Voilà une chose à laquelle Itzan ne s’attendait pas vraiment. Être convoqué dans le bureau de son professeur référent de dortoir dès la deuxième semaine de cours, il fallait le faire. Pourtant, assis sur son lit, le gitan tourne ce bout de papier dans tous les sens tout en réfléchissant. Il a beau tordre l’histoire dans tous les sens, rien à faire. Il ne voit vraiment pas pourquoi il est convoqué. Il n’a rien fait de mal. Il ne s’est pas fait remarquer outre mesure en classe. Il n’a pas provoqué d’esclandre dans les lieux communs. Même mieux, il n’a pas laissé trainer une seule de ses affaires dans les couloirs comme le reste de ses camarades de dortoir. Non vraiment rien de tout ça.

Alors pourquoi ?

C’est vrai que le référent a changé depuis Adala. Ace Creed est parti. Une nouvelle relativement indifférente pour le garçon. Il n’était certes pas très sympathique mais si on ne l’approchait pas, il ne disait rien. Et il ne convoquait pas non plus. Pas comme le nouveau visiblement. En plus Itzan le connait. C’est un de ses professeurs depuis le début de sa scolarité. Il n’était juste pas son référent. Et encore une fois, il n’a rien fait de répréhensible pendant ses cours. Non décidemment, vraiment aucune hypothèse crédible ne lui vient en tête.

— Et toi Doudou qu’est-ce que tu en dis ? Tu sais si à un moment j’ai fait quelque chose qui a pu froisser un professeur ?

Evidemment que la créature rose ne lui répond pas grand-chose. Posée sur ses genoux, elle se contente de couiner, les yeux toujours aussi humides. Même si Doudou ne pleure plus à grosses larmes en permanence comme à ses débuts, il n’en reste pas moins extrêmement craintif. Un rien peut le faire partir en pleurs, et le reste du temps il a tout de même les yeux tout mouillés. En revanche, ce que l’élève a remarqué, c’est que malgré toutes ses réactions extérieurs, Doudou n’a jamais paniqué au point d’en devenir complètement statique. L’attaque de l’ancien directeur sur le campus d’Adala en a été un parfait exemple. Ce pokemon est vraiment plein de mystère.

— Bon c’est pas tout mais il faut qu’on y aille.

Délicatement, Itzan replace dans sa capuche le petit pokemon et quitte sa chambre pour trouver le bureau de son référent, placé juste à l’entrée du bâtiment. Epreuve pas bien difficile puisque pour l’instant, le gitan est lui aussi positionné à cet étage. Quelques coups contre la porte suffisent à prévenir le professeur de sa présence, lui permettant d’entrer.

— Pile à l’heure jeune homme

— Vous m’avez convoqué un weekend. Je n’ai aucune raison d’être en retard. Mais je ne sais pas pourquoi je suis là, je ne crois pas avoir fait quelque chose de mal.

— Figurez-vous que j’ai pris le temps récemment de faire un tour de mes effectifs dans le dortoir. Monsieur Creed n’était pas très précautionneux dans tout ce qui est administratif, alors ce ne m’étonne pas qu’il ne s’en soit jamais rendu compte. Mais il y a un petit souci avec vous.

— Un souci ? De quel genre ?

A partir de ce mot, tout un tas d’idées passent dans la tête du garçon, convergeant toutes vers le même point. Un souci pourrait être synonyme d’un renvoi. Ou dit plus gentiment d’une erreur dans son dossier provoquant l’arrêt de sa scolarité. C’est vrai quoi, après tout c’est possible. Il sait bien que sa mère n’a pas l’argent pour payer une telle école. Ce sont surement les bourses sur critères sociaux qui ont dû permettre un tel exploit. S’ils ont décidé de la retirer pour une raison x ou y, cela serait sa chance d’enfin rentrer chez lui. Bon certes, il s’est fait quelques amis maintenant et partir d’un coup serait bien embêtant. Mais retourner auprès de sa maman n’a pas de prix à ses yeux.

— Je viens de voir que vous êtes scolarisé à la Pokemon Community depuis un semestre, et plus si l’on compte les classes d’été.

— C’est ça si je compte bien. Même si on s’appelait l’Adala Community jusqu’à il y a trois semaines.

— Cela n’a pas d’importance. Cela fait donc plus de 6 mois que vous êtes là, et vous n’avez choisi ni parcours ni spécialité. Comment cela se fait-il ?

