"Tu m'as offert une infinité dans un nombre de jours limité, et j'en suis heureuse. ~"
«-Maman! Maman! Ou on va?
-On va à l'école!
-C'est quoi l'école?
-C'est un endroit pour apprendre à devenir grand, et tu pourras même te faire des amis!
-Pourquoi il y va pas Henry?
-Henry est trop jeune pour y aller...
-Je veux pas y aller moi!
-Tu verras, une fois là-bas, ça sera à la maison que tu ne voudras pas retourner!
Maman rit.
Je souffle et commence à monter dans ma chambre pour bouder un peu, mais maman me rattrape par le bras et m'emmène de force dehors. Je me laisse faire en me disant que ce ne dois pas être aussi nul que ça, l'école.
Maman me tiens par la main, et on marche sur le petit chemin. Autour de nous, il y a pleins de fleurs multicolores qui ondulent dans le vent. Je vois un pissenlit et ai la folle envie de souffler dessus, mais ma mère me tiens fort le bras et m'empêche d'aller autre part que devant moi. Puis, dix minutes plus tard, je vois un grand bâtiment avec des lettres capitales écrites en rouge, mais que je n'arrive pas à lire puisque je ne sais pas encore lire.
Quand on arrive au bâtiment, une grande dame aux cheveux blond platines tirés en bas chignon à l'aide d'un barette viens arrive en notre direction.
-Bonjour madame! Qui est cette jeune fille?
-Voici ma fille, Yuki Frost.
-Oh, mais bien sûr!
Puis elle se penche vers moi et me dis:
-Bonjour Yuki!
-Euh... on se connait?
-Pas encore! Tu ne m'a pas encore dit bonjour!
-Et alors, ça fait quoi?
-Cela fait que c'est très malpoli de ta part. Dis-moi bonjour, allons!
-«Moi bonjour, allons».
-Pas comme ceci voyons!
-Comment alors?
La dame ferme les yeux comme pour essayer de rester calme. Maman se penche elle aussi et me chuchote:«écoute-là et fais ce qu'elle te dis» avec un regard sévère.
-Bonjour, Madame-Dont-Je-Connais-Pas-Le-Nom.
-Très bien. Appelle-moi Madame Chouchou.
Je ne réponds pas. Puis Madame Chouchou m'emmène à l'interieur du bâtiment. C'est sûrement ça, l'école. En tout cas, je n'aime pas "Madame Chouchou". Je ne comprend même pas pourquoi on l'appelle comme ça. Ce n'est pas très joli, comme nom.
A l'intérieur, il y a déjà une vingtaine d'enfants qui ont l'air d'avoir le même âge que moi. La plupart d'entre eux jouent à la marelle, la dinette ou a la balle. Leurs jeux ont l'air nuls, et les personnes, pas vraiment sympas. Ce ne sont que des préjugés, bien entendu, mais je ne suis pas d'humeur a me faire beaucoup d'amis.
En regardant bien, je vois un garçon assis tout seul, au fond de la salle. Il est entrrain de dessiner. Il n'a pas l'air comme les autres, c'est pour ça que je vais le voir.
-Salut!
-Sa...
Il se retourne pour découvrir qui lui parle:
-...lut...
En me voyant, il fait un énorme sourire. Je me suis sûrement trompée sur son compte. Il doit être comme les autres, tout le temps à sourire pour rien, et à rire pour tout et n'importe quoi. Ils m'énèrvent, ces gens là. Je m'apprête à partir quand je vois sa feuille de dessin:
-Tu dessine quoi là? Un éléphant?
-Euh... non! C'est un vase... il faut que je m'entraîne encore...
Je sais que c'est un vase, mais je voulais juste le vexer. Apparement, c'est réussi.
-Tu veux faire dessineur plus tard?
-On dit dessinateur. Mais sinon, j'aimerais bien. Je voudrais faire artiste peintre.
-Artiste peintre, c'est pas la même chose que dessineur?
-On dit "dessinateur".
Il soupire mais hoche la tête.
-Tu m'apprend à dessinaturer?
-"Dessiner"!
-Je sais pas moi, tu me dis «dessinateur» et après je peux pas dire «dessinaturer»?!
-On dit «dessiner» et «dessinateur».
-D'accord, monsieur le dessineur! Alors, tu m'apprend à dessinaturer ou c'est moi qui m'apprend?
Il sourit, amusé.
-Tu le fais exprès, n'est-ce pas?
-Évidemment! Je suis pas aussi débile que ça non plus!
-Donc tu veux que je t'aprenne à dessinaturer ou c'est toi qui t'apprend ?
Pour la première fois de la journée, j'ai envie de sourire, mais je ne le fais pas, parce que je ne veux pas sourire pour me montrer heureuse, je préfère sourire quand je fais une farce, ou quand un personnage fictif meurt par exemple.
-Apprends-moi!
Il me donne une feuille, puis commence à m'expliquer les bases du dessin en commençant par le matériel jusqu'à la perspective et les angles de vue, ce dont d'ailleurs, je ne comprends rien du tout. Puis j'essaye de dessiner le vase, mais ma main tremble et je n'y arrive pas.
-Laisse, je suis pas douée pour ça.
-Si t'abondonne déjà, tu n'y arriveras pas! J'ai du faire pleins d'essais pour réussir à faire ce dessin! Et encore, tu l'a confondu avec un éléphant...
-Je savais que c'était un vase. Je voulais juste voir si je pouvais... "plaisanter" avec toi.
-Ah... Donc tu veux toujours que je t'apprenne à dessiner? On peux faire quelque chose de plus simple, si tu veux. Par exemple, euh...
-Apprend moi déjà à dessiner un soleil, et on verra la suite! je dis, sur un ton ironique.
Il sourit une deuxième fois.
Finalement, il m'a appris à dessiner un soleil, une pomme, et pendant que j'admire ses oeuvres précédentes, il crayonne un paysage. Peu de temps après, je vois que des gens commencent à se regrouper autour de nous. Une jolie petite fille blonde avec deux tresses sur les côtés, et aux yeux bleus s'approche de moi et prend mon dessin de pomme, puis celui du «Dessinateur-Dont-J-Ignore-Le-Prénom».
-Qui a fait ça? dit elle en désignant mon dessin.
-C'est moi, je réponds sur un ton froid.
-Eh bien c'est râté! dit-elle sur un ton moqueur.
D'autres enfants commencent à rire autour de moi. Il faut que je me défende.
