Montée en Grade
Maison Voltali / Bureau de Leon Nahr / Magnolia
Ce n’est qu’un léger contact. Un insignifiant contact. Mais pour le bleu, c’est déjà beaucoup. Parce que c’est la rose qui vient volontairement taper doucement son épaule contre la sienne pour attirer son attention. Elle pourrait simplement prononcer son nom au milieu de la conversation entre le club des 5 en ce samedi matin – rien que ça suffirait pour que le gitan se retourne immédiatement vers elle et l’écoute. Il y a toujours une de ses oreilles qui trainent pour la voix discrète de son amie. Mais, depuis peu, depuis leurs dernières confessions en réalité, Magnolia se permet plus facilement ce genre de geste. Le contact avec le Voltali ne la terrifie plu. Et pour Itzan, c’est un vrai soulagement de voir sa partenaire agent s’en remettre à lui de cette façon. Après tout, même s’il ne l’impose pas aux autres, lui reste quelqu’un de relativement tactile, aimant le contact humain de manière plus directe.
— Oui j’ai rempli les papiers dans la semaine. Nahr me les avait donnés il y a quelques temps. Attends je vais regarder.
Effectivement, il ne lui faut que quelques clics pour constater que lui aussi a reçu un mail de son référent le convoquant dans le bureau. Exactement à la même heure que son amie. Ça sent le passage de grade commun à plein nez, et lui n’hésiterait pas à l’affirmer devant ses amis si la rose n’avait pas tenu à rester sur la réserve. Malgré tout elle reste prudente, et elle a surement raison. Alors, il l’aide à noyer le poisson, à passer à autre chose, laissant son flot de parole facile écarter cette discussion au profit de la dernière création de Lyria au côté de sa colocataire Gwenaelle.
L’heure arrivant, Magnolia initie le mouvement pour que les deux adolescents s’éclipsent, laissant les 3 autres discuter encore un peu autour du long petit déjeuner qu’ils s’accordent tous les samedis matins tous ensemble. Cela fait partie de leur routine à tous depuis de nombreux mois. Ces moments à eux où ils dealent avec leur adolescence comme ils l’entendent. Ces moments-là, le bleu ne veut pas y déroger.
Alors, quand il voit Candice, c’est à d’autres moments. Souvent en fin de journée, entre la fin des cours et le début de soirée où il doit aller faire ses devoirs. Parfois, ils passent dans la chambre de l’un et l’autre avant le début des cours pour venir se chercher mutuellement, et se pavaner un peu dans les couloirs. L’un comme l’autre aime ça. Cette attention, ce contrôle qu’ils ont sur ce que les gens disent d’eux. Ça les amuse bien, peut-être même un peu trop. Après ça, à quelques pas de leur salle de classe, ils finissent par s’échanger un rapide smack avant de rejoindre leurs amis respectifs. Parce que c’est eux, et leurs amis à côté. Ils n’ont pas tout mélangé. Et aucun des deux n’en a réellement envie.
Itzan n’est pas tout à fait persuadé de savoir lequel est le vrai lui. Celui qu’il est depuis presque 2 ans avec le club des 5. Ou celui qu’il aime aussi être avec Candice. Ou peut-être un peu des deux.
Les couloirs traversés, marche animée par les histoires du Voltali, les deux jeunes finissent par rejoindre le bureau du référent des lieux, un tout petit peu en avance pour leur rendez-vous. Si ça avait été lui, il serait arrivé pile à l’heure. Mais Magnolia mène. Et Magnolia arrive en avance, sous le sourire légèrement amusé du garçon.
Une fois à l’intérieur, leurs épaules légèrement tendues s’affaissent bien vite. Ils sont bien là pour marquer leurs passages de grade, rien d’autres. Pas de bêtises inconnues à l’horizon. Parce que si de sa part, cela ne l’aurait pas étonné, le gitan n’avait aucune envie d’embarquer involontairement son amie dans ses propres bêtises.
