15 décembre 2015. C’était une journée comme les autres. Enfin, presque comme les autres? Bon, d’accord, honnêtement c’était une journée fichtrement différente et importante et qui me faisait très, très peur! Je m’étais levée avec l’aurore et avais pris une bonne douche chaude avant de me préparer plus que jamais. Ouvrant ma penderie, j’y avais passé une vingtaine de minutes, me demandant quoi prendre. Au final, mon choix s’était porté sur une chemise blanche aux manches trois quart, un pantalon foncé à taille haute, des bottillons et un gilet pour aller par-dessus le tout. Pour conclure, j’avais attaché ma courte chevelure rose en queue de cheval, comme à l’habitude, ceux-ci étant encore trop courts pour l’être en chignon. Ajoutons à cela une écharpe colorée, mon manteau et j’étais prête à partir. J’hésitais à emporter autre chose, mais comme il s’agissait de mon premier jour, je n’avais pas vraiment de matériel. Remarque, il me restait bien mes épais ouvrages et mes documents pour les cours théoriques à distance qu’il me restait encore à mener à bien, mais je n’allais pas là-bas pour ça. D’ailleurs, pourquoi commencer le 15? Si peu de temps avant les… ah… Il n’y a pas les vacances des fêtes dans le monde des adultes, j’oubliais. Je retire ce que j’ai de fait, laissez-moi une autre chance, je veux devenir prof à la plaaaaaace! *hum hum* Un peu de courage Estelle, si je me décourageais pour ça, je ne ferais pas carrière longtemps. Sur ce, je verrouillai la porte derrière moi, ayant une pensée au passage pour ma voisine Niki, et descendis les marches. Il faudrait que je lui rapporte des sushi ou un autre truc du genre un de ces quatre, pour la remercier d’avoir volé à mon secours. Raaah, pourquoi autant de détours dans ma narration? À ce rythme, j’étais bonne pour un retard! Aller, une deux, une deux, une deux!
*Quelques minutes plus tard *
J’entrai dans le commissariat de Lansat, mon regard chocolat ouvert avec émerveillement et curiosité. Les gens ici bougeaient comme dans une fourmilière et, au comptoir, la réceptionniste semblait débordée, jonglant entre les appels et les mémos à distribuer aux agents et officiers qui faisaient un détour par l’accueil en arrivant. Les conversations allaient bon train et, à cette heure matinale, semblaient vibrer au son d’une même bonne humeur générale, mais sérieuse. Rien à voir avec l’ambiance d’une salle de classe pendant qu’on attend le prof. Non, ici tout le monde était là pour faire sa part et pour la faire bien. Je déglutis.
This is the real deal. Un rire gras attira mon attention, près de la machine à café. Des collègues étaient vraisemblablement en train de se moquer gentiment d’un homme aux cheveux d’encre, porteur d’un air blasé. Dure journée au travail hein? Mais pourquoi je restais plantée là?! Prenant une nouvelle inspiration, je gagnai le comptoir de l’accueil, attendant que la réceptionniste lève vers moi un regard interrogateur, toujours pendue à son téléphone et notant quelque chose en simultanée. Wow, ça c’est un niveau de multitasking incroyable!
- Estelle Highwind, pour le stage. Je commence aujourd’hui.La femme ne me répondit pas, pas verbalement en tout cas, mais acquiesça du regard avant de poursuivre sa conversation téléphonique. Dans le même temps, la brunette avait fait rouler sa chaise vers une pile de dossier et y fouillait tout en lâchant par ci par là un oui ou un non concentré. Une Ralts vint lui donner un coup de main et me donna un mémo rédigé sur un pense-bête pendant que sa propriétaire retournait à son appel téléphonique. Selon la note, j’avais été jumelée au Lieutenant Détective Sieg Torchwick, bureau numéro sept. Quant à mon horaire, je serais présente du mardi au jeudi en plus d’un samedi sur deux. Remerciant la pokémon psy d’un signe de tête, c’est avec Chidori perché sur mon épaule gauche que je m’avançai dans le poste, cherchant du regard les identifications sur les bureaux. Possédait-il son propre espace de travail fermé ou son bureau était-il avec les autres, dans la grande et vaste aire de travail? Errant un peu au hasard, je fus soulagée lorsque l’on vint à ma rencontre. Sans doute quelqu’un qui avait compris qui j’étais et qui m’attendait. Le lieutenant en personne peut-être même?
