— Prends pas trop vite la confiance, avec celui-là je vais creuser l’écart

Concentré sur son tir (sa connerie plutôt mais bon ça il faut pas le dire), Itzan place sur sa cuillère le dernier projectile non alimentaire qui lui reste sur son plateau, à savoir l’emballage de son beignet. La trajectoire est idéale, la cuillère abimée juste ce qu’il faut pour lui donner une bonne souplesse, le papier est lui-même assez dur pour qu’une fois complètement froissé il forme une boule suffisamment aérodynamique. Une dernière respiration avant d’armer sa cuillère, puis de libérer le projectile. Comme si d’un seul coup le monde était passé au ralenti, la boulette s’élance dans les airs selon une sublime courbe survolant l’allée pour quitter la cafétaria avant d’approcher parfaitement de sa cible. Dans un petit ricocher, elle tombe sur le rebord de la poubelle avant d’y plonger droit dedans, entrainant le couvercle au passage.

— Admire l’artiste. C’était le plus beau tir jusqu’à présent, t’es bien obligé de le reconnaitre.

Oui oui vous avez bien compris, ces deux andouilles jouent à celui qui catapultera le plus de déchet dans la poubelle du comptoir. Jeu relativement débile, probablement internet, mais dans lequel Itzan et Lyria ne voient absolument aucun problème. Après tout que font-ils de mal ? Ils mettent les déchets directement à la poubelle sans même se lever. Si c’est pas écolo-friendly, le bleu n’y comprend décidemment plus rien.

— Comment ça ça ne compte que pour un ?! Je veux le point bonus pour avoir fermé le couvercle au passage. Ok ok, effectivement je parie que tu n’es pas capable d’atteindre la poubelle derrière le comptoir.

Avec un peu de jugeote, le gitan est prêt à en mettre sa main à couper. Elle est trop loin, et leurs projectiles sont beaucoup trop légers pour ne pas dériver de leur trajectoire à une telle distance. C’est juste mission impossible. Sauf si la rousse se met à changer de projectiles. Sous les yeux tantôt désespérés tantôt amusés des trois autres membres du club des 5, Lyria chance de stratégie et s’arme après quelques hésitations d’une peau de baie Nanab.

C’est clair que c’est plus gros et plus lourd. Mais ça n’a clairement pas la bonne forme pour être catapulté. C’est inconstant et ça va se déformer dans l’air et perturber la trajectoire. Mais la plus jeune ne semble pas raisonner comme le gitan et n’attend pas plus pour l’attraper par la queue et la faire tournoyer avant de la jeter. Une bonne idée pour prendre un peu de vitesse, même si le chanteur n’est pas sûr que cela soit suffisant.

*SPLOSH*

Ouais, Itzan aura beau baisser la tête et mettre ses mains devant ses yeux pour se cacher le mal est fait. Il aurait dû se douter qu’avec un projectile plus lourd ça n’allait pas le faire. Et pas seulement pour des questions d’aérodynamise. Il a fallu que Lyria se plante et l’envoie droit dans la tête du professeur de coordination. Quel enfer. Il la sent déjà venir la gueulante, et en moins de temps qu’il ne le faut pour le dire, le dirigeant du pôle coordination est sur leur dos pour leur passer un savon. Parce que même si ce n’est pas Itzan qui a tiré, Hearnett n’a pas mis longtemps à capter (son Crapustule l’a aidé aussi c’est de la triche) que le gitan était aussi dans le coup.

— Si je peux me permettre monsieur, ce n’est pas moi qui aie tiré sur ce coup-là…

— Je ne veux rien entendre non plus jeune homme. Vous avez participé à l’élaboration de cette infamie, vous êtes tout autant coupable qu’elle.

— C’est bien ce que je me disais…

Et voilà le professeur qui continue encore et encore, sous les regards de tout le réfectoire, pour conclure qu’ils ont l’obligation de venir le voir dans sa salle de cours pour qu’ils reçoivent la punition qu’ils méritent. Comme si leur hurler dessus ne suffisait pas. Ok ils ont taché ses cheveux. Mais ce n’est pas comme s’ils avaient mis la terre entière en danger non plus. La réprimande publique aurait pu largement suffire.

Une fois enfin partie, Lyria a une réplique tout à elle, très en décalage par rapport à ce qu’il vient de se passer. Le bleu, par réflexe, cherche les regards de ses amis. Et même si Agatha n’a pas l’air choqué plus que ça, les regards noirs d’Ash et Magnolia suffisent à lui faire comprendre que ce n’est même pas la peine de chercher du soutien. Soupirant, il répond tout de même à la Mentali.

— Ouais, j’imagine qu’on peut dire ça

**

— Apparemment ils n’ont pas besoin de l’écrire dans le règlement. Pour eux, c’est du bon sens. Faut qu’on se fasse à l’évidence Lyria. On n’est pas adapté. Regarde, il y a à peine plus de 6 mois, je n’avais jamais mangé avec un plateau de ma vie.

Le gitan s’était fait la réflexion a lui-même suffisamment de fois pour le savoir. Il est inadapté. Et il n’est pas le seul. Même si Ash fait de son mieux pour qu’Itzan évite certaines boulettes, il y a tellement de choses avec lesquelles il est en décalage qu’il faut bien qu’il expérimente par lui-même. Et jouer à envoyer le plus de déchet dans la poubelle avec sa cuillère ne fait pas partie des choses admises ici.

