Pourquoi aies-je accepté de participer à cette sortie déjà ? Ah oui, la possibilité de capturer un pokémon. Depuis l'annonce de la sortie, j'ai comptée les jours jusqu'au jeudi matin. À 9 h 45 j'étais déjà au port, prête à embarquer dans le bateau en partance pour le continent. La traversée m'avait semblé durer des heures puisque j'étais trop impatiente de connaître la destination de la première sortie capture du deuxième semestre. Quelle n'avait pas été ma déconfiture lorsque j'ai vu le sable à perte de vue et les vagues de chaleur troublant l'horizon. J'avais encore plus déchanté lorsque j'ai levé les yeux vers un ciel sans nuage. Je n'aurais jamais pensé être lâchée lousse dans un désert aride. J'avais été assez prévoyante pour emporter de la crème solaire, des lunettes fumées et de l'eau à profusion. En cet instant, il me manquait une seule chose essentielle, un chapeau... Je marchais depuis à peine dix minutes sous le soleil impitoyable et mon cuir chevelu commençait déjà à s'enflammer. J'ai dû mettre mon châle sur ma tête pour éviter d'avoir un coup de soleil à cet endroit. De ce fait, mes épaules fraichement crémées de protection solaire subissaient les assauts impitoyables des rayons UV. Malgré les multiples couches, ma peau délicate n'allait pas tarder à rougir. J'allais devoir refaire mon stock d'aloès, car j'allais sûrement en avoir besoin. Je me demandais quelle fatalité du sort avait voulu que j'aie une peau si sensible.

Une bourrasque de vent menaça l'équilibre de mon chapeau improvisé, lequel demeura en place seulement parce que j'y avais posé ma main juste à temps. La rafale n'apportait aucun soulagement puisqu'elle était aussi chaude que l'air ambiant. Je remerciai le ciel d'avoir pensé à emporter mes lunettes fumées, car elles formaient écran protecteur contre les grains de sable soulevés par la brise chaude. Je scrutai le vague horizon pour vérifier s'il n'y avait pas une tempête de sable en formation. Le désert Jouca était reconnu pour ses perpétuelles tempêtes sableuses. Rien n'indiquait que cela allait se produire, mais je savais qu'un typhon pouvait surgir à tout moment. Je cherchai un endroit où je pourrais me cacher en cas de déferlement sablonneux. Je remarquai quelques gros rocher derrière lesquels je pourrais m'abriter. Je m'y dirigeai sans perdre de temps, la nidoran femelle trottinant difficilement derrière moi.

Accroupie à l'ombre d'un rocher, je passai ma main sur mes épaules déjà douloureuses. Les prochains jours s'annonçaient fort pénibles. L'ombre projetée par le rocher offrait peu de soulagement dans cet environnement extrême. La bouche asséchée par la soif, je profitai pour nous abreuver. Je me penchai d'abord vers Karael pour lui en donner quelques goûtes. La pauvre semblait abattue par la chaleur. Cet endroit n'était décidément pas pour elle. En fait, tout endroit sans nourriture n'était pas adéquat pour l'estomac sur patte qui me servait de pokémon. Elle accueillie les gorgées bienfaitrices avec un soulagement manifeste. Je me servis à mon tour, apaisant ma gorge asséché. Je scrutai les environs à la recherche du moindre indice d'une présence vivante dans les environs. Comment j'allais trouver des pokémons dans ses terres arides ? Je me hissai au-dessus du rocher pour scruter à nouveau les environs. Malgré les bourrasques récurrentes, aucun signe ne trahissait l'imminence d'une tempête sablonneuse. Je me résignai à quitter l'ombre du rocher pour me remettre en marche. Si je voulais avoir la moindre chance de rencontrer au moins un pokémon, je ne devais pas rester en place. À peine eus-je quitté l'ombrage du bloc, que le soleil plombait déjà sur mon dos déjà à vif. Je fis quelques enjambées dans le sable avant de me rendre compte que la nidoran femelle ne me suivait pas. Je me retournai pour la voir coucher à l'ombre du rocher, la mine boudeuse.

