Je revenais de l'un de mes cours, la tête dans les nuages, Ash ouvrant le chemin en trottinant comme un bien heureux, la trompe haute. Ce à quoi je réfléchissais? Voyons, la réponse était bien trop évidente. La Saint-Valentin était de plus en plus proche et, bien que mon léger problème avec Ouji-sama était majoritairement résolu suite à mon entrainement avec Ruby, il y avait encore autre chose pour me porter à la réflexion. Effectivement, mes essais de cuisine en compagnie de Cael s'étaient soldés par un échec assez... déprimant. Du coup, je devais trouver mieux. Des chocolats achetés? Ce n'était pas super super, ça faisait genre cadeau facile et peu coûteux surtout, de quoi sans grande valeur au final. Serait-il sage de se détourner des choix traditionnels et d'offrir autre chose que des chocolats? Après tout, il serait bien plus heureux de recevoir un oeuf de Pokémon de type acier par exemple, mais ça ne se trouvait pas en claquant des doigts pour autant. Hmm, dilemme dilemme. Je fus toutefois tirée de mes pensées par mon Phanpy qui s'était arrêté net, reculant vers moi en regardant autour de nous. Bon, qu'y avait-il cette fois? Regard circulaire dans le couloir du dortoir Mentali et.... oh. Sweet mother of Arceus....N'a même pas été le visiter à l'infirmerie....
...crois qu'ils sont encore....
....l'autre jour avec un kit de massage....
....phyllali, sérieusement....
...cette fille mérite juste de se faire....
....en plus Allen quoi, le plus....
...et puis même des chocolats avec...
...trois en même temps?!...
.....vais aller avertir notre prince moi-même...
...cheveux roses, elle veut juste de l'attention....
.....pauvre Kaeko, partager sa chambre avec....
..devrait la dénoncer au zarbdomadaire...
....tu sais qu'elle a déjà giflé une...
......ne doit même pas prendre soin de ses pokémons....
Un instant. QUOI?! Je sentis la rage monter en moi, je sentis mes yeux qui me piquaient et ma gorge se nouer. Elles n'avaient même pas la décence de faire attention pour que je ne les entende pas. Non, elles étaient là, dans le couloir en petits groupes dispersés, s'échangeant des mots à voix rapide, me jetant des regards insistants, mais aucune n'osant venir me parler. C'était quoi ces histoires débiles?! Elles étaient sérieuses là? Cette bande de pimbèche revenait à la charge avec cette histoire idiote et maintenant, comme si ce n'était pas suffisant, elles répandaient des rumeurs de merde sur mon dos en toute impunité?! Sans même s'en cacher?!! Salopes de mentaliennes!!!! Trop, c'est trop.
- J'espère que vous savez que je vous entends toutes! Non seulement vous perdez votre temps à salir la réputation des gens, mais est-ce qu'il y a au moins l'une de votre bande de Lippoutou sans cervelle pour venir me répéter ces conneries en plein visage, ou est-ce que vous êtes toutes trop lâches pour le faire?!! C'est ça être une Mentali maintenant!?! Je pensais que vous aviez plus d'honneur que ça, merde!
Échange de regards, silence complet. Le calme avant la tempête. Le début des ennuis.***
- Sephiroth!! Ouvre moi la porte!
Je courais, dans le couloir, à en perdre haleine. Je courais pour sauver ma vie. J'avais brisé la glace, j'avais crevé l'abcès et levé le voile sur l'attitude méprisante des Mentaliennes et fans d'Allen. Maintenant, vu cette petite foule en colère et remontée par tous les trucs qu'elles s'imaginaient sur moi, me voilà poursuivie par une véritable horde de pokémons normaux plus craquants les uns que les autres. Mystérieusement, j'avais tout sauf l'envie de me retourner pour leur faire un câlin. Une fois la porte de la chambre que je partageais avec Kaeko en vue, j'avais libéré mon Fantominus, lui ordonnant d'ouvrir la porte pour m'aider dans ma fuite. Le timing était important là, même crucial. Ce n'était pas une cinématique de jeu vidéo, mais bien une situation réelle qui m'enverrait directement à la satanée case infirmerie. Non, mais c'était quoi cette obsession soudaine pour cet endroit hein?! Dans tous les cas, il est encore heureux que j'aie réussi à entrer dans la chambre tel un boulet de canon, précédé d'Ash qui tentait de freiner mes poursuivants. C'était carrément surréaliste cette histoire! Je refermai en claquant la porte, me souciant peu de la délicatesse dans pareil contexte. Oh?! Kaeko-chan était là aussi!
