Noël n’avait jamais été aussi proche et le moral aussi bas. Les temps étaient durs… Mes jambes peinaient à trouver la force d’avancer et je ne savais comment me reprendre. Bien que les fêtes étaient aux portes de nos dortoirs, la météo venait alourdir le poids sur mon cœur. Les jours se raccourcissaient inexorablement, le solstice était pour après-demain. Lorsqu’il ne faisait pas noir, un ciel gris digne d’un Akwakwak me rappelait que les jours heureux étaient derrière moi. J’aurais aimé pour ces vacances rentrer à Rosalia. Passer du temps en famille, avec ma mère, m’aurait fait le plus grand bien. Elle m’aurait aidé à supporter cette vie terne… J’aurais aussi aimé lui présenter Jackie, ma fille. Plus j’y pensais et plus j’avais l’impression que rien n’allait dans ma vie.

Tout se précipitait, s’enchaînait et me poussait au bord du précipice. Je n’avais eu le temps d’aucune halte, d’aucun répit pour reprendre mon souffle et me poser sur mon sort. Depuis plusieurs années, mon moral fluctuait entre des moments de bonheur intense et de tristesse profonde. J’étais de nouveau dans une passe vers l’obscurité, incapable de discerner la lumière au bout du chemin. Un chemin dont la route m’avait été barrée par une abîme hurlante. Les cris de douleur et de désespoir m’accablaient et aucune de mes actions ne parvenait à les taire. Personne en dehors de moi semblait les entendre, ou alors feignaient-ils de ne pas s’en apercevoir ?

Malgré les mauvaises nouvelles, tout n’était pas noir. Jackie allait fêter son premier Noël… en compagnie de sa mère. Mon Griknot, Stitch, avait aussi évolué en un Carmache. Cela s’était produit lors d’un de nos entraînements de volley. En raison des proportions de ses pattes, trop petites pour lui permettre de jouer convenablement, Stitch avait un rôle occasionnel de serveur. Il entrait uniquement pour ça, ce qui représentait une poignée de secondes. Un laps de temps très court pour dévoiler son plus beau jeu. Autant dire qu’il n’avait pas le droit à l’erreur, car chacun de ses coups incarnerait sa volonté à rester sur le terrain. Il avait passé de nombreuses heures à parfaire son service mais ses efforts étaient-ils suffisants ? Anxieux, il avait soufflé longuement avant de visualiser la position des joueurs adverses. Il devait contraindre leur ace à réceptionner dans une position inconfortable pour casser leur marge d’actions. Il ouvrit la gueule et de celle-ci s’échappa un Draco-Rage qui fusa sur le terrain opposé dans un angle serré à la limite de la ligne. Le ace hésita, pensant que l’attaque sortait mais celle-ci frappa la ligne, la calcinant légèrement.

Fier de cette première victoire, Stitch allait pouvoir réitérer la tentative. Une autre balle, un autre point. Le stress était monté d’un cran. L’équipe adverse était concentrée sur sa gueule, prête à réceptionner l’attaque, qu’importe l’angle qu’elle prendrait. Stitch sua mais il repensa à ses entraînements précédents. Il repensa à tous ses échecs et aux encouragements de ses partenaires, ainsi qu’à ses réussites et aux joies qu’elles avaient provoquées. Serrant ses petits poings, il imagina emprisonner cette pression à l’intérieur, puis il la relâcha en les ouvrant vivement. Tandis qu’elle s’envolait, sa Draco-Rage s’envola aussi et rejoignit le même coin qu’au précédent coup. Cette fois-ci, le ace se déplaça pour effectuer la réception et permit à son équipe de jouer la balle. Le passeur se décala et la renvoya sur un ailier qui smasha. Ali et Ecto avaient pu anticiper grâce au coup de Stitch et sautèrent pour bloquer. La Draco-Rage rebondit sur le bout des doigts d’Ali et dévia vers le fond du terrain, là où se trouvait Stitch. Sa seule option était alors de sauter et frapper de la tête, mais il sentit qu’il pouvait faire plus… qu’il le devait s’il voulait achever ce point en restant sur le terrain. Il écarta les pattes et sur la pointe des pieds, il s’élança bras levés vers la balle. C’est alors que son corps s’enveloppa de lumière et que ses bras poussèrent. Il sentit ses doigts caresser de leurs griffes la sphère et usant de sa nouvelle force, il repoussa la balle vers le passeur. Celui-ci fit une courte sur Chimpenfeu qui mit fin au point.

