Cette fois-ci était la bonne, j’en étais persuadée. Le Psykokwak semblait tenir debout par on ne sait quel miracle. Il changeait de jambe d’appui toutes les deux secondes, jouant de son équilibre avec maladresse, épuisé. Nygma l’avait sérieusement affaibli et ce dernier refusait toujours de céder, ce qui forçait mon admiration. Son espèce n’était techniquement pas connue pour sa combativité, ni même pour sa grande présence d’esprit, alors c’était d’autant plus étonnant. J’avais hâte de faire connaissance avec le jeune habitant de l’île Pitaye, et de voir s’il était aussi perspicace qu’il en avait l’air, ou bien si ce n’était que l’illusion d’un instant teinté d’adrénaline. Je souris, tandis qu’enfin cette pokéball s’immobilisa au sol. Je lâchai un petit cri victorieux et serrai triomphalement le poing, très soulagée. Emportée par ma joie, je me laissai même jusqu’à me jeter dans les bras de Nygma, pokéball en mains… même si son coup de langue affectueux sur ma joue faillit me faire tourner de l’œil. Il avait toujours tendance à oublier que ce genre de choses n’était pas si sain que ça pour moi. Un peu confuse et la tête qui tournait, je gardai mon nouvel ami dans mon sac afin de le laisser se reposer.
« C’est vraiment bien joué… je suis fière de toi, tu sais ? J’étais sûre qu’en unissant nos forces, on pourrait le faire. C’était un beau combat. »
J’avais balbutié un peu hésitante, et surtout avec les neurones qui s’entrechoquent à cause du manque soudain d’énergie, mais le cœur y était. Je le pensais vraiment, et j’étais on ne peut plus satisfaite de l’issue des événements. En plus du reste nous avions trouvé un adversaire honorable, ce qui nous avait permis de sérieusement tester la compatibilité de notre duo improbable. Nous n’avions pas de quoi rougir, surtout pour un premier essai. En vérité j’étais certaine que l’avenir nous réservait encore plein de bonnes surprises… Contente de ma réussite, je conseillai à Nygma de prendre un peu de repos dans son foyer portatif, une proposition que ce dernier approuva après m’avoir fait quelques grimaces comiques. Je souris. J’étais vraiment gâtée de l’avoir croisé au Safari, surtout que ce n’était pas le genre d’énergumène que l’on pouvait rencontrer tous les jours.
Je regardai l’heure sur mon Ipok. J’avais encore assez de temps pour faire un tour, prendre quelques photos, et éventuellement capturer un deuxième Pokémon si je faisais une rencontre intéressante. Suivant donc la même logique qu’un peu plus tôt, j’en appelai à Saaz, ma Scalpion. Cette dernière surgit de sa Pokéball en me faisant un salut martial, chose que j’avais toujours un peu de mal à comprendre. J’en déduisais qu’elle avait sûrement un attrait particulier pour les entraînements de Jackie, mais à vrai dire j’en venais à me demander si ce n’était pas un peu plus complexe. Comme c’était le seul autre Pokémon (à part Gee bien sûr) qui m’avait été offert par le Collectionneur, j’en venais à légitimement m’interroger sur son origine. Se pouvait-il qu’une partie des bêtes qu’il détenait aient eu un contact avec la prof la plus martiale de l’académie ? J’aurais aimé pouvoir dire que non, mais c’était une supposition plutôt risquée. Dans tous les cas Saaz était disciplinée à l’extrême et je n’allais pas m’en plaindre, même si je regrettais qu’elle manque un peu de spontanéité. D’un autre côté son côté sérieux la faisait bien s’entendre avec le taciturne et grognon Syl, ce qui n’était pas plus mal. Ce n’était pas parce qu’il était une saleté de rabat-joie qu’il ne pouvait pas se faire des amis… Et bon je l’aimais quand même malgré son habitude de râler sans raison.
D’ailleurs je les aurais bien vus se battre dans un combat duo, œuvrant de concert pour remporter un combat acharné devant les foules en délire. Je m’imaginais déjà sourire fièrement devant la prestation de mes petits Pokémons. Un rêve improbable c’est sûr, puisque je n’étais pas une férue de combat contre d’autres dresseurs. Ceci étant dit il n’était pas interdit de rêver, et il en fallait pour me motiver à continuer de progresser. Une progression qui pour l’instant me paraissait aussi dégagée que les immenses champs fleuris de l’île. Je souris en voyant la façon dont Saaz avançait, le pas assuré tout en faisant bien attention de ne pas découper des fleurs par mégarde. C’était mignon de voir que derrière cette apparence agressive et froide comme l’acier se cachait un grand cœur et pas mal de sensibilité. Je l’appréciais déjà, même si notre lien restait encore récent. Nous approchions de la lisière des bois, dont les arbres couvaient silencieusement une faune invisible, lorsque des flammes rasèrent mes cheveux de très près. Effrayée, je criai avant de faire plusieurs pas en arrière.
Un Goupix sauvage sauta alors des hautes herbes, l’air aussi adorable que courroucé. Et je dois bien l’avouer, j’étais tellement charmée par cette petite bouille de peluche vivante que je manquai d’oublier immédiatement cette agression gratuite. Me craquant les doigts en secouant la tête, je me forçai à me reprendre. J’avais été attaquée c’est un fait, mais je n’allais pas laisser passer la chance d’attraper un Goupix ! J’échangeai un regard décidé avec Saaz, qui sautillait déjà impatiemment, apparemment peu soucieuse du désavantage de type. Affronter un type feu ça n’allait pas être de tout repos, mais visiblement cela ne lui faisait pas peur ! D’accord, alors je n’allais pas trembler ! Une main posée sur une Hyperball, je m’impatientais déjà.
« Lance Danse-Lames, attends qu’il attaque à nouveau, et puis riposte avec Assurance ! Ne lui laisse pas la moindre chance de te faire mal ! »
[Lancer d’une HyperBall ! ]