- Kae! Aide moi à pousser la commode devant la porte! Il faut barricader la chambre, vite! Sephiroth, occupe toi de la fenêtre! J'expliquerai plus tard aller, pas une seconde à perdre!! Si elles entrent on va ressortir en petits morceaux!!
Fuite réussie et ce, avec presque brio! J'avais atteint la chambre, jusque là tout va bien, j'avais refermé la porte d'un coup sec et donné des instructions claires à Sephiroth, tout va bien encore. Puis, j'entendis la voix de Kaeko me parvenir de derrière moi, pendant que je tentais toujours de bloquer la porte. Vouloir tant que ça du chocolat? Non, je n'étais pas Ginji quand même. Ce que je faisais avec la porte? Assez clair là il me semble, non? Ou peut-être devrais-je faire un dessin? Si j'étais poursuivi par mon fan club anonyme? Oh, si seulement c'était le mien, au moins ils n'essaieraient pas de me passer au buché.
- Non, c'est celui d'Allen!
Heureusement, cela sembla sonner une cloche dans la tête de mon amie qui, tout de suite, délaissa tout pour venir m'aider. Nous savions l'une comme l'autre à quel point les groupies de ce blond pouvaient être dangereuses quand elles s'y mettaient et, pour le coup, elles venaient de rehausser le niveau. Si l'on m'avait dit que des filles pouvaient être aussi folles que ça pour un garçon, je pense que je ne l'aurais pas cru sans l'avoir vu de mes propres yeux. Non, mais c'est qu'elles ne connaissaient vraiment aucune limite ces folles! Heureusement que Feldspath vint nous donner un coup de main avec l'armoire, autrement je ne sais pas si j'y serais arrivé à temps. Je pris le temps de reprendre mon souffle, tendant juste assez l'oreille pour entendre ce qui se disait de l'autre côté. C'est qu'elles étaient franchement remontées ces filles, et pas qu'un peu. Je n'aimais pas trop devoir fuir comme ça au lieu d'affronter le problème directement, mais pour le coup j'étais encore si perdue mentalement que je n'aurais pas réussi à leur faire face et à leur livrer le véritable fond de l'histoire. Heureusement que ma meilleure amie, et colocataire depuis le début de la session, décida de leur envoyer Omega. Il me suffit, pour ma part, d'un regard en coin vers Sephiroth pour qu'il accepte d'aller accompagner son sempai avec un immense sourire.
- Merci, Kae.
S'en suivit le rire démoniaque de mon amie, qui me fit d'ailleurs esquisser moi-même un sourire, alors que nous pûmes nous délecter des cris terrifiés des mentaliennes et de leur pokémon de type normal. Étaient-elles donc stupides au point de ne pas connaître la particulière relation entre les spectres et leurs Pokémon? Ça se prétendait fan d'Allen et elles ne connaissaient même pas la moitié de leur table de types, c'était à faire pitié. Quelle bande de têtes vides. Enfin, remarque, il aurait peut-être été mieux que, moi aussi, je ne la connaisse pas. C'était un mal bien moindre que ce que j'avais fait. Parlant de cela, bien sur que Kaeko allait me demander des explications. Nous étions des amies après tout, même, des meilleures amies! Si je pouvais parler à quelqu'un de tout ça, plus qu'à n'importe qui, c'était bien à Kaeko. Car bon, c'était bien l'une des rares choses pour lesquelles Leo ne pourrait pas m'aider. Bon sang, je parlais presque comme si j'avais l'habitude de me tourner vers le phyllali lors des situations difficiles. Enfin, c'est vrai qu'il était digne de confiance et que je sentais que je pourrais toujours compter sur lui, mais étrangement c'était bien là une partie du problème. Je baissai les yeux, un peu honteuse, débutant mon récit sans vraiment oser la regarder en face.