-Essaie de dessiner, toi, juste pour voir. je dis sur la défensive.
-Non, pas question. Je salirais mes mains en touchant le crayon que tu as déjà touché!
-Tu as aussi touché ma feuille sur laquelle j'ai déjà dessiner.
-Je compte me laver les mains.
-Tu pourras aussi le faire après avoir touché mon crayon.
-J-je... ET PUIS TANT PIS!
Elle s'en va, sûrement en colère. Un sourire narquois se dessine sur mon visage.
Après ça, les gens autour de nous partent; ils n'ont sûremet pas envie de rester avec une «méchante» comme moi.
Je me retourne vers le petit:
-Au fait, c'est quoi ton nom?
-Stahl! Et toi?
-Yuki. Yuki Frost.
-Enchanté, Yuki Frost!
Il me tend sa main afin que je la serre, mais je n'en fait rien. Avec un sourire gêné, il retire sa main de devant moi pour éviter de se faire humilier une fois de plus. J'en ris intérieurement. Puis, quelque instants après, une cloche sonne, indiquant sûrement la fin du temps libre. «Madame Chouchou» nous ordonne de nous mettre en rang deux par deux. Comme je ne vais sûrement pas me mettre avec la jolie blondinette aux yeux bleus avec deux tresses sur les côtés, je demande à Stahl de me mettre avec lui. Mais malheureusement pour moi, il se tient déjà avec un de ses copains.
Comme nous sommes vingt-cinq, je me mets au fond, derrière, puisque il n'y aura de toute façon personne pour se mettre avec moi. Puis La Blonde passe devant moi en me disant:
-Souviens-toi de moi, je suis Allysse.
-Souviens-toi de moi, je suis Yuki, je répond.
Furieuse que je lui vole sa réplique, elle s'en va encore une fois, loin de moi. Puis après une ou deux minutes, «Madame Chouchou» nous attribue des places pour le premier trimestre. Je suis évidemment à côté de Stahl -ouf!- et nous sommes trois par tables. L'autre garçon de mon groupe s'appelle Nahil. Il a la peau plus foncée que celle de Stahl. Ses yeux sont noisettes, mais deviennent dorés à la lumière du soleil. Ses cheveux châtains sont légèrement bouclés. Ça lui donne l'air décontracté et sympathique, je trouve. Quand il remarque que je l'observe, il me fait un petit sourire et me dis:
-Tu t'appelle comment?
-Yuki.
Il hoche la tête et continue de discuter avec Stahl. Il est simple, ça me plaît. Évidemment, ce n'est pas lui qui me plaît, mais son caractère.
-Maintenant, commence Madame Chouchou, nous allons apprendre à compter!
Elle nous apprend à compter. Moi, maman m'a déjà appris tout ça. Donc j'ai une longueur d'avance sur les autres. Après quelques heures, on nous apprend à écrire. Je sais écrire mon prénom puis mon nom de famille. Yuki Frost. Ce n'est pas les noms les plus faciles à écrire, ou à lire. Je sais aussi écrire: "robot, spectre, noir, obscurité, apocalypse, sociabilisation, discorde, povoquement et démoniaque". Le reste, ce n'est pas important. Je ne suis pas de ces enfants à écrire tout le temps le mot "fleur" ou "soleil" et faire des dessins en rose bonbon et jaune fluo, mais plutôt de la catégorie à dessiner des gouttes de sang ou à colorier toute une feuille en noir ou en gris foncé pour marquer en rouge bordeaux le mot: APOCALYPSE en lettres capitales ou alors la phrase: "LE SPECTRE NOIR SORTIT DE L'OBSCURITÉ, PROVOQUANT UNE DISCORDE DÉMONIAQUE ET APOCALYPTIQUE, FAUTE DE SOCIABILISATION AVEC LES ROBOTS". C'est une phrase que mon père m'a lue et appris à écrire. J'ai bien aimé cette phrase, avec ces mots compliqués. Puis il m'a expliqué ce que ça voulait dire, et j'ai encore plus aimé. Ça à été tiré d'un livre, ou dans un mondes de robots, vit un spectre noir, exilé dans le royaume de l'obscurité, sous la terre. C'est le spectre le plus puissant de tous les morts (car dans ce monde, personne n'est vivant, soit t'es un robot, soit t'es un spectre, donc forcément, si t'es pas vivant, c'est que soit t'es mort, soit dans le coma, mais logiquement, si t'es dans le coma, c'est que tu as une âme vivante et morte en même temps, ce qui n'est pas le cas pour les personnages de cette fiction qui ne sont pas vivants. Je les considère comme morts). C'est la première phrase du deuxième tome de cette trilogie. La première. Je l'ai lue et relue, jusqu'à l'apprendre par coeur parce que je n'avais rien d'autre à faire. Papa m'a promis qu'il me lirait l'histoire en entier, quand je serais un peu plus grande pour comprendre. Parce qu'apparement, je ne comprendrais pas ces histoires de "politique", de "population entièrement robotisée sous l'exigeance du gouvernement mondial" et de ces "Confréries Communiales ou Départementales agissant à la faveur des Dominants pour la Communauté et la Concitoyenneté de tous les peuples" puis des "sectes secrètes faisant partie des Rebelles", et il a raison, parce que je ne comprend rien. Sauf le fait qu'il y a deux "peuples": les dominants qui dominent les gens, ceux qui dirigent le monde, puis les rebelles, ceux qui ne sont pas d'accord avec les dominants et qui veulent changer le monde. Puis il y a les spectres qui viennent tout gâcher, donc les dominants et les rebelles se sont alliés temporairement afin des les exhiler dans le Royaume de l'Obscurité, ou si ils résistent, de les éliminer. Les spectres sont les méchants. Mais moi, je veux que les Spectres gagnent, et que tout le monde reconnaisse le Spectre Noir (le plus puissant) comme le maître du monde, celui qui remplacerait le dominants. J'aime beaucoup cette histoire. C'est ma préférée. C'est aussi la seule que je connais.
