(Warning : Ce RP traite de tentative de suicide)

Elle se crispe. Comme si en se raccrochant de toutes ses forces à ce simple geste, elle pouvait échapper à ces émotions qui l’assaillent. Cinq lignes rouges qui se mettent à luire sur son avant-bras nu. De petites perles vermeilles se détachent une à une le long du passage de ses doigts.

*Plic, plic, plic*

Chaque goutte qui lui échappe, glisse rapidement autour de son poignet, avant de venir s’écraser sur le sable. Avide et affamée, la plage semble dévorer son offrande, sans pour autant répondre à sa demande : même la douleur qui commence à poindre le long de son bras, ne lui offre aucun répit face aux tremblements qui l'assaillent de toutes parts.
Elle garde le même sourire. Celui qu’elle a toujours
Après tout, un artiste ne doit jamais montrer à son public ce qui le tourmente. Seul compte la satisfaction de ceux qui la regardent:  des yeux plein d’étoiles, des sourires sincères, et des applaudissements qui venaient lui réchauffer le cœur.
Mais derrière tous ces beaux discours…Il existe une vérité inéluctable.

Elle a mal.
Si mal, qu’elle pourrait en hurler.
Et pourtant, les mots se bloquent dans sa gorge.
Qu’a-t-elle fait pour mériter ça ? Elle était heureuse…Sans questionnement, sans doute.

*Sans douleur*

Alors, à quel moment est-ce que les choses ont changé ? Sa magie qui lui échappe ? La découverte de ses sentiments pour Ranya ? La perte d’Agni ? Les ombres tournent et retournent dans son esprit, sans pour autant lui apporter une réponse à laquelle elle pourrait se raccrocher. N’importe quoi qui lui permettrait de calmer les battements de son coeur, qui tambourine dans sa poitrine.

Son regard se porte sur la mer qui lui fait face. Voilà au moins quelqu’un qui ne la jugera jamais, si ses larmes venaient à couler. Ses ongles déchiquètent déjà ses bras, les jointures blanchies sous l’effort, et pourtant, le ressac poursuit sa course, imperturbable. En d’autres circonstances, elle aurait trouvé absolument magnifique les reflets orangés qui viennent mourir sur l’eau turquoise…mais ce soir, c’est un gigantesque flou incompréhensible de couleurs et de sensations qui envahit tout son être.
Et si…

(Jeune fille…)

Avec un pauvre sourire, elle détourne brièvement la tête, pour découvrir les silhouettes d’Amaya et Albus. Si le Brasegali affiche son expression neutre habituel, elle le connaît suffisamment pour observer l’éclat dans ses pupilles: au même titre que celle qu’il a fait la promesse de protéger envers et contre tout, son état le touche de manière bien plus intense qu’il ne le laisse paraitre.
Quant au sage Goupelin, c’est une mine soucieuse qu’il affiche, avant de renouer le contact mental, en tapotant sa paume de sa baguette.

(Nous devrions y retourner.)

‘’Allez-y, je vais…rester encore un peu’’

(Il n’est pas bon de rester à ressasser ce qui nous tourmente, ma petite.)

Est-ce vrai ? Après tout, ce n’est qu’une souffrance supplémentaire. Une fois passé le choc initial, il s’agit simplement d’une impression sourde à laquelle on s ‘habitue. Et puis, au fil du temps, elle devient même un compagnon de tous les jours, sans lequel il manquerait quelque chose, au sein d’un fragile équilibre.
Détournant le regard, Calua se remit à fixer les flots, en inspirant doucement.

(Calua, s’il te plait. Nous ne partirons pas sans toi, tu le sais bien. Ecoute…Je ne suis peut-être qu’un vieux fou, mais je sais reconnaître une jeune fille qui ne sait plus ce qu’elle doit faire et qui a besoin qu’on lui vienne en aide.)

‘’Ce serait si facile…’’

(Je sais. Mais il y a toujours une solution, crois-moi.)