— Non c’est pas si grave. Mais on a atteint son égo en le touchant directement avec cette peau de baie Nanab. Alors il a eu besoin de crier pour prouver qu’il restait malgré tout supérieur à nous. Te prends pas la tête. C’est relou mais c’est comme ça. Ça ne sert à rien de s’énerver.

Ça aussi, le gitan l’a vite compris. Ici, ce n’est pas comme chez lui. Il ne peut pas débattre avec les adultes pour savoir lequel au bout du compte à raison. Non, ici, les adultes ont presque toujours raison. Surtout les professeurs. Il ne va pas se battre dans le vide, c’est une perte de temps.

— Ouais je comprends t’inquiète. On voulait juste s’amuser. Mais dis-toi que ça aurait pu être pire. On aurait pu copier des lignes à l’infini. Là au moins on bouge, c’est plus sympa.

Effectivement, Itzan n’aurait jamais supporté de passer deux heures sur une chaise à écrire des lignes idiotes en boucle. Là au moins il fait quelque chose. Bon, ils pallient surtout la flemme de leur professeur. Mais c’est presque du détail. Apparemment le dôme coordinateur aurait un problème puisque personne n’y va. Et ils doivent découvrir ce qui ne va pas justement. Bon il aurait peut-être pu attendre le lendemain pour les y envoyer, et pas le début de la nuit. Mais c’est trop tard pour revenir en arrière de toute façon.

— Non je ne jouais pas spécialement à ça je te jure. J’ai surtout une bonne dextérité. On aura qu’à recommencer une autre fois. Mais dans nos chambres cette fois-ci, histoire qu’on nous laisse tranquille. Je t’apprendrais le mouvement parfait de la cuillère. Tu verras c’est super simple.

Trêve de bavardage, les voilà enfin arrivés devant le dôme. Et effectivement, ça n’a pas l’air très animé. Il y a juste un gardien devant la porte pour s’assurer que des intrus ne rentrent pas, et c’est bien tout. De toute façon, Hearnett leur a donné une carte donc pas de souci de ce côté-là. Ils n’ont plus qu’à entrer. Le bleu a tout a y découvrir puisqu’il n’y est jamais allé, et encore moins de nuit.

Par réflexe, il actionne l’interrupteur a l’entrée qui semble activer un peu toutes les lumières. Très vite, il devine au loin la grande scène, mais aussi tout un tas d’entrée qui mènent surement à des coulisses ou bien dans les gradins. Sans trop hésiter, le gitan s’avance mais constate que Lyria est moins téméraire que lui.

— On y va Lyria ? Plus vite on aura trouvé ce qui cloche et plus vite on pourra rentrer. Bon c’est toujours sympa d’avoir une autorisation officielle pour sécher les cours, mais à ce compte-là je préfère qu’on le fasse tous ensemble tu ne crois pas ?

Souriant, le bleu entraine à sa suite la Mentali pour rejoindre la grande salle. On voit que tous les équipements sont parfaitement neufs, jamais utilisés. Et évidemment, ce qui attire tout de suite le chanteur, c’est cette immense scène. Celle de son dortoir est super cool, mais celle-ci est d’un autre niveau. Pressé, le garçon monte dessus sans attendre et marche au milieu, s’imaginant en train de chanter avec sa guitare. Curieux, son regard tourne encore et encore pour fixer son environnement, jusqu’à finalement reporter son attention sur le plafond.

Le cou bloqué en l’air pendant plusieurs dizaines de seconde, le garçon décide de se laisser tomber un peu brusquement en arrière, dos au parquet brillant. Il aurait surement pu faire ça plus subtilement, mais tant pis maintenant c’est fait. Il y a quelque chose qui le dérange, et qui la poussé à se mettre dans une position plus confortable pour observer.

— Tu ne le trouves pas étrange ce plafond ?

Evidemment, Lyria n'avait pas pu s'empêcher d'envoyer en reconnaissance ses Hxadrons tel des petits soldats. Le gitan n'a jamais trop compris ça. Ordonner des trucs aux pokemons comme s'ils n'étaient que des instruments. Bien sûr, il sait bien que la jeune fille ne le voit pas comme ça, mais plus comme un travail d'équipe. Et puis ses pokemons n'ont pas l'air de particulièrement rechigner à la tâche. Ils ont même l'air plus que ravi de se rendre utile. Mais c'est plus fort qu'Itzan. Faute à une éducation trop stricte sur le sujet.

Après avoir fait basculer Doudou contre lui, le garçon se laisse volontairement tomber au sol, dos contre le parquet. Si effectivement au départ il n'a fait ça que pour pouvoir s'allonger un peu sur cette incroyable scène, rapidement son regard dérive sur la coupole, attiré par quelque chose. Il y a de drôle de reflet là-haut. Le bleu ne saurait pas trop l'expliquer, mais il n'a jamais vu un toit briller comme ça. C'est pour ça qu'il fait appel à son amie, pour avoir un second regard.

— Non Lyria je ne parle pas vraiment de sa fonction mais plus de ce qu'il y a dessus. Tu n'as pas l'impression qu'il y a une drôle de forme brillante là-haut ?

