Désolé les copains je me suis réveillé un peu à la bourre, je vous rejoins après le petit dej avant les cours. A toute.

Quel joli mensonge.

Le garçon a à peine le temps de reposer son téléphone sur le bord de l’évier que déjà il s’y raccroche, le visage grimaçant. Depuis hier, il a l’horrible impression d’avoir une boule dans l’estomac. Une boule si grosse qu’elle le pousse à se plier en deux agenouillé au sol, les bras enroulés contre lui, essayant de repousser la nausée qui le guette. Cette sensation est plus que désagréable et vient se cumuler avec les nombreux maux qu’Itzan se traine déjà depuis de trop nombreuses semaines. Et le matin, c’est particulièrement difficile à gérer.

Hier, il a bien tenté de feinter, comme à son habitude, et de rejoindre ses amis pour le petit déjeuner. Mais l’odeur de la nourriture tôt le matin mélangé à son mal-être et son épuisement l’on conduit à s’éclipser, prétextant une envie toilette. Il a bien cru qu’il allait rendre son repas de la veille tellement la nausée a été forte. Heureusement, les repas du midi et du soir sont plus facilement gérables, même s’il ne mange pas énormément pour autant.

Mais pour le petit déjeuner, il vaut mieux ne pas tenter le diable et inventer une panne de réveil. Excuse particulièrement ironique lorsque l’on sait qu’Itzan ne dort plus depuis de bien trop nombreux jours.

La crise passée, Itzan se redresse pour atterrir devant son miroir. Le maquillage ne cache plus grand-chose désormais. Même s’il a foncé les teintes ou tenté des mélanges, il n’arrivera bientôt plus à camoufler ces énormes cernes qui se sont installées sous ses yeux. A moins d’un produit bien plus couvrant professionnel, son attirail va montrer ses limites. Malgré les couches de fond de teint et d’anticerne, il aperçoit sans mal ces formes foncées, entre le gris et le violet, qui se placent juste sous ses yeux. Soupirant, le bleu se reconnait à peine. Physiquement, il est pourtant le même. Mais il a l’impression de regarder une version éteinte de lui-même.

Percevant des couinements, Itzan quitte la salle de bain pour regagner sa chambre, attrapant Doudou qui l’attendait avec impatience. La boule rose fait clairement office de doudou, littéralement, depuis quelques temps. Sa présence l’apaise et l’aide à garder le moral malgré tout ça. Il doit montrer à Doudou qu’il est fort, qu’il peut réussir, pour que le type fée continue de lui aussi garder confiance en lui. Son compagnon a fait tellement de progrès depuis qu’ils se sont rencontrés. Avoir les yeux humides fait partie de lui, mais au-delà de cet aspect physiquement, le Toudoudou s’exprime davantage, prend des petites initiatives et surtout est devenu bon au combat. Le bleu ne peut pas gâcher tout ça en s’écroulant à son tour.

L’heure avançant, le Voltali est bien obligé de quitter sa chambre pour démarrer sa journée de classe. Juste après avoir fermé sa porte pour quitter le dortoir, il aperçoit du coin de l’œil son référent, malheureusement bien trop près pour qu’il puisse simplement faire comme s’il ne l’avait pas vu.

— Monsieur Xoaelteño je…

— Je suis désolé Monsieur Nahr mais je vais être en retard pour les cours. Monsieur Heartnett n’apprécie pas ça en plus, et je n’ai pas envie de me faire remarquer.

— Je pourrais vous donner un mot d’excuse. Je veux juste qu’on discute quelques minutes.

— Je suis vraiment désolé Monsieur, je ne veux pas de traitement de faveur. Et mes amis m’attendent. Bonne journée.

Sans laisser le temps à l’adulte d’en placer une, le garçon s’éloigne dans le couloir à pas rapide, fuyant le plus vite possible. Il ne veut pas parler à son référent, car il sait qu’il finirait par comprendre qu’il y a un souci. Le bleu ne peut pas prendre le risque d’être interrogé plus que cela.

Alors, il prend rapidement la route en direction du bâtiment de classe. C’est un miracle qu’il arrive encore à marcher. Chaque pas est lourd pour l’ensemble de ses muscles, difficile à assumer. Mais c’est surtout pour son cerveau, mis à bout depuis trop de temps, que l’épreuve est la plus complexe. Et tous les stratagèmes du dresseur n’apparaissent désormais que comme des pansements sur des plaies béantes.

De son côté, le professeur regarde son élève s’éloigner sans rien dire. Cela fait des jours qu’il essaie d’intercepter le garçon pour prendre le temps de lui parler. Leon a bien constaté que son comportement avait changé ces derniers temps. Il commence à connaitre le gitan maintenant et son attitude fuyante, davantage par la peur que par la simple flemme, ne lui ressemble pas du tout. Il a été tenté de demander à Magnolia des informations mais s’est abstenu. Ça lui a paru un peu trop intrusif comme geste, surtout qu’il ne sait pas à quel point son autre élève est au courant de la situation de son ami.

Autour de lui, la Flotte-Mèche ramené du cratère par Itzan flotte, regardant le bleu disparaitre dans d’autres couloirs, puis le professeur. Même si le référent a insisté pour qu’il participe à cette expédition, il reconnait sans mal que cette créature a de quoi mettre mal à l’aise.

— Et toi, tu ne saurais pas me dire ce qu’il se passe ?

Pour seul réponse, il obtenu un ricanement