C’est bizarre. Ce silence entre eux est si étrange, si inhabituel, si loin de tout ce qui fait qu’ils sont eux. C’est bizarre. Bizarre de se sentir si mal à l’aise avec elle alors qu’elle est une des personnes les plus proches de lui. C’est étrange de ne pas savoir quoi dire, de ne pas vouloir dire quoique ce soit.
Peut-être que s’ils continuent à ne pas bouger l’étrange sensation disparaîtra ? Peut-être, avec un peu de chance, Calua se lèvera, sortira et ne reviendra que quand Sirius sera de nouveau Sirius. Pas cette carcasse désabusé, cette carcasse qui n’a plus vraiment d’espoir. Cette carcasse qui ne mérite vraiment pas le rayon de soleil qu’est Calua.
Elle est posée là dans un coin et elle dit rien. Sirius aussi est posé là et il ne dit rien. Il n’y a qu’Ash qui tente tant bien que mal d’amener l’attention sur lui, de briser le terrible silence, le terrible malaise. Ça ne marche pas vraiment et ils continuent de se regarder dans le blanc des yeux. Ils continuent de juste être là. De rien dire.
Et Sirius réalise qu’elle voit enfin à quel point il va mal. À quel point le Sirius qu’elle connaît n’est plus exactement le même. Qu’il a changé. Son accident ne l’a pas laissé indemne, ni physiquement, ni moralement. Et comme souvent, les blessures physiques guérissent bien plus vite que les mentales.
Il voudrait Sirius, du plus profond de son cœur, être capable de lui parler comme avant. La taquiner sur sa timidité, faire une blague sur sa condition, lui dire qu’il va bien. Mais il n’en a pas envie, il n’a pas le courage et il est juste … Fatigué. Fatigué de se battre tout le temps, fatigué de toujours porter le masque de l’homme heureux et épanoui.
Sirius est humain. Sirius a des failles, Sirius n’est pas parfait. Et Sirius se déteste pour ces raisons là.
Sirius voudrait balayer les soucis d’un geste de la main. Sirius voudrait simplement que tout aille bien, qu’il puisse faire tournoyer Calua dans ses bras, ébouriffer ses mèches rebelles, la faire gonfler les joues, agacée par ses taquineries. Mais il n’y arrive pas. Il n’a pas la force de mettre un sourire sur son visage, il n’a pas le courage d’être heureux. Il n’a pas envie d’être fort.
Il veut juste … que ça s’arrête.
Que la douleur dans son cœur s’arrête, que les doutes et les blessures disparaissent. Juste, il veut aller mieux.
Calua brise le silence. Son surnom reste en attente d’une suite que la brunette ne semble pas arriver à dire. Il flotte dans la pièce et Sirius réalise que ce Starius n’est plus vraiment là. Et Calua l’a probablement compris aussi. Il s’est endormi, il est partit et Sirius dépose sur ses lèvres un sourire triste.
Sa petite sœur n’arrive plus à lui parler.
Dans quel état est-il pour en arriver là. Il baisse les yeux sur la robe d’hôpital qu’il porte. La même chose que depuis le début du mois. Cet endroit lui prendra tout. Ces pokemons, ses vêtements, ces cheveux, son essence. Il n’est qu’une coquille vide.
Une pauvre coquille vide.
Sirius manque le brusque mouvement de Calua. Ou plutôt, il n’y fait pas attention. C’est évident. Elle part. Il n’est pas à la hauteur, il n’est pas Starius. Il ne la mérite pas et elle part. Elle le laisse seul. Elle ne l’aime plus comme avant.
C’est plus pareil.
Il ferme les yeux, ça fait mal. Mal au cœur d’être abandonné, mal au cœur de décevoir ces amis, sa petite sœur. Sirius le bon à rien, le mauvais en tout. Excellent pour rater les choses.
Sirius déglutit. Il les sent arriver mais avant de céder, avant que les larmes ne ruissellent sur les joues du garçon, il veut que Calua parte. Qu’il ne détruise pas totalement l’image qu’elle a de lui. Il attend d’entendre la porte se fermer.
Elle ne se ferme jamais.
Au contraire, les pas se rapprochent de lui et intrigué, Sirius rouvre les yeux pour être envoyés quelques centimètres en arrière par une canette qu’une Calua très déterminée lui tend. Les paupières de Sirius papillonnent et les prémices de ses larmes naissent au coin de ses yeux. Surpris, il récupère la canette et regarde la gamine se confondre en excuse.
Il secoue la tête et son regard alterne quelques secondes entre Calua et la canette. Puis il laisse un léger rire s’échapper de sa gorge.
- C’est rien Calulu. Merci. C’est bizarre de rire à nouveau. C’est étrange de sentir la boule qui aplatit son estomac depuis des mois disparaître à nouveau. C’est bizarre de se sentir léger.
En réalité, peut-être que ce n’est pas bizarre ou même étrange. Peut-être que c’est juste un peu
m a g i q u e .