Je ne savais pas que... Andrew Stansfield / Lyra Scarlet Quand vous sentez les embruns de la mer, vous savez que la liberté vous tend les bras ! Accoudé au bastingage du ferry, je regardais Touga disparaître de la ligne d’horizon, comme le mirage qu’elle avait toujours été. Les cheveux éclaboussés par la brise, le roulage de la coque sur les flots parcourus de frisson, vous vivez… Il n’y a plus que vous, et la mer. Oui, il y a toi aussi Iris, ne roule pas des yeux comme ça ! Tu sais bien que je ne peux plus me passer à toi ! Mon petit sourire en coin l’a convaincu je crois… elle aussi elle perd son regard sur l’immensité de l’océan. C’est la première fois qu’elle le voit, je le sais, alors ça me rend euphorique de la voir aussi heureuse... Mon Iris… Si tu savais ou nous allions ! Dis au revoir à ce désert fourbu, et… imagine… une côte sauvage ou la terre et la mère s’épousent, embrassées par les vagues, imagine qu’elle est recouverte d’une myriades de petites maisons aux toits bleus de nuit, comme les écailles sur le dos hérissé d’un Draco, et ses rubans de route ensablée s’élançant sur les récifs escarpés… Imagine là, Iris, cette ville excentrique, ce petit paradis aux rumeurs de la mer… Son nom sonne comme le ressac à mes oreilles : Relifac-Le-Haut. Je reviens à Kalos, région maternelle. Cependant, je ne me nicherais pas dans le giron maudit d’Illumis… J’y ai bien trop goûté. Ladd, Arsène et Lupin devront attendre… Il faudra que je te les présente un jour, ma jolie. Tiens, attends un peu… Je pose genou à terre, et mon sac gisant à côté, je me mets à fouiller : voilà, je la tiens dans ma main. Je tremble un peu. Il faut dire que cela me rappelle tant de choses… Tiens, jette un coup d’œil sur cette photo : tu vois ici ? Gravé sur la pellicule, les trognes de mes amis d’enfance défilent devant ces petits yeux d’or. Un jour, tu les verras en chair et en os ! Mes mains entourent son petit corps que je presse contre mon torse. Dans cette position, elle pourra mieux admirer le paysage. Et puis la vue n’est pas trop vilaine, pour ne pas dire charmante. Cela fait un moment d’ailleurs que la ligne ardente de Touga s’est effacée. J’en suis heureux, dans un certain sens. Il faut que je souffle un peu de ces « vacances » hasardeuses : tellement de choses se sont produites sur ce bout de désert ! Les rencontres se sont succédées, et les sentiments aussi. Je voulais me noyer dans l’indifférence mais comme je suis une personne disons, à fleur de peau, le choc fut rude. Alors voilà, j’aimerais oublier juste quelques jours tout cela, engloutir ce capharnaüm dans un voyage dépaysant. Enfin, dépaysant n’est peut-être pas le mot le plus approprié pour cette excursion… Relifac-Le-Haut m’est depuis longtemps connu. De temps à autre, quand mes parents décidaient de « jouer à être une vraie famille », ils m’emmenaient passer l’été dans ce petit village du Sud-Est Kalosien. Et j’adorais ça. Son souffle chaud à bercé mon enfance au rythme des marées, derniers souvenirs d’un semblant de réunion avec ces deux inconnus qu’étaient mes parents. Ma mémoire fait jaillir ces moments précieux comme des bulles à la surface de ma conscience… C’est si bon de se sentir en vie… Si doux… Les yeux clos, je laissais le vent caresser mon visage, les laissant éclater un par un. - Kraaaaa ! Kraaaa, KrakNOIX ! Les petits cris d’Iris m’arrachèrent à ma quiétude, me sommant de réagir à son appel : l’ancre venait de toucher le fond. Nous… nous y sommes… Relifac-Le-Haut s’étendait bienheureuse sur les bords de la mer salée. Mes souvenirs ne me trompaient pas : elle était toujours aussi belle. Rêveur, je saisissais la valise d’une main leste, Iris à mes talons. Regarde bien, toi qui es si curieuse, et imprègne-toi de la magie de ses lieux. Mais comme ce n’est pas mon habitude de traînasser, je mets pied à terre en traversant les docks d’un bon pas. Quel bonheur d’apercevoir à chaque morceau de rue un coin bien connu de mon enfance ! Les bruits du marché mêlés aux chants des Goélises font écho à des souvenirs profonds… Enfin, pas