Une heure après, nous avons appris à écrire quelques mots. Comme par hasard, les mots "fleur" et "soleil" se sont retrouvés dans le lot. Puis On nous à donné quatre phrases à écrire, puis une phrase au choix. Les quatre phrases sont: 1) "Les papillons volent au dessus des fleurs" 2)"Le chat boit du lait" 3)"La vache mange de l'herbe" 4)"Le soleil brille au dessus du pré". Et évidemment, la phrase au choix que j'ai écrite n'est pas une autre que: "Le Spectre Noir sortit de l'obsucrité, provoquant une discorde démoniaque et apocalyptique, faute de sociabilisation avec les robots". Quand j'ai montré ma feuille à «Madame Chouchou» elle m'a tout de suite dit que je ne comprenait rien et que ça ne voulait rien dire, de toutes façon. Mais moi, j'ai voulu défendre cette phrase, donc je lui ai tout expliqué sur les Robots (à voir les dominants et les rebelles) les Spectres et la Population entièrement Robotisée sous l'exigeance du gouvernement mondial et des Confréries Communiale ou Départementales agissant à la faveur des Dominants pour la Communautée et la Concitoyenneté de tous les peuples. Elle me dit de garder ça pour moi, mais je continue à expliquer que, plus tard, Le Spectre Noir qu'on à réussi à exhiler dans le premier tome réapparaît dans le deuxième. Elle me dit de me taire parce qu'elle conaissait déjà l'histoire -mon oeil, elle ne connait même pas le titre!- et qu'elle n'avait pas envie qu'une gamine de trois ans lui spoile le troisième tome. «Je n'ai pas trois ans mais cinq ans, madame», j'ai répondu. Elle m'a dit de sortir de la classe. Je lui ai dit que ça m'arrangeait, parce qu'il faisait beau dehors. Elle m'a dit d'y rester pendant la journée, je lui ai dit «Ok. Bye.» et je suis sortie de la salle. Pleins de gens ont rit, et Sumia à insisté sur le fait que comme Madame Chouchou est notre maîtresse, il ne faut pas l'humilier ainsi, ce qui lui a valut des points en plus.
En ce moment, je suis dehors, à regarder le autres travailler. Puis vient l'heure du déjeûner, ce moment ou tout le monde se bouscule pour être un des premiers a se faire servi et pouvoir choisir sa table à la cantine. Moi, personellement, tout cela m'était égal. Je suis la dernière à passer.
Pendant le déjeuner, j'ai été seule à une table. Je regardais les autres. Allysse se trouvait avec ses autres amies, Nahil discutait avec d'autres garçons, un groupe s'amusait à faire des batailles de nourritures -comme c'est puéril, mon Dieu- et d'autre ne faisaient que manger. Je cherchais Stahl du regard. Il se dirigeait vers la table de Nahil, un carnet et un crayon à la main.
Toute la durée du repas, je pouvais voir Stahl me regarder. Qu'est-ce qu'il avait? Ce comportement m'a intrigué, mais aussi désespéré.
La journée s'est vite passée. Je m'étai encore disputée avec Allysse. Elle m'a bousculé et je me suis défendue en utilisant les mots. Ça l'a fait taire et elle est partie. Elle a raconté à tout le monde que j'étais une «Chochotteuse», bien que j'ignorais le sens de ce mot, puis, voyant que je n'en avais rien à faire de ma réputation, elle ordonna à Nahil de me taper, mais celui-ci a refusé, ce qui mit Allysse folle de rage. Je me suis souvenue que ça m'a fait rire.
Je marche sur le chemin de ma maison. Le vent fait onduler les brins d'herbe zébrés par les rayons du soleil couchant, mais tout ce que je veux faire, moi, c'est rentrer à la maison. Je ne veux pas admirer ce beau paysage, comme le font la plupart des gens. Alors je m'empresse d'arriver chez moi. Sur le chemin, je vois Stahl, assis par terre, toujours en tenant son carnet. Il fait un croquis du paysage.
-Bonjour, Monsieur le dessineur.
-Bonjour, Mademoiselle qui ne sait pas parler.
Je me sens vexée par cette remarque, alors je soupire et continue ma route.
-Je rigolais, Yuki. Tu peux rester.
-Pas envie.
Cette fois-ci, c'est lui qui semble vexé. Il se lève et tourne sa tête de mon côté.
-Tu habite par là, Yuki?
-Oui, dans le tas de maison.
-Oh, oui, je vois. J'habite aussi là-bas!
-D'accord.
-Hum... Tu veux que je te raccompagne?
-Non. Ma maman m'a dit de n'accepter l'aide de personne et de ne pas trainer au retour.
-Tu as déjà accepté mon aide, ce matin, en me laissant t'apprendre à dessiner.
-Ce n'est pas faux.
-Donc c'est vrai.
-Exact.
Je començais à apprécier Stahl.
-Alors je te raccompagne?
-Si tu insiste, j'accepterais.
-J'insiste alors.
-Très bien. Alors raccompagne-moi.
Stahl me sourit.
-Tu connais l'histoire du Spectre Noir.? je demande.
-Évidemment! Mon oncle l'adore.
-J'aime beauoup aussi. En particulier la première phrase du deuxième tome.
-Je vois laquelle c'est. «Le Spectre Noir sortit de l'obscurité, provoquant une discorde démoniaque et apoccalyptique...
- ... faute de sociabilisation avec les robots.» Tu sais ce que ça veut dire, sociabilisation?
-Pas du tout.
C'est ainsi que commença ma première amitié avec quelqu'un.
Le soir même, je demande à mon père ce que voulait dire «sociabilisation». Il me l'a expliqué, mais je l'ai oublié..
Les semaines se sont passées vite. Au fil des mois, Stahl dessinait plus, et de mieux en mieux. Il est vraiment fait pour être dessineur. Je suis toujours opposée au mot «dessinateur». Je n'ai jamais compris pourquoi on disait «dessiner» et pas «dessinaturer» puisqu'on disait «dessinateur». Dans ce cas, il valait mieux dire «dessineur». C'est largement mieux.
Mais ce n'est «Pas intéressant», comme le dirait Nahil, quand je commence à m'embarquer dans des expliquations trop longues ou à réflechir au sens de la vie. Quand il dit ça, je me stoppe tout de suite, et je regarde Stahl dessiner.
En quelques années seulement, Stahl est devenu la star de l'école; il dessine drôlement bien pour quelqu'un en primaire.
Puis au collège, tout s'est corsé.
Je garde encore des contacts avec Nahil en lui téléphonant, souvent.
Je suis dans le même établissement que Stahl et Allysse qui suit Stahl partout ou il va, comme un petit chien. Il est vrai que Stahl a vraiment beaucoup de succès auprès de filles. Même les adultes l'adorent.