- Allez viens Kara, plus vite on rencontrera un pokémon, plus vite on pourra retourner à l’embarcadère, l'encourageais-je.

Toutefois, la retardataire ne l'entendait pas de cette oreille. Elle ne bougea pas d'un poil, hormis pour détourner la tête. Je grinçai des dents en songeant à la perte de temps qu'elle occasionnait par son attitude bornée.

- Ça ne m'enchante pas plus que toi de me faire carboniser par le soleil, mais si je veux que tu aies un nouvel ami, je n'ai pas le choix, argumentais-je. Alors, s'il-te-plait Karael, arrête de bouder et bouge de ce rocher. Ne m'oblige pas à aller te chercher.

La nidoran me lança un regard en coin, contrariée. De mauvaise grâce, elle déplia ses petites pattes et se résigna à me suivre.

OOOOOOOOH *_*

Le sable rendait notre progression de plus en plus difficile. Il fallait presque que je fasse deux pas pour avancer d'un seul. Quelques grains de sables s'étaient faufilés dans mes souliers, les rendant inconfortables. Je ne pouvais retirer mes souliers afin de les vider. Le vent, qui s'était levé, soulevait des vagues de sable brulant. Si j'avais le malheur d'ouvrir la bouche, j'avalais une pelletée de sable. Comment j'allais arriver à trouver un pokémon dans un temps pareil ? Je voyais à peine à un mètre devant et encore j'étais généreuse. Je n'étais plus victime des rayons du soleil, mais le contact de l'air chaud sur ma peau déjà enflammée me faisait affreusement mal. Je n'avais pas hâte de voir dans quel état je serai le lendemain pour l'entrainement matinal. Normalement, c'était supportable, cependant avec un dos douloureux cela allait devenir une véritable torture. Je n'osais pas y penser. Je baisai le regard vers Karael, que je voyais à peine. Celle-ci traînait un peu de la patte derrière moi. Elle devait me maudire de l'avoir forcé à quitter son rocher. À vrai dire, je m'en voulais aussi, mais c'était le seul moyen pour augmenter mes chances, déjà minces, de rencontrer un nouveau pokémon.

- Karael dépêche-toi, il ne faudrait pas que tu t'éloignes trop, je ne voudrais pas qu'on se perde de vue, l'enjoignais-je

J'avançais à l'aveuglette, lorsque mon pied rencontra quelque chose de dur. Je culbutai sur l'objet et tombai sur autre forme plus douce. Je roulai un peu plus loin et laissai échapper un gémissement de douleur en même temps que la pauvre petite créature derrière le rocher. Le contact de mon dos sur le sol sablonneux provoqua une douleur lancinante. À peine tentais-je de me relever que je sentis des griffes s'enfoncer dans ma jambe et ainsi que des crocs acérés dans mon mollet. Je n'avais pas déjà assez mal comme ça, il fallait qu'en plus je me fasse attaquer par un pokémon. Les yeux pleins de larmes de douleurs, je n'arrivais pas à distinguer la forme qui s'agrippait férocement à ma jambe. Je tentai d'enlever la boule de poil brune de sur ma jambe, mais il ne voulait pas lâcher prise.

En remarquant que sa dresseuse était en difficulté, Karael ne tarda pas à la rejoindre. Malgré sa nature pacifique, elle réagit au quart de tour en voyant le lionceau mordant la jambe de la dresseuse. La nidoran s'élança férocement sur l'hélionceau, se roulant en boule pour que ses épines empoisonnées percutent l'autre pokémon. Ses dards libérèrent leur venin sur le félin, l'empoisonnant par la même occasion. Le lionceau n'eut d'autres choix que de lâcher sa prise sur la jambe de l'humaine. Les deux pokémon roulèrent l'un sur l'autre, jusqu'à ce que la nidoran se retrouve au-dessus de lion. Elle lui donne un coup de griffe bien sentie. Son adversaire ne tarda pas à la repousser. Celui-ci lança une attaque flammèche dans sa direction, avant de souffrir à nouveau des effets de son empoisonnement. La nidoran répliqua avec un lancé de dard empoisonné.

