Son de cloche d'un navire qui rentre au port. Brise légère qui balaye les sables de la plage. Horizon orangée, éclairée par un soleil déjà déclinant. Le fond de l'air est chaud, lourd et les rues sont calmes. Dans la petite maison, si proche de l'océan un cri retentit. Les pleurs d'une enfant qui visiblement depuis sa naissance ne sait faire que ça. C'est le troisième enfant de la famille, la toute première petite fille et jamais un nourrisson n'a paru au couple Fray si épuisant, si fatiguant, si plein de vie et d'énergie. L'homme soupire, la femme se lève, résignée afin de prendre la petite rousse dans ses bras. Déjà, la frimousse de la petite s'éclaire d'un sourire, comme si la présence des siens était finalement la seule chose qui pouvait l'apaiser. Elle se blotti, dans les bras de sa mère. Semble respirer son odeur...avant de refermer les yeux, paisiblement. Un sourire s'étire sur les lèvres de la femme.
« Dors, petite Karel. Dors paisiblement. »∞
« Qu'est-ce que tu fais, Karel ? » Tu plisses les yeux. Tu fronces les sourcils. Tu affiches une moue boudeuse. Pourquoi est-ce qu'il parle si fort, celui-là? Il va te faire repérer. C'est que c'est pas très stable, ton empilage de cartons à escalader pour atteindre le haut de cette fichue armoire.
« Tais toi, crétin ! Tu vas tout faire rater ! » grognes-tu. Tu captes le regard mi-amusé, mi-blasé de ton frangin. Tout ce que tu veux c'est satisfaire ta curiosité, c'est trouver et jeter un œil à ton cadeau d'anniversaire. Tu l'auras dans deux petits jours, oui, mais tu n'as aucune patience. Alors tu prends des risques, et puisque tu es petite...c'est système débrouille pour obtenir, pour toucher des doigts l'objet tant convoité.
« Tu vas tomber Karel, descends ! » Il te donne des ordres maintenant, et tu l'ignores royalement. Bien trop concentrée pour grimper sur le tout dernier carton et enfin atteindre ton but. Tu peux la voir. La boite dorée décorée d'un joli nœud...et tu souris. Tu tends les mains pour l'attraper. Tu vas l'avoir oui...mais soudainement. Tu sens le carton s'affaisser sous toi, petit à petit. Ou alors est-ce la tour en entière, qui s'affaisse...sans doute. Tu n'as le temps que de lâcher un petit
« Oh, oh... » avant que ton œuvre entière ne s'écroule en t'emportant avec elle. Tu atterris sur la moquette, sur les fesses.
« Aieuh ! » Tu rages. Pas tellement pour ta chute, parce que ça...tu y es habituée, non tu rages pour le cadeau alors que ton frère à côté se bidonne, se tordant de rire après une énième cascade.
« Tu verrais ta tête ! » Tu te renfrognes, avant de te lever difficilement. Toi, tu ne trouves pas ça drôle. Alors tu attrapes un coussin sur le lit de tes parents, et tu lui lances en pleine tête.
« Prends ça ! D'abord t'es trop nul. »∞
« Dis, Aiden. Tu crois que pourrais faire ça moi aussi ? » Tu sens le regard de ton frère sur toi, mais tu ne le regardes pas lui, non. Tu fixes ce dresseur, pas si loin de vous et qui fanfaronne avec son Pokémon sur l'épaule. Tu adores ça, toi les Pokémon. Tu vis avec des Pokémon. Ceux de tes parents, celui de ton plus grand frère...mais finalement, plus tu grandis, plus tu ressens le besoin d'avoir le tiens. De partager ce qu'un dresseur peut partager avec son Pokémon. Amitié. Complicité. Tu sors peu, oui, mais ça te tente bien de faire tes preuves en tant que dresseur.
« Toi ? Dresseur ? Tu plaisantes, j'espère. Tu tiens à peine sur tes deux jambes. Tu serais capable de t’assommer en lançant une poké-ball. » Il ricane et tu lui tires la langue. C'est vrai que toute seule, tu n'irais pas loin. Tu es une véritable assistée, une assistée pleine de courage certes, mais une assistée tout de même.
∞
« Tu as vu le dépliant, sur la table de la cuisine ? » Bien sur, que tu l'as vu. Tu l'as même zieuter avec grande attention, ce fichu bout de papier glacé, avec ses jolies photos et les beaux discours plein de bon sens qu'il renferme. Des jours, des semaines que tu ressasses les mêmes discours à ta famille, et finalement, tu te rends compte que tes mots et tes attitudes boudeuses ont finalement fait de l'effet. Pokémon Community. C'est ça, ta solution. C'est la sécurité pour toi, l'esprit serein pour tes parents et c'est l'occasion de te lancer. Tu ne sais pas trop, où ça va te mener. Non...tu ne prévois rien. Tu ne réfléchis à rien, tu te contentes toujours d'avancer, sans trop te poser tes questions. Tu tombes, et tu te relèves. Tu avances, malgré tes genoux souvent écorchés.
« Je l'ai vu. » Tes yeux brillent. Tu es pleine de fierté. Surexcitée. Tu as compris. Ils t'ont comprise et tu as presque l'impression que ta vraie vie commence maintenant.
« Bien joué, boulet. »∞
Il fait sombre, il fait frais. Tu frissonnes. L'endroit te paraît même un peu humide, ou alors ce n'est que toi qui divague. C'est glauque, par ici. Mais c'est parait-il une étape nécessaire. Un voyage dans les souterrains, un passage devant ce drôle de monsieur qui te fixe depuis déjà une bonne minute et qui depuis ton arrivée, te pose des questions. Parfois, elles te paraissent avoir du sens, tu cherches leur rapport avec la situation, tu échafaudes une théorie entre deux hochement de tête...mais parfois, ça te semble simplement sans queue ni tête son histoire. Pourtant, tu ne dis rien. Peut-être est-ce l’atmosphère, qui inhibe ton côté bavard, le fait est que tu ne parles que pour répondre (honnêtement, s'il vous plaît!) à toutes les questions qu'il te pose, ce vieux bonhomme bizarre. Et puis finalement, il se tourne. Il te quitte du regard et décroche sans hésitation une pokéball du mur derrière lui. Il te l'offre sans un mot et tu la prends à deux mains, comme s'il s'agissait de la chose la plus précieuse au monde, comme si tu craignais pour une fois .. de la faire tomber, et de la briser à jamais. Tu la fixes, cette sphère bicolore et tu hésites, le cœur battant avant de l'activer. Tu es presque éblouie un moment, tu plisses les yeux sur la petite créature qui montre sa frimousse. Un regard enjoué, un petit fripon, tu souris sans savoir pourquoi et de ta poche, tu sors une friandise que tu trimbales tout le temps. Un simple petit biscuit, que tu offres à ton nouvel ami, avant de délicatement lui caresser le pelage.