‘’Une solution…’’

(Exactement. Calua…Reviens par là, s’il te plait)

Comme parcouru d’un frisson, la jeune fille secoua le tête, lorsqu’une sensation de fraicheur vint lui effleurer les chevilles. Elle ignorait par quel prodige, mais à présent, l’eau lui arrivait presque à mi-cuisses. Presque mécaniquement, sa tête pivota en direction des deux types Feu, à l’air franchement inquiets.
Dans sa poitrine, le tambourinement se faisait de plus en plus fort, de plus en plus douloureux, se muant finalement en une sensation plus lourde que le plomb, qui la tirait presque vers le bas et oppressait sa poitrine.

‘’...Désolé Albus. Ça fait trop…mal’’

(Calua, NON !)

Avant que le duo ne puisse réagir, la main de Calua avait volé à sa ceinture, libérant deux rayons rougeoyants depuis les Pokéballs de ces derniers. Sans leur laisser le temps de ressortir, elle appliqué rapidement deux des verrous qu’elle utilisait sur la Pokéball d’Agni pour éviter qu’il ne se déchaine, bloquant totalement les deux sphères.

‘’...Désolé…Désolé…”

Comme une litanie, les mots se répétaient encore et encore, tandis qu’elle lança les Pokéballs sur la plage, loin des flots. C’est à peine si elle entendit le petit *plof* caractéristique de l’impact, avant de reporter son attention sur l’océan infini qui l’entourait. Au loin, le soleil entamait sa descente, une ligne de feu commençant même à se dessiner à l’horizon.

Et l’eau commença à monter.
Elle sentait à peine ses pas sur le fond sablonneux. Pour elle, la mer aurait tout aussi bien pu s’élever comme pour l’accueillir petit à petit, pressée de l’engloutir en son sein.
D’abord ses jambes, puis sa taille, alors qu’elle inspirait de plus en plus lentement.
Puis, lorsque l’eau atteignit sa poitrine, elle détacha son foulard, avant de le laisser dériver. Elle n’en aurait plus besoin.
Une fois à hauteur d’épaule, au milieu du brouillard qui envahissait son esprit, une pensée la frappa: n’était-il pas un peu ironique pour une spécialiste des Pokémon Feu, de rejoindre le royaume de la mer? Un bref sourire vint illuminer ses traits.
L’eau lui montait à présent jusqu’à hauteur des yeux et Calua contempla une dernière fois la ligne flamboyante à l’horizon. Les reflets orangés se mêlant à l’azur, les étincelles dansantes et le son régulier des vagues et de la brise.

Oui, c’était vraiment magique.

Elle prit une inspiration, probablement sa dernière…et l’univers entier disparut, étouffé sous la surface des flots. Un lieu…paisible ? Oui, c’était le mot. Tout lui semblait ralenti, sans importance, il n’y avait plus que le silence. Elle se surprit à n'éprouver aucune envie de lutter. Seule sa jambe se crispa un instant, en un réflexe pour la propulser vers la surface, mais elle l’apaisa sans y penser.
Petit à petit, une sensation de brûlure vint lui étreindre les poumons…Mais elle tint bon. En comparaison de ce qui lui déchirait la poitrine, elle était parfaitement insignifiante. Et quoi qu’il arrive, elle ne durerait plus bien longtemps.
Elle était fatiguée. Si fatiguée.

‘’...ua’’

Un cri étouffé. Et avant qu’elle ne puisse en déterminer l’origine, la sensation qu’on lui saisit les bras, avant de la tirer brutalement vers le haut. La première prise semblait de petite taille mais l’autre était plus forte, plus massive et…étonnamment plus douce. La lumière orangée fusa à toute vitesse dans sa direction, avant qu’elle ne crève la surface de l’eau.
Sous le choc, la douleur disparut momentanément et elle inspira par réflexe une grande goulée d’air.

‘’Hmmmmmpf…*kof, kof*’’

Elle n’avait finalement bu la tasse que sous la surprise de se faire ainsi agripper. Dans un état second, elle se sentit tirer en arrière, se laissant emporter sans lutter d’aucune manière. Ce n’est qu’une fois sur le sable, à moitié affalée qu’elle sentit les deux prises se relâcher et qu’elle s’autorisa à ouvrir les yeux…Avant de manquer d’avaler une nouvelle quantité d’eau poussée par les vagues, en découvrant les deux responsables !