Le jeune garçon l'a déjà remarqué plusieurs fois sans le dire à voix haute, mais la vie de la Mentali n'avait pas l'air toute rose avant. Elle ne parle toujours que de sa chambre, et de jamais rien d'autre. Comme si elle n'en était jamais sortie. Bien sûr, le Voltali n'est pas très bien placé pour juger. Après tout lui-même a passé sa vie dans un clan de gitan sans connaitre le monde extérieur. Mais lui au moins, il voyageait. Mais surtout, il sortait de sa caravane.

Qu'importe, ce n'est pas un sujet qu'il veut aborder avec Lyria, enfin pas comme ça. Elle leur dira plus explicitement si elle le souhaite, mais en attendant il fera comme s'il n'a rien entendu. C'est à elle de leur en parler, pas à lui de la mettre aux pieds du mur. Soutien normal entre inadapté à la société.

De toute façon, ce n'est pas ça qui arrête Lyria qui vite se hisse hors de son fauteuil pour s'allonger à côté du bleu. Elle aussi fixe de longues secondes le plafond avant de s'écrier d'un seul coup.

— Ok c'est bon je me pousse. Qu'est-ce que t'as vu ?

Le garçon roule sur le côté pour laisser de la place à sa camarade, en pleine analyse de la structure tout en roulant sur le côté. Elle roule vachement bien dis donc (c'est le Rolling Thunder ça). La réflexion passée, la Mentali se met à énumérer ses affirmations, éclairant d'un seul coup la lanterne du gitan. Ce qu'elle dit est loin d'être bête.

— J'y avais pas du tout pensé ! Attends on va essayer de déchiffrer tout ça.

Les voilà pas malin maintenant à rouler dans tous les sens sur la scène pour essayer de déchiffrer lettre par lettre ce qui est écrit là-haut. Méthodiquement, ils s'attachent à chacun des caractères jusqu'à finalement avoir une réponse qu'énonce Lyria à voix haute.

— Bah ça veut dire ce que ça veut dire. A un moment on le voit, et à un autre moment non. C'est littéralement ce que représente ce procédé. Ce qu'on doit se demander plutôt c'est pourquoi il est écrit ça là-haut sur un dôme de coordination.

Doucement, le garçon se redresse pour essayer de comprendre. On dirait une farce, mais placé à cet endroit cela fait très peu sens dans l'esprit d'Itzan. Mais ses poils se hérissent quand il écoute la Mentali déblatérer à voix haute, beaucoup trop haute.

— Lyria ne dis pas ça !

Trop tard, dans un bruit sourd, c'est toutes les lumières qui se coupent en même temps. Si le bleu a juste le temps de soupirer, la jeune fille se jette littéralement contre lui, très impressionnée par le grand bruit mais surtout l'obscurité immédiate dans laquelle ils se retrouvent tous les deux plongés. Itzan essaie de s'habituer à la noirceur pour y voir quelque chose mais difficile sans source de lumière. Heureusement, il n'a pas le temps de chercher son Ipok pour créer une nouvelle source de lumière que tout se rallume de lui-même. Et évidemment, Doudou pleure un peu plus que d'habitude, impressionné par le grand bruit. Doucement, le gitan le blottit contre lui pour essayer de le calmer grâce à des caresses apaisantes. Et tandis que les Hexadrons reviennent, le guitariste lance un regard noir à son ami, toujours en train de crier dans le vide.

— Lyria arrête. Il ne faut pas parler aux esprits comme ça. Ils méritent le respect, et tu ne sais pas ce qu'ils peuvent faire. Les esprits nocturnes sont très puissants.

Habituellement, Itzan ne parle pas de ça comme ça à ses amis, du moins pas directement. Il a bien compris que ses mœurs ne sont pas ceux de la majorité présente sur l'île. Alors il préfère tout simplement éviter de s'exposer aux questions et autres remarques. Mais là, c'est une question d'urgence. Le contexte est trop propice à ce qu'il ne pense pas à une intervention des esprits nocturnes, décidés à leur jouer des tours. Le Voltali se redresse vivement, plaçant Doudou dans sa capuche pour qu'il soit bercé par le mouvement, avant de descendre de l'estrade.

Mais alors qu'il s'attendait à voir la rousse le suivre par l'estrade, elle présente quelques difficultés à se hisser toute seule dans son fauteuil. En voyant qu'elle n'y arrive définitivement pas, le garçon retourne sur l'estrade et l'attrape par les aisselles pour la réinstaller dans son fauteuil. Puis, sans rien dire, il descend de nouveau, attendant que la jeune fille le rejoigne, énonçant en même temps son plan.

— Bon ce que je te propose, c'est qu'on aille là où se trouve le générateur du complexe. On verra si quelqu'un se moque de nous ou des esprits nocturnes. Puis ensuite, on devrait monter le plus haut possible pour observer de plus près en quoi sont faites ces lettres brillantes. Normalement il y a des passerelles pour ça.

Tranquillement, Itzan se dirige de nouveau vers l'entrée du bâtiment. Il y a un plan de la structure, au cas où pour les évacuations. De là, ils devraient facilement trouver ce qu'ils cherchent. Pour s'aider, le garçon laisse son doigt courir sur le plan jusqu'à finalement s'arrêter.