- Il y a des rumeurs qui disent qu'Allen serait allé à l'infirmerie et que je ne suis pas allée le voir. Je l'ai contacté par Ipok, pour savoir s'il allait bien, et il m'a dit que si, du coup j'ai juste assumé qu'elles me mentaient. Mais c'est en train de devenir trop gros tout ça, du coup je me demande presque... si ce n'est pas Allen qui m'aurait caché quelque chose d'aussi important qu'un séjour à l'infirmerie. Mais bon, au fond.... il y a bien pire que ça....
Je me passai la main dans les cheveux, mes sourcils se froncèrent et mon regard chocolat prit un éclat concentré. Je devais trouver les bons mots pour bien traduire la situation à Kaeko. Si je voulais pouvoir être aidée et éclairée pour prendre la bonne décision, je me devais de dire les choses comme elles étaient, sans mentir, sans maquiller la vérité, sans omettre le moindre fait. J'étais déjà une personne assez horrible comme ça, pas besoin d'en rajouter en me voilant la face.
- Elles savent que je suis allée rendre visite à Leo, enfin, Leonidas Blackhart, c'est un phyllali. Elles m'ont vu m'y rendre avec mon kit de massage, pour aller traiter son Caninos qui a des troubles de la croissance, et du coup elles se font tout plein d'idées.
Je déglutis avec difficulté, me faisant plus petite, comme si j'avais voulu disparaître dans mes propres cheveux. Oh, aller, un peu de courage. Si j'avais du mal à en parler à Kaeko, je ne réussirais jamais à en parler avec Allen et ça, il le faudrait bien. Autant m'en remettre à ma plus proche amie et voir ce qu'elle m'en dirait. Enfin, je savais qu'elle n'était pas la plus expérimentée dans le domaine, mais elle était plus jeune que moi et, d'une certaine façon, bien plus innocente. Si ses conseils ne seraient pas aussi pointus ou adaptés que le seraient les miens, je savais qu'elle me guiderait sur la bonne voie, ou en tout cas sur la moins pire. Et Arceus sait à quel point j'avais besoin d'être guidée, là maintenant.
- Ce qu'elles ne savent pas, c'est que j'ai vraiment massé Leo. Enfin, juste les épaules, le dos et les bras, mais quand même... Même que....
Je me mordis la lèvre inférieure, enfoui ma main dans ma cheveux pour aller me frotter la nuque, mimique que m'avait filée Leonidas lui-même depuis notre rencontre. Aller, encore un peu plus de courage.
- Il s'est endormi et il m'a serré dans ses bras. Et comme une idiote, la seule chose que j'ai trouvé à faire, c'est d'être attendrie et de lui jouer dans les cheveux. C'est comme si j'avais oublié qu'il y avait un monde en dehors des murs de sa chambre. Chaque fois que je suis avec lui, c'est comme s'il n'y avait plus rien d'autre, ça me terrifie. Mais j'ai arrêté hein! Et je suis partie peu après. Je me demande même s'il en a seulement eu conscience... Oh Kae, quel genre d'affreuse personne est-ce que je suis en train de devenir?! Il doit y avoir un endroit spécial en enfer pour les gens comme moi, c'est certain.
Tout de suite, ma meilleure amie sembla comprendre la situation. Elle ne me jugea pas, elle ne me regarda pas de travers, non. Elle me dit de respirer et me suggéra de m'asseoir, ce que je fis sans plus attendre. J'avais effectivement grand besoin de me poser et de tout remettre à plat dans ma tête. Ainsi, la préfète des mentali demanda même à l'un de ses pokémons de nous préparer le thé, ce qui s'avérait une bonne idée. Enfin, j'étais plutôt du genre chocolat chaud habituellement, pour satisfaire ma petite dent sucrée, mais je n'étais pas contre une tasse de thé de temps à autre et, si le chocolat appelait le réconfort, le thé savait offrir la sérénité. J'eu même droit à des petits gâteaux aussi d'ailleurs, c'est bien là que l'on voyait qu'on était chez les mentaliennes. Je me demandai d'ailleurs, vaguement, comment auraient réagi des Pyroli dans ce genre de situation. Enfin, remarque, elles n'étaient pas non plus que des machines de guerre, elles devaient bien avoir des petits moments plus "mentali" elles aussi.