de temps pour la nostalgie ! Il faut te réveiller Drew ! Oh mais j’y pense, qu’est devenue la maison ? Rue des Venalges, et en vitesse ! On courre à en perdre haleine ! La joie me submerge à la vue de la plus jolie des bicoques au monde, qui plus est elle n’a pas changé d’un poil ! Elle m’a vu grandir chaque été dans ses murs, elle en a vu, des choses… Je caresse du bout des doigts la patine de la porte… Je suis serein, comme je ne l’ai jamais été depuis longtemps. Voilà. Nous y sommes. Plus de Touga, plus de chaleur torride, plus d’élèves grouillants et piaillant, rien que nous, et la mer. Tu vois Iris, je ne fais pas la même erreur deux fois. Je lui adressais un petit clin d’œil complice, qu’elle reçut d’un air ravi. Puis, une bonne fois pour toutes, je pénétrais dans la maison. Rien n’avait changé, pas même ma chambre, restée en l’état depuis mes six ans. J’ouvrais la fenêtre d’une poignée ferme afin de dégager l’odeur de renfermé. Les rayons du soleil m’éblouirent brutalement, cachant la place centrale que la résidence surplombait, mais les silhouettes des passants réapparurent bien vite, touts petits qu’ils étaient et… Non, je… je dois rêver ? Cette fille, ce n’est pas… Pas possible ! Iris dans la pokéball, le vent me portait jusqu’à elle. Était-ce elle seulement ? Depuis le jour de notre rencontre, son souvenir me revient comme une chimère… qui me transperce de son regard. Mais bon sang, je ne comprends rien à ce qui m’arrive ! Je ne sais pas pourquoi j’attache autant d’importance à cette fille. Notre échange me laissait un goût étrange en bouche... De la gêne... Je ne savais pas trop à quoi imputer ce sentiment qui m'était d'habitude totalement inconnu. Je me surprenais même à prier pour ne pas la croiser de nouveau. Pas comme si je connaissais son nom en plus… Bon Drew tu te calmes, et tu vas constater dans quelques minutes que ce n'est pas elle... Oui, c'est une touriste qui lui ressemble un peu, ça doit être ça. Calmes toi Drew, calmes toi... Arrivé sur la place, je fouillais du regard la foule. Mon cœur battait fort, car la course devait m'avoir épuisé. Le souffle court, je cherchais, mais il n'y avait plus de doutes: j'avais perdu sa trace. J'étais tiraillé entre deux sentiments: d'une part, la joie d'avoir échappé à une éventuelle confrontation, mais d'autre part... du dépit? Je... je désirais secrètement la revoir... Peut-être... Pour savoir son nom seulement, voilà, elle a juste un peu éveillé ma curiosité, et c'est tout! Ressaisis toi Drew! -T-Toi? Une voix hésitante, mais reconnaissable entre mille. C'était elle. Les yeux écarquillés, je regardais sa silhouette se dessiner devant le relief de la mer. Ses longs cheveux de jais ondulaient sous la brise, son regard brun... La fille du lac se tenait à quelques mètres de moi. Stupéfait, je ne bougeais pas le moindre muscle. Que faisait-elle ici? Comment était-ce seulement possible? Les questions revenaient en boucle dans ma tête, sans trouver de réponse. Arrête, ressaisis toi! Je rejetais vivement cet état d'hébétude, et mu par une impulsion, je me dirigeais en ligne droite vers elle. Là, là, le bon moment. Il était temps de parler, temps de mettre des mots sur notre silence. Je sentais mes joues rougir, et je savais que ma voix allait bafouiller, mais... Il fallait que je lui parle. - Quand on me disait que le monde est petit, je n'y croyais pas vraiment, mais décidément, j'ai vraiment toujours tort... Hem... Que fais-tu à Relifac? J'étais gêné et ça se sentait, même si je le cachais sous une touche d'humour. Enfin, je savais que cette question était bateau, mais comment pouvais-je commencer la discussion sans perdre mes moyens? Je ne lui aurais pas demandé son nom tout de go, bien que... j'en mourrais d'envie... Hrp : 5 pokéballs en poche ! Ce Rp se fait avec Lyra Scarlet c: |