Hébétée, je me redressai péniblement. Je retirai mon châle de sur ma tête pour le poser sur mes blessures. J'appuyai fortement pour aider à coaguler. J'allais devoir dire adieu à cette écharpe après cela. Ce qui s'annonçait être une sortie scolaire enrichissante se révélait n'être qu'une suite de mésaventure. Je tournai mon regard vers le combat qui faisait rage entre les deux pokémons. Quelle ne fut pas ma surprise de voir Karael qui combattait avec une ardeur que je lui avais rarement vu. Abasourdie par la férocité dont faisait preuve mon pokémon ça me prit quelques temps avant de reprendre mes esprits. Je sortis mon ipok de ma poche afin d'identifier l'adversaire de la nidoran.

« Hélionceau, plus l'adversaire auquel il est confronté est fort, plus la température de sa crinière augmente, l'énergie générée se diffusant alors dans tout son corps.» énonça voix de l'ipok.

Ça promettait d'être intéressant comme pokémon. Finalement, je n'allais peut-être pas revenir bredouille de cette expédition. Le lionceau se lança sur Karael pour lui faire un attaque coup d'boule. Il était temps que je reprenne mes responsabilités et que je soutienne mon pokémon.

- Karael fait double-pieds, ordonnais-je à mon pokémon.

Celle-ci se positionna pour l'attendre de pied ferme. Alors que le lionceau l'atteignait de plein fouet, elle lui donna ses coups de pieds au même. Les deux pokémons furent projeté plus loin sous la force de l'impact. Karael fut la première à se relever, affectée par les coups qu'elle avait reçus et la tempête qui faisait rage. Les effets de l'empoissonnement commencèrent à se faire de plus en plus sentir. Le lionceau se releva en vacillant. Je profitai de cet instant de faiblesse pour lui lancer une pokéball. Je croisai les doigts pour qu'elle cesse de gigoter, ainsi je pourrai enfin retourner à l'embarcadère.

Une immense vague de soulagement m'envahit lorsque la lumière rouge de la pokeball s'éteignit. J'avais enfin capturé mon premier pokémon. Mon euphorie fut de courte durée, car je devais réfléchir au moyen de retourner à l'embarcadère. Dans ces plaines sablonneuses, il était facile de se perdre. De plus, les rafales de sables rendaient le repérage encore plus compliqué. Je rangeai la pokéball sur ma ceinture, ce ne serait pas le bon moment pour faire connaissance avec mon nouveau pokémon. Après tout, la dernière image qu'il avait de nous c'était ma jambe qu'il mettait en compote et un nidoran qui l'attaquait. De ce fait, il ne serait assurément pas dans l'état d'esprit adéquat pour faire connaissance. D'ailleurs, le poison continuait de faire effet sur lui, j'allais devoir le faire soigner le plus rapidement possible puisque je n'avais pas d'antidote sur moi. J'attachai mon châle sur ma jambe afin qu'il reste en place. Karael revint vers moi, examinant ma jambe avec inquiétude. Malgré la tempête ambiante, je sortis ma gourde d'eau. Nous avions vraiment de nous désaltéré. Je me penchai vers Karael, la couvrant des grains de sable projetés par le vent. Elle laissa échapper un soupir de soulagement.

- Kara tu t'es bien battue, la félicitais-je. Je crois que lorsque nous allons revenir à l'école, je vais te donner un bon petit festin.