‘’...xy.’’

Les six pattes croisées, l’air le plus orageux qu’elle lui ai jamais vu, son starter voletait dans les airs face à elle. Ses élytres redressées, le Coxyclaque avait l’air complètement à bout, et pourtant, elle ne put supporter son regard. Ce dernier ne lui laissa pourtant pas la possibilité de s’esquiver et orienta son vol pour vrevenir dans son champ de vision…aux côtés de celui qui la soutenait pour lui éviter de reboire la tasse, avant de l’aider à se relever !
Et si la présence du type Insecte avait déjà causé un choc à la jeune fille, l’apparition d’un véritable fantôme lui fit l’effet d’un électrochoc !

‘’Sirius ?! Qu’est-ce que…tu fais là ?’’

Elle a beau être dans ses bras et sentir ses mèches détrempées lui chatouiller le visage, Calua ne parvenait pas à y croire. Sûrement une hallucination due au manque d’oxygène et…

‘’AIEUH’’

Ah non. Ou alors les hallucinations sont capables de lui pincer les joues, avec un air de nuage d’orage. Un peu incertaine, elle s’écarta doucement pour reprendre son souffle, avant de détourner à nouveau le regard.

‘’Vous étiez pas obligés-é-é-é-é-é”

Impossible de continuer. Entre Sirius qui la secouait comme un prunier et Apollo qui ne perdit pas de temps pour participer depuis son autre épaule, Calua se sentit emporter par un tourbillon. Au milieu du flou artistique qu’était devenu sa vision, un détail l'a marqué, cependant:  si Sirius était trempé, ses joues étaient bien plus humides que le reste. Une fois la tornade passée en revanche, le calme s’imposa de nouveau sur la plage, uniquement brisé par le bruit du ressac. Un instant s’envola…puis un autre…Et elle gardait toujours le silence.

‘Bon. On peut rester là jusqu’au matin, ou essayer de parler. Si tu t’en sens capable, évidemment. Ou alors, tu me donnes juste un nom et je vais lui péter les g…’’

*Snirfl*
Le nNoctali ignorait probablement ce qu’il venait de déclencher, Apollo n’ayant pas eu le temps d’entrer dans les détails. Mais en un instant, toute la tension accumulée par Calua, tout ce poids qui lui oppressait la poitrine parut s’envoler, pour venir se nicher dans sa gorge.
Un sanglot lui échappa juste avant que ses yeux n'inondent le haut du jeune homme (déjà complètement trempé) de larmes. Entre deux hoquets, elle sentit les mots déferler, comme un trop-plein longtemps retenu.

‘’C’est elle et c’est moi et j’en ai juste marre et j’en peux plus. J’voulais juste que ça s’arrête, et j’ai même pas réussi et en plus t’es mouillé et Appolo aussi et..et..et…’’

Les vannes étaient ouvertes et il faudra un long moment avant qu’elles ne se referment. Presque tremblante, l’énormité de ce qu’elle s’apprêtait à faire venait de frapper la Pyroli, l’engloutisant dans un véritable abîme de terreur.

‘’Je savais pas quoi faire, je sais plus quoi faire, j’ai jamais su, j’suis juste nulle, inutile, j’arrive à rien, jamais, avec personne….’’

Et les mots finirent enfin par mourir dans sa gorge. Un nouveau silence s’installa doucement. Elle attendait, qu’il réagisse, qu’il juge, qu’il se moque, mais Sirius fit bien pire : il se contenta de la serrer contre lui, sans un mot.
Un silence de plus en plus insupportable, jusqu’à ce que n’y tenant plus, Calua reprenne la parole. Étrangement, elle se sentait presque mieux après ce craquage…Comme si elle parvenait à mettre des mots sur cette sensation indescriptible.

‘’Tu..tu sais ce que c’était mon premier tour ? Un truc tout simple avec des cartes où j’voulais en déplacer une, d’un coté d’une pièce à l’autre. Et ben, j’ai jamais réussi. Et j’ai essayé et essayé et essayé mais même maintenant, j’y arrive toujours pas. J’en ai appris plein, je sais en faire plein, mais celui que je voulais vraiment apprendre, j’ai pas réussi.''