Je ne savais pas que... Andrew Stansfield / Lyra Scarlet Charmante, vraiment charmante… Mademoiselle vient encore de me remballer, comme aux lacs. Et moi qui croyais être le seul à avoir le goût des réparties acerbes… je viens de me trouver une concurrente de taille. À vrai dire, en temps normal cela m’aurait pincé, mais qui suis-je pour juger ? Il y a du malaise dans sa voix. Je crois qu’elle appréhende difficilement ces « retrouvailles », et elle n’est pas la seule. Peut-être vaudrait-il mieux couper court à cette entrevue. Le hic, c’est que je n’ai pas envie de prendre la tangente : je suis sûr qu’elle prendrait cela pour une marque de faiblesse, que cet orgueil terrible qui est le mien, ne supporterait certainement pas de lui accorder. Si seulement je pouvais le ranger dans ma poche de temps en temps… Mais attends, je rêve ou elle vient de filer à l’anglaise ? C’est bien ça, elle vient de se carapater devant mes yeux ! Et impolie avec ça. Comment ça, j’allais le faire moi aussi ? Hypocrite ? Oh non je ne suis pas hypocrite… je sais juste retourner la situation à mon avantage, nuance. - Oh, vous êtes un ami de Lyra ? Moi c’est May, enchantée ! Vous savez, je la connais depuis longtemps, mais c’est bien la première fois que je la vois discuter avec quelqu’un de son âge… - ... Lyra ? Lyra. C’est son nom. Et cette jeune femme vient de me le donner tout sourire, sans crier gare. J’hallucine. Bouche bée, les yeux écarquillés, je dois tirer une tête de six pieds de long. Mais… qu’est-ce-qui se passe aujourd’hui ? J’étais simplement venu à Relifac-Le-Haut pour me détendre, pour me séparer du reste du monde… et voilà qu’elle débarque, elle, Lyra, et que moi je me retrouve à patauger dans l’incompréhension la plus totale. Non, c’est trop. Je file à toute vitesse loin de ce vacarme, loin de cette ville, loin de cette femme… désolé, mais si je reste une seconde de plus ici je vais devenir fou ! Depuis quelques minutes je marche au petit bonheur la chance, le long de la plage. Bruissement de ressac, sable pâle, rubans d’écume, tiédeur du zéphyr… La nature est ma seule compagnie, et j’aime son chant silencieux. Mes pas plus légers tâchent la lagune de leurs empreintes, comme ils le faisaient autrefois, lorsque ça allait mal. Lorsque les parents étaient trop concentrés dans le travail et les réunions mondaines, lorsque tout se brisait autour de moi. Je courrais, je courrais à en perdre haleine, jusqu’à ce que la mer noie mon angoisse de ses murmures surnaturels. Aujourd’hui, je courre encore. Je n’ai jamais cessé de le faire. Un petit rire s’échappe de ma gorge : je n’ai pas changé d’un pouce. Il est temps de bouger. Temps de passer les limites de mon enfance. Je sais que la falaise muraille m’attend du haut de son perchoir vertigineux, depuis mes 8 ans. Je m’en rappelle encore de ces histoires, récits sordides ou contes fabuleux, de femmes qui attendent leur bien-aimé du haut de ce nid d’aigle, à la recherche des voiles tant attendues, ou de créatures monstrueuses qui jetteraient les étrangers dans la mer, histoires sanglantes baignées de soleil, histoire de marins et de vieille femmes fanées… nourrissant mon imagination, et accroissant de jour en jour ma curiosité. Et Annabelle de me répéter que c’était trop dangereux pour les enfants comme moi. Oh Annabelle, je n’étais pas en sucre. Je ne l'ai jamais été d'ailleurs, et c'est peut-être là ma seule force. Sur le bord de la falaise légendaire, le précipice s'ouvre à mes pieds: je suis arrivé au bout de mon voyage. Le vent secoue mes cheveux et m'apporte les embruns de la mer en contrebas, plus éclatante que jamais. Elle danse avec le sable duveteux de la lagune, et chante pour les Goélises aux ailes blanches, elle vit, la mer, elle respire comme vous et moi. Je l'ai toujours trouvée magnifique cette mer, mais du haut de ce rocher, sa beauté baigne mes prunelles de reflets bleus. Je pourrais rester des heures comme ça, les mains dans les poches. Je pourrais... si je n'avais pas entendu ce souffle derrière moi. Ce n’est pas humain. Je sens des frissons me parcourir le corps, tandis que je me retourne doucement sur mes appuis. Devant moi, des arbres étendent leurs ombres sur les herbes sauvages, serrées autour de quelques buissons épais de laurier