Il aime toujours autant le dessin.
Les premiers jours se sont difficilement passés pour moi. Allysse a réussi à convaincre tout le monde que je suis «méchante». Tous ses amis me détestent sans aucune raison précise, et sachez-le, elle a beaucoup d'amis. Mais elle n'a toujours pas compris que je me fichais d'être aimée ou non.
Mais à cause de ça, personne ne se montre gentil avec moi. Dans des exposés en binôme par exemple, ceux qui ont été avec moi faisait tout pour que j'aie une mauvaise note. Je trouve que ça ne sert à rien.
Je me suis faite exlure plusieurs fois, à cause de mon comportement et de mes remarqes. C'est vrai que je réponds à tout le monde, que ce soit aux élève qu'aux professeurs. Il faut tout de même bien que je me défende quand on m'insultait!
J'ai aussi eu l'âge de lire la Trilogie du Spectre Noir, mais je ne raconterai rien car ce sujet est aussi classé comme «Pas intéressant».
En troisième année de collège, les gens étaient devenus plus matures. Les corps évoluent, et les gens commencent à s'intéresser aux personne de sexe opposé et à chercher l'amour. C'est à cause de quoi déjà? Ah oui, ces foutues hormones.
De plus en plus de garçons commencent à «m'embêter». Ça m'énerve vachement. Alors je sèche souvent les cours. De toute façon, je vais presque tout le temps chez Stahl, il s'occupe de me faire comprendre ce que j'ai raté.
Le jour de la rentrée en quatrième, je marchais, déçue que les cours reprennent. Rien qu'en voyant les personnes de la classe dans laquelle j'étais, je faisais une tête de déterrée. J'étais avec Allysse, alis la Blonde aux deux tresses, et Stahl aka le Dessinateur (j'accepte enfin de dire le mot exact, mais je n'ai toujours pas percé le mystère de cette prononciation fort singulière).
Je m'étais assise à côté de se dernier, à tous les cours auxquels j'ai assisté.
Je me rappelle aussi, à la fin de la journée, que Miss Tresses Blondes était venue me voir, tous les élèves de la classe derrière elle:
-Alors, Yuki, t'as pas intérêt de faire des «choses» à Stahl.
-Tu veux dire «à Stahl» ou «avec Stahl»?
-C'est la même chose!
-Pas du tout. Si je dis...
-Tais-toi, m'avait-elle coupé. Tu vois très bien ce que je veux dire!
-Pas du tout.
-Si tu ne comprends pas, c'est que tu es vraiment pas intelligente.
-C'est vrai qu'il y a plein de choses que je ne sais pas, mais je sais que j'en connais bien plus que toi, niveau culture générale.
-Je me contrefiche de ta culture génératrice ou le truc du genre. Je te dis de faire attention avec Stahl.
-En quoi tu veux que je fasse attention?
-Arrête de le draguer!
J'avais eu un fou rire à ce moment là.
-Tu crois vraiment que je «drague» Stahl?
-Oui! Et je te préviens, si tu t'approche encore de lui, tu auras affaire à moi.
En vérité, je n'avais pas compris pourquoi elle tenait tant à ce que je coupe les ponts avec lui. Lui avait-il dit quelque chose? Qu'avions-nous fait?
-Oh, je me sens vraiment menacée! Mademoiselle la Comptesse Allysse va me frapper avec ses petits points, oh là là, ce que j'ai peur.
-Je ne compte pas te frapper.
Elle m'avait indiqué un grand garçon bien costaud derrière lui.
-Et alors? lui avais-je dit, l'air indifférent.
-Je ne pense pas que tu ne puisse résister à ses coups.
-Et alors? avais-je répété.
-Tu ne fera pas le poid face à lui!!
-Je me fiche de faire le poids face à lui. Je veux voir comment tu m'affronteras, toi.
-C'est lui qui t'affrontera! Je ne prendrais pas la peine de te toucher! Je serais obligée de me laver!
-Tu sous-entends que tu ne te laves pas souvent.
-Ce n'est pas ce que je voulais dire.
-Peut-être, mais c'est ce que j'ai compris.
-C'est bon! Toi, derrière, avait-elle crié en se retournant vers le garçon qui avait le malheur d'être son ami. Tu vas la taper!
-Pas si vite, m'étais-je interposée. Tu m'as dit «tu auras affaire à moi». Cependant, ce mec n'est justement PAS toi. Alors je te prie de bien vouloir m'excuser, mais je dois rejoindre Stahl chez lui avant qu'il ne fasse noir, sinon ses parents s'inquiéteront.
J'ai achevé ma phrase avec le plus grand sourire que je pouvais faire, puis je suis partie chez mon ami, laissant derrière moi une Allysse furieuse et une assemblée déçue de ne pas avoir vu de baston.
J'ai appris que, le lendemain, Allysse avait changé de collège. Le prof avait dit que c'était «à cause de nombreux malentendus avec un camarade de classe». A ces mots, tout le monde s'était retourné vers moi. J'avais affiché un sourire triomphal.
Ah oui, j'ai aussi un petit frère, il a un an de moins que moi, mais il est tout aussi mature, même qu'il connait plus de choses sur moi-même que moi je sais. Il s'appelle Henry. Je l'aime beaucoup. Même si il me tape souvent sur les nerfs.
-Tu sais quoi, Yuki?
-Non.
-Nous deux, on a été adoptés. C'est pas nos vrais parents. On fait pas partie de la même famille.
-Et tu me dis ça comme ça et maintenant?!
-Ouais. Juste pour te mettre de bonne humeur.
-Tu pense vraiment que ça me met de bonne humeur?!
-Yep. J'aime te voir hausser le ton.
-Qui me dit que j'ai le droit de te croire?
Il a laissé échapper un petit rire de sa bouche et a pris dans sa poche un papier.
-Qu'est-ce que c'est?
-Les papiers bizarres que nose parents ont dû signer pour nous adopter.
Je les ai regardés attentivements.
Henry a commencé à se moquer de moi et à partir en courant avec mon sac. Je dus le rattraper en lui criant dessus et en l'injuriant, comme à chaque fois. Quelle maturité...
C'est comme ça que j'ai appris que j'étais adoptée.
~~~~~~~~~~
Mais maintenant, ma vraie histoire commence ici.
Pendant toute ma scolarité, je me suis bizarrement retrouvée dans la classe de Stahl. Toujours.
