| La terre se nourrit d'empreintes RP Solo
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Le reste du voyage fut mitigé. Ils étaient bel et bien arrivés à Oliville, et le temps que Jackie négocie avec un marchand de location de vélos, Alban en avait profité pour acheter quelques souvenirs pour ses amis. Des carillons en verre soufflé à l’effigie du Pokémon Loupio - apparemment très présent à Oliville - pour Calliope et Marie, un bracelet en lanières de cuir d’Ecremeuh pour Aaron, un paquet de biscuits goût raclette pour Audrey, et une grosse boîte pour Nolan. Dans cette dernière, de nombreuses spécialités locales - il savait que son colocataire en raffolait -, ainsi que quelques objets typiques ; des journaux d’Oliville, un porteclé à l’effigie de Jasmine, la championne, et une sorte de magazine qui comportait une interview de la belle jeune femme ainsi que plusieurs clichés apparemment « inédits ». Son petit doigt lui disait que les cadeaux pour Nolan risquaient de lui faire très, très plaisir. Sa bonne humeur s’était cependant envolée lorsque Jackie leur avait annoncé qu’ils rallieraient Doublonville en vélo, coûte que coûte. Il connaissait peut-être mal la géographie de Johto, mais quelque chose lui disait qu’ils allaient en baver. Et, après deux heures intenses de pédalage, ils s’étaient effectivement tous plus ou moins écroulés de fatigue sur le côté de la route. Ce qui avait beaucoup agacé le Général Jackie. Même si elle avait consentit à les laisser prendre le bus pour « ne pas arriver en retard au Dôme ». La terrible référente était cependant restée derrière, pour rendre tous les vélos au centre de location le plus proche. Alban ne savait pas comment elle s’y était prise pour ramener les huit vélos à elle seule, mais toujours est-il que Jackie était arrivée à Doublonville avant leur bus. Ce qui forçait le respect, il fallait avouer. Mais la rouste qu’elle leur infligea à ce moment-là fut si violente qu’ils n’espéraient tous qu’une chose : qu’elle aille enfin s’enfermer dans sa chambre d’hôtel.
Quoi qu’il en soit, Alban et les autres étaient enfin arrivés au fameux Dôme Pokéathlète. Ayant pour impératif d’arriver à 18h sur leurs terrains respectifs pour le discours d’ouverture et la rencontre avec l’expert, ils n’eurent cependant pas le temps de faire du tourisme. Ils se séparèrent donc et Alban avança, seul, vers l’immense terrain de course aérienne qui était situé dans l’aile droite. La boule au ventre, il traversa les longs corridors immaculés, comme s’il se dirigeait vers un bloc opératoire. Sur son épaule, Zéphyr roucoulait pour essayer de le rassurer. Autour de sa ceinture, les Pokéballs de ses autres Pokémon semblaient comme se réchauffer pour lui montrer leur soutien. Mais rien à y faire. Alban était tendu et anxieux. Au fond néanmoins, un sentiment d’excitation parvenait à prendre le pas sur tout le reste. Il était enfin de retour dans le milieu. Il allait pouvoir voler de nouveau. Devant des milliers de spectateurs et téléspectateurs. C’était juste fou… Mais c’était aussi un retour à la case départ. Lui qui, un an plus tôt, avait fait office d’expert pour les jeunes coureurs du ciel participant à la course Mondiale qui s’était tenue à Nénucrique… Il allait redevenir l’élève, l’apprenti. Mais il ne demandait qu’à apprendre.
Traversant les portes grandes ouvertes, Alban porta ses mains en visière pour calmer l’intensité des rayons du soleil. Devant lui, une dizaine d’autres participants étaient déjà arrivés, tous silencieux et visiblement aussi nerveux que lui. Parmi eux, il reconnut quelques autres sportifs qu’il avait déjà eu l’occasion d’affronter, ou qu’il avait aidés lors de la quarante-cinquième édition de la course aérienne mondiale qui s’était tenue à Nénucrique. Celle-là même pour laquelle il avait tenu le rôle d’expert. De ce qu’il voyait, il allait y avoir un niveau exceptionnel. Ce qui ne le rendait que plus anxieux, encore.
