Enthousiasmé au plus haut point par son idée de transformer le cabanon en SPA, Paul ne se rendait pas compte que celle-ci inquiétait son camarade Phyllali. Ce n’était pas faute de Nico d’avoir essayé de prévenir le garçon aux cheveux d’ébène. Néanmoins, Paul comme à son habitude, assurait qu’il savait ce qu’il faisait. Débordant d’énergie, il avait rapidement pris les choses en main, ne laissant pas d’autre choix à Nico que de le laisser faire. Sous ses ordres, ses Pokémon de type Feu se mirent à exécuter un relai dans la pièce où la température ne cessait plus de monter. Les volutes de fumée se firent de plus en plus présentes et Paul n’ayant pas pensé à emporter avec lui un Pokémon de type Vol, dû s’en remettre à Nico, en vain. Ce dernier s’éloigna alors du local technique, Paul ne le retint pas, ils n’avaient pas besoin d’être deux pour s’occuper de cela, et Nico serait sûrement plus utile à l’extérieur à rassurer les passants qui verraient le capharnaüm provoqué par le Noctali.
- Cara carapuce…
Donatello avait du mal à supporter ce nouvel réchauffé qui émanait du sous-sol et rendait sa respiration difficile, alors Paul se pencha vers lui.
- Tu n’es pas obligé de rester ici. Il y a Aligatueur et Nico dehors, tu seras mieux avec eux.
Le garçon afficha un nouveau sourire et caressa la tête de Carapuce, avant que celui-ci opine du chef et se précipite vers l’extérieur. Sa course fut arrêtée à l’entente d’un bruit vif de métal, semblable à un tir de fusil. Donatello remarqua que son dresseur s’était lui aussi stoppé dans son mouvement et observait désormais le sous-sol. Trop concentré par leur tache, les autres Pokémon n’avaient pas mis en pause leur enchaînement d’attaques.
- Attend…
Soudain, un second bruit identique au premier retentit. Cette fois-ci, les Pokémon perçurent le son, mettant fin à leurs actions, et Paul vit un objet fuser contre la paroi en béton avant de couler au fond de l’eau : c’était un boulon. Ce n’était pas du tout bon signe, ils devaient absolument se stopper maintenant ou il serait trop tard ! A moins, qu’il ne le soit déjà. Un sifflement dans les canalisations avait remplacé les lance-flammes de ses Pokémon et bientôt, d’autres boulons sautèrent à ne plus s’arrêter. Paul eut à peine le temps de se retourner vers Donatello pour le prévenir.
- Cours ! Fuis et ne t’arrête pas ! Vas-y cours !
Les paroles du Noctali semblaient tourner en boucle, comme un vieux disque rayé. Le Carapuce mit quelques secondes à emmagasiner l’information, comprenant ce qui allait se produire une fois qu’il aurait le dos tourné. Néanmoins, poussé par les injonctions de son dresseur, il quitta le cabanon au pas de course, sentant derrière lui le sol trembler. L’explosion du local le souffla à l’extérieur en compagnie de quelques gravas. Il fut accueilli par Aligatueur qui le prit dans ses bras en s’assurant qu’il allait bien, puis vit Nico pénétrer la structure ébranlée.
Paul se redressa avec une vive douleur dans le dos, mais plus de peur que de mal, il n’avait rien. Il s’était simplement retrouvé projeté contre la console de l’attraction qui avait complètement disjoncté elle aussi et se présentait dans un sale état. Ses pensées se tournèrent immédiatement vers ses Pokémon et il voulut foncer dans la partie souterraine de l’installation afin de les retrouver. Mais il n’eut pas le temps de s’avancer, qu’il vit de nouvelles flammes percer un chemin à travers les tuyaux en métal et plastiques qui s’étaient nichés entre eux et la sortie. Chartor passa le premier, puis il tira des décombre avec Darumarond, Ouisticram. Ce dernier n’avait pas la chance d’avoir un corps aussi solide que ses compagnons et avait subis l’explosion de plein fouet, sans aucune couverture.
