Ce matin, j’en ai peut-être fait un peu trop. On ne passe plus trop aperçu aux yeux de tous lorsque dans la même journée, on cogne un mec et on beugle comme une débile pour rire de la gueule d’un autre type, tout en l’injuriant avec tendresse et amour. Surtout si vous possédez une longue chevelure sarcelle chatoyante comme la mienne. Là, vous êtes foutu ! Cependant, ce fut un début de journée qui restera à jamais gravé dans ma mémoire ; les occasions de rigoler telle qu’elles l’ont été lors du discours du vice-directeur sont plutôt rarissimes, à moins que ce soit ma dérisoire personne qui ait été trop longtemps à l’écart de la société de notre monde. Et puis, c’est toujours dans cette même journée que j’ai reçu mon nouvel ami, qui sera mon éternel compagnon et celui qui assistera du début à la fin ma carrière de dresseuse.
Après ces événements époustouflants, j’avais passé la plupart de l’après-midi à visiter les lieux sur le campus de l’académie. En effet, la Pokémon Community s’est conçue sur une île absente de présence humaine à la base, pratiquement hors de portée de la civilisation moderne, alors tout ce qui est présent ici est tout nouveau pour chacun et chacune. Par conséquent, il est de mon devoir de visiter les différents endroits de l’institut. Je me suis vite lassé des emplacements comme la bibliothèque, ou encore les serres. J’y trouverai certainement une utilité dans un futur proche, mais disons dans de termes simples que pour le moment, les livres et les baies sont le cadet de mes soucis. Or, les coins comme l’arène de combat, les distincts dortoirs et la fameuse boutique ont été digne de mon intérêt et de ma curiosité.
Nous approchons le soir, l’heure du dîner est pratiquement passée et je n’ai toujours rien avalée pour assouvir la faim de mon pauvre petit estomac. Celui de la petite souris commence également à émettre un grognement peu agréable à l’oreille. Certes, j’avais complètement oublié qu’il faut que je le nourrisse, lui aussi ! On va donc sortir les instincts maternels ! Néanmoins, comme je viens d’arriver et qu’il y a rien dans le frigo du dortoir – comme si on en avait un de toute façon – direction la cantine pour mettre fin à ce supplice ! Et puis, il n’y a pas d’épicerie dans le coin, alors on va faire avec ce qu’on a.
Après une petite promenade, nous fûmes ravis d’entrer dans le complexe qu’est la cafétéria pour assister au spectacle de fermeture de la journée ! J’entre, je fais deux pas et que vois-je ? Un Fantominus qui fait donne la chair de poule à un brun et ce dernier échappe son plateau et son contenu dans les airs. Direct, sa gueule me fait pouffer de rire, j’appose mes mains sur ma bouche et mon nez pour ne pas faire de bruit avant de me cacher derrière une table en m’accroupissant. Après m’être calmé un peu, je me remémorais du visage de la victime : tronche assez fine, crinière noir et violette, borgne de l’œil droit. Un plan se dessinait dans ma tête alors que je susurrais des commandes à Pika. La créature leva le pouce en guise de compréhension sur un sourire narquois. Parfait, on est bon pour y aller.
M’assurant que le jouvenceau s’était penché pour ramasser son gâchis, je pris Pika et m’approcha du martyr discrètement – car oui, c’est un véritable martyr que nous avons ici. Tous ces bandages sur la peau, il doit bien y avoir une raison derrière ça ! Tel un ninja, adepte des arts de l’assassinat en silence, je me précipite vers lui en utilisant son angle mort comme atout puis lorsqu’il eut fini, et fis volte-face dans ma direction, je lui braquai mon Pikachu direct dans sa gueule. Mais la souris électrique faisait une grimace plutôt… amicale !
Place au spectacle !