— Bingo, c'est juste ici. Au deuxième étage. Ensuite, on n'aura plus qu'à monter au 4ème pour accéder au plafond. Et il y a un ascenseur, ça sera plus simple pour monter.

Aussitôt dit aussitôt fait, les deux enfants empruntent l'ascenseur jusqu'à finalement atteindre le deuxième étage puis, sans trop de difficulté, la salle de contrôle avec les générateurs. A cette heure-ci, elle est vide . Rien d'étonnant à ce qu'ils se contentent d'un gardien à la porte quand on sait qu'il n'y a aucun spectacle et que le dôme a bien du mal à accueillir du public. C'est justement le pourquoi de leur mission. Songeur, le gitan n'a qu'une chose en tête. Pourquoi des esprits nocturnes viendraient se planquer ici alors qu'ils ont l'immensité du monde à découvrir ?

— Tu n’as pas besoin de me dire merci pour ça Lyria c’est normal de t’aider quand tu en as besoin.

A vrai dire, le garçon n’y avait même pas fait attention. Pour lui, aider la Mentali à se remettre dans son fauteuil revenait au même qu’aider un ami qui s’était cassé la figure au sol. Le fauteuil n’a absolument aucune importance à ses yeux. Ce n’est qu’une difficulté comme une autre, il n’y a pas de raison de les distinguer, ou d’y accorder une importance particulière. D’autant plus que Lyria n’est clairement pas du genre à vouloir se faire remarquer par cette différence. Et ça tombe bien, Itzan ne la voit pas. Ou plutôt, il la voit mais n’en tire aucune conséquence.

— Non je n’en ai pas vu, du moins pas directement. Mais je sais qu’ils existent.

Le bleu s’en tient là pour les explications. Il n’a aucune envie d’entrer dans les détails. Même s’il a confiance en ses amis, il y a certaines choses qui lui appartiennent, qui appartiennent à lui et sa maman pour être exact. Pour autant, il ne peut pas être trop silencieux, sinon Lyria risquerait de faire des erreurs de jugement. Erreurs qui risqueraient de leur poser des ennuis par la suite.

— Les esprits nocturnes n’ont rien à voir avec les esprits ou les fantômes que tu les entends. Ce ne sont pas des défunts. Ce sont autre chose, des forces surnaturelles qui errent dans notre monde, et qui ont un rôle. Mais ce ne sont pas d’anciennes personnes comme nous. Ça ne sert à rien de crier pour les appeler, c’est même dangereux. Ils ne pensent pas comme nous.

Ça c’est le moins que l’on puisse dire. Itzan le sait et les a trop indirectement côtoyés pour ne pas le savoir. Ces êtres ne sont pas comme eux. Ils ne parlent pas. Ils font seulement passer des messages, de manière plus ou moins directe, plus ou moins violentes. Mais cela ne sert à rien de crier contre eux, cela risquerait plus d’attirer le mauvais œil qu’autre chose. Le gitan fait véritablement attention à ces choses-là, et ne peut décemment pas laisser Lyria dans l’ignorance.

Itzan cligne subitement des yeux un instant, réalisant qu’à nouveau, alors qu’ils venaient juste d’arriver dans la salle des machines, que les lumières se sont éteintes. Bon, cela ne va pas arranger leurs affaires si elles n’arrêtent pas de s’éteindre et de s’allumer. Il faut qu’ils trouvent une solution pour s’assurer qu’elles ne s’éteignent plus. Le gitan n’a clairement pas envie d’y passer la nuit.

— On va aller trouver comment remettre les lumières et les bloquer.

Confiant, le garçon avance en se souvenant de la pièce telle qu’il a eu le temps de la voir quelques secondes. Ce n’est pas bien compliqué, il suffit d’avancer un peu plus par ic, puis un peu par là pour trouver le premier générateur. C’est le plus gros, il doit bien gérer la lumière du dôme. Les pokemons de Lyria sont partis en premier pour essayer de tout trifouiller et trouver la bonne combinaison. Une chance qui permet au Voltali de ne plus avancer, comprenant que la Mentali ne la suit plus, mais surtout qu’elle ne se sent pas bien.

Impossible de le tromper. Le gitan est devenu au fil des années un expert pour reconnaitre les respirations des gens. Le moindre changement, perturbation ou autre accélération, il le perçoit. Forcément, en étant le pilier de sa maman pendant les nuits, il n’a eu d’autres choix que de s’adapter et de devenir une véritable machine. Don bien utile là tout de suite.

Doucement, il se retourne et s’accroupit devant la jeune fille, essayant pour l’instant de simplement lui faire sentir qu’il est là, juste à côté, tout près. Elle doit seulement entendre sa respiration pour le moment. Habituellement, il fait ça sur une personne endormie, mais la méthode n’a pas besoin d’être radicalement différente pour quelqu’un de réveillé et sujet à la panique. Il ne faut juste pas la brusquer, surtout pour Lyria qui ne supporte pas qu’on l’infantilise.

Il sent la Mentali se crisper un peu plus sur son fauteuil. Alors, doucement, il se met à chuchoter tout en laissant son bras courir le long de celui de son amie.

