Binding promises were made on my soul, grand illusions lead astray,
Ice cold winds swept my heart away, so please bring me back to you.
Ses mots coupaient comme des poignards plantés dans une plaie déjà béante. Sans même que j'ai le temps, et encore moins la force de réagir, Yuki me remit de force au lit. Mon expression résolue ne me permit pas pour autant de me complaire de cette situation. Je me rassis aussitôt, bien que je n'ai pas reposé le pied à terre. J'étais prête à me remettre debout si j'en ressentais le besoin... bien qu'à vrai dire j'ai simplement envie de l'entourer de mes bras pour m'assurer qu'il ne me laisserait pas plantée là. À ce stade je me fichais pas mal de ce que je déclenchais, et encore plus du retour de flamme qui allait m'arriver droit dessus. Je ne comprenais pas pourquoi ni comment nous en étions arrivés à ce stade. Je ne savais pas ce qui me valait une telle réaction, puisqu'il ne cessait de me dire qu'il se fichait de mes sentiments passés pour Ace, ce que je pensais être la pomme de la discorde.
Je n'eus d'autre choix que d'encaisser tout ce qu'il avait à dire, le regardant dans les yeux. Je ne pouvais pas baisser les yeux, ce qui reviendrait à céder et abandonner. Non, plus maintenant, sûrement pas sur ce sujet. Je passai tristement sur la violence de ce qu'il venait de dire, comme si tout ça m'était passé à côté. Il me comparait aux gens qu'il méprisait et détestait, comme si pendant tout ce temps tout n'avait été que tromperie et faire semblant. Je déglutis. J'avais l'impression que plus j'essayais de bien faire en expliquant ce qui me motivait, et plus il le prenait mal. C'était une conversation de sourds, tout simplement. Il était en train de dégager d'un simple revers de main tous les efforts -certes maladroits- que je faisais pour lui faire comprendre ce que je ressentais. De plus j'avais du mal à saisir pourquoi autant de ressentiment ne faisait surface que maintenant, alors que les faits en question remontaient de plus en plus. Si je l'avais blessé tant que ça, pourquoi ne m'en avait-il pas parlé plus tôt ? Pourquoi avais-je dû lui tirer les vers du nez et presque le forcer pour qu'enfin il en vienne à ce qui le tracassait ? Crétin obstiné de Tanuyuki !
« Oui, c'est dur, justement ! Ce n'est pas parce que tu peux dire tout ce que tu penses avec naturel que c'est aussi simple pour tout le monde. Comme je te le disais, personne ne peut m'exiger de fonctionner différemment, pour la bonne et simple raison que ça ne suffira pas à en faire une réalité. Oui, j'aimerais bien pouvoir dire ce que je ressens aussi facilement que je respire, mais je ne peux pas. Cela fait un mois que j'essaie avec toi, et rien ne sort. Tout ce à quoi j'arrive ce dont des ébauches minables de ce que je sens vraiment. Tu ne crois pas que j'en suis la première frustrée, peut-être ? »
La tristesse était lisible dans mon regard. Je ne savais pas comment le dire autrement, pas dans l'état ravagé où se trouvait mon cerveau, pas alors que mon cœur se comprimait douloureusement à la tournure aigre de la conversation. Il m'avait traitée de fille bête, égoïste, cruelle, et maintenant de suicidaire ? Et ce serait quoi ensuite ? De superficielle, manipulatrice et dévergondée ? Un sourire sarcastique dansa au coin de mes lèvres. J'encaissai ses accusations encore et encore. Il venait me pourrir alors que j'étais à l'hôpital après avoir bien failli y passer, mais c'était moi l'égoïste. Oui, sans aucun doute. Je pourrais aisément riposter, dans ce ton tranchant qui était à mi-chemin entre le reproche et l'insulte, mais je ne le fis pas. Aussi altérée que je sois, je ne tenais pas à envenimer les choses. Je ne voulais pas rentrer dans son jeu.
Néanmoins intérieurement je bouillonnais, déjà résignée à l'idée que quoi je fasse ou dise, il partirait en bafouant nos promesses. Quand l'avais-je rabaissé, quand lui avais-je ne fusse que mal parlé ? C'était n'importe quoi, du pur et simple n'importe quoi. Il disait que je le retrouverais quand je serais redevenue moi-même... mais il se trompait. La vraie Chiho était là, juste devant lui. Blessée et nue, fragile et désespérée. C'était elle la petite chose pathétique qui se cachait derrière la forteresse de sourires, de gentillesse et de bonne humeur. J'en avais honte, mais je ne pouvais pas reculer. Il l'avait déjà vue, et loin de vouloir profiter que mes défenses soient nulles, il faisait un carnage entre mes murs. Il se détourna, et je baissai enfin la tête, vaincue. Qu'il parte si ça lui chante, mais qu'il n'ose plus jamais remettre en doute mon affection pour lui.