C’est sur un sourire d’outre-tombe de la part du rongeur chromatique que le brun à l’unique perle améthyste devint tétanisé par la terreur. Le jeune mortel de sexe masculin étant trop occupé à ramasser son gâchis avant de faire volte-face en direction de son bourreau, ce dernier eut droit à une véritable surprise ! La tête qu’afficha le borgne lors de son cri de détresse était un spectacle tout à lui, une œuvre – si capturée par un quelconque appareil numérique – qui vaudrait des milliards si jamais reproduit par un artiste de renom – tel Léonard de Vinci ou Picasso, quoiqu’admettons que pour ce dernier, le résultat final ne serait pas autant prodigieux comme nous avons tendance à l’imager. Contrairement au Pikachu qui se sentait un peu mal à l’aise après la frousse qu’il a infligé à son martyr, la luxuriante adolescente était tortillée par sa respiration saccadée et irrégulière. Son faciès débutait à prendre des teintes incarnats à force de manquer son souffle. D’ailleurs, même le spectre du dresseur prenait une bonne dose de rigolade face à ce divertissement qui semblait bien lui plaire.
Après s’être apaisé, le cœur assurément plus léger, la victime de la native de la région du Kanto appris à cette dernière qu’elle lui a fait peur. Un fait qu’elle ne savait guère ! Ellie croyait sérieusement que le jeune homme avait réagi de la sorte pour lui faire plaisir et finir cette première journée sur le campus de la Pokémon Community en tout bonheur et en toute joie… Évidemment, ceci est du sarcasme de pauvre niveau de la part de votre narrateur bien-aimé. Alors que la Drystan croyait avoir tout vu, des larmes de rigolade commencèrent à lui monter aux yeux, cédant un effet miroitant à ses scintillantes perles sarcelle et elle se plia de rire à nouveau. Le garçon venait tout juste de se présenter, de décliner son identité. Une impression de pathétisme s’imprimait dans l’esprit de notre protagoniste à propos de ce Peter. Ce type la distrayait – dans un sens favorable et non discriminatoire. Comme quoi la meilleure chose à faire lorsque l’on frôle l’arrêt cardiaque, c’est de se présenter. Sa voix enchanteresse, bridée par son souffle intermittent, résonna dans le désert absolu qu’est la seule et unique cafétéria du campus.
- Vr… Vraiment ? J’ai passé à deux cheveux de t’envoyer dans l’au-delà via une crise de panique, et tu ne trouves rien mieux d’autre que de faire ami-ami avec ton bourreau ?
Ne parlons pas de la longueur des cheveux céleste de la dresseuse, ce n’est pas ce qu’il y a de plus exact pour correspondre à la métaphore. Le rongeur électrique sur ses épaules, se grattant l’arrière-tête en guise d’excuse envers sa proie, contrairement à la riche adolescente encapuchonnée qui tenait de ses deux mains son ventre, tentant tant bien que mal de reprendre un semblant de calme. Quelques secondes passèrent avant que la maîtresse du Pikachu chromatique se relève, bien droite, passant son index et son pouce sur chaque paupière pour évacuer le liquide qui y perlait.
- Je suis Ellie Drystan, du dortoir Pyroli. Et voici mon partenaire, Pika. A défaut d’être légèrement polie – car la courtoisie veut que l’on décline notre nom complet lorsque l’on se présente à une femme – je ne pensais pas que tu sois un grand trouillard ! Le sursaut, quiconque aurait compris, mais la terreur absolue ? Ahaha !
Le bout de son index vint pointer le fantôme qui tirait la langue au duo – à moins que ce soit une grimace à l’intention du tous. Son sourire ravissant et joyeux, révélant ses dents d’un blanc brillant, témoignait qu’elle n’était vexée au rien au monde. Ce Pokémon l’amusait, au contraire.
- Je vois également que ton compagnon est ton revers de la médaille – le caractère opposé au tiens.
Faisant volte-face dans la direction inverse au brun pour aller s’approprier un cabaret à son tour, elle se dirigea vers l’endroit pour s’emparer de ce qui est disponible. Mais une fois sur place, elle s’aperçue du manque de variété dans le menu. La conséquence de venir se servir trop tard, probablement.
|
|