Dans cette chambre pourtant si accueillante dans laquelle il a trouvé un nid nouveau, bien loin des caravanes qu’il aime tant, il n’y a désormais plus que de l’angoisse. Rien que l’idée de s’assoir sur son lit lui provoque une montée de stress, alors se coucher n’en parlons même pas. Chaque instant passé dans cette petite pièce lui rappelle inlassablement qu’il va encore avoir des visions pendant la nuit, et que peut-être elles lui montreront des choses terribles.

Si au début les visions étaient anodines, désormais elles le sont moins. Il commence à voir des gens se faire opérer dans la clinique de l’île. Si les esprits lui épargnent les images des corps ouverts sur la table, il voit en revanche très bien la détresse des proches des malades, tout comme la peur ou la résilience de ceux qui souffrent. Puis, quand la clinique de Leiar n’a plus suffi, son esprit s’est aventuré plus loin, sur les îles voisines, où les accidents se sont multipliés sur le dernier chantier. Depuis une semaine maintenant, il n’assiste plus qu’à ça. De la souffrance. Des cris. Et des pleurs.

Seulement, dormir est un besoin vital des créatures vivantes. Une condition à laquelle il tente par tous les moyens de s’arracher, repoussant les limites du possible. Alors, une fois tous les mécanismes d’évitement mis en place, une fois que toutes ces petites stratégies impliquant les copains à leur insu ne sont plus possibles, il sort. Par la fenêtre le plus souvent, profitant d’être au rez-de-chaussée. Itzan s’assure que les pokemons de l’éducatrice ou de la surveillante ne rôdent plus de ce côté et file en direction de l’obscurité.

Marcher l’occupe. Marcher oblige son corps à se mouvoir, et à ne pas dormir. Il ne fait rien d’exceptionnel. Il se promène juste, laissant Doudou à l’intérieur pour dormir paisiblement. Nocturna le suit aussi de loin, sans rien dire. Il ne l’a jamais vu avec un tel sourire. Une satisfaction chez la Paradoxe qu’il ne veut pas interpréter, pour ne pas se faire souffrir davantage alors qu’il se doute sans peine que, pour une raison ou pour une autre, la créature mystérieuse sortie du cratère de Paldea se délecte de cette situation.

Il fait de son mieux pour être discret, pour ne pas être vu par les adultes qui s’interrogeraient de la situation. Seulement, il est impossible d’échapper aux yeux du référent de dortoir, Leon Nahr. L’homme a vu son élève entamer ce drôle de manège depuis quelques jours. Le gitan n’était pas du genre à sortir de cette façon autrefois, alors forcément il se demande ce qu’il en est. Seulement, le couvre-feu n’est plus aussi stricte qu’autrefois sur Adala. En théorie, les élèves ne sont pas obligés de rester cloitré dans leur chambre, tant qu’ils ne dérangent personne.

Alors, Monsieur Nahr le garde à l’heure, l’apercevant seulement marcher sans réel but. Surement que pour lui il y en a un. De par ses origines et ses parfois difficulté d’adaptation, le référent n’intervient pas. Après tout il ne fait rien de mal. Et sa curiosité ne sera peut-être pas bien vue dans l’esprit du bleu qu’il a eu tant de mal à dompter.

En espérant qu’il ne prenne pas la mauvaise décision.