« Tu peux t'en aller si tu veux, mais si tu oses remettre ce que je ressens pour toi en doute ce n'est même pas la peine de me reparler à nouveau, t'entends ? »Mon ton était glacial, empli d'une colère froide qui transpirait la solitude. Je ne pouvais pas l'obliger à rester à mes côtés s'il ne le voulait plus, je ne pouvais pas l'empêcher à tenir ses promesses comme je comptais tenir les miennes. Je ne pouvais pas blâmer Jirachi de ne pas réaliser mon vœu le plus cher... Mais je n'allais pas le laisser salir et cracher sur ce que l'on avait déjà bâti ensemble... Ni maintenant, ni jamais. Les larmes montèrent à mes yeux, retenues à leur bord par le fil d'infime fierté qu'il me restait. Je ne le regardais plus, mais je jugeais qu'il devait être sur le point de partir. Je criai alors dans sa direction, contenant l'impulsion de lui courir après pour l'empêcher de partir, quitte à me briser les deux jambes. Je ne pouvais pas le perdre. Je repensai à la façon dont j'avais perdu papa, à la façon dont j'avais bien cru avoir perdu ma mère aussi lorsqu'elle m'avait confiée temporairement à mamie Christelle. Mon cœur se serra.
« Pourquoi m'avoir menti ?! Quelle espèce de salaud me promettrait d'être toujours là pour moi s'il me tourne le dos à la première dispute ?! Tu ne comprends pas que je... que je t'...... MERDE à la fin ! »Je tapai du poing contre le matelas, furieuse contre moi-même. Pourquoi ça ne voulait pas sortir, putain ?! Ce n'étaient que trois petits mots. Trois mots simples que je m'étais déjà répétés dans ma tête des centaines et des centaines de fois. Frustrée, je me pris la tête dans les mains en fermant les yeux. J'inspirai un grand coup pour essayer de me contrôler et calmer ma furieuse envie de pleurer. Non, je devais être forte. Je rouvris les yeux, et vis le visage de Yuki en face de moi. Surprise, j'eus un mouvement de recul par instinct... mais ne pus fuir son baiser. En fait je ne le voulais pas. Lorsque ses lèvres touchèrent les miennes, j'agrippai sa nuque avec force pour l'attirer vers moi, avec une urgence et une audace qui n'étaient pas les miennes. Lorsque finalement nous nous séparâmes pour reprendre notre souffle, j'avais toujours envie de pleurer... seulement j'étais trop soulagée pour me laisser aller. Je ne voulais pas qu'il pense que j'étais déçue qu'il soit resté.
« Je ne veux pas te perdre, je ne le supporterais pas. Je n'ai jamais réussi à surmonter les pertes et les abandons... J'ai déjà perdu papa, je ne veux pas que tu t'en ailles aussi. »
Je lui pris les mains d'un geste frénétique, la panique dans les yeux. J'avais l'impression que si jamais il s'en allait, il ne reviendrait plus jamais. Qu'il finirait par bientôt m'oublier et trouver un autre binôme, une autre amie, une autre am... Amoureuse. Oui, je l'admettais, j'admettais enfin ce qu'au fond je savais déjà depuis longtemps. Je n'avais pas de peine à réaliser l'intensité de ce qu'il évoquait en moi, en fait ce que je peinais à faire, c'était le lui exprimer clairement. J'avais essayé de le lui faire ressentir et deviner, j'avais espéré qu'il puisse percevoir les sentiments qui transpiraient dans mes actes, mais à ma grande détresse ça ne suffisait pas. Je réalisais qu'il fallait que je réussisse à baisser mes murs encore plus, d'une façon ou d'une autre. Mais comment faire ? Je n'en avais aucune idée. La seule chose qui m'obsédait, c'était de le garder près de moi. Il était à la fois mon problème et ma solution. Mon poison et mon antidote. Je serrai Hikari dans mes bras, un peu timide... embarrassée de la direction que prenait mon esprit.
« Je tiens trop à toi pour te laisser partir. Si tu étais parti j'aurais sûrement demandé à Robyn et Hikari de te ramener par la force. Ou alors j'aurais retiré mon atèle pour te suivre. Je... Je suis désolée si je t'ai blessé, ce n'était pas mon intention. Je voulais seulement dire ce que je pensais, je... Si j'ai parlé de lui encore une fois c'était parce que je cherchais comment te dire les choses, comment te faire comprendre qu'il n'est plus rien pour moi. Il... Il n'y a que toi. »Ce n'était sans doute pas ce qu'il voulait entendre, mais c'était tout ce dont ce dont j'étais capable pour l'instant. Le regardant dans les yeux en soupirant, je serrai ses mains dans les miennes, priant le ciel pour qu'il ne s'énerve pas encore, tandis que j'essayais juste de faire un pas en sa direction.