Un jour, lors de ma première année au lycée (lycée qui faisait aussi partie de l'établissement de mon collège, donc logiquement, toutes les personnes de mon collège étaient présentes, sauf Allysse qui avait changé d'école, ce qui a réjouit tout le monde d'ailleurs!) j'ai séché les cours, ce qui arrivait souvent. Maintenant, plus personne ne fait attention à moi.
Un concours de peinture a lieu à la fin de la semaine. Le dessin, ce n'est pas vraiment mon truc, alors je ne fais qu'encourager Stahl.
Lui, est vraiment désireux de le gagner, ce qui arrivera à coup sûr, évidemment. C'est Stahl. Stahl est capable de plein de choses, pour ne pas dire de tout.
Aujourd'hui, il vient me voir, en souriant, comme toujours. Je n'ai jamais aimé les gens qui sourient sans raison, mais son sourire était différent de tout le reste.
-Yuki, ça te dirait de m'aider pour le concours?
-Tu sais très bien que je dessine comme un cochon dans un coulis de boue gluante.
-L'idée du cochon ne peut pas exprimer ton non-talent en arts. Ce n'est pas la bonne image..
-Même toi tu le dis. Qu'est-ce que tu veux? Je sais très bien que tu n'as pas besoin d'aide pour peindre. Et si tu veux que je t'achète des pinceaux, c'est mort.
Il rit.
-Pas du tout. Je veux simplement que tu me serve de modèle.
-Pardon?!
-En gros, je veux que tu sois mon modèle.
-J'avais compris mais... pardon?!
-Pas la peine de faire semblant d'être choquée, je sais très bien que tu réalise à quelle point ta beauté est apte à devenir...
-Stoppes tout de suite les compliments.
Nous rions tous les deux.
-Je ne suis pas capable d'être ton modèle.
-Bien sûr que si!
Je n'insiste pas plus. Être le modèle du «grand peintre Stahl», c'est vraiment un honneur. Alors j'accepte.
-Quand veux tu que je viennes chez toi pour que tu commences?
-Tout de suite.
J'hoche la tête en faisant semblant de n'avoir aucune conviction, puis le suis dans sa maison qui se trouve à deux pas de la mienne.
Je monte les escaliers qui mènent à sa chambre en courant, sans oublier de saluer sa mère, puis entre dans la pièce. Je me suis toujours bien sentie, dans cet endroit apaisant, et ça n'a toujours pas changé. Les murs sont couverts de tableaux aussi beaux les uns que les autres, et les espaces vides sont peinturlurés de toutes les couleurs. C'est vraiment un espace magnifique.
Quand j'entre, je peux remarquer que son lit n'est toujours pas fait et que des vêtements traînent par terre. Un énorme chevalet se tient fièrement en plein milieu de la pièce.
-Assieds-toi sur le lit et fait comme si je n'existais pas.
-Si tu n'exitais pas, je ne serais pas dans ta chambre entrain de regarder dans le vide. Tout aurait été différent. Je n'aurais pett-être même pas eu le caractère que j'ai maintenant. Je ne serais plus pareille.
-C'est une profonde réflexion.
-Pas vraiment. Pas de ma part en tout cas.
Il soupire.
-Je voulais juste dire de faire comme si je n'étais pas là.
-Si tu n'étais pas là, je ne serais pas non plus assise sur ton lit. J'aurais sûrement été chez moi entrain de relire la trilogie du Spectre Noir ou à me documenter sur certains pokémons.
-Tu as très bien compris ce que j'insinue!
Je rit.
-Évidemment. Je ne suis pas bête à ce point.
Je m'assois sur le lit en m'appuyant sur mes mains, puis je regarde à la fenêtre. Des enfants jouent dehors. Certains s'amusent avec leurs pokémons. Des personnes un peu plus âgées discutent entre elles. Je vois des gens entrer et sortir des maisons et des magasins.
Je réflechis alors à quoi je pourrais penser pendant quelques heures, le temps que Stahl finisse une partie du tableau. Et j'ai trouvé à quoi je pourrais penser :à rien. Je suis bien au courant que ce n'est pas possible, mais pour juger les choses impossibles, il fallait toujours essayer avant de tirer une conclusion trop hâtive.
Quelques heures s'écoulèrent. Je ne sais pas combien exactement, ma je suis sûre que Stahl a terminé l'esquisse et au moins le mélange de toutes les couleurs.
En tout cas, il me fait signe de me lever. Je lui demande de me montrer ce qu'il a fait, mais il ne veut rien me faire voir. Il me fait signe de descendre avec lui, en prétendant qu'il devait me montrer quelque chose.
Avant de sortir de ma chambre, je me dirigeai vers le tableau et soulevait le tissu qui le recouvrait. C'est vraiment magnifique, le personnage est même trop beau pour être moi. Je me demande comment il a fait pour peindre tout ça en seulement quelques heures. Puis je remarque une feuille dépassant de derrière la toile. Je n'avais pas le temps de la lire, surout qu'elle semblait longue. Je ne veux pas que Stahl trouve ça suspect que je reste trop longtemps dans sa chambre. Si il ne veut pas me la montrer ou si il l'avait recouvert d'un tissu pour le cacher, il y a une bonne raison. Stahl ne fait jamais de choses inutiles.
Je descends donc le rejoindre en demandant quel était la chose «si importante» qu'il voulait me montrer.
-Tu te souviens de Nahil ?
-Oui.
-Et tu sais quoi?
-Non. Tu ne m'as toujours rien dit.
-Aujourd'hui, c'est ton anniversaire.
Mon anniversaire. Je l'ai oublié celui-là. Il faut dire que personne ne pense vraiment à moi, donc personne ne me l'a souhaité. Même pas Stahl.
-Quel est le rapport?
-Il m'a chargé de te souhaiter bon anniversaire de sa part...
-C'est tout?
-Faudrait que tu me laisse finir ma phrase. Je disais donc qu'il m'as dit de te souhaiter un bon anniversaire et il m'a donné...
Stahl se retourna et prit une boite.
-Ça!
-Une boîte?
-Pas n'importe laquelle.
-Une boite qui conserve les aliments frais? Oh, non, une boite qui peut fabriquer des baies!
-Non! Ce n'est pas la boîte qui est particulière, mais le contenu.
-Ce n'est pas ce que tu m'as dit. Tu me disais «pas n'importe laquelle» en parlant de la boîte, pas du contenu. Pourtant...