— Ne t’en fais pas Lyria je suis là, ça va passer.

Ses doigts courent, effleurant à peine sa peau. Ce n’est pas comme s’il risquait de la réveiller, elle l’est déjà. Mais il est persuadé que la brusquer de trop ne serait pas la solution. Alors, il la laisse attraper son bras comme une bouée de sauvetage, profitant de la légère marge de manœuvre qu’il a pour continuer à agiter le bout de ses doigts tout en respirant calmement. Il ne savait pas que cette expérience avec sa maman lui servirait ainsi, mais ça a l’air de fonctionner puisqu’il entend moins les sanglots coincés dans la gorge de son amie.

Finalement, les lumières reviennent enfin, levant définitivement l’obscurité. Se contentant d’un sourire amical face à la réplique de Lyria, il se redresse avant de dire.

— Tu n’as rien ne t’en fais pas. Et puis tu as raison, on doit trouver comment bloquer les lumières.

Le garçon se concentre donc sur les divers boutons facent à lui. Twili lui montre lequel il a appuyé pour rallumer l’ensemble. Plus qu’à trouver celui qui va définitivement bloquer la chose. Quoi que par sécurité, il serait peut-être mieux que quelqu’un monte la garde, ça leur évitera de nouvelles frayeurs.

— Oui j’ai l’habitude. Notre clan vivait aussi en partie la nuit, a contrario nous sommes beaucoup moins matinaux. Ça a été dur de me remettre sur le même fuseau que vous. J’en suis sûr Lyria. Si tu veux on proposera aux autres de faire des petites soirées dehors à la belle étoile, ça t’habituera au noir. Quand il fera meilleur d’accord ?

Même s’il n’y répond pas directement, Itzan ne peut oublier cette remarque de son amie. « Soirée sans lumière ». S’il a bien compris, cela rend la mère de Lyria encore plus méchante que ce qu’il pensait déjà. Il demandera à sa mère ce soir ou demain ce qu’elle en pense. Parce que, de son expérience et de ce qu’il sait, aucune maman de son clan n’a jamais imposé une « soirée sans lumière » à son enfant parce qu’il avait mal fait quelque chose.

Au fur et à mesure des regards sur ce tableau de commande, un nouveau message finit par apparaitre. Et si la remarque de la Mentali n’est pas fausse, elle confirme les soupçons du garçon.

— Je ne pense pas que cela soit un esprit. Ce n’est pas un esprit nocturne ça c’est sûr. Ils sont plus subtils que ça. Et je ne crois pas que les esprits des défunts fassent ce genre de chose. Moi je mise sur un type spectre, ou sur un humain.

Maintenant, Lyria déroule la suite du plan. Rien qui ne choque Itzan. Enfin bon peut-être sa manière de voir ses pokemons comme des soldats. Mais ce n’est pas la première fois et surement pas la dernière.

— Ça marche on y va, je compte sur toi aussi Twili.

Itzan aurait bien été tenté de laisser Doudou sur les jambes de Lyria, ce n’est pas comme s’il les aimait beaucoup après tout, mais il a finalement choisi de le laisser dans sa capuche. Vu la situation dans laquelle ils sont, autant essayer de lui imposer le moins de changement possible. Calé dans sa capuche, il ne risque rien de toute façon.

Les escaliers en métal passés, le gitan arrive bien vite sur la passerelle qu’il voyait depuis la scène située maintenant en contrebas. C’est quand même vachement haut. Forcément 4 étages, ce n’est pas négligeable. Mais le Voltali essaie d’ignorer ce détail pour continuer de marcher, d’autant plus que Lyria a visiblement trouvé comment fonctionne le panneau de commande mais aussi le micro. En réponse à son invitation, le chanteur fait un signe de main sous son menton et adopte une drôle de démarche, digne d’un mini Chad. Il essaie malgré tout de ne pas trop se déconcentrer et d’avancer sur la passerelle, au niveau des inscriptions.

Effectivement, ils n’ont pas halluciné. Il y a bien des inscriptions, visible encore plus nettement à cette courte distance. Malheureusement, même en tendant les bras au maximum, il ne peut pas les toucher, encore un peu trop haute. En revanche, il est a peu près sûr qu’il s’agit d’une sorte de papier scotch. Rien de plus compliqué que ça, mais qui avec les reflets de la structure ont permis ce jeu de lumière. Mmh, même s’il est difficile d’ignorer les cris amusés de la rousse, le garçon se concentre au mieux pour réfléchir à tout ça.

C’est la légère agitation de Doudou dans sa capuche qui lui permet de se remettre les idées au clair.

— Tu as vu quelque chose Doudou ?

Suivant du regard les agitations de son pokemon, le bleu finit par comprendre ce qu’il pointe. Il y a des petites feuilles collées à certains endroits du toit. De plus en plus étrange, mais qui éloigne définitivement la théorie des défunts revenus pour hanter les vivants. Sauf si les arbres sont capables de les hanter bien sûr.

Espérant que cette hypothèse soit fausse, Itzan en conserve une autre, qui lui parait bien plus plausible. Regagnant rapidement la salle de contrôle, le Voltali passe en revu tous les écrans mais surtout le plan de nouveau affiché à l’entrée de la pièce avant de proposer une nouvelle idée à son amie.