rose, le coin est charmant peut-être mais quelque chose s’y tapit. Je m’approche à pas feutrés de l’acacia d’où vient le bruit, le cœur serré par l’angoisse. Evidemment, quelle bonne idée de se précipiter dans la gueule du Grahyéna… mais la curiosité est trop forte. Elle l’emporte toujours, pour mon plus grand malheur. Déjà tout près du tronc, je regrette rapidement mon choix. Un éclair rougeoyant, et je me fais faucher d'un coup sec avant de mordre la poussière. Mon corps est douloureux mais à fortiori, je n'ai rien de grave. J'essaye de me relever tant bien que mal, m'appuyant sur mes coudes, mais le choc est encore trop fort. Il faut faire quelque chose, et vite... Je dois au moins voir le visage de mon assaillant: péniblement, je réussis à lever ma tête... avant de sentir sur ma gorge la menace d'une lame. - Hisssssssss..... [ lancer une pokéball ] |
Je ne savais pas que... Andrew Stansfield / Lyra Scarlet J'étais différente. Un monstre ? Peut-être. Je ne sais pas moi-même à présent, démêler le vrai du faux. Ce qui tient de la pestilence des mots déformés ou de la vérité pure dans la bouche d'un enfant. Le monstre des lauriers roses. J'imagine que ça doit bien sonner, lors d'une soirée ou les légendes s'étiolent comme les flammes du foyer. J'imagine que c'est plus facile de qualifier de monstre ce qui nous échappe. Dans la violence d'une lame pénétrant la chair, j'ai écouté mon premier appel de vie. Je brisais ma coquille. Le monde pâle se présentait teinté de sang, sang de mon frère qui coule entre les serres de son meurtrier, sang dans ma bouche lorsque je mordais à pleine chair sa gorge découverte. Dent pour dent, dès le début de notre existence. Le Mangriff gisait là, lové contre l'autre dépouille. Drôle de monde, les tueurs finissent toujours par rejoindre les tués. Quelle ironie... dans cette lutte sans merci. Museau ensanglanté, éclair pourpre sur le poitrail, stigmates d'une naissance douloureuse. Je ne pleurais pas la mort de mon frère, ni celles qui survinrent bien plus tard. Le goût des larmes, les Sévipers ne le connaissaient pas: ils naissent et meurent dans le silence des nuits sans lune. Que faire d'états d'âme quand l'on doit se battre pour assurer son existence ? On jette, à moins de vouloir être soi-même jeté du haut de la falaise. J'en ai fait valser des tueurs d'enfants et des bourreaux de vieux, je les ai fait danser avec ma lame avant que leurs silhouettes ne disparaissent dans le bleu de la mer. J'étais jeune, et j'étais déjà crainte. Différente, cette enfant réchappée du massacre. Victime devenue vite bourrelle sous le sifflement de ses congénères, sous le cri étranglé de ses ennemis. Le bleu de la mer dans ma bouche, pour ne pas oublier le goût du sang, dans mes yeux, pour ne pas oublier leurs derniers regards, sur mon dard, instrument de mort, le bleu de la mer, pour me rappeler le prix des vies que j'ai enlevées pour la mienne. Je ne le faisais pas de gaieté de cœur. Je ne trouvais pas de plaisir dans cet acte. Seulement le sentiment d'une victoire contre cette chose invisible qui rôde autour de nous, sans odeur, aérienne comme de la gaze, cette marque subtile qu'est la mort. Tous les jours sur la falaise il était question de qui resterait vivant jusqu'au crépuscule. Lui, elle, moi, eux ? Sans noms, sans attaches, nous nous mouvions ensemble sous le soleil de ce petit paradis cruel au dessus de l'océan. Je l'aimais ce monde pâle, ce monde dur qui ne pardonne pas, je l'aimais comme un alcoolique aime les divines bulles d'or frémissant dans son verre : il était douloureux, et terriblement beau à la fois. Écailles virides coiffant ma peau, comme les tendres feuilles de laurier rose aux premiers jours de printemps, souvenir que tout se refait malgré les avanies du temps. J'ai compris dès ma naissance que je ne serais jamais acceptée. Était-ce l'étrangeté de ma carnation, ou ce penchant incontrôlable pour la violence ? Je me confondais moi-même parfois : étais-je vraiment cette effrayante silhouette à la surface de l'eau ? J'interrogeais mon