« Nooooc ! Hé, Noc ! Ecoute moi ! »
Le dénommé Noc ouvrit un œil, l'air ennuyé. Devant lui se dressait une petite brunette, à peine moins âgée que lui. Un large sourire s'affichait sur ses lèvres et ses deux petites joues rosées s'étaient redressées. Il avait tellement envie de la câliner, là. Avec son air adorable et ses grands yeux... Peut être un petit baiser sur la joue ?
Elle n'aurait pas protesté, il le savait. Pourtant, Noctis Nathaniel Flavelle faisait tout son possible pour se contenir. Dans ce monde, il n'y avait bien qu'elle qui pouvait le faire craquer ainsi. Il avait quatorze ans, et s'ennuyait fermement à rester à la maison sans rien faire. Oh, bien sûr, il y avait l'école. Super. Quelle consolation. Elle n'en avait que treize, mais Lyph Mithril Flavelle était sans doute beaucoup plus enjouée que lui. Pour son propre départ. Il était désormais temps pour lui d'avoir – non sans mal -  son premier pokemon ! Et ça lui changerait la vie, très certainement. Enfin, une chose lui manquerait. Une personne en fait.
Elle.
Elle était tellement fragile. N'importe qui aurait pu arriver et la briser. Il céda à la tentation, se leva et la serra fermement dans ses bras.
« Oh, ne soit pas triste Noc. On se reverra tu sais ? Je ne vais pas disparaître. »
Il soupira. Maudite cadette.
« Et... Heu... Pour ce dont on a parlé...? »
Il prit son air renfrogné et l'invita à s'asseoir.
« Tu n'as que deux ans d'écart avec moi. Tu te souviens sans doute de plus de choses que moi.
-N'empêche. Tu as promis. Raconte moi. Comment était maman ? »
Il y eut un long silence, avant que Noctis ne se décide à prendre la parole, malgré ses hésitations.
« Je ne l'ai pas connu beaucoup plus que toi... Je suis né deux ans avant toi, à Romant-sous-bois ; c'est là qu'elle vivait, avant. Je crois me souvenir qu'elle disait qu'il neigeait, ce jour-là. Que tout était blanc. Elle était douce. Très douce. Je ne me souviens pas de grand chose d'elle... Mais quand j'étais tout petit, que j'étais effrayé, elle posait sa main sur ma tête, comme je le fais pour toi... Elle la frottait doucement, jouait avec mes cheveux, et chantait. C'était comme ça qu'elle faisait pour m'endormir aussi. Elle te l'a aussi fait, mais tu ne dois pas t'en souvenir... Tu étais si petite. Elle m'a dit qu'il fallait que je te protège, coûte que coûte. »
Lyph eut un sourire amer. Le temps passait tellement vite, pour elle. Un Evoli sauta souplement sur ses genoux, et elle se mit à le câliner.
« Il était à elle, tu sais. Je suis sûre qu'elle voudrait que tu le gardes. Il a toujours été plus proche de toi que de moi. Peut être parce que maman et toi, vous avez la même allure gracieuse et douce... Une certaine fragilité. »
Son sourire se fit plus franc.
« Tu te souviens, quand tu m'embêtais dans le jardin, à chaque fois que papa recevait des invités ? Je ne comprenais pas pourquoi il faisait ça...  Mais tu étais méchant, Noc.
-Je suis toujours méchant.
-Non, ce n'est pas ça. Tu es juste joueur et têtu. Tu refusais d'admettre que j'avais raison, quand je disais que tu ne comprenais pas ce qui se passait, alors du coup, tu te vengeais. Ce que tu pouvais être orgueilleux... »
Au vu de la tête blasée du garçon, il l'était toujours. Elle retint un rire.
« Notre enfance n'a pas été si mauvaise que ça... Toujours à gambader et se chamailler l'un et l'autre. On faisait vraiment la paire. Je crois que... »
Sa voix se brisa un peu.
« Je crois que j'aurais voulu que ça continue... Rester avec toi. »
A l'entente du sanglot étouffé de sa sœur, Noctis changea complètement d'attitude. En un instant, il était agenouillé devant elle, lui tenant les mains, le regard doux.
« Lyphie, je suis toujours avec toi, pas vrai ? Je ne te quitte jamais. Toi et moi, on se connaît par cœur. Et tu l'as dit toi même : je ne disparais pas. »
Elle lui fit un maigre sourire, mais il savait qu'il était sincère. Alors, à son tour, il lui sourit, comme il savait si bien le faire. Un sourire fort et resplendissant, comme le soleil. Noctis ressemblait au soleil lorsqu'il souriait.

Son père l'étreignit une dernière fois avant de le regarder s'éloigner. Bientôt, la silhouette du garçon disparu, et il resta seul, sa fille à ses côtés. Il soupira. La vie continuait, hein...?

« Y a quelqu'un ? »
Dans les ténèbres, Noctis avançait, sans l'ombre d'une hésitation. Il y était clairement à l'aise. A peine arrivé, on lui avait indiqué les souterrains de l'école, pour finir son admission, soit disant. Pas de souci pour lui. Il n'avait pas peur du noir. Il avait passé la majeure partie de son temps dedans, la nuit, quand il parlait avec sa sœur. Cela étant, c'était quelque peu différent ici.
« Oui, oui... Je suis là. »
Un homme, dont la silhouette était tapis dans l'ombre, le scrutait. Il le sentait, sans pour autant parvenir à le voir. Au son de la voix, c'était un homme, relativement âgé. Peu d'informations...
« J'imagine que tu es là pour ton premier pokémon, mon garçon ? Bien bien bien... Parlons un peu, tu veux ? »
L'homme le pria de répondre à une sorte de quizz, sur l'un des ordinateurs de la salle. L'intensité lumineuse contrastait brusquement avec la pièce, et il détailla plus le collectionneur. Beuh. Il avait l'air aussi blasé que lui. C'était des questions sans lien logique, sur lui-même, sur son entourage, sur les autres. Il ne faisait rien de plus que d'apprendre à le connaître. Tout simplement. Comprendre qui il était, comment il était, pourquoi il était. Au bout d'un long moment, l'homme rendit son verdict:
« Je sais ce qu'il te faut. Tu es beaucoup trop froid avec les autres, il te faut de la tendresse. Beaucoup de tendresse. Sinon, les pokémon que tu auras ne t'aimeront pas. Pour cela... »
Il se déplaça rapidement, avant de tendre au garçon une pokéball.
« C'est ce pokémon là qu'il te faut. »
Noctis regarda la ball pendant quelques secondes, réfléchissant à ce qu'elle pouvait contenir.
Il lui était venu en tête tout un tas d'idées pour flatter son égo.
Pas celle d'un petit pokémon cotonneux qui le fixa intimidé.
Pourtant, il ne fallut qu'une brève minute au garçon pour revoir en ce pokémon sa sœur. Aussitôt, un grand sourire naquit sur ses lèvres et il commença à câliner le pokémon.
« Il est tout cotonneux... Tellement doux... Comme une peluche... »
L'homme lui sourit. Une fois encore, il avait visé dans le mille. Un petit cri suraigu s'échappa du bec du Tylton, et les deux nouveaux compagnons remontèrent, tandis que l'homme les regarder s'éloigner, attendant son prochain défi.