— En fait, ce n’est que du simple scotch. Et il y a des feuilles aussi. Si tu veux bien, j’aimerais qu’on monte sur le toit. D’après le plan c’est possible. Il y a une petite plateforme et ensuite les techniciens s’accrochent aux rambardes avec des câbles s’il y a des travaux. Entre le message placé sur le toit et celui ici qui parle de hauteur, j’ai bien envie d’aller au point le plus haut du dôme. On peut y accéder par la passerelle où j’étais. Si ça te va, je te porte jusqu’en haut, ensuite j’emmène ton fauteuil et tu viens avec moi jusque là haut. Ça te va ?

Le gitan ne perd pas plus de temps pour mettre en œuvre son plan après l’approbation de la Mentali. Déjà parce qu’il n’a aucune envie d’y passer toute la nuit, mais surtout parce qu’il sent bien que Lyria ne va pas tenir longtemps. La pauvre sursaute au moindre mouvement, imagineant probablement les pires scénarios dans son cerveau dégenté pour justifier le moindre mouvement d’air autour d’elle. Après, Itzan essaie de se mettre à sa place. Lui a grandi en passant sa vie entre les caravanes, dans des endroits inhabités où seule la nature régnait autour d’eux, et où les petits bruits étaient courants. Pareil pour l’ambiance nocturne qui était un de ses terrains de jeu préférés. En comparaison, son amie a passé sa vie entre 4 murs maintenus très solidement par sa mère. Comment ne pas avoir peur de l’extérieur après ?

Itzan aurait pu la porter tel une princesse. Mais pour ne pas l’embarrasser davantage, il choisit plutôt l’option koala, à savoir la porter doucement sur son dos jusqu’en haut.

— Si je te fais mal ou que tu ne te sens pas bien, n’hésite pas à me le dire d’accord ?

Le garçon se souvient vaguement que la jeune fille leur a expliqué qu’elle avait une maladie de naissance qui affaiblissait ses muscules. Il n’est pas médecin, alors il ne sait pas à quel point il peut avoir mal en la tenant comme ça. Plus qu’à aller vitesse et confort pour rapidement la reposer au sol et aller chercher son fauteuil.

— Oui oui ne t’en fais pas Lyria

Finalement, le plus haut point du dôme est en vu, heureusement bien éclairé par les diverses manipulations faites sur les tableaux de bord. Le garçon pose son amie sur un des tuyaux de la structure et repart au pas de course chercher le fauteuil de la Mentali. Il espère tout de même que cette expédition sur le toit leur apportera la réponse à tous les problèmes dans ce dôme. Heureusement, il n’y a pas trop de vent cette nuit alors se tenir là sur ce toit ne parait pas insupportable.

Rapidement, les deux pokemons de la rousse ramènent leurs petites trouvailles. Des feuilles, mais aussi des bouts de branche et tout un tas d’autres éléments végétaux qui n’ont, en toute logique, rien à faire là.

— Moi non plus j’y ai jamais mis les pieds. Mais même en ayant écouté qu’à moitié les cours d’Heartnett je confirme, un buisson n’a rien à faire là.

Effectivement, au milieu de l’étage supérieur, il semble y avoir un petit buisson sorti d’absolument nulle part. Très étrange. Le parquet et autres plateformes métalliques ne sont a priori pas les meilleurs terreaux pour les plantes. Le garçon n’a malheureusement pas le temps de se poser plus de questions que les choses commencent à s’agiter. Sans grande surprise, Doudou qui est encore dans la capuche de son dresseur se met à pleurer, et l’une des têtes d’Hexadron de Lyria n’est pas bien rassuré non plus. Ils ont probablement senti une présence que les deux jeunes n’arrivent à encore à identifier. Quoi que le garçon ait déjà sa petite idée derrière la tête, peut-être plus habitué à les sentir que les autres. Des spectres.

Lyria essaie de s’avancer pour mieux comprendre mais son mouvement est trop vite stoppé, la faisant tomber directement contre le sol.

— Lyria tout va bien ?!

Le gitan voudrait s’approcher mais son amie l’en empêche. Visiblement quelque chose se tient tout près de lui, mais surtout de Doudou. Itzan parvient à garder son calme et à attendre plus d’explication de la Mentali, bien que les multiples rires d’enfants sortis de nulle part compliquent sérieusement les choses.

La providence viendra peut-être de la rousse, ayant une sorte de flash révélateur sur l’origine de tout ça. Ecoutant ses indications, le garçon sort de sa poche son Ipok et procède à une recherche par mot clé. Un pokemon spectre avec une souche possédée en élément principal, cela devrait suffire pour trouver (pas que l’indication sur le panacée soit inutile, mais le Voltali est à peu près sûr que l’Ipok n’est pas capable de faire des recherches avec ce type de critères).

Trouvé ! Brocélome. Effectivement, même s’il a un côté effrayant, le pokedex s’accorde à dire qu’il souhaite simplement se faire des amis. Et de ce que le garçon est en train de comprendre, il y a toute une colonie qui se trouve ici, sur ce toit. Pour y voir plus clair, Itzan tente le tout pour le tout.

Il se retourne vivement, attrape Doudou de sa capuche et le tient devant lui avant de presque crier.

