« Paroxysme du romantisme (non) »« -… Désolé. Le verdict est sans appel.-Oké ! »Caroline lâche un profond soupir d’exaspération.
« -Vraiment ? Vous avez tout essayé ?-Oké.-Affirmatif. -Oké ! »Elle écarquille les yeux, et dévisage son interlocuteur.
« -Même le programme intensif ?-Oké ?-Oui. Normalement, subir cet entraînement pendant une semaine suffit à changer n’importe quel Pokémon en une simple machine de guerre obéissante, mais… Il y est resté complètement imperméable. Ce n’est du jamais vu, même au sein de la formation. -Oké...-Navré, mais… Ce Pokémon est la créature la plus stupide que la terre ait porté, Agent 499. -Okéééééééééééé !-...-... » Caroline prend une profonde inspiration.
Et arme son geste.
« -TA GUEUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUULE !-SBAF.-Okéééééééééééééééééééé…. ! »Elle observe la silhouette du Pokémon s’échouer dans le lointain avec une expression quelque peu satisfaite, sous le regard circonspect de son homologue.
« -Pourquoi ne pas simplement le donner ? -J’ai essayé. Trois fois. Plus cinq tentatives d’abandon. Il est TOUJOURS revenu. » elle fait un mouvement nonchalant de la main
« J’ai laissé tomber une semaine après lui avoir fait gober une pilule d’arsenic sans qu’il ne soit ne serait-ce que ballonné. -…. » Les épaules de la blonde s’affaissent.
« -Comment je vais faire ? Ce truc serait capable de complètement me faire foirer une mission… » L’autre se détourne, visiblement sur le départ.
« -C’est la Saint Valentin, arrangez-vous pour qu’il jette son dévolu sur une autre femme ? -Ah, ah, ah. Très drôle. -En tout cas, nous en avons terminé pour aujourd’hui. Dressez-le ou débarrassez-vous-en, peu importe, mais arrangez-vous pour qu’il ne nous pose plus aucun problème. -Oké ! »Caroline toise le Pokémon de retour à ses côtés, et se facepalm en un grognement exaspéré. Elle en a presque oublié qu’aujourd’hui est la fête des amoureux… Bon sang. Heureusement qu’Enzo n’est pas du genre à lui sortir le grand jeu, parce qu’en vue de son humeur….
***
De retour à son appartement, elle s’avachit lamentablement sur son canapé.
« -Okéo- ? »Têtaclak n’a même pas le temps de finir sa phrase que Caroline lui balance sa Pokéball en pleine tronche, enfermant cette insupportable chose à l’intérieur. Elle lâche un énième soupir d’exaspération, et se tourne sur le dos après avoir saisi son Ipok. En quête d’une quelconque source de distraction en attendant de retrouver son bleu ténébreux, elle scroll machinalement les dernières nouveautés.
Son regard finit par s’arrêter sur une publication d’une association étudiante. Elle avait vu passer, quelques jours auparavant, une annonce à son sujet… L’idée d’y prendre sérieusement part lui a bien traversé l’esprit, mais elle s’est rapidement ravisée. Ce genre de trucs, c’est pour les amoureux complètement Couaneton de leurs partenaires, qui se goinfrent de guimauves et pètent des paillettes. Elle et Enzo n’ont clairement pas besoin de toutes ses mièvreries dans leur couple ultra-chill… Et elle a vraiment pas envie de passer pour une ringarde, en plus. Elle s’est donc contentée d’une annonce
discrète au sujet de sa récente… Acquisition, et est vite passée sur autre chose.
Curieuse, elle commence donc à consulter les messages, non sans arborer un large sourire narquois. Il semble que son frère a un certain succès auprès de… Cael ? Hmm, c’est étrange, elle l’imaginait moins rentre-dedans. Mais soit… Attendez, c’est une menace de mort, ça ?… Ooooooook…. Ginji se fait des amis vraiment très étranges, dans cette école…
Mais alors qu’elle se délecte tranquillement des ragots étudiants, Caroline se redresse brusquement. Pourquoi il y a un poème lui étant destiné ?… Bon, il ne l’est peut-être pas à elle précisément, après tout des Caroline il doit y en avoir une tonne, mais il faut avouer que le format du message et les couleurs choisis lui évoquent grandement son nigaud de petit am…
« -Oh merde. »Oui, c’est le mot.
Son regard a dévié jusqu’à la signature du texte, et s’est complètement figé. Enzo.