*Et ça, c’est toute ma vie, en fait*

Elle bégaya les deux mots avant d’enfouir sa tête dans ses mains une nouvelle fois pour retenir les larmes qui recommençaient à couler.

‘’Je suis pas comme vous, j’ai fait semblant jusque là mais je le savais juste pas…Je sers plus à rien, j'ai même pas réussi à te battre une seule fois, j'fais juste des tours, c'même pas de la magie. J’fais genre d’être une Coordinatrice mais quand je fais ce qui me plait, ça blesse des gens.''’’

Il allait à nouveau la pince ou la gronder, ou juste la lâcher, comme les autres…

‘’On est des coordinateurs, choupette. Le concept de défaite et de victoire, il est subjectif. Si c’était aussi simple que ca, on serait juste des topdresseurs et le KO règlerait la question. Ce qui compte pour nous c’est de faire passer un message et d’utiliser notre imagination et tes tours, c’est ton moyen de transmettre a ton public. C’est toi qui me l’a rappelé tu te souviens ? A mes yeux, ton sens du spectacle, tes tours, tout ca c’est ta magie. Tu as perdu l’inspiration là. C’est ok, ça nous arrive à tous, regarde le nombre de fois où je doute. Ce qui compte c’est apprendre a se relever, a avoir confiance et tu vas pas être seule pour ça, je suis la’’

Face à son air renfrogné, elle poussa un profond soupir…C’était juste la vérité. Et maintenant, le plus dur.

'’Je…je  doute pas que sur ça.  Je...je crois que j'étais amoureuse. Mais je sais pas comment on fait, je sais pas si c'est ça, je sais juste plus...Parce que quand je suis avec elle, c'est comme quand je suis avec toi, j'ai juste envie que ça continue. Et maintenant, ça pou-pou-rra plus’'

Pour le coup, elle aura au moins réussi à le faire sourire. Un pauvre sourire compatissant, avant qu’il ne rabatte ses mèches rigidifiées par le sel.

‘’ Je t’ai déjà parlé d’Hazel ? C’est la première fois que je suis tombé amoureux. Sans dire que ça s'est mal fini, ça s'est juste effrité dans le vent. Y’aura pourtant toujours une part de moi qui l’aime. Qui pense aux et si. C’est normal je crois. La première fois c’est toujours un peu spécial. Je suis désolé que ça n' ait pas marché cette fois-ci, Calua. Je suis désolé de te voir avec le cœur brisé. Je suis désolé de te dire que ca arrive. Mais ça va aller. On va s’engloutir quelques kilos de glace, regarder quelque chose pour se détendre, respirer et prendre du recul. On peut pas vraiment forcer les gens à nous aimer, ça ne se contrôle pas. Et si cette personne ne voit pas à quel point tu es exceptionnelle, tant pis pour elle. Moi je le vois. Et je te promets que tu trouveras quelqu’un d’encore mieux qui te verra comme tu le mérites.’’

Se dégageant doucement de ses bras, Calua prit position sur le sable, assise, les bras sur les genoux qu’elle ramena contre sa poitrine. Son regarde se porta à nouveau vers la mer : mais cette fois-ci, les flots lui parurent bien moins éclatants, presque indifférents à ses tourments. Ils ne lui apporteraient aucune réponse, Sirius avait raison. En cet instant, elle était complètement perdue…Mais rien ne l’obligeait à retrouver son chemin dans la seconde.

‘’Tu veux voir quelque chose de magique ?’’

La proposition du jeune homme lui fit tourner la tête d’un air interrogateur. Avec des gestes extrêmement calculés, ce dernier sortit une Pokéball, avant d’enchainer d’une petite révérence, le sourire aux lèvres. Puis, dans une posture digne des meilleurs moments de Tarak (8/10 par le jury, au moins), il lança cette dernière au-dessus de sa tête.