— On veut bien être vos amis ! Amis vous comprenez ! Mais il ne faut pas nous envoyer des flammes dessus, ni rire comme ça. Sinon votre futur ami a peur.

Le gitan désigne son pokemon en larmes, tétanisés par les cris des types spectres. Le bleu échange un regard avec son amie. Il ne sait pas si cela va marcher comme stratégie sur le long terme. Mais déjà, il aperçoit un peu plus loin, grimpant surement depuis le sol le long du bâtiment, un imposant arbre tordu, probablement l’origine de tous ces Brocélomes.

La situation est un peu tendue là tout de suite. Entourés de tout un tas de pokemons qu’ils ne parviennent pas formellement à identifier, les deux jeunes se retrouvent un peu démunis. Attaquer dans le vide n’aurait aucun intérêt ou pire, ne provoquerait que de la colère chez les occupants des lieux, rien de ce qu’il recherche donc en l’état. Doudou chouine quant à lui de plus en plus fort, la situation l’angoissant véritablement. Lyria n’est pas beaucoup mieux même si elle tente de maintenir une façade. Au final, il n’y a qu’Itzan et Prime qui sont à 100% de leur capacité pour lutter en cas de véritable attaque. Autant dire que pas le meilleur duo en cas de problèmes (rien contre toi Prime particulièrement, mais soyons réaliste deux secondes).

La rouquine joint les gestes à la parole et appuie les propos de l’agent apprenti, essayant de faire comprendre aux petits spectres désormais nommés que leur méthode d’approche pour se faire des amis n’est pas la plus incroyable. De manière générale, Itzan a vite compris que les types spectres ne réagissaient vraiment pas comme tout le monde. Ils sont presque tout le temps bizarre, à croire que c’est un critère pour entrer dans cette catégorie.

Heureusement, pas un miracle que le gitan n’explique pas, les spectres semblent avoir compris. Les petits feux follets finissent par disparaitre, levant ainsi le contraste entre la forte lumière et l’obscurité ambiante, ce qui a pour conséquence de rendre les Brocélomes visibles. Ils sont relativement ressemblant à ceux dans le pokedex. Pas plus gros. Une bonne nouvelle. Les explications les ont convaincus de changer d’approche, et les voilà qui font usage de leur tout petit bras pour forcer les deux jeunes à les suivre un peu plus loin sur la grande scène du dôme. Itzan échange un regard avec Lyria, s’assurant que tout va bien de son côté, puis replace Doudou dans sa capuche, espérant que le mouvement de balancier suffise à le calmer un peu.

Quelques mètres suffisent en réalité pour comprendre la manière dont a été conçu ce dôme. Il a été inspiré directement par la forme de cet arbre gigantesque, devant probablement être la maison de ces petits êtres spectraux. Il est immense, et probablement très vieux. Une chance que les constructeurs des lieux aient choisi de l’intégrer plutôt que de le raser. Cela aurait été un immense gâchis.

Toujours est-il que maintenant, les Brocélomes essaient de leur expliquer quelque chose avec beaucoup de convictions. Mais le regard désespéré de Lyria ne fait pas avancer la réflexion du gitan plus vite. Doudou ne parle pratiquement pas. Alors forcément, difficile pour lui de traduire la langue des pokemons, en plus propre à chaque espère.

C’est Lyria qui s’y colle et qui, à l’aide de dessins, essaie de retranscrire ce que les spectres expliquent. Curieux, le bleu s’approche et tente de suivre le décryptage de Lyria. De simples mouvements des spectres, elle parvient à monter toute une histoire qui tient plutôt bien la route. Le gitan hoche la tête, approuvant les propos de sa camarade. L’explication se tient. L’activité humaine aurait du leur ramener des amis, ou en tout cas des personnes avec qui échanger, mais comme ils sont au sommet du toit, les gens ne le savent pas et ils ont l’impression d’être toujours aussi isolé qu’avant. Un drôle de dilemme.

— Bon bah alors on va vite régler le problème.

Les spectres semblent étonner de l’apparente confiance que dégage le gitan. Mais pourtant, pour lui, la solution apparait évidente.

— Il suffit juste qu’on prévienne les gens que vous êtes là, et que vous voulez de la visite. Par contre si on fait ça, il risque d’y avoir plein de monde. C’est vraiment ce que vous voulez ?

Les Brocélomes se jaugent les uns les autres, pour être surs de répondre d’une même voix, puis finissent par acquicer en riant. Ils veulent de la compagnie, ça c’est clair.

— Et bah dans ce cas, avec Lyria, on va rentrer à l’académie. On fait une affiche pour parler de tout ça, et demain matin on la montre à Heartnett. On lui dit qu’avec ça on va régler le problème du dôme et que notre petite bataille de lancer de nourriture dans la cantine est oublié. De toute façon même s’il est pas d’accord je m’en fiche, on la collera quand même cette affiche. Par contre, il ne faudra plus faire de blague à base de lumière qui s’éteignent et de ricanements quand vous deviendrez célèbres. Sinon on aura fait tout ça pour rien.

Plutôt convaincu de son plan, le bleu cherche l’accord de sa partenaire. S’ils ne veulent pas se coucher en plein milieu de la nuit, il faut qu’ils s’y mettent le plus vite possible.