J'avais ensuite commencé à lui parler, timidement, de Leonidas. De façon un peu surprenante, Kaeko haussa un sourcil, comme l'air de dire que c'était complètement normal. À la base je voulais juste masser son Caninos? Oui, c'est vrai. J'y étais allée avec pour objectif d'aider Arkhan. Jusque là ce qu'elle disait semblait parti pour faire du sens et je l'écoutai donc avec attention, jusqu'à ce qu'elle prenne une tournure digne... de Kaeko. Enfin, pas dans le sens que c'était complètement rocambolesque, un peu atypique et amusant, mais bien dans le sens que c'était complètement innocent. Ainsi elle avait fait des massages à des amis garçons plus jeune et ça ne s'était pas terminé en débauche? Certes, dans le contexte actuel ça n'avait pas été grand chose non plus à bien y penser, mais ce n'était pas la première fois que Leo et moi nous retrouvions dans une situation de proximité suffisante pour que je m'y sentis mal à l'aise et, surtout, coupable. Enfin, au moins la suite rattrapait un peu puisque l'avis des autres mentaliennes ne valait vraiment pas grand chose, mais ce ne serait pas suffisant pour m'empêcher de la contredire.
- C'était peut-être mignon à la petite école, mais lui comme moi avons déjà 16 ans... Disons que ce n'est plus tout à fait la même chose tu sais. Enfin, c'est vrai qu'au fond il ne s'est pas passé grand chose, mais je ne sais pas, c'était suffisant pour que je me sente mal.
J'avais par la suite continué sur ma lancée après m'être massé la nuque, lui avouant l'étreinte de Leo et ma réaction totalement déplacée. Enfin, je mentionnai également qu'il s'était endormi à ce moment là, me faisant me rappeler qu'il n'avait sans doute même pas eu conscience de ce petit égarement de ma part, lorsque je lui avais tendrement joué dans les cheveux. Bon sang, juste d'y penser mon coeur se serrait. Une fois de plus, ma plus proche amie vola à ma rescousse, répondant d'emblée que je n'étais pas une mauvaise personne, mais que je m'étais laissé porter par mes émotions. Oui, comme toujours. Je n'avais jamais été avec qui que ce soit avant, je n'avais jamais vécu pour qui que ce soit d'autre que moi et, maintenant que c'était différent, il semblerait qu'une partie de moi aie du mal à bien tracer la ligne de ce qui était trop et de ce qui était juste assez. Au fond j'aimais Allen. Oui, ça c'était quelque chose que je savais depuis un moment maintenant. Pourtant, certaines choses semblaient avoir changé entre nous, mais pas nécessairement de la façon dont je l'avais imaginé. Comme le dit Kaeko, la meilleure chose à faire était de lui en parler et, s'il m'aimait, il allait m'écouter et sinon... Vaut mieux laisser cette phrase en suspens. Au pire des cas, je n'aurais qu'à prendre des distances avec tous les deux et y réfléchir un bon coup. C'était effectivement un très bon conseil. Un conseil qui me terrifiait, car il impliquait de trouver la réponse à ce fameux pourquoi, il impliquait de découvrir pourquoi la présence de Leo devenait parfois, si soudainement, inconfortable. Et si tout ça me filait un gros cafard, ma meilleure amie serait là pour l'écraser. Voilà qui ne manqua pas de m'arracher un rire. Le simple fait de l'avoir à mes côtés, de savoir que j'avais son support et que, peu importe ma décision, elle serait toujours là, c'était plus rassurant que n'importe quoi d'autre. Ni une ni deux, j'ouvris grand les bras pour lui faire un énorme câlin, initiative que je semblais avoir pris en simultané avec la spé type spectre. Comme quoi le moment était vraiment propice à ce genre de réconfort.
- Merci beaucoup, Roméo! J'avais vraiment besoin de ça. Merci.