-Ce n'est pas intéressant, Yuki. Je suis sûre que Nahil te l'aurait dit si il était là. Ça t'arrive d'arrêter de réfléchir des fois?
-Jamais.
Il y a un petit silence. Stahl avait l'air déçu que je sois indifférente au cadeau de Nahil. Mais depuis le temps qu'il me connait, il aurait dû le savoir.
-Tu ne veux pas ouvrir la boîte?
-Non. Je n'en ai pas envie.
-Allez Yuki! Ça vient du coeur!
-Si tu insiste...
Je prend la boîte et regarde son contenu. Un... un oeuf de pokémon?! Pour la première fois devant quelqu'un, je laisse voir sur mon visage une expression de surprise. Un sourire s'esquisse sur ma bouche pendant un instant. Un vrai sourire.
J'aperçois un flash dans mon champ de vision. Quelqu'un est entrain de me photographier. Étant donné que Stahl est la seule personne présente...
-Qu'est-ce que tu fous, Stahl?!
-Désolé, je n'ai pas pû m'en empêcher! Ce n'est pas souvent que je te vois sourire comme ça. En fait, je crois que c'est la première fois... J'aurais quand même voulu être la cause de ce sourire, j'envie Nahil..
Il se gratte la nuque en affichant un sourire gêné, puis rougit.
-Préviens-moi la prochaine fois que tu me prends en photo, je taperai la pose, je dit en plaisantant.
-Je préfère quand tu es naturelle. Et si je te l'avais dit, tu aurais reufsé et ton sourire se serait évanouit. Ça n'aurait pas été mon but.
-Et quel est ton but?
Il hésite avant de répondre.
-Te rendre heureuse.
Le silence qui suit cette phrase est assourdissant. Puis Stahl reprend:
-Je voulais t'emmener quelque part pour ton anniversaire, avant qu'il ne fasse nuit.
-D'accord. Je remarque quand même que tu ne m'as pas souhaité bon anniversaire, aujourd'hui.
-C'est en effet une bonne remarque.
Il ne dit rien de plus. Quel abruti, il sait très bien que c'est mon annversaire aujourd'hui, il insiste même sur ce fait, mais il ne me le souhaite pas. Après, ce n'est pas comme si j'allai me vexer... bon, ok, je suis vexée. Je trouve ça «suspect» que Stahl ne dise rien, lui qui prend d'habitude si soin de moi...
Il me prend la main et m'emmène dehors. Et il me dit de simplement le suivre.
Le soleil commence à se coucher. Nous sommes sortis il y a plus d'une demi-heure. Mes parents adoptifs (d'ailleurs, je regrette qu'ils le soient, car ils sont moins proches de moi, et mon «père» ne me prête plus ses livres de science-fiction..) seront inquiets. Je ne leur ai rien dit.
Comme si on lit dans mes pensées, ma mère adoptive m'appelle:
-Yuki! Ou es-tu?
-Loin de la maison.
-Es-tu seule?
-Tu sais très bien que je ne suis jamais seule. Il y a des pokémons partout.
-Je voulais te demander si tu étais avec un HUMAIN.
-Dans ce cas, oui, je suis avec un HUMAIN.
-Est-ce Stahl?
-C'est quoi ton problème avec Stahl?
-Il n'y a aucun problème. Mais pourquoi faut-il toujours que tu traîne avec des garçons?
-Ce n'est pas ma faute si des «garçons» m'apprécient.
-Pourquoi ne traînes-tu pas avec des filles? Il y a plein de filles gentilles, polies, intelligentes... elles pourront faire l'amie parfaite.
-Tu penses déjà à fiancer Henry avec une fille gentille, polie et intelligente?
-Pas du tout!
-D'accord, donc si ce n'est pas le cas, tu n'a pas besoin de savoir pourquoi je ne traîne avecc aucune fille. Bye.
Fin de la conversation.
-On dirait que tu l'aimes de moins en moins, ta mère adoptive, fait remarquer mon ami.
J'hausse les épaules et le dévisage.
-Où veux-tu m'emmener?
-Tu verras.
Je déteste quand les gens disent ça.
J'avance derrière lui, tout en regardant le ciel qui commençait à prendre des lueurs orangées.
Stahl a prit un foulard de sa poche (je me demande pourquoi il se trimballe avec un foulard dans sa poche..) et me l'a mit devant le yeux afin que je ne puisse rien voir. Je laisse Stahl me guider, sans rien dire; je lui fais confiance.
-On est arrivés.
J'enlève le foulard.
Je me trouve dans un champ parsemé de pissenlits. Le ciel me paraît encore plus proche de moi que d'habitude. Le coucher de soleil, ce soir là, est vraiment magnifique..
Je me retourne et souffle sur un pissentlit. Les graines se font emporter par le vent. Je souris. Je suis heureuse que Stahl ait prit la peine de m'emmener dans un endroit aussi beau. J'observe les grains s'envoler au loin.
Stahl me photographie pour la seconde fois de la journée, mais cette fois-ci, je m'en fichais.
Je me retourne vers lui pour le remercier. Je le vois ramasser deux pissenlits, un jaune, et un blanc. Il me les tend:
-Tu comprendras leur signification plus tard.
Il affiche un sourire triste. Pourquoi était-il triste?
-Qu'y a-t-il?
-Rien. Je me sens parfaitement bien. Je suis heureux quand je suis avec toi.
Il s'avance doucement de moi et me regarde d'une façon apaisante.
-Bon anniversaire Yuki.
Il se rapproche un peu plus.
-En fait, j'ai oublié de te dire quelque chose d'important pendant toutes ses années.
Je crois avoir une idée de ce qu'il veut me dire.
D'ailleurs, je ne me suis jamais demandé quel place Stahl occupait dans mon coeur. J'ai préféré ne pas y réflechir, mais il est clair que je ne le vois pas simplement comme un ami.
-Je sais que tu déteste les histoires d'amour, à l'eau de rose et tout ça...
Il a complètement raison.
- ... Mais je pense que c'est mieux quand on les vit.
J'hoche la tête.
Il me caresse la joue.
-Yuki Frost. Je suis amoureux de toi.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
C'est la première fois que je suis aussi contente d'aller en cours.
Les tableaux du concours de peinture doivent être rendus aujourd'hui. J'ai appris par le biais de mon frère qu'il y avait un thème précis: «Ce que j'aime le plus au monde». J'étais vraiment heureuse que Stahl m'ait peint.