Dans sa tête, il fit le bilan de ses futurs adversaires. Chacun portait son numéro sur sa tenue, ce qui rendait le décompte un peu plus simple. Et chacun était accompagné de sa monture, ce qui n’était pas encore son cas. Il nota mentalement les différents profils. Candidate numéro 1 : Meilou Garcia, la terrible compétitrice originaire de Jadielle qui avait pour monture un Rapasdepic du nom de Brasven. Du genre à avoir un vol très agressif, mais particulièrement bien maîtrisé. Candidat numéro 2 : Jordan Jane, de Vaguelone. Son Lakmécygne nommé White avait toujours été une monture magnifique, et diablement efficace, surtout sur les vols en ligne droite. Un adversaire dont il allait devoir se méfier, vu qu’il obtenait toujours d’excellents résultats. Candidate numéro 3 : Julia Jude, de la Forêt Blanche et sa Guériaigle, Zoé. Alban se souvenait qu’il n’avait pas eu grand-chose à lui reprocher lors de son inspection. Elle était plutôt régulière dans sa carrière. Ces trois-là en tout cas, Alban les connaissait bien puisqu’il avait dû les coacher l’année précédente. Ce qui rendait la chose plus difficile, puisqu’il leur avait également donné des conseils pour s’améliorer. M’enfin. Ça n’en serait qu’un challenge plus intéressant. Il tourna la tête pour voir le reste des candidats. Candidat numéro 4 : Viktor Vanderweiss, de Céladopole. Il avait déjà eu l’occasion de voler contre lui, et ils avaient souvent été comparés puisque Viktor avait également un Roucarnage pour monture. En général, il n’obtenait pas plus haut que la troisième place. Mais il devait certainement avoir progressé depuis le temps. Candidate numéro 5 : Joy Clarisse, de Lavandia. Alban la connaissait bien puisque, natifs de la même Région, ils avaient très souvent concouru l’un contre l’autre. Une cavalière exceptionnelle avec une monture atypique, un Drattak particulièrement rapide. Son regard se tourna vers les candidats 6 et 7, qu’il ne connaissait pas. Le 6 avait un Bruyverne, tandis que le 7 avait un Prismillon. Etaient-ils forts ? Alban n’en savait rien, mais il se nota qu’il devrait les tenir à l’œil. Il regarda brièvement le badge qu’on lui avait remis et se souvint qu’il était le 8ème candidat. Il sauta donc au suivant… Qu’il ne connaissait pas non plus. Néanmoins, ce dernier portait une sorte de sweat avec son nom entier inscrit dessus. Il le fixa un moment. Candidat numéro 9 : Cleith Clinton. Probablement le même âge que lui, avec un magnifique Flambusard chromatique comme monture. Alban ne savait pas s’il était fort, mais malgré ses apparences de gamin détaché et un brin espiègle, il semblait avoir une certaine aura. Il ne put détacher son regard de lui, jusqu’à ce qu’une chevelure blonde et bouclée vint se planter devant son champ de vision. Il sursauta en reconnaissant ce faciès caractéristique.
- Candidate numéro 10 : Azalea Stockholm, de Romant-sous-b-Il s’interrompit en s’apercevant qu’il venait de le dire à voix haute. Quelques têtes se tournèrent vers lui, tandis que la jeune fille lui montrait une moue nonchalante.
- Encore en train de tout analyser ? Déstresse l’expert, tu n’as pas besoin de faire des programmes sur mesure, cette fois-ci !Elle partit dans un grand éclat de rire et s’approcha de lui. Juste assez pour pénétrer dans son cercle. Mais pas trop pour ne pas le faire reculer par réflexe. La fourbe. Elle restait juste à la limite, hein ? Alban déglutit. Azalea… Il aurait dû se douter qu’elle serait là également. Elle avait gagné la course mondiale de l’année précédente, après tout. Et il avait passé beaucoup de temps à l’aider là-dessus. A l’époque, elle avait un problème avec sa monture, un Flambusard qui n’acceptait plus qu’elle s’approche de lui depuis son évolution. Alban était parvenu à leur faire retrouver leur confiance l’un envers l’autre, et les avaient entraînés pour qu’ils gagnent la course. Et il la soupçonnait d’avoir un faible pour lui. Il n’était pas vraiment doué pour détecter les signes, mais quand une fille vous embrasse… Il fallait supposer qu’elle en pinçait un peu pour vous. Même s’il n’était pas sûr de l’intensité des sentiments de la Kalosienne à son égard. Toujours est-il qu’il lui avait gentiment - croyait-il - fait comprendre qu’il ne la voyait pas de la même façon. Et ils en étaient restés là, à être encore moins que des « amis ». Mais plus que des « connaissances ». Avec une drôle de relation d’élève-professeur. Hm. C’était plutôt particulier, maintenant qu’il y repensait. Raison pour laquelle tout cela le mettait mal à l’aise.
Sans se préoccuper de sa gêne néanmoins, Azalea se hissa sur la pointe des pieds et déposa un léger baiser sur sa joue.
- Je… Je suis désolé, bafouilla-t-il.
La Pokéathlète pouffa de nouveau de rire. Derrière elle, Sylphe, son Flambusard, était en train de gratter le sol avec son bec.
- Ça faisait longtemps en tout cas. Comment vas-tu ? Tu n’as pas donné beaucoup de tes nouvelles… tu n’as même pas répondu à mes messages…- Désolé. J’ai été plutôt occupé ces derniers mois. L’école demande pas mal de choses et…-- Occupé à faire de la télé ? Je t’ai vu avec ta petite copine rousse, sur l’île de la Destruction… Et avec ton meilleur ami aux Hunger Games, également. C’est quoi. T’as un faible pour cette couleur de cheveux, c’est ça ?Oulah. Discussion tendue. Alban pouvait presque sentir les reproches tranchants d’Azalea. Il prit une grande inspiration.
- Ruby n’est pas ma petite copine. Comme tu l’as dit, c’était pour la télé. On ne faisait que faire semblant… Idem pour Aaron et moi. - Oh d’accord. C’est vrai que je me disais que cette rousse n’était pas du tout dans ton style. Ta vraie copine doit être un peu plus… douce et super mignonne, genre paillettes-paillettes ooh j’adore le rose, je suis une fiiillle… N’est-ce pas ?Alban faillit s’étrangler tant la description avait quelque chose de vrai. Azalea avait une sorte de sourire railleur et sarcastique. Comme si elle estimait peu ce genre de filles. Le châtain ne sut trop quoi répondre.
- … je n’en ai pas. Et c’était vrai. Mais il avait bel et bien quelqu’un qu’il aimait. Quelqu’un qui était du genre douce et super mignonne. Quelqu’un qui avait un truc avec les paillettes. Et quelqu’un qui avait même les cheveux roses, d’ailleurs. Néanmoins, il s’était promis d’essayer de l