- C’est toi la nouvelle stagiaire? Pas mal, pas mal! Et si tu allais me faire un café pour voir ce que tu vaux, hein?J’offris un regard interdit à l’homme au nez de corbeau et aux petits yeux pétillants. Sur son épaule, un Spearow me détaillait avec un intérêt presque inquiétant et le policier, mains dans les poches, m’offrait un sourire moqueur, mais dans le mauvais sens. Enfin, disons simplement qu’il semblait rire d’une plaisanterie qui ne m’incluait pas et donc, en conséquence, qui se faisait sur mon dos. Moi, la jolie et mignonne petite stagiaire aux cheveux roses. Si c’était lui ce fameux Torchwick, mon expérience serait définitivement… non, elle serait chiante, point. Pas moyen de faire semblant. Je priais de tout mon cœur que ce ne soit pas lui et, bien sûr, me devais de vérifier.
- C’est vous le Lieutenant Détective Torchwick? Je m’appelle Estelle Highwind, je suis ravie de—- Hahaha! Le jour où je serai aussi chiant que Torchwick, jetez moi par la fenêtre du deuxième. Tellement blasé ce type, il comprendra même pas la chance qu’il a d’avoir une stagiaire comme toi. Mais tu peux quand même me faire un café t’sais, les jolies filles savent toujours faire de bons cafés!Il me faisait quoi là? C’est bien sympathique tout ça, mais il savait que j’avais dix-sept ans au moins? Un instant, est-ce que ça faisait de moi un odieux
jail bait du coup? FOCUS ESTELLE! Ce n’est pas de ça dont il est question ici! L’âge n’avait rien à voir, c’était quand même tout simplement déplacé comme attitude! Je devais m’excuser poliment et m’éclipser pour reprendre mes recherches, sans quoi j’allais arriver en retard à mon rendez-vous avec celui que j’étais véritablement venue voir. D’autant plus que ce n’était pas très agréable comme situation. D’accord, j’étais une stagiaire, je ne m’attendais pas à être respectée d’office par tout le monde, mais me faire relayer au rang de jolie fille machine à café? J’avais presque envie de lui en faire un pour de vrai tiens, histoire de lui faire comprendre à quel point c’était une fichue de mauvaise idée. Peut-être qu’après ça il apprendrait à me laisser tranquille, lorsqu’il aurait compris que ma cuisine était, à elle seule, une arme de destruction massive?
- Oh je suis vraiment désolée, je suis attendue par le Lieutenant Détective Torchwick, insistais-je,
je ne voudrais pas être en retard. Pouvez-vous m’indiquer son bureau? Ce serait très apprécié.- Un café contre une direction, c’est un bon marché tu trouves pas?Termina-t-il en s’appuyant contre le bureau juste à côté de moi, s’approchant du même coup, son sourire s’étirant un peu plus. Je pu même entendre crépiter les joues de Chidori, la souris électrique étant à peu près aussi contente que moi du traitement que nous recevions. Pourtant le type en soit n’avait pas l’air méchant, il n’avait même pas l’air louche, mais pour le coup il se comportait comme un abruti et c’est peu de le dire. J’allais ouvrir la bouche pour répliquer avec plus de fermeté cette fois, mais un jappement décidé me coupa dans mon élan, attirant notre attention à tous les deux. Se tenant dans l’allée, droit et fier, son pelage de charbon éclatant de santé, un Houndoom venait de s’inviter. Son regard perçant dardait mon futur collègue qui eu un mouvement de recul, tout en douceur, son sourire se faisant soudainement bien moins volontaire alors qu’il levait même les mains en signe de soumission. Skoll? Non, celui-là semblait un peu plus grand, plus expérimenté, plus dangereux. Il s’agissait d’un autre Demolosse et il n’était certainement pas ici pour rire.
- Calmos Feuer, je te laisse repartir avec la demoiselle et on oublie ça. Bonne chance Highwind et n’oublie pas mon offre! Tu diras bonjour à Torchwick pour moi.- Une bonne journée à vous aussi.Lançais-je avant d’emboiter le pas du canidé qui trottait déjà vers l’un des bureaux. Tiens tiens, il avait donc le sien, avec une porte et une baie vitrée et tout le gros luxe, comme dans les séries télé. C’est du joli. Le chien de l’enfer fit son chemin sans se soucier de regarder si je le suivais ou pas, allant se coucher dans son panier, dans un coin de la pièce, tout près du porte-manteau. À celui-ci était pendu un manteau identifiant clairement son porteur comme un membre du « DPL », le Département de Police de Lansat. Sauf qu’il n’y avait pas que ça. Perché là, son regard vif tourné vers la porte d’entrée et donc, accessoirement, vers moi, se trouvait une grosse hirondelle bleu nuit. Son roucoulement m’accueillit alors qu’un frémissement d’agitation parcourait ses ailes repliées dont les plumes se gonflèrent l’espace d’un instant. Un Swellow. Tu parles d’un duo de Pokémon qui en jette. Sauf que l’ensemble était encore incomplet et il me restait encore un individu à découvrir, assis à son bureau avec un air blasé et une cigarette en bouche, ne se souciant manifestement pas des lois anti-tabac de son
–de notre– lieu de travail. Minute papillon! J’avais déjà vu ce type! Il n’y a pas deux minutes avec son air blasé, près de la machine à café alors que ses collègues l’embêtaient sur un sujet que je n’avais pas réussi à capter au vol. C’était donc ça!