Arg, il pensait que personne ne s’en rendrait compte. Pour demander des spécialités, il faut remplir un formulaire à retourner à son professeur. Exercice auquel le gitan ne s’est jamais plié. Après tout, quel intérêt de cocher des cases si c’est pour le faire au hasard ? Itzan n’a aucune idée de quoi faire, parce qu’encore une fois il n’a initialement pas envie d’être là. Il aurait bien pu cocher mécano, parce que cela fait partie de ses compétences de base. Mais même ça il n’en a pas eu envie. Parce qu’il ne veut pas forcément faire ça de son avenir.

— Eh bien, je ne me suis pas encore décidé c’est tout. Vous savez l’école propose du choix, il faut bien y réfléchir – tente-t-il de baratiner.

— Bien essayé jeune homme mais ça ne prend pas avec moi. Je sais bien que vous le faites exprès. Parce que l’école ce n’est pas trop votre truc non ?

Le Voltali grimace. Cet homme a visiblement tout compris dans son jeu. Au pied du mur, le garçon ne sait pas trop quoi répondre.

— Oui, l’école ce n’est pas trop mon truc. Mais ce n’est pas grave si je n’ai pas de spécialité non ? J’aurai un diplôme normal sans parcours. Ça doit bien exister non ? A la base je ne suis là que parce que ça fait plaisir à ma maman que je sois à l’école, rien de plus. Je ne veux pas être un grand dresseur vous savez.

— Ça je crois que j’avais saisi jeune homme. Seulement comme vous dites, vous ne pouvez pas avoir un diplôme sans parcours. Sinon il aurait fallu aller dans un établissement lambda. Il va donc falloir choisir un parcours, et tout de suite.

— Tout de suite ? Mais si je n’ai rien décidé en 6 mois ce n’est pas pour prendre une décision en une seconde.

— C’est bien ce que je me disais. Ça tombe bien j’ai donc choisi pour vous.

— HEIN ?

Le bleu a du mal entendre. C’est possible ça ? Qu’un professeur choisisse à sa place une filière ?

— Je sais que vous n’êtes pas scolaire. Je l’ai bien vu à votre dossier, et je ne suis pas là pour vous torturer. En revanche, je note que vos meilleures notes sont en Pokeathlétisme, qui cela tombe bien est mon domaine.

— Surement un pur hasard Monsieur, n’y voyez pas des compétences particulières de ma part.

— Oh au contraire je pense que si. J’ai bien vu que dans les cours pratiques de mécanique vous vous débrouilliez bien, mais la partie théorique n’est vraiment pas votre fort. Vous savez faire mais sans expliquer. Une caractéristique typique des gens qui sont plus des débrouillards que des vrais intellectuels. Du coup j’ai pensé à autre chose.

— A quoi ?

Le garçon voit bien que le piège est en train de se refermer sur lui. Impossible de fuir.

— Je vais vous inscrire chez les Pokeathlètes Agents

— Chez les Agents ? Mais attendez Monsieur je n’ai aucune compétence là-dedans moi. Qu’est-ce que vous voulez que je fasse là-bas ?

— Encore une fois vous vous sous-estimez jeune homme. J’ai sous les yeux un rapport de cours spécialité rédigé par vos soins très réussi, et même approuvé par la Générale Jackie. Une prouesse. Je pense qu’il y a vraiment du potentiel à exploiter.

— Mais Monsieur vous n’en savez rien. C’était en tout début d’année, rien de compliqué et puis vous ne pouvez pas m’évaluer comme compétent sur une filière avec un seul cours pratique.

— Eh bien je crois que sur ce coup-là, si c’est ce que je vais faire. Vous serez donc maintenant sous la direction du Général Jackie lors de vos cours de spécialité. En plus c’est tout particulièrement une aubaine puisque c’est elle spécialement qui gère les agents. Je suis sur qu’elle saura faire de vous un bon élément. Dans tous les cas, on se revoit dans 3 mois. Si vraiment cela ne va pas dans cette filière, on envisagera une autre solution mais je suis pratiquement sûr de moi. Sur ce vous pouvez disposer. N’oubliez pas de vous présenter dès lundi au cours spécialisé de votre branche. A bientôt, et n’oubliez pas de fermer la porte en sortant.

Chose faite, le garçon reste bloqué devant cette porte, sans savoir comment réagir.

Un agent alors ?

Cela sonne presque comme une mauvaise blague.

HRP : Itzan est donc un Pokeathlète Agent o/