Dans un éclair de lumière dorée, les ailes puissantes de Soleil se hissèrent au-dessus des vagues, juste avant qu’elle ne prenne son envol en une vrille vers les nuages. Libérées dans son sillage, une multitude d’attaque Danse-Plumes vint former une colonne duveteuse, qui accrochait les derniers rayons du jour. A l’apex de son ascension, la Roucarnage pivota brusquement avant de déployer ses ailes au maximum. Une vague d’énergie parcourut ses dernières et sous l’effet de son attaque Zenith, les minces rayons du soleil qui disparaissaient à l’horizon, se firent bien plus fort et illuminèrent toute la baie et les plumes qui dansaient au-dessus du duo.

‘’Et maintenant, le final ! ’’

Presque exultant, Sirius vint retrousser sa manche, pour effleurer le cristal orangé ornant un bracelet d’argent. Sous son impulsion, la Gemme-Sésame se mit à luire, juste avant que son éclat ne se déploie tout autour d’eux. Avec un cri de défi, Soleil se laissa envelopper par cette dernière : sa silhouette commença à se modifier, à grandir tandis que sa crête se déployait en une somptueuse crinière dorée. Son envergure démultipliée, elle projetait son ombre sur la plage, au travers du voile généré par ses plumes.
Enfin, d’un puissant battement d’ailes, la type Vol projeta une série de tourbillons au milieu de ces dernières : la spirale ainsi créée vint entourer Calua et Sirius, tel un kaléïdoscope masquant et révélant la lumière du crépuscule, pour ne s’estomper qu’à la disparition totale du soleil par-delà l’horizon. Maladroitement, la Pyroli se saisit de l’une des plumes scintillantes, juste avant que cette dernière ne s’évapore entre ses doigts.
La sensation, chaude jusqu’au bout de ses doigts fins, ne tarda pas à disparaitre, pour autant que le léger sourire de la Pyroli ne s’efface.
Oui..C’était magique, en effet. Et l’air radieux de Sirius face à la performance de Soleil, l’était tout autant. Une expression que la Pyroli avait oubliée…

Avant qu’elle ne puisse reprendre la parole, un vrombissement attira son attention, avant de prendre place face à elle : l’air toujours aussi neutre, Apollo la contempla un instant…avant d’abattre ses six poings sur le sommet du crâne de la jeune fille !

‘’Aïe ! Pollo, ça va pas, ça fait super mal !’’

Sans s’en rendre compte, Calua se redressa brusquement, pour répondre à l’agression. Pourtant, le Coxyclaque ne broncha pas d’un pouce, avant de se contenter de la fixer. Une attitude qu’elle connaissait bien, irradiant littéralement d’une seule question : N’as-tu rien à me dire ?
Il avait supporté toutes les frasques de sa dresseuse. Il avait survécu à bon nombre de situations, toutes plus dangereuses les unes que les autres. À chaque folie, à chaque lubie, il s’était contenté de soupirer et de la suivre.

Car il l’aimait, son andouille de Calua.

Mais la voir se trahir ainsi, c’était hors de question. Pour elle, il avait parcouru la moitié du globe à tire d’aile, dans l’espoir de retrouver le grand dadais qui, sans qu’il arrive à en comprendre la raison, avait de l’importance pour elle.
Cette simple question resonnait entre eux, jusqu’à ce que la jeune fille, n’y tenant plus, le saisisse brutalement pour le serrer contre elle en laissant ses dernières larmes lui échapper. Les pattes posées sur ses épaules, Apollo aussi vit ses yeux à facettes s’embuer. Pourquoi est-ce qu’ils étaient tous aussi gentils avec elle ? Elle ne le méritait pas, elle était juste…

‘’...!’’

Prise dans son étreinte, elle se surprit à se remémorer une toute autre : celle d’un vieil homme au costume de scène d’un jaune éclatant, son haut de forme vacillant dangereusement sur sa tête. Main dans la main avec une enfant, il s’inclina bien bas face à son public, l’encourageant à faire de même. Et lorsque la timide gamine lui avait dit qu’elle n’avait pas le droit parce qu’elle n’était pas la magicienne, il s’était contenté d’un éclat de rire. D’un geste de son baton de cérémonie, un nuage de fumée les avait enveloppé tous les deux, juste avant qu’il ne se retrouve sur le dos de son Trioxhydre, volant au-dessus des spectateurs émerveillés. Et ces quelques mots qu'il lui avait glissé à cet instant…

‘’Tu n’es pas une magicienne, cela est vrai, ma jeune assistante. Non, tu es comme tout le monde. Et c’est bien ça qui te rend capable d’une telle magie…Après tout, comment accomplir quelque chose d’exceptionnel, si on l’est déjà ?’’