J'arrive au lycée et le cherche des yeux. Je ne le trouve pas. C'est étrange, pourtant. Stahl n'a pourtant jamais raté un cours..
Son tableau se trouvait devant la salle de classe, visible pour tout le monde. Quand je suis entrée, tout le monde m'a regardé. Ils ont eu l'air de m'admirer. Peut-être parce que Stahl m'a peinte...
Mais j'ai beau regarder partout, je ne le trouve pas. Ça m'inquiète de plus en plus. J'ai peur. Peur qu'il ne vienne pas. Peur de ne plus le revoir. Si il lui était arrivé quelque chose? Et si la dernière rencontre que j'ai eue avec lui était celle d'hier, le jour de mon anniversaire? Non, je ne dois pas me faire des films. Il est en retard, c'est tout.
Quand c'est l'heure d'aller en cours, je me dirige vers la salle. Arrivée là-bas, je m'asseois au fond, ma place habituelle. Mais la chaise d'à côté est vide. Stahl n'est pas là. Je vais passer une journée merdique.
«-Écoutez les enfants, commence le professeur lorsque tout le monde est assis. J'ai le malheur de vous annoncer qu'un camarade de classe a dû... déménager. C'est Stahl.»
Il y a un concert de cris, de protestations et de remarques tristes ou énervées. Tout le monde aimait Stahl, évidemment. Mais moi, je ne dis rien. Je reste là, bouche bée. Je sais que Stahl n'a pas déménagé. Hier encore, sa chambre était en bazar, comme d'habitude, et ils n'avaient pas l'air de préparer un déménagement.
Il lui est arrivé quelque chose.
Je me lève de ma chaise et sort de la salle. Le professeur a voulu m'en empêcher, mais ce gros lard est beaucoup trop lent et pas assez autoritaire ni futé pour pouvoir me faire rester. Alors je sors du lycée en jetant un dernier coup d'oeil au tableau de Stahl qu'on n'avait toujours pas pensé à faire rentrer.
Sa maison se trouve à quelques minutes. Je cours en sa direction.
J'arrive chez lui et entre directement.
-Stahl!!
Je vois sa mère me saluer et s'avancer vers moi, le regard triste.
-Mon fils... ne peut accueillir personne pour l'instant. Il y a des raisons privées.
Je n'ai jamais répondu à sa mère, je l'aime trop pour ça. Mais il faut que je sâche.
-Quelles raisons?!
Elle ne répond pas sur le champs et commence à me dévisager.
-Tu es la petite amie de Stahl?
-Exact. Je veux dire... en quelques sortes.
Je rougis un peu.
-Alors tu n'es surtout pas censé le savoir.
-Pourquoi?!
-Tu es trop curieuse. Rentre chez toi.
-Il se passe quelque chose de grave! Sinon le professeur ne nous aurait pas menti en nous disant que vous aviez déménagé. Ou il serait venu en cours! Et hier, Stahl avait l'air triste. Croyez-moi, je connais ses émotions mieux que vous. Que se passe-t-il enfin?!
-Rentre chez toi.
A ces mots, je devine qu'elle veut que je voie quelque chose qui se trouve chez moi. Ou quelqu'un. Comment je le sais? Facile, elle m'aurait dit d'aller en cours. Elle déteste voir des personnes se ballader dehors pendant leurs prétendues «heures d'apprentissage».
Je me dirige en vitesse vers ma maison, en face de la leur.
-T'as des cadeaux de la part d'un «ami proche», déclara Henry, un sourire en coin.
-Où ça?
-C'est la première fois que je te vois aussi paniquée, Yuki. Ça ne te ressemble pas.
-Je te demande juste où se trouvent les cadeaux!
Il me montre le coin de la pièce. Il y a deux toiles et une petite boîte. Je m'approche pour voir de plus près.
Sur la première je peux m'apercevoir, moi, entrain de sourire. La photo prise hier, quand j'avais vu le cadeau de Nahil.
Sur la deuxième, je suis représentée dans le champs de pissentits, toujours souriante.
-J'avais jamais remarqué à quel point t'es mignonne quand tu sourit, remarque Henry.
-T-tais-toi!
Je rougis un peu et baisse les yeux vers la boîte. Je la prend dans mes bras et l'ouvre. Il y a les deux pissenlits; le jaune et le blanc.
Et une feuille.
Je la retourne pour la lire.
«Yuki Frost. Si tu lis cette lettre, c'est que ma mère t'as donné les toiles.
Tu dois te demander pourquoi je n'étais pas en cours.
C'est très simple, je suis entrain de mourir. [...]»
-Il écrit drôlement bien pour un mec quand même, commente Henry en se plaçant à côté de moi pour lire la lettre.
-Tu crois vraiment que c'est le moment de dire ça?!
Je secoue la tête et continue ma lecture.
«[...]Je te dois sûrement des explications. Alors tu en auras.
Il y a deux ans, les médecins ont détecté une maladie. Je ne te dirais pas laquelle c'est; c'est bien trop compliqué à tout expliquer sur papier. Tout ce que je sais, c'est qu'une récente étude de cette maladie l'a déclarée incurable. L'année dernière, j'avais 36% de chances de m'en sortir. Maintenant... ça a baissé. Vraiment beaucoup baissé. En tout cas, il y a beaucoup de chances que se succombe aujourd'hui. [...]»
Henry ne fait pas de commentaires, pour une fois. Il a l'air aussi étonné que moi. Je serre les dents. Mes yeux commencent à s'humidifier. C'est difficile à tout avaler quand on ne fait que le lire.
« [...] Logiquement, si tu as séché les cours et que tu es revenue directement ici (je te connais presque trop bien Yuki), je me dirige vers l'hôpital de la grande ville la plus proche. Je sais que je n'ai aucune chance. Mais mes parents croient que je vais m'en sortir. Ils croient si forts en leurs espéances qu'ils les confondent parfois avec la réalité, ce qui est le cas. Je fais donc un déplacement pour rien.
Mais je voulais que tu garde un bon souvenir de moi. C'est pour ça que je ne t'ai pas accompagnée au lycée ce matin. Je voulais que la dernière fois qu'on se voit soit... hier.
Ah oui, une dernière chose...»
Je déglutis. Ma gorge se noue.
«... Je t'aime, Yuki Frost. Mais tu le sais sûrement déjà.»
