Il a tellement peur de la briser. Il a l’impression qu’à la moindre erreur, au moindre faux mouvement, il pourrait la perdre.

Il ne l’a jamais vu comme ça. Tout simplement parce que Magnolia ne se l’est jamais permise. Dans leur petit groupe toujours soudé, il y a Ash qui n’est certes pas le plus expressif mais qui dans sa maladresse se rend à peu près lisible. Il y a Lyria qui sous couvert d’une joie de vivre débordante cache beaucoup de faiblesses qui la dépassent régulièrement et pour lesquelles elle trouve toujours du soutien auprès de ses amis. Il y a Agatha qui sourit simplement à la vie, ressent tout très fort et dit tout haut tout ce qu’elle pense, même si parfois c’est un peu à côté.

Et puis il y a Magnolia. La rose d’apparence si solide mais couverte de fêlure qu’elle cache sous d’épaisse couche de sérieux. Celle que le bleu admire tellement par son intelligence, mais pour qui il a toujours eu si peur.

Et là, tout de suite, c’est comme si tout ce qu’il y a de pire pouvait arriver.

Il doit gérer. Il le faut absolument.

Mais il ne faut surtout pas qu’il la perde.

Itzan finit par enfin percevoir ce mouvement. Cet infime mouvement qui veut dire oui. Que malgré la tornade qui est en train de s’abattre sur elle, Magnolia veut bien qu’il la prenne dans ses bras. Il ne lui faut qu’un geste, que quelques secondes pour la coller à lui, et la serrer fort dans ses bras. Il faut qu’elle sente qu’il est là. Il faut qu’à défaut que son esprit soit en capacité de le réaliser, que son corps le comprenne. Il faut que sa peau sente la pression qu’Itzan exerce dessus. Ses bras qui l’entourent. Sa tête proche de la sienne. Il faut qu’il sente tout ça. Pour qu’enfin la rose revienne à elle. Qu’elle revienne dans ce monde qui parfois peut faire peur et se montrer cruel, mais qui lui permettra d’avancer, tout en étant entourée.

Le gitan sent qu’elle se met à bouger légèrement. Elle est là, à nouveau. Et il ne lui faut pas plus longtemps pour saisir délicatement, du bout des doigts, son t-shirt avant de s’enfoncer plus fort contre son épaule pour se mettre à pleurer. Doucement, pour ne pas la brusquer, le garçon place l’une de ses mains sur ses cheveux roses, et l’incite à placer sa tête plus profondément dans son cou. Si c’est ce qu’elle veut, il la cachera du monde le plus possible. De ces regards qui en vérité ne se posent pas sur elle, bien trop occupé ailleurs, mais dont l’agent doit percevoir comme s’il s’agissait de la réalité. Itzan lui aussi plaque son visage contre son crâne, lui murmurant les mots les plus doux qu’il puisse.

— Magnolia, pleure. Pleure autant que tu en auras besoin. Je suis là. Je ne te lâche pas. C’est fini maintenant. C’est fini. Tout ira bien. Tout ira bien.

Ils ne peuvent pas rester là maintenant. La rose ne pourra jamais vraiment souffler s’ils restent parmi cette foule courant à en perdre haleine pour constater les dégâts. Ils doivent partir. Il pourrait aider toutes ces personnes. Mais, quelqu’un d’encore plus important à ses yeux à besoin de lui.

Voyant Lissa passer, il l’interpelle. Il n’en dit pas plus. Il lui montre juste avec un signe de tête qu’il est avec la rose, et qu’il ne la lâchera pas. Que leurs ainés ne s’inquiètent pas en le voyant plus ici.

— Magnolia. On va aller dans ta chambre d’accord ? Pour que tu puisses te poser, tu y seras mieux. Est-ce que tu arrives à marcher ? Tu veux que je te porte ?

En entendant ces mots, la jeune fille se recule légèrement, et se remet à avancer d’elle-même en direction du dortoir Mentali. Et même si elle marche toute seule, hors de question de lui lâcher la main.

**

Magnolia est là, tout près de lui. Allongée dans son lit, couverte par cette fine couverture étendue sur son corps, ses yeux papillonnent. Même si elle n’a rien dit depuis leur départ de la zone de combat, l’agent semble lutter pour rester éveillée. De son côté, assis au bord du lit, le garçon remonte encore un peu la couverture avant de laisser sa main délicatement passer dans ses cheveux.

— N’essaie pas de rester éveillée. Dors, ça te fera du bien. Je m’en irais dès que tu seras endormie d’accord ?

Ses gestes sont lents et doux. Avec beaucoup de tendresse, Itzan la regarde décrocher un léger sourire, puis fermer ses yeux complètement. Il ne lui faut que quelques minutes pour s’endormir complètement, ravagée par la vague de stress qui l’a submergé. C’est une réaction normale du corps lorsqu’il en a subi trop. Il connait ce phénomène par cœur. Plus par sa mère que par lui-même, mais il sait gérer. Il a réussi à gérer.

Le garçon soupire un instant avant de descendre s’assoir à même le sol, sa tête s’appuyant contre le bord du matelas. Ses yeux à lui aussi se mettent à papillonner. Il faut qu’il se lève. Qu’il retourne dans sa chambre au dortoir Voltali. Peut-être qu’il doit aussi aller voir Leon pour faire son rapport. Il a plein de choses à faire. Peut-être des personnes qui se demandent où il est, ce qu’il fait. Il faudrait qu’il prévienne sa mère aussi qu’il va bien. Que même s’il a eu peur, il va bien.

Il faudrait qu’il fasse tout ça.

Il est bien, assis là, juste à côté de son amie.

Son esprit s’embrouille, emporté par le sommeil. Il est dans cette phase d’entre d’eux, où il ne sait pas s’il dort, s’il est réveillé ou s’il rêve. Et il ne sait pas non plus s’il a vraiment dit cette phrase à voix haute avant de véritablement s’endormir.

Je ferais tout pour toi.