Les mots résonnaient. Comme des petits soleils qui brulaient littéralement à l’intérieur de son corps. Lentement, elle s’écarta d’Apollo, avant de contempler ce dernier, puis Sirius, qui la regardait également. Elle venait de prendre conscience de quelque chose. Une chose tellement évidente qu’elle en devenait presque risible.
Sans préavis, elle se jeta sur Apollo pour lui saisir les pattes avant de les secouer.
Puis, dans le même mouvement, elle lacha ce dernier pour faire de même avec la mains de Sirius, sans cesser de répéter le même mot.

‘’Merci..merci, merci, merci, merci !’’

D’une pirouette tourbillonnante, la jeune fille fit quelques pas en arrière, avant de prendre appui sur le sable. Instinctivement, sa main vola jusqu’à son foulard…pour découvrir un espace vide. Pourtant, cela la perturba moins qu’elle ne le croyait.

‘’Merci beaucoup, merci infiniment ! Je le savais pas, j’étais pas sûre, mais on s’égare parfois, n’est-ce-pas ? Merci beaucoup ! Je ne suis pas une super Coordinatrice. Et je suis pas une mauvaise Coordinatrice ! Je ne suis pas une pro des types Feu et assurément pas une artiste ! Et non je ne suis pas une magicienne! Vous savez ce que je suis ?
Je suis… une idiote, avec une baguette magique, et un Coxyclaque. Je passe partout, je fais des tours et j’amuse la galerie. Je n’ai pas besoin que ça soit magique et ça ne sera jamais le cas, parce que ce n’est pas à moins de décider si ça l’est ! Je ne sais même pas où je vais aller et ce que je vais rater ou réussir et ça n’a AUCUNE importance. ‘’


Et la voilà partie dans un immense éclat de rire. Si puissant, si cristallin qu’il semble emporter avec lui les derniers reliquats du poids qui l'enserrent. Elle riait, non pas de soulagement mais face au ridicule du monde : elle était si stupide que ça en devenait l’une des plus belles farces à laquelle elle avait assisté. Se laissant aller en arrière, elle s’effondra les bras en croix, sans jamais cesser de rire, le dos plaqué sur le sable.
Les mains dans les poches, Siris se rapprocha d’elle, avant de se gratter l’arrière de la tête. Pouffant sans pouvoir s’arrêter, elle se contenta de la fixer, l’air ravie.

‘’Et maintenant…je fais quoi ?’’

‘’Aucune idée. C’est à toi de me dire ce que tu veux, ma louloute’’

Il ne lui fallut qu’une fraction de seconde pour répondre.

‘’Je sais pas.’’

‘’...Ça risque d’être compliqué, tu ne crois pas ?’’

‘’Non, je te jure. J’en ai aucune idée. C’est génial, non ?’’

‘’J’imagine.’’

''Mais je vais trouver, t’inquiètes Starius ! Il me faut juste un point de départ. J’rassemble mes affaires et on va aller chercher notre bout de chemin, avec Apollo !
Par contre…Tu crois qu’on pourrait…’’

Pour toute réponse à sa question muette, le Noctali se contenta de lui tendre la main pour l’aider à se relever. Avec un glapissement ravie, Calua saisit cette dernière, pour l’entrainer dans une véritable valse sur la plage, tout en progressant vers le sentier en direction du campus. Elle ne participerait peut-être pas à cette fête, mais elle venait de trouver son propre festival…et le sien durerait chaque jour de sa vie, à partir de cet instant.

‘’Bon, maintenant, tu peux me le dire…Qui est responsable des émois de MA Calua, que je lui fasse sa fête ?’’