Cette fois-ci, je pleure pour de bon. Une larme dégouline sur ma joue puis vient s'écraser sur le mot «aime» ne laissant qu'une grosse tâche d'encre.
Je jette la lettre à mes pieds. Il allait mourir. Un proverbe dit «On ne se rend compte de le valeur d'une personne qu'une fois l'avoir perdue» ou quelque chose du genre. Je ne pensais pas qu'un proverbe pouvait être aussi "vrai". Maintenant, je l'approuve totalement.
-Pourquoi a-t-il dit au professeurs qu'il déménage? je demande, encore sous le choc.
-Il déménage dans un sens. Il va s'installer dans l'au delà.
-Pourquoi il ne m'a dit la vérité qu'à moi?
-Mets-toi à sa place Yuki. Tu préfère sourire pour un mensonge ou souffrir pour une vérité?
-Je prendrais la vérité. Mais même dans les deux cas, je souffrirais.
-Raison de plus pour ne dire la vérité qu'à toi.
J'hoche la tête, convaincue.
-Mais si c'est le cas, pourquoi...?
-Tu te pose beaucoup trop de question dont je ne connais pas toutes les réponses, me coupe Henry. Il faut que t'ailles voir ça sur place.
-Sur... place?
-Oui. On va aller dans la grande ville la plus proche puis lui rendre visite à l'hôpital.
---
Deux heures plus tard, j'arrive à la grande ville la plus proche, avec Henry.
Les infirmiers ne nous laissent pas entrer. Ils prétendent que «Stahl n'est pas en état de recevoir des visites».
J'ai attendu longtemps, assise devant la porte. J'ai entendu des cris déchirants venants de l'intérieur. Henry a bien vu que j'étais au bord des larmes. Il m'a fait sortir de ce foutu hôpital. Pour me consoler -au moins un peu- il a emmené avec lui l'oeuf de Pokémon que Nahil m'a offert.
Je me retrouve assise sur un banc, à caresser la surface blanche et lisse de la coquille.
Une silhouette apparaît devant moi.
La personne se dirige vers moi. Je lève enfin la tête.
-Yuki...? C'est toi?
-On se connaît?
J'essaie d'identifier la personne. Un garçon, grand, cheveux châtains et légèrement bouclés, teint bazané, yeux noisettes...
-Nahil! s'exclama Henry.
-Oui, c'est moi!
Je me souviens que Henry aimait bien rester avec Sathl et Nahil, après les cours, bien que celui-ci aie déménagé au collège. Ils restaient en contact.
-Vous êtes venus... "le" voir?
-Oui...
Son regard se voile et il baisse les yeux.
-C'est dur, dit Henry.
-Sans blagues.
-C'est même très dur. De savoir que notre meilleur ami va mourir. Enfin, meilleur ami pour Nahil et moi, après, pour toi Yuki, je crois que c'était allé un peu plus loin...
-N'en rajoute pas. Je n'ai pas vraiment envie de m'énerver. La tristesse et la colère sont durs à supporter en même temps.
Personne ne répond.
-Venez chez moi, déclare Nahil. J'habite en appart' ici, je peux vous héberger. Quelques jours, si il le faut.
-Je ne tiens pas à voir Stahl mourir. Je préfère en rester à la derrière fois ou on s'est vu, répond Henry. Je rentre.
Moi, je compte rester. Mais tout le monde l'a compris. Henry me salue et part vers un taxi qui s'est arrêté pas très loin.
~~~~~~~~~~~
Une semaine s'est passé depuis la mort de Stahl.
Je suis allée tous les jours à l'hôpital et suis rentrée tous les soirs chez Nahil. J'ai décidé d'arrêter les cours. Je comprenais assez vite, et Nahil, qui continuait, me faisait un résumé tous les soirs.
Un jour, je suis partie à l'hôpital. L'infirmière me l'a annoncé.
-Votre ami Stahl est mort. Nous sommes navrés.
Je tenais mon oeuf pokémon dans les mains. Il a éclos au moment ou ma larme l'a touché. Mais je ne pouvais pas être heureuse. J'avais déjà la mort de Stahl sur la conscience. Je trouvais ça trop dur de devoir ressentir deux émotions à la fois. Je décidais d'être heureuse plus tard.
Une lumière aveuglante a jaillit de l'oeuf, tellement éblouissante que je dus le lâcher et le laisser tomber par terre.
Un Ptiravi en était sorti. En temps normal, je n’aurai pas aimé ce genre de pokémon : Rose, petit, rond, mignon. Mais c’était un cadeau de Nahil. Et le Ptiravi me chérissait. Je ne voulais tout de même pas rester avec lui toute ma vie. Je faisais en sorte de ne pas m’y attacher.
~~~~
Nahil s'occupait de moi et me soutenait.
J'ai enfin compris le sens des pissenlits. Ils nous correspondaient, Stahl et moi. Sa "métaphore" avait deux sens. Le premier est que moi, je suis le pissenlit jaune, j'ai encore du temps devant moi, je suis rayonnante, et Stahl, c'est le blanc. Les graines du pissenlit s'envolent avec le vent et le temps, tout comme l'esprit de Stahl. Le deuxième sens est un peu plus pessimisste. Je suis toujours le pissenlit jaune, et Stahl, le blanc. Mais un pissenlit, une fois l'avoir déraciné, finit par se faner, sauf si on met de l'eau. Nahil était mon "eau" à moi. Quant au pissenlit blanc, Stahl, il si décompose. Tout comme un corps peut se décomposer dans une tombe...
Toutes les années ou je voulais pleurer mais ou j'ai dû m'en empêcher étant données certaines circonstances... toutes les larmes sortaient à cette mort.
Je décide de vivre une vie heureuse. Ou du moins, plus heureuse que maintenant. Il faut que je recommence tout à zéro.
Déménager. Vivre seule.
Avant ça, j’ai redonné le Ptiravi à Nahil. Ce dernier m’avait parlé d’une île : Cobaba. Elle semblait paisible. Elle l’était.
Mais à mon arrivée, je fis la rencontre d’un certain Collectionneur, qui allait me donner mon premier « vrai » pokémon. Il était âgé, mais avait l’air en bonne santé. Il me posait d’étranges questions : « Quelle est la marque de shampoing que tu préfère ? », « Tu préfère la Bolognaise ou la carbonara ? » Et pleins d’autres truc du style. Finalement, il a réussi à trouver le pokémon de mes rêves : Feuforêve.
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