En toute honnêteté, Itzan irait bien s’écrouler dans son lit là tout de suite. Même si son rapport à l’idée même de dormir est un peu déformé par ses croyances et son clan, il ressent toute la fatigue de sa journée d’école, cumulée à celle de cette expédition nocturne qui a un peu joué avec ses nerfs il faut le dire. Le bleu se surprend lui-même à raisonner comme ça. Il y a à peine un an, à cette même heure, il serait au meilleur de sa forme, la vie de son clan étant aussi nocturne. Mais maintenant qu’il se lève à 7h le matin et plus à 11h, il n’a plus la même forme une fois la nuit tombée.

Seulement, ils ne peuvent pas tout arrêter tout de suite. Le gitan est même à l’initiative du reste de leur nuit. Tant qu’à faire, autant essayer de régler le problème tout de suite histoire qu’Andres ne leur en parle plus jamais. Ces Brocélomes ne sont pas tellement fautifs après tout. C’est l’académie qui s’est installée ici et qui a pris possession de leur arbre. A eux de s’adapter aussi à leur présence. Même pour Itzan qui n’est pas habitué à côtoyer des pokemons, cela parait tout de même relativement évident.

Lyria approuve son plan et après encore quelques échanges avec les types spectre pour leur promettre qu’ils vont réussir leur coup, les deux jeunes descendent de la structure et regagnent le campus. Itzan fait un rapide saut par sa chambre pour prendre le coussin de Doudou et retrouve la Mentali dans la salle d’art. Apparemment sa colocataire avait pas mal de matériel utile que Lyria qui a emprunté. Bien pratique, surtout au milieu de la nuit.

Sans trop se poser de questions, le gitan rassemble des tables pour créer un grand espace. Rapidement, le garçon va chercher une grande feuille de papier qui leur servira de support, pose pleins de stylos de toutes les couleurs, feutres et autres crayons sur la table et s’installe sur une chaise au côté de son amie. Juste avant, il prend soin de sortir Doudou de sa capuche et de le poser sur son oreiller, non loin d’eux. La petite boule rose n’a pas à subir l’empressement des deux punis et mérite bien de se reposer dans son coussin, devenu son espace de repos depuis qu’il cohabite avec Itzan.

Sur son Ipok, le garçon télécharge un certain nombre d’image des brocélomes, histoire d’avoir des modèles de référence, et les voilà parti, le bleu finalement déterminé à arriver au bout de cette punition.

**

Réveillé depuis bientôt deux heures pour suivre sa routine matinale, Léon Nahr a eu le temps de se lever, d’aller faire son entrainement matinal, de se doucher puis de s’installer à son bureau pour gérer quelques formalités administratives. Tout ça alors qu’il n’est même pas encore 8 heures du matin. Une forme olympique qu’il entretient désormais avec aisance, habitué à un tel rythme. Il lui reste encore une bonne dizaine de minute avant de devoir se rendre en salle de classe pour donner cours. Des minutes à rentabiliser.

Enfin ça, c’est s’il n’avait pas été interrompu par l’arrivée dans son bureau d’un imposant Crapustule, n’attendant pas pour tenter de lui expliquer quelque chose, sous le regard despespéré du référent des Voltalis. Sans trop perdre de temps, le Pokeathlète sort son téléphone de sa poche et compose un numéro, attendant une réponse.

"Que puis-je faire pour toi mon cher Leon ?"

"Heartnett, je t’ai déjà dit de ne pas m’envoyer ton Crapustule pour me parler. Je ne comprends pas son langage."

"C’est surtout parce que tu ne l’écoutes pas. Tu manques d’ouverture d’esprit !"

"Viens en au fait"

"J’ai retrouvé ton élève il y a quelques minutes, Itzan Xoaelteño."

Même si le professeur de coordination ne l’entendra pas, le référent pousse un léger soupir de soulagement. Ne pas le trouver ce matin dans sa chambre lors de sa ronde l’a un peu inquiété tout de même. S’il savait qu’il avait une autorisation de rentrer plus tard du à la punition de son collègue, il n’a pas particulièrement apprécié le fait qu’il ne soit pas réapparu au petit matin, se permettant même de faire des remontrances à Andréas, selon lui peu responsable de laisser deux jeunes comme Monsieur Xoaelteño et Mademoiselle Sydhe sans surveillance, et de nuit en plus. Ils restent tous les deux jeunes malgré tout. Difficile de ne pas s’inquiéter pour le référent.

"Ou étaient-ils ?"

"Ils sont en salle d’art, ils dorment paisiblement. Tu les verrais ils sont adorables, ça donne presque envie de prendre une photo."

"Je ne te suis pas là."

"J’ai l’impression qu’ils ont pris la mission bien plus au sérieux que prévu. Tu vois finalement, il n’y avait aucune raison de t’inquiéter pour Monsieur Xoaelteño. Tu n’es pas habitué à t’occuper d’élève comme lui, mais il suffit juste de le stimuler un peu."

Leon Nahr soupire, non sans un léger sourire sur les lèvres. Comme quoi, malgré des inquiétudes partagées avec les autres professeurs, il n’a pas eu tort de croire en Monsieur Xoaelteño. Son côté inadapté comme il aime tant le dire finira par faire sa force, d’une façon ou d’une autre.