- Ouisticram ! Ne t’en fais pas, nous allons te sortir de là.
- Paul ?
- Nico ? Je suis là !
Paul enjamba l’étagère qui était tombée dans le passage pour atteindre l’entrée, ses Pokémon à sa suite. Une flaque d’eau s’étendait jusque-là et manqua de faire glisser le Noctali.
- Oui, moi ça va à peu près. C’est mon Ouisticram qui m’inquiète, il est blessé. Les canalisations n’ont pas tenu à la pression et tout à sauter.
Ils approchèrent le blessé à la lumière du jour afin de mieux examiner l’amplitude des dégâts. A première vue, Ouisticram ne comportait que des blessures légères et s’était simplement retrouvé assommé par le choc, ce qui rassura son dresseur, contrairement à ce qui suivit. Le talkie de Paul se mit à vibrer, avant de finalement se mettre à grésiller. Paul échangea un regard avec Nico, tous deux se doutant de qui il s’agissait. Le garçon fronça les sourcils et attrapa l’appareil d’un coup sec avant de le mettre entre lui et Nico, pour le laisser entendre la conversation. Malgré son absence d’envie d’écouter les propos de leur supérieure, Paul ajusta les paramètres de l’appareil jusqu’à ce que la voix de la chef se face audible.
- Hey, les troufions ! Répondez !
Les insultes se cumulant au travers du talkie confirmaient les pensées de Paul qui déglutit en prenant son courage à deux mains pour répondre.
- Hum… Oui ?
- AH BAH C’EST PAS TROP TÔT ! La ponctualité, c’est important les mioches. Surtout quand on fout le dawa dans MON parc. Non mais franchement, qu’est-ce que vous avez foutu avec l’attraction 5 du secteur 1-12-C ?! Vous deviez la réparer. RE-PA-RER. Capiche ? A aucun moment je ne vous ai dit de la réduire en miettes. Vous imaginez le travail que nos ingénieurs vont…
Doucement, Paul détourna son regard du talkie-wookie, dont même la vue devenait presque douloureuse. Leur chef ne semblait plus vouloir s’arrêter de les incendier. Ils tentèrent pourtant de reprendre la parole et de lui expliquer, voire même de s’excuser, mais la chef ne voulait rien savoir, les traitant de « mécanos en toc » et de « mioches décérébrés », notamment Paul pour cette dernière. Enfin, ses réprimandes se terminèrent par une convocation dans son bureau. Là, c’était clair. Il ne restait qu’une chose qu’elle n’avait pas pu leur dire au talkie et ne pouvait faire qu’en face-à-face. Après la conversation, Paul et Nico attendirent l’arrivée d’autres agents du parc qui prirent leur place avec un air renfrogné à la sécurité du toboggan. Ils se mirent alors en chemin, direction le quartier général de la chef.
- Eh bien… Je suis désolé Nico. Déclara Paul en s’inclinant devant le garçon. J’aurais aimé que les choses se passent autrement. Je ne pensais pas provoquer un tel chambardement, excuse-moi. Surtout que tu es un vrai mécanicien, toi. Tu ne méritais pas de te faire virer par un rigolo comme moi. Tout en marchant, il penchait la tête pour regarder le sol. Je voulais simplement apprendre comment fonctionnait ces machines pour construire mon propre parc aquatique sous l’académie. Maintenant, je comprends que je ne suis pas fait pour ça et que mon idée était complètement folle. Si encore j’avais eu des compétences techniques comme toi, j’aurais peut-être pu réaliser ce projet, mais je dois me rendre à l’évidence, je ne suis doué qu’au combat Pokémon, à enquêter sur les légendes de ce monde et dans les épreuves physiques. Il releva la tête et sourit de sa bêtise. Quel piètre scientifique je fais. Au moins, je ne referais plus la même erreur. Lorsque nous verrons la chef, je lui expliquerai que tu n’y es pour rien et que j’en ai fait qu’à ma tête. Elle se sera peut-être calmée et acceptera de te garder. Je suis le seul responsable de ce désastre.