Bien sûr, impossible que ce soit aussi simple. Il fallut que les mentaliennes choisissent ce moment précis pour revenir à la charge et tambouriner contre notre porte. Était-il vraiment permis de prendre d'assaut la chambre d'une préfète hein?! Pour le coup j'avais bien envie de sortir en mode destruction massive et les dégommer une à une en les faisant mordre la poussière avant de lâcher un "hmpf" bien senti avec une pointe de dédain! Malheureusement, ce genre d'attitude pourrait être source de conséquences et, si je ne voulais pas me retrouver à l'entraînement matinal des Pyroli comme Leo et Cael avant moi, valait mieux attendre et espérer qu'un surveillant passe par ici j'imagine. Enfin, Kaeko avait, heureusement, une plus grand liberté de mouvement que moi et n'allait pas se priver il semblerait. Pourvu toutefois que ce siège ne dure pas trop longtemps, nous viendrions à manquer de petits gâteaux et de thé éventuellement et ce serait plutôt malheureux. D'ailleurs, parlant de thé, la préfète me tendit ma tasse et je la pris en la remerciant, avant de l'écouter reprendre la parole. Je souris doucement, sa tentative avait été maladroite, mais elle demeurait pleine de bonnes intentions. Maintenant que j'avais pu relativiser grâce à elle et que j'étais désormais déterminée à parler de tout ça avec Allen, c'est sans trop de mal que je retrouvai une partie de mon aplomb habituel, désirant un peu éloigner le sujet de moi, pour me permettre de souffler un peu.
- Oui, ça va déjà beaucoup mieux maintenant. Je veux faire la bonne chose et en parler à Allen. Je ferai de mon mieux, car je ne veux pas qu'il soit blessé par ma faute.
Je goûtai finalement le thé après y avoir soufflé un peu, laissant le liquide chaud venir tapisser ma gorge et me détendre. Quelle merveilleuse idée Kaeko avait eu. D'ailleurs, maintenant que j'étais apaisée, n'y avait-il pas un sujet en particulier qui m'intéressait? Mon regard chocolaté se tourna vers elle, l'ombre d'un sourire taquin au coin des lèvres, j'entrepris de relancer la conversation, dans une direction complètement différente, mais peut-être pas tellement au fond.
- Sinon, vu que l'on parle d'histoire de coeur, il se murmure que tu auras peut-être un valentin?
Selon mon amie la préfète, il semblait ne faire absolument aucun doute que j'allais prendre la bonne décision. Ça avait de quoi me réchauffer le coeur tiens, de voir qu'elle semblait avoir autant confiance en moi. Même, elle disait que je savais prendre de sages décisions et, pour la peine, je n'eu pas le coeur de la contredire. C'était réellement réconfortant, après toutes les paroles dégradantes des Mentalis, qu'il y ait enfin quelqu'un pour me faire confiance, pour me rappeler que j'étais une jeune femme relativement sage et que je saurais, le moment venu, marcher sur le bon chemin pour ne pas blesser les gens qui comptaient le plus pour moi. Je pris une nouvelle gorgée de thé, pour bien faire passer le tout et faire le vide dans mon esprit, nettoyer mes pensées de toutes ces hésitations et de toutes ces idiotes de mentaliennes. Il faudrait bien que ça s'arrête, elle ne pouvait pas toujours être comme ça, tout de même. Il faudrait qu'elles passent à autre chose et qu'elles acceptent les faits à un moment ou à un autre. Maintenant plus détendue et ne désirant pas rester sur le sujet à me lamenter durant trois heures de plus, j'avais décidé de ré-orienter la conversation. Habituellement je préférais ne pas trop me fier aux rumeurs et donc, même si la question avait été posée, je l'avais fait de façon simple et naturelle, sans vraiment me faire curieuse outre mesure. Néanmoins, lorsque je vis qu'en fait je venais de faire une touche sur une petite corde sensible, je me redressai, mon regard se faisant plus pétillant.
Je suivis chacun des gestes de la préfète avec un petit sourire malicieux au coin des lèvres, lui laissant la chance de s'exprimer sans que je ne vienne l'interrompre. Oh, elle ne voyait pas du tout de quoi je voulais parler? Pourtant sa vitesse d'élocution et le nombre de bégaiement à la seconde semblaient bien décidés à me prouver le contraire. Mon regard se fit plus insistant et je m'approchai d'elle un peu, de façon inconsciente, sans doute pour lui mettre un peu plus de pression pour la forcer à poursuivre sur sa lancée. La voilà maintenant qui voulait s'essuyer le visage. C'était à ce point? Oh oh oh!! La phrase qui suivit, tout de même! Elle avait été catapultée sans espaces et sans ponctuation, comme un aveux si timide qu'il avait été fait de façon à ne pas être compréhensible. Heureusement que j'étais une mentalienne et que je possédais donc certaines aptitudes divines à la compréhension des discours des membres de la gente féminine. Ainsi, j'en compris l'essentiel soit "jen'aimepasSethc'estfaux" et "jenevoispasdequoituparles". Pas besoin de plus pour me faire une petite idée de ce qui se passait très, très exactement.
