rien de mieux ! »

Rhodon utilisa Vive-Attaque. Vampigraine n’était pas dangereux, tu le savais. Tant que Chapignon continuait sur ces attaques, il n’y aurait pas de problème. Tu gagnais du temps, en quelques sortes, mais Rhodon épuisait doucement ses attaques. Tu devais tenir.

Tu avais l’impression d’ignorer Bao, d’en oublier jusqu’à sa présence, mais la situation était critique. Même si tu te disais que la fuite était la plus logique et intelligente, tu ne pouvais pas renoncer à un combat. Tu y étais presque… Tu remarquas que ton pokémon bougeait un peu mieux. C’était ta chance :

« Etonnement. Maintenant ! »

Le coup ne manqua pas. Libéré de sa paralysie, Rhodon frappa en premier, apeurant à nouveau le Chapignon. Tu enchaînas avec Harcèlement. Tu ne pouvais rien faire de mieux. Il ne restait plus qu’à espérer que cette dernière attaque suffise avec les dégâts sur la durée. Tu dévisageas Bao :

« Tu devrais rapidement apprendre à combattre. C’est peut-être le premier, mais ce ne sera pas le dernier : il n’y a jamais de dernier combat. Pas jusqu’à ta mort, du moins. Alors au lieu de te lamenter, et de pleurer parce que tu as trébuché et que tu es tombé, relève-toi et sers-toi de cette leçon de vie pour avancer. Quand un bambin apprend à marcher, il tombe. Et il se relève. »

Tu lâchas un soupir. Tu vis le Chapignon tituber, autant que Rhodon avait du mal à rester en l’air. Tu sortis ta pokéball par réflexe, et heureusement. Le Chapignon tomba, et quelques secondes plus tard, Rhodon s’écroula à son tour. Tu le rappelas. Le Fantyrm n’était pas tout à fait KO, mais il n’en était pas bien loin : il était épuisé et blessé : il avait mérité son repos.

Ton Fantyrm était à bout, mais malgré le peu de capacités que tu avais à ta disposition, tu avais fini par réussi. Le type Spectre était chanceux. Mais Rhodon avait désormais besoin de soins. Plus de lancer de Fantyrm pour s'amuser, désormais. Tu devrais prendre soin de cette petite larve.

Ton sermon te sembla sourd aux oreilles de Bao. Allez savoir pourquoi, peut-être qu'une garce comme toi, Octavia, n'avait pas son mot à dire ? En tout cas, ce combat t'avait confirmé ce que tu pensais : si l'élevage te plaisait énormément, le parcours de Top Dresseur avait quelque chose... D’envoûtant. Ta seconde spécialité serait donc celle-ci, et probablement même tourné vers un Spécialiste du type Spectre... Ou dragon ? Aaah, tu ne savais pas. Tu ne savais pas. Les deux étaient intéressants. L'un t'avait montré sa force redoutable, et l'autre t'avait toujours plu. Que choisir...?

Nan Bao parla. Il en avait assez, toi aussi. L'idée de rentrer pour soigner les pokémons était une bonne idée. Après tout, vous n'aviez plus grand chose à faire ici non ? Il faudrait prévenir ce gars-là. John. Mais plus tard. Vous aviez un bon bout de chemin à faire.

Tu commençais à avoir des courbatures, et ton coeur, qui avait fait quelques bonds pendant le combat, peinait à se calmer. Doucement, lentement. On respire... Cette journée avait été fort en émotion... Et à vrai dire, tu divaguais déjà, t'imaginant avec Rhodon, le Lanssorien majestueux, défonçant tous tes adversaires d'un simple geste. Aaaah... Ce rêve-là était bien lointain encore.

Voilà. Après un bon bout de marche, vous étiez arrivés au refuge. Ton Ipok sonna. Qu'importe, tu étais occupée. Tu tendis la pokéball de Rhodon alors que Bao prit l'appel, après avoir donné son Sonistrelle. Il allait certainement lui passer un savon. Ironique, hein ? Un ado qui passe un savon à un adulte qui est censé être responsable...? Tu lâchas un soupir, observant la machine de soin des pokémons. Ironique. Ce mot te fit sourire.

Alors que Bao était affalé sur un des fauteuils, tu continuais de fixer tout l'équipement de ce mini-centre. Cela te faisait un peu rêver... Quoi de plus normal, lorsqu'on est une ado en quête de sa voie ? Tu avais réussi à échapper à l'enfer familial de l'immobilier, tu avais toute une vie devant toi. Elevage... Duels... Spectacles... Tant de possibilités. Tu n'avais pas à hésiter, mais tu avais un quelque chose de... "Et si ...?" qui te trottait dans la tête.

Une fois que tu retrouvas la pokéball de ton pokémon, tu pris celle du Sonistrelle, avant de la tendre à Bao, une fois que tu l'eus rejoint. Un soupir passa tes lèvres, puis tu esquissas un léger sourire, rassurant et moqueur.

