C’est avec une haine presque tangible que Sirius éteint son réveil. Très, très, très difficile. Faut dire que la veille, il s’est couché à pas d’heure après être rentrée d’un simili de soirée organisé par un type rencontré dans un bar il y a trois jours.

Autant dire que la vie de Sirius, en ce moment, c’est le bordel.

Les projets s’accumulent sur son bureau et c’est à peine si il prend le temps de faire ses devoirs obligatoires. Les gens l’étouffent et il n’y a que lorsqu’il traîne, seul, dans les rues tard la nuit, éclairé par les rayons des néons des derniers bars ouverts.

Il évite le regard de son équipe et il est bien loin, le brillant coordinateur a l’avenir doré.

Dire qu’il y a peu de temps, il s’imaginait quitter l’école, lancer son entreprise, lancer son avenir, gagner, gagner et encore gagner. Il voudrait bien redevenir cette personne là, son lui qui allait si bien depuis la chute.

Mais …

il faisait semblant.

Ils faisaient semblant.

Il y avait quelque chose qui allait pas et ça se sentait.

Les silences s’allongeaient et la joie se réduisait.

La joie des retrouvailles ne compensait plus la douleur des absences.

C’était difficile.

Très difficile.

Il enfile un gros sweat, Paul l’a forcé à s’inscrire à la sortie capture spéciale. Une histoire de Galopen ? Pour être tout à fait honnête, Sirius n’a aucune idée de ce dans quoi il s’embarque quand il monte sur le bateau. Et il ne reste pas longtemps sur le bateau puisque des nausées l’attrapent bien vite.

On dira merci au combo gueule de bois et transport maritime.

C’est presque trente minutes plus tard que Sirius émerge de la cabine des toilettes sous le regard un peu compatissant d’Heartnett. Le coordinateur tapote l’épaule de son élève tout en l’entraînant à sa suite.

- Bon, mon grand, je sais, les cœurs brisés, c’est pas cool. Alors tu vas te reprendre d’accord mon loulou ? Et l’alcool c’est la dernière des bonnes idées. Essaie plutôt le pot de glace. Et les séries mièvres. C’est l’antidote suprême, crois en l’expert.

Son Otarlette suivant de plus ou moins bon cœur, le petit groupe sort du bateau bien vide et pendant que le type eau plonge dans les eaux sombres qui bordent la plage, Andreas guide Sirius jusqu’à l’eau.

- Otarlette, s’il te plaît, rebranche ton dresseur.

Elle n’a pas besoin de se le faire dire deux fois. Un puissant jet d’eau sort de la mer pour venir s’écraser dans le faciès surpris de Sirius. Andreas qui s’était bien évidement écarté juste à temps d’une pirouette superbement exécutée, lui lance une serviette.

- Les idées plus claires ? Bien. Va te balader, prend un gros bol d’air bien frais et je te garde à l’œil. Je ne veux plus te voir approcher une bouteille d’alcool jusqu’à réparation de ce petit cœur. On est d’accord ?

Toujours sous le choc, Sirius ne peut qu’hocher la tête.

Sacré entrée en matière tient.

Trempé et toujours un peu sur le cul, Sirius regarde son professeur partir avec classe et pirouette. Et lui il reste là, comme un con, finalement parfaitement réveillé, à se dire que putain, il aurait pas pu faire de pires choix dans sa vie.

Sa rupture avec Etna c’est une épreuve, bien sûr, surtout après avoir été amoureux d’elle pendant si longtemps, surtout alors qu’il est toujours amoureux d’elle.

Il comprend, bien sûr, pourquoi elle a voulu tout arrêté et une part de lui est d’accord. Mais de l’autre côté … de l’autre côté ça fait mal. Et Sirius n’a jamais vraiment sut gérer la douleur. Donc il s’est enfermé dans le ridicule modèle de son père et de ses verres de whisky. Il s’est enfermé dans ce qu’il ne voulait surtout pas devenir.

Il a passé un mois entier sous forme de cadavre,

sous forme de cendres.

Il est pourtant temps de faire rejaillir les flammes.

Heartnett a eut raison de le secouer.

Sirius serre les points, se relève et remercie doucement son Otarlette. Si Alrish lui fait une pseudo crise adolescente, il n’en reste pas moins un fidèle allié qui est là pour lui quand il le faut.

Sirius se secoue, inspire profondément, et va faire très exactement ce que Heartnett a dit. Il va profiter de sa journée, des jolis paysages et des pokémons qu’il peut rencontrer et quand ça sera fait, il se posera, réfléchira calmement aux prochaines étapes de sa vie, et là, il repartira du bon pied.

Des mauvais passes, tout le monde en a, ce qu’il faut savoir faire, c’est en sortir et malheureusement pour lui, Sirius est habitué des mauvaises passes.

La douleur est bien réelle mais elle n’est pas comparable à celle qu’il a déjà subit lors de la chute de Lansat. C’est bien différent en vrai et complètement incomparable. Pourtant, si il s’est relevé de ça, il peut se relever de cette nouvelle épreuve.

Inspire et expire Sirius, tout ira bien.

Ses réflexions guident ses pas et il ne fait pas spécialement gaffe à son environnement, aussi, il ne remarque pas exactement le minuscule petit dragon qui volette derrière lui depuis un bon moment maintenant. Trop perdu dans ses pensées, il ne fait simplement pas attention.

Aussi, quand il se retourne pour constater qu’il est, en effet, complètement perdu, il fait un bond de surprise. Et très honnêtement, je serais incapable de dire qui est le plus terrifié des deux. Le petit pokémon ou la grande andouille ? La question reste entière. Pour répondre au plus ridicule c’est immédiatement plus simple puisque Sirius s’est complètement éclaté au sol en sursautant. Faut dire, le petit engin, il vole, donc pour se casser la gueule, c’est plus dur.

- Salut toi ?

Le dragon tente un sourire.

- Tu connaîtrais pas le chemin pour retourner à la plage par hasard ?

C’est qu’il faudrait pas oublier de rentrer. Le dragon hoche vivement la tête.

- Ça t’embêterait de me guider ?

Qu’est-ce qu’on avait dit Sirius ? On ne suit pas les étrangers, même quand c’est des bébés dragons trop mignons.