Lieutenant Détective Sieg Torchwick - Estelle Highwind? - Oui, c’est moi! Enchantée de faire votre connaissance. Merci d’avoir accepté… euhm… de prendre une stagiaire.Il ne répondit que d’un signe de tête, m’invitant à prendre place à la chaise d’en face pendant qu’il terminait de consulter un dossier. Je remarquai également, finalement, que l’on avait aménagé un petit coin pour moi avec ma propre petite table de travail et une chaise. Pour un type « chiant », je ne le trouvais pas si mal, pour l’instant. Espérons que les choses continuent sur cette voie. Remarque, n’importe quoi serait mieux que le type au Spearow. Il éteignit sa cigarette avant de prendre une gorgée de café, grimaçant au passage, ne portant son regard bleu-gris vers moi qu’après cela. Silencieux, c’est de ce même air un peu ennuyé qu’il me détailla et, bien qu’il avait l’air très blasé, j’étais contente. Lui, au moins, ne semblait pas tirer de conclusions hâtives sur moi et me reléguer d’office au rang de jolie stagiaire. Peut-être allait-il même me donner la chance de faire mes preuves? Voilà qui serait plaisant, mais je m’avançais un peu trop vite, comme j’allais bientôt le comprendre.
- Ça va pour aujourd’hui, mais évite l’écharpe à l’avenir. Si nous devons prendre un suspect en chasse à la course durant une patrouille, ce truc va seulement te nuire. Et pense à apporter une seconde paire de chaussures, pour quand tu es à l’intérieur du poste, surtout durant la saison froide. Je n’aime pas quand le plancher du bureau est sale. Des questions?Au moins cette introduction avait le mérite d’être très, très claire. Je n’étais plus une mentali et si je ne voulais pas que l’on me catégorise comme la jolie fille un peu nunuche, alors je devais raisonner autrement. Plus de jolie écharpe colorée pour moi et, dans la même veine, probablement plus de bijoux non plus durant l’exercice de mes fonctions. Encore heureux que j’aie déjà coupé mes cheveux, il aurait fait une attaque autrement!
- Oui. Alors… euhm…- Il faut parler clairement si tu veux pouvoir être prise au sérieux. C’est un commissariat, pas l’Académie de Police. - Oui, bien sûr. Je me demandais simplement par quoi nous allions commencer et quel genre de tâches je vais effectuer au quotidien? Avais-je dit avec beaucoup de sérieux, refermant mes mains sur mes cuisses et me tenant droite, la voix assurée. L’officier sembla convaincu, m’offrant un sourire en coin avant de sortir un dossier vraisemblablement préparé à l’avance pour moi de l’un de ses tiroirs. Je m’en saisis en le remerciant d’un humble signe de la tête alors qu’il reprenait la parole.
- L’avant-midi, si je ne suis pas sur une affaire, nous sommes chargés de patrouiller dans Lansat. Nous revenons au poste à midi moins le quart pour remplir un rapport. Je le ferai aujourd’hui, mais je t’en ai mis une copie du formulaire dans ton dossier avec les instructions complètes, avec ça tu devrais être en mesure de le faire par toi-même dès demain. Nous revenons du déjeuner à treize heures et durant l’après-midi tu es ma secrétaire personnelle. Si je suis sorti tu prends les messages, s’il y a une urgence tu m’appelles et si j’ai la flemme tu ranges les dossiers ou tu peux garder le bureau en ordre. N’hésite pas à emporter un livre ou deux, Lansat est une petite île alors tu auras sûrement des moments de temps libre. Je crois avoir compris qu’il te reste de la théorie au travers de tout ça donc, ce sera l’occasion parfaite d’étudier. Et si tu as des questions et que je suis là, n’hésite pas à demander. Tu peux déposer le dossier sur ton bureau, on sort. Feuer, Orkan.L’homme s’était levé et, d’un pas énergique
–plutôt surprenant pour l’individu-, était allé récupérer son manteau. Le chien démoniaque avait tout de suite redressé la tête et s’était levé, prêt à nous accompagner. Le Swellow, pour sa part, avait docilement rejoint la pokeball que son maître lui tendait avant d’accrocher cette dernière à sa ceinture. Il ne gardait donc qu’un compagnon hors de sa balle, comme j’avais choisi de le faire avec Chidori. Au moins je n’avais pas fait que des mauvais pas pour cette première journée!