Putain.
Ça craint.
Et son regard s'attarde sur les mains, aux longs doigts fins. Ces sales mains de couturier. Cette peau de velours aux senteurs parfumées et ces ongles parfaitement taillés. Trop beaux. Trop manucurés. Et pendant un instant seul son estomac semble saisir l'horreur de la situation : elle voudrait vomir. Elle voudrait déglutir tout ce beau poison qu'elle s'est enfilée la veille... Car c'est sous ces sales mains que son corps, et son âme, ont étranglé la nuit. C'est ces mains qui l'hypnotisent alors que le jour, vengeur de son aimée, l'assassine. L'aube est son bourreau.
Un geste, réflexe étonnamment pudique : et elle s'enroule sous la couette. Comme une armure. Deux pupilles de glace frappe la figure enfarinée de Sirius, qui réalise peu à peu l'impensable.
- Qu’est-ce que tu fous là ? qu'il demande.
Elle glapit. Ce qu'elle fout là ? Elle est sans doute la première à se le demander. Comment les boucles blondes d'Hope sont devenus chevelure corbeau ? À quel moment cette foutue Bellamy de la veille s'est dit que c'était une bonne idée d'atterrir ici. Comme un oiseau sans instinct, à l'aile blessée. Renifles. Inspires. Pour le coup, elle se hait... Elle est son impulsivité. Tout en elle la dégoute... Ces sensations volatiles d'alcools et les marques qui parcourent ses sensations. Comme des coups de becs sur son désir. Cette nuit... Son corps... A apprécié. Oui, assurément, gerbant. Cette nuit sous le regard de mère lune, la rose s'est laissée séduire par une étoile. Et quel étoile. Quelle erreur.
Et ça n'enlève rien à son dégoût alors que ses yeux s'attardent sur les grains de beauté du brun.
-Mets un t-shirt, Powell... ordonne t'elle presque suppliante.
Dans le même temps, le petit oiseau apeuré qu'elle est se retourne et récupère les vestiges de la nuit. Ce bout de tissu offert par Calua... Il n'y donc pas eu de case dortoir des mentalis. Rassurant en un sens, hors de question que les filles l'apprennent. Comme un écho du nouvel an : les tissus tombent et recouvrent maladroitement les épaules dénudées de l'étudiante. Mal fagotée, petite souillon -comme perdue dans des chutes de tissus déchirés par sa propre sauvagerie- se lève et salue modestement le pokémon qui rentre armée d'un plateau.
Et les souvenirs arrivent à la pelle, si ce n'est ceux d'hier : Adara. C'est son nom. Adara et sa tempête verte, adara est la perte de connaisance de sirius. Adara et la honte de Bellamy. Idalienor avait pris sa place en tant que victime mais elle restait coupable.
Alors elle se tait presque. Saisit le verre d'eau et se contente d'un fluet "merci" timide. Soupire : rien ne va. Son mal de crâne se mélange à son envie de gerber sans qu'elle ne sache vraiment si c'est lié, ses souvenirs manquants sont comme un poignard planté dans la plaie encore béante de ceux qui sont bien là, plus anciens et plus sombres. Et il y a... Sirius.
Elle le regarde. Ah merde, pourquoi est t'il si beau ? Même dans cet état pathétique. Ses cheveux vraiment décoiffés le rende sauvage, ses cernes font ressortir ses pupilles et... Putain. Il est détestable. N'y a t'il que dans les films que les ordures sont inregardables ? Pourquoi voit t'elle toujours sirius comme Tom alors qu'il devrait déjà être Voldemort ?
La rose se mord la lèvre. Pas le moment, Bellamy. Assurément pas le bon moment. Prendre l'initiative, tu dois. Alors elle dépose son verre d'eau et se déplace bon gré, mal gré vers la fenêtre. C'est sûr que le semblant de tenue qui recouvre à peine sa vertu n'aide pas. Elle jette un regard à l'extérieur : il est tôt. Trop tôt. Mais c'est bien. Son instinct de survie fonctionne toujours : le walk of shame sera plus facile à effectuer à l'abri des regards givrali. À l'abri des rumeurs qui... Sa tête atterrit lourdement au coeur de ses paumes. Putain de merde. Qu'est-ce qui serait le mieux ne plus jamais toucher à l'alcool ou enterre cette matinée sous des litres de rhum arrangé ?
- Je crois qu'on sera d'accord pour... N'en parler à personne, hein, Powell ?
Car personne ne doit savoir. Ça serait catastrophique. Pas pour sa réputation, elle n'en a rien à faire... Mais hors de question qu'un random lui rappelle son erreur au détour d'un couloir. Assurément hors de question et...
Un éclair.
Ça la renverse, ça l'abat, c'est physique. C'est comme une nausée intenable, comme un coup de poing dans les tempes. Elle ne pose pas de question et se saisit immiédatement de la poubelle qui traine à proximité du bureau, à proximité du lit. Et... Pour un peu elle vomirait presque dedans. Pour un peu elle s'enterrait sous les feuilles griffonnés pour ne jamais sortir mais il y a plus urgent.
-Sirius...
La bouche est pâteuse, le teint est blême, le problème trop urgent. Alors ouais, le prénom sort tout seul. C'est le bien le seul à sortir, car ses fichus souvenirs remontent pas à la surface. La rose ne peut se fier qu'aux sensations de son corps endolori et plein de courbatures. Et au poids dans sa poche aussi. Purée : elle a le sien. Celui qu'elle avait prévu si josh se montrait à la hauteur. Bien là, dans sa poche, intact.
-Est-ce qu'on a bien... ? Non, ce n'est pas la bonne question. Il y plus important, plus effrayant. Sirius, dis moi que t'as un bout de latex qui traîne dans ton lit ?