reflet. Il ne voulait pas me répondre. Peut-être lui faisais-je peur, à lui aussi ? La peur que j'instillais dans le cœur collait aux écailles de ma peau, réussissait presque à toucher le mien de son poison secret... En vérité, c'était moi, Qui les redoutait. J'avais laissé le mythe du monstre se fortifier, incorporé à tout mon être, je ne faisais plus qu'un avec la légende. Ils la répandaient à travers le silence des nuits, revêtant la falaise d'histoires lugubres. Tragédies sombres au coin d'un feu, pour faire peur aux enfants trop aventureux, aux esprits rétifs que la curiosité pousse, légendes "de créatures monstrueuses qui jetteraient les étrangers dans la mer". Les humains sont les poètes les plus pathétiques que j'ai jamais vus... dans leur incompréhension, les peurs prennent la forme de chimères exubérantes. Mais pour une fois, la chimère hantait bien son royaume d'ombres, tapie sous l'éclat rougeoyant des lauriers rose, agitant de temps à autre sa dague bleutée pour effrayer les badauds, mêlant à sa comédie des sifflements gutturaux, faisant ployer les corps sous la pression menaçante de ses anneaux. Une parfaite... croque-mitaine. Plus personne n'osa s'aventurer pendant longtemps dans le royaume au dessus de la mer. L'océan livrait son récital chaque soir, froissant le silence comme pour réanimer ce monde que j'avais rendu muet. Même lacets de sable, même soleil qui brille doucement, même bruissement des acacias en fleur, silence des âmes. Je goûtais à la solitude, ce divin nectar, divin... poison... J'étais seule à présent, comme je l'avais désiré. Mais était-ce le véritable souhait que j'avais formulé un de ces soirs sans voix ? Au fil des jours ma lassitude s'accrut, et l'ennui devint mon seul compagnon de route. Je me languissais. Les silhouettes passaient de nouveau sur mon territoire, ersatz de vie sans intérêt pour moi. Je ne les regardaient même plus. Tout m'était devenu parfaitement étranger. J'avais toujours été une étrangère, Parmi ces ombres. J'attendais quelque chose, un je ne sais quoi. J'attendais une résistance dans cette chair molle que la falaise composait, Mangriffs sanguinaires, passants hébétés, monde se dérobant au premier jet de lame. Je l'attendais, lui. Mon diable. Il n'a pas fui, il n'a même pas frémi quand il a rencontré mon regard. Calmement, il s'est relevé comme si tout cela était naturel, avait écarté de la main ma lame, ne songeant même pas au danger de l’empoisonnement, avait épousseté son costume noir impeccable, et une fois le protocole terminé, avait enfin songé à me fixer... dans le blanc de l’œil. Il n'avait... pas peur ? Non, il n'avait pas peur ! C'était lui ! Cette force dans ce regard sauvage, cette force qui suinte de tout son être, ce sourire narquois... Je venais de trouver mon seul et unique congénère... Oui, il était fait de la même essence que moi ! C'était épidermique, instinctif, je le sentais comme moi, ce diable aux cheveux couleur de sang, ce diable qui avait osé touché le tranchant de ma lame mortelle, lui qui planterait ses crocs dans ma chair sans hésiter ! C'était lui, et je devais le tuer. Le tuer ou ce serait moi... Lui, ou moi. - Et pourquoi pas lui et moi ? Je le fixais stupéfaite. Il était comme moi, il savait ce que je pensais, car lui aussi ressentait l'appel du sang. Le destin semblait lui avoir présenté une issue moins sanglante ce pendant, une issue... intéressante. J'avais le choix. Je n'ai pas attendu une seconde plus. - CE SERA TOI ! Un sifflement aigu, mon corps écaille déchire l'espace. Les crocs en avant, je vais lui déchirer le visage... avant de disparaître dans un éclair. Poum, poum, poum... Tswing. Jusqu'au dernier moment tu n'as pas bronché. Tu as même gardé ce sourire serein, ce sourire qui connait déjà l'avenir. Je suis sans crainte désormais. Peu importe le chemin à parcourir, les batailles à endurer, j'ai trouvé mon semblable. Seras tu aussi impitoyable que moi ? Je ne sais pas, mais dès ce jour, ce sera... Toi et moi, hissss... |
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