Bref, en cette période de ténèbres, heureusement qu’il restait de petits moments de bonheur tel que celui-là pour ne pas sombrer totalement. Demain, ce serait les vacances. Les choses seraient sans doute différentes lorsqu’elles débuteraient et que je n’aurais plus d’obligations à me lever le matin. En attendant, je devais encore faire des efforts et participer à cette nouvelle sortie capture. La plupart des élèves étaient joyeux à l’idée de capturer un Pokémon sur cette île. J’essayais plutôt de m’intéresser à cette sortie en me basant sur l’historique légendaire de l’île. La capture serait un plus mais pas obligatoire. Qu’aurais-je à offrir de toute façon à un Pokémon en cette période ? Ce n’était pas propice à une bonne intégration dans la famille déjà nombreuse.

Avec peu d’espoir, je débarquais sur l’île aux trésors. La démarcation était impressionnante. D’une part l’obscurité, de l’autre la glace. Je n’avais aucun mal à imaginer le dénouement de l’affrontement qui avait eu lieu des centaines, voire des milliers, d’années auparavant. Pendant ce temps, Ali discutait avec Stitch de son évolution. Le grand dadais aidait son ami à appréhender ses nouvelles capacités avec sérénité. Lui aussi avait connu ce choc de petit mignon à gros méchant, donc il avait une batterie d’informations à lui confier sur le sujet. Pour ma part, je n’avais pas vraiment la tête à tout ça et j’essayais de me concentrer sur l’important de cette sortie. La zone glacée contiendrait certainement des types Glace et j’en avais déjà mon lot avec Satan, Esdeath et Lokhlass. En toute logique, je prenais la voie des ténèbres, m’enfonçant physiquement dans l’état psychologique qui m’habitait depuis peu.

Montant sur Ponyta, j’entamais une promenade au milieu des terres désolées. Mes deux gardiens sur pattes, Ponyta et moi-même étions sur nos gardes dans cet environnement hostile. Néanmoins, nous n’étions pas en quête de Pokémon mais de réponses.




Dernière édition par Paul Nyllis le Ven 8 Jan - 14:11, édité 1 fois

La mort était présente aux quatre coin de cette zone lugubre dans laquelle nous tracions notre route. La pratique d’arts martiaux du Pokémon qui avait combattu ici était plus ténébreuse que je ne le pensais. Sa part d’ombre avait réduit à néant cet endroit où prospérait autrefois la vie. Je descendais de Ponyta afin de toucher la terre. J’en prenais une poignée que j’observais attentivement avant de la relâcher.

- On dirait des cendres. Rien ne peut pousser ici.

Mes Pokémon exprimèrent de la peine sur leurs visages, que je comprenais et partageais. Tout autour de nous, tout n’était que désolation. Les arbres étaient morts et je ne parlais même pas du reste de la végétation quasi-inexistante.

Dans ce paysage lugubre, je retrouvais une part de moi-même. Celle qui était vide de sens et qui souhaitait tout ravager pour que plus jamais elle ne puisse ressentir cette douleur. Seulement, une autre part de moi m’incitait à tenir bon et imaginer qu’après reviendraient les beaux jours. J’avais du mal à croire devant ce territoire dévasté que ces jours lui reviendraient. Combien d’années, de décennies, de siècles… s’étaient écoulés depuis leur affrontement ? Combien de temps il me faudrait pour apercevoir une pousse fraîche et pleine de vie au milieu de mon propre désespoir ?

Au loin, je vis ce drôle d’oiseau passer. Sa tête était surmontée d’un symbole rappelant les Zarbi et j’avais l’impression qu’il m’était familier. C’était la seule forme de vie à des kilomètres à la ronde que nous avions croisé. Pour un lieu de capture, il y avait mieux. Au final, j’en venais à me dire que nous aidions ces Pokémon en les capturant et en les ramenant à Adala où ils seraient dans un environnement moins hostile.

Ali me posa une patte sur l’épaule. Ce geste me sortit de mes rêveries et je le gratifiais d’un sourire à peine forcé. Oui, nous devions reprendre notre course afin d’en découvrir plus sur l’affrontement qui avait eu lieu ici. Je commençais à entrevoir l’espoir de peut-être capturer un Pokémon. Maigre et très fin, j’étais loin d’en être convaincu jusqu’à ce que hennisse ma Ponyta. Au milieu de gravats, elle avait su trouver un œuf. En dehors du Cryptero, nous n’avions vu aucun Pokémon dans la région et cet œuf risquait de finir livrer à lui-même si nous le laissions là. C’était dans la nature de cette partie de l’île que d’abandonner les individus à leur sort mais je fus pris par l’élan d’espoir que ma réflexion m’avait insufflé.

- Emmenons-le avec nous. Nous croiserons peut-être quelqu’un à qui le confier, sinon nous le rapporterons à Adala.

D’un commun accord avec mes amis, nous prenions soin de l’œuf en le glissant dans mon sac.