La nidoran laissa échapper un cri de pur bonheur à l'idée de manger. Il y avait toujours de la place dans l'estomac de Karael pour un peu de nourriture. Après m'être désaltérée, je rebroussai chemin. Dès que je fis un pas, la douleur sur ma jambe se raviva. Le chemin du retour promettait d'être fort pénible. J'avançai donc en claudiquant dans les plaines sableuses. Le vent me poussait dans le dos, ce qui pour une fois m'avantageait. Je n'avais pas hâte de me retrouver devant un miroir pour voir la tête de déterrée que j'avais en ce moment. Le portrait se résumait ainsi : la peau rougie par le soleil, les cheveux en bataille et plein de grains de sables, ainsi que ma jambe recouverte d'un tissu aux tâches écarlates. Je devais ressembler à une créature hybride digne des films d'épouvantes, mi-humaine, mi-homard. Le pire restait à venir, car j'allais sûrement avoir des cloques d'eaux dans quelques jours. Après allait venir la mue, soit ma peau allait commencer à pelée. Pour l'instant, mon dos n'était qu'une plaie brûlante qui rendait ma progression interminable. Autre chose qui commençait à me perturber, c'était mes pieds enfoncé constamment dans le sable. Les grains sablonneux qui s'infiltraient à l'intérieur se faisaient de plus en plus nombre. De ce fait, mes pieds commençaient à être douloureux.

À mesure de ma progression, le vent se calmait peu à peu. Le sable retombait graduellement, laissant les rayons du soleil plongé à nouveau. À mon plus grand malheur, je sentis le soleil vriller sa chaleur sur le devant de mon corps, terminant ainsi de griller ce qui me restait de peau intact. Je n'avais plus mon châle pour protéger mon visage de l'agression des rayons UV, de ce fait j'allais sûrement avoir une belle démarcation au niveau de mes yeux. Hormis que je cuisais autant sur le chemin du retour qu'à l'allée, aucun autre événement marquant ne se déroula durant le trajet. Je commençais presque à penser que je m'étais évanouie quelque part et que je rêvais. Toutefois, la douleur que je ressentais me prouvait que j'étais belle et bien éveillée. Après une traversée interminable, je vis enfin la lumière au bout de ce tunnel brûlant. L'embarcadère se profilait peu à peu au loin. J'espérais seulement que ce n'était pas un mirage. L'exclamation de joie de Karael me rassura. Elle ne tarda pas à partir en flèche vers le port. Avec ma jambe blessée, je ne pouvais la suivre. Cette situation avait un air de déjà-vu, me rappelant ma première rencontre avec Yamato durant l'hiver passé. Je soupirai en raison de la mauvaise habitude de mon pokémon de se précipiter sans m'attendre.

- Sibole Karael, attends-moi, je ne peux pas te suivre, m'écriai-je en claudiquant dans son sillage.

Finalement, elle s'arrêta à l'entrée de l'embarcadère. Je la rejoignis, haletante. Je remarquai une poubelle près de moi, je pris pot de crème solaire qui s'était révélée inefficace durant mes mésaventures. En une quinzaine de minutes d'exposition et je carbonisais déjà, cette lotion ne valait rien du tout. Je la jetai dedans avec humeur, j'allais changer de marque à mon retour. Je me tournai vers la flèche qui me regardait avec une innocence feinte.

- T'étais vraiment obligé de partir en flèche comme ça, bougonnai-je.

Elle me répondit par une exclamation que je perçus comme un oui fort enthousiasme. Je levai les yeux au ciel. Je remarquai aussitôt les coups d'oeil interloqués des passants. Mes brûlures me rendant déjà irritable, je leur lançai des regards assassins. Je montai dans le bateau sans demander mon reste et me faufilai à l'intérieur, profitant de la fraîcheur bienfaisantes de la cabine. Je m'assieds sur le dernier banc au bord d'un hublot, Karael couchée tout contre moi. Je ne m'appuyai pas sur le dossier du banc, car je savais que ce serait fort douloureux. De ce fait, j'étais dans une position inconfortable et j'avais l'impression que tout mon corps était en feu. Je ne pouvais m'endormir, ce qui n'était pas le problème de mon pokémon qui ne tarda pas à s'endormir épuisée par cette journée mouvementée. Je pris doucement la pokéball contenant mon nouveau pokémon. Au final, mes mésaventures dans le Désert Jouca avaient valu la peine.