Pour Caroline.
De Enzo.
Hmm.
Peut-être une sorte de coinci… ?
« -… Oh merde. » -Non, ce n’est résolument pas une coïncidence, il faut être parfaitement stupide pour l’envisager. Des Enzo qui écrivent à une Caroline via une belle mise en page océan tout en lui parlant de canapés, il n’y en a pas trente six milles, sur cette île.
Se levant d’un seul coup de ce fameux canapé, justement, elle commence à faire les cents pas dans son salon tout en lisant le poème qui lui est dédié. C’est maladroit, sans aucune rythmique, les rimes sont pauvres et elle est presque sûre d’avoir vu passer une faute d’orthographe : mais les faits sont là.
Enzo lui a écrit un poème, et l’a rendu public à Adala toute entière.
Caroline s’immobilise, et pour la seconde fois de la journée, vient se frapper le front de la paume de la main.
« -Oh meeeeeeeeeerde.... » Et dire qu’elle a simplement posté une annonce pour son Okéoké. Cette fois c’est sûr, elle craint, pour le coup. Tout en reprenant ses va-et-vient nerveux, elle cherche à rapidement remettre de l’ordre dans ses idées.
« -Très bien, très bien… Je dois le retrouver dans quinze minutes, je n’ai absolument rien préparé, il m’a écrit un poème, et je ne sais absolument pas quoi faire pour... » elle s’immobilise, et son regard s’illumine
« Oh, je sais ! » elle se focalise à nouveau sur son Ipok, dont elle change la page, sélectionne un contact, et porte l’écran à son oreille
« Je vais demander à Ilea ! Elle doit sûrement savoir ! Après tout, elle est sortie un an avec lui, donc elle sera parfaitement capable de dire à sa colloc’ comment rendre heureux le gars qui lui a brisé le cœur, et... » alors que le premier bip retentit dans le téléphone, elle le rabaisse, et raccroche
« … Et t’as beau être une espionne gouvernementale, Caro, t’es quand même sacrément conne. » Elle reste là, figée, et le regard perdu dans le vide. En un soupir las, elle finit par se frotter les yeux de fatigue, et parvient par la même occasion à retrouver un tant soit peu de calme.
« -… Bon. L’impro, ça te connaît, hein ? ‘Pas comme si tu passais ta vie à improviser… Je vais trouver un truc. Ça va le faire. Il faut juste que… » Son regard commence à balayer l’appartement, en quête d’idée. Elle pourrait lui offrir le canapé, puisqu’il a l’air de tant l’apprécier ? Hum, non, les idées de ce genre tu les oublies tout de suite, Caro. Peut-être que si elle se contente de s’habiller de façon glamour… ? Pouah, non, c’pas un cadeau ça…. Oh ! Elle n’a qu’à lui filer Têtaclak, et… ! Et le larguer par la même occasion, parce que c’est bien le genre de trucs qu’offre à quelqu’un avant de le larguer, histoire de bien enfoncer le clou. Voyons voir Caro, tu peux faire mieux… Tu peux faire beaucoup mieux…
Ses yeux finirent par se poser sur sa cuisine. Hmm…
***
Elle se racle la gorge, les mains dans son dos. Postée devant la porte de son compagnon, elle paraît avoir un léger moment d’hésitation avant de se décider à enfin toquer. Elle finit toutefois par le faire, et vient aussitôt planquer son bras derrière elle, tenant fermement son cadeau de ses deux mains.
Elle ne sait absolument pas à quoi s’attendre pour aujourd’hui. Est-ce que le poème n’est qu’un vague aperçu de ce qu’a préparé Enzo, ou l’a-t-il au contraire effectué en guise de minimum syndical ? Caroline espère en tout cas ne pas trop en avoir fait avec cette robe et ce rouge à lèvres violacés.
La porte finit par s’ouvrir. Elle n’attend même pas qu’il se soit complètement révélé à lui pour prendre la parole.
« -Tadaaaaaa ~★ » Elle tend ses bras devant elle, et l’invite à saisir une… Enveloppe, entourée d’un joli petit ruban.
« -"Stari vous présente ses cinquante recettes de riz", édition collector !… Le bon de commande. Parce que, euh… Tu connais les livreurs, on ne peut pas leur faire confiance, ahaha !… Aha…. » … Ahum. Faîtes qu’il est prévu de la merde, faîtes qu’il est prévu de la merde.