- Intéressant tout ça!
Enfin, il semblait que ce fut encore au stade de sujet trop gênant pour que Kaeko ose s'ouvrir à ce sujet et je n'insistai pas plus pour l'instant, lui laissant le soin de préciser sa pensée. Cette fois son discours se fit plus calme, si l'on peut appeler cela calme, après qu'elle se fut frappée la tête contre la table, comme en signe de grand découragement. Horrible qu'elle disait? Mais en quoi? Enfin, sauf si le gars en question était un pauvre gars sans coeur qui ne se souciait pas d'elle, ou s'il était un gars super gentil qui avait déjà quelqu'un, ou si c'était quelqu'un qui avait un lien de parenté ou qui n'aimait pas ses Pokémon par exemple, ou sauf si ce quelqu'un n'était pas un pauvre gars sans coeur déjà en couple et qui ne se souciait pas d'elle ou de ses propres Pokémon et qu'ils avaient un lien de parenté... Ouf, j'allais où moi avec ça? J'ai réussi à m'y perdre toute seule! Hm! Bref, si ce n'était pas un truc du genre, ça ne pouvait pas être si horrible, non? Si honte qu'elle voulait s'enterrer vivante? Parce qu'elle aimait un garçon? Ou était-ce à cause de ce qui s'était passé avec ledit garçon? Oh! Mon intérêt était piqué à vif là, vous pouvez en être plus que certains. Hors de question maintenant que je la laisse filer sans connaître le fin mot de cette histoire, parole de mentali! Mais? Elle termina en disant qu'elle n'avait personne, ou plus précisément qu'elle ne sortait avec personne. Ah! Je comprends! Je me revoyais déjà, assise avec Kaeko le soir de notre première rencontre sur l'île Cobaba, alors que je lui avais parlé d'Allen, que j'avais hésité, que je m'en sentais honteuse, que j'avais peur de m'imaginer des choses qui n'étaient pas. Voyez où on en était maintenant! En couple depuis le 4 décembre, nouvelle date la plus importante de l'année. Bref, maintenant, l'important, c'était de bien formuler mes prochaines paroles, pour la mettre en confiance et l'aider à parler, ce qui s'avérait souvent l'une des meilleurs façon de formuler plus clairement une pensée ou, dans ce cas ci, un sentiment. Je pris une nouvelle bonne gorgée de thé, savourant tout en planifiant mon prochain mouvement, tel un grand génie du mal qui prépare son prochain grand coup.
- Donc tu n'aimes pas du tout un garçon en particulier et tu n'aurais pas du tout envie de passer la Saint-Valentin avec lui au point d'en être honteuse et de te demander comment lui demander de la passer avec toi. Je comprends tout à fait. C'est dommage d'ailleurs, j'aurais eu toute une mine d'or de conseils variés et différents à te donner si ça avait été le cas. Mais bon, il aurait aussi fallu pour cela que j'en sache un peu plus sur ce garçon mystère nommé Seth qui ne t'attire pas du tout, bien sûr.
Nouvelle gorgée de thé. Regard en coin vers mon Roméo, le sourire malicieux et un petit éclat joueur au fond de mes iris chocolatés. Tout, en ma gestuelle, lui criait "n'essaie même pas petite Kaeko, je t'ai grillée, tu ne m'échapperas plus, promis". Malgré tout, je déposai ma tasse et m'emparai d'un petit gâteau avant de m'asseoir plus confortablement, sur mon lit, tournée vers ma colocataire en replaçant ma longue chevelure. Nous venions de passer du mode réconfort au mode discussion entre filles sur nos histoires de coeur, comme ça, en le temps de le dire. Magie!
- Aller, je t'écoute! Parle moi de ce Seth. Il est de quel dortoir? Quel parcours? C'est le même Seth qui écrit les articles? Il s'est passé quoi entre vous deux? C'est quelqu'un de bien ou je dois aller lui casser une jambe? Pourquoi te sens-tu honteuse? Tu veux que je t'aide à trouver une façon de l'approcher à la Saint-Valentin?
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