« Eh, on s'en est pas mal sorti. T'es pas mauvais en combat, juste... Timide ? 'Faut pas hésiter à gueuler. »

tu te laissas tomber sur le fauteuil d'à côté, avant de reprendre :

« Le premier, c'est toujours le plus difficile. Le mien c'était contre ma soeur. J'ai tenu bien moins longtemps que toi, t'sais. Pourtant j'avais l'avantage du type... Mais c'était pas mon pokémon, et il a refusé de m'écouter. Ce jour-là, j'ai appris le respect et l'entente. Toi tu as de la chance, ton Sonistrelle t'apprécie. »

Encore une courte pause. Tu n'étais pas du genre à rassurer quelqu'un ni à le réconforter, mais tu ne pouvais pas laisser Bao dans cet état. Il avait le regard d'une personne prête à abandonner et faire demi-tour. Tu ne supportais pas ça, surtout qu'il avait un certain... Talent..?

« T'as bien vu. Rhodon c'est pas une lumière, c'est pas un pokémon rapide, et ses capacités sont limitées : Etonnement, Harcèlement, Vive-attaque et Morsure. Et pourtant, ça a marché. J'vais pas te mentir, si ça n'avait pas été un Chapignon, et si tu l'avais pas amoché avant, il aurait probablement fini KO avant le sauvage. Mais voilà. C'est surtout l'entraînement et la stratégie qui fait tout. Et ça, y'a pas vraiment de secret, c'est l'expérience qui t'apprendra. »

Bao était dans un état d’esprit qui t’agaçait, mais que tu ne connaissais que trop bien. Le manque de confiance en soi, la culpabilité après avoir perdu. Ah ça, tu l’avais plus que vécu. Surtout dans ta famille… Mais cela t’avait aussi forgé un caractère à toutes épreuves.

Tes mots avaient fait leur petit effet sur ton partenaire de mission. Au moins, il avait retrouvé le sourire, et il se réconcilia avec son pokémon. Les retrouvailles se passaient bien. Tu en profitas pour sortir ton pokémon, qui se logea dans ta veste, comme à son habitude. Tu apprécias ce moment quelques instants et, lorsque Bao te proposa de rentrer, tu haussas les épaules, avant de te lever à ton tour. L’impression que tu avais eu de lui le soir du bordel s’était confirmée. Mais qu’importe, ce n’était pas le moment d’analyser une nouvelle personne.

La suite fut bien plus calme. De retour au refuge, la routine était revenue. Repas, douche, coucher. Il fallait dire que s’attendre à autre chose que ça, après ce qu’il s’était passé, aurait été vraiment déplacé : vous l’aviez tous mérité. Même toi. Même cette journée de merde. Un soupir passa tes lèvres alors que tu posais ton casque sur tes oreilles. Affalée sur ton lit, tes colocataires de même, tu t’enfermas dans ta petite bulle, alors que Rhodon s’amusait à faire des figures en l’air. Ordinateur sur les genoux, tu tapais sur ton clavier, doucement, puis frénétiquement. Tu écrivais. Ton rapport, ta journée, ton journal. Tout. Rien n’était laissé au hasard. Même une petite lettre, comme à ton habitude, une fois par semaine, pour ta famille. Peu importe où tu étais, tu avais des comptes à rendre, avec tout le monde. Et c’en était agaçant.

Vers minuit, tu eus terminé ce que tu avais à faire. Et tant mieux, car tu en avais assez. Rhodon était posé sur ton oreiller, et la lumière tamisée de ta petite lampe de chevet était la dernière source de lumière de la pièce. Ton casque te faisait mal aux oreilles. Après tant d’heures à écouter de la musique, pas étonnant. Mais cela touchait à sa fin. Un dernier clic. Tout était ok. Tu éteignis cette technologie si pratique, puis tu rangeas le tout. La lumière enfin éteinte, tu te laissas porter dans les bras de Morphée. Epuisée.

Cette nuit-là, tu rêvas de ton passé, de ces combats aussi décevants qu’humiliants contre ta sœur, sous le regard impassible des deux adultes. Ces moments-là, tu les haïssais, mais cela te rappelait d’où tu venais, et où tu allais. Montrer à tous que tu étais bonne à quelque chose, que tu étais sûre de toi, que tu réussirais mieux que quiconque, en faisant ce que tu voulais faire, pas ce que eux, des imbéciles, voulaient que tu fasses.

Le message de Bao, tu ne le lus que le lendemain, alors que sept heures sonnaient. Ton sommeil avait été lourd et, finalement, assez réparateur. Le temps de te lever et de faire tes affaires, il était presque huit heures. Tu lui répondis un simple « Oui ». Il n’avait pas besoin d’en savoir plus. Tu faisais toujours ton travail. Tu étais ponctuelle, studieuse, sérieuse, minutieuse, et parfaite. Personne n’avait le droit d’en douter. Ni lui, ni personne. Alors, inutile d’en dire plus. Voilà qui était fait. Bao était certes un partenaire de mission honorable, mais cela s’arrêtait là. Si d’aventures tu le recroiserai, tu serais polie. Voilà tout, ce n’était pas un « pote ». Juste une connaissance.