De manière rigoureuse, le professeur leur remet les divers objets qu’ils avaient demandé sur leurs fiches de passage de grade. Itzan a passé une très longue soirée là-dessus, à réfléchir au plus pertinent pour ses pokemons. La tentation de rendre fiche blanche lui a bien traversé l’esprit, mais il s’est bien douté que Nahr n’aurait pas apprécié la légère provocation. Surtout qu’ils commencent enfin à établir une relation de confiance.
— Itzan, je suis content de voir que vous avez rempli de vous-même un nouveau parcours et une nouvelle spécialité.
— Je n’allais pas vous laisser choisir une deuxième fois pour moi. Et j’ai choisi ce qui me paraissait être le mieux pour moi.
Etrangement, et ça ne lui arrive pas souvent, le garçon fait tout pour éviter le regard de Magnolia à cet instant. Il se souvient bien de sa réaction quand, il y a plus d’un an, il a été outré par le choix de son professeur de le placer arbitrairement chez les agents. Elle lui avait fait comprendre qu’il l’avait un peu cherché. Et même si leurs rapports ont bien changé depuis, il a désormais honte que, l’espace d’un instant, elle ne l’ait perçu que comme un imbécile incapable de faire des choix. Et, même si sur certaines choses il a changé, au fond il reste le même. Il a choisi la filière scientifique mécano parce que c’est celle avec lequel il est le plus à l’aise, qui lui demanderait le moins d’effort. Rien de plus.
Leon Nahr continue de présenter les petits changements qui vont s’insérer dans leur scolarité. Leurs nouveaux cours, les endroits où ils vont pouvoir se rendre grâce à leur grade atteint, et également d’autres formalités comme la possibilité de réaliser une alternance où l’attente de leur part d’exposé sur certaines thématiques. Itzan préfère n’écouter que d’une oreille, se doutant que toutes ces initiatives ne viendront pas de lui. En tout cas pas tout de suite. Il préfère regarder les yeux de Magnolia qui pétillent, pleine de fierté qu’elle mérite amplement de s’accorder. Elle, tout ça, elle le mérite vraiment.
Le sujet du nouveau pokemon tombe, et sans surprise, même si la rose est sûre d’elle sur le nouveau compagnon à accueillir dans son équipe, ce n’est pas le cas du bleu. Et son référent ne le lâchera pas avec ça.
— Itzan, vous n’avez pas rempli cette partie de la feuille destinée à choisir un nouveau compagnon offert par le collectionneur.
— Je sais. Je n’ai pas besoin de nouveaux pokemons. Les miens me suffisent. Et je sais que d’autres élèves ont refusé d’avoir des pokemons en plus. Je ne suis pas le premier.
— Peut-être, mais souvent ces élèves ont déjà capturé à plusieurs reprises à l’extérieur, comblant les besoins de leur équipe. Vous n’avez que deux pokemons Itzan, et aucun d’eux ne peut être un réel appui en mission agent. Il est temps que cela change.
Sans attendre, le référent sort de son tiroir une pokeball et l’enclenche, libérant un drôle de pokemon. Par réflexe, le gitan fait appel à son téléphone pour savoir de quoi il en retourne. Un Porygon. Sa forme géométrique est un peu étrange. Mais le garçon n’a pas le temps d’y réfléchir davantage que le pokemon lévite, s’avançant vers lui avant de disparaitre, comme absorbé par son Ipok. Complètement perdu, Leon Nahr ne le laisse pas trop longtemps dans la confusion.
— Porygon est un pokemon capable de voyager dans le réseau à sa guise par le biais de tout type d’ordinateur. Il vous sera extrêmement utile pour la suite de votre parcours.
Aucun doute – Je n’en suis pas à mon premier dresseur. Tu vas voir je fais des miracles
Et en plus il prend possession de son appareil pour s’exprimer via une voix robotique mais audible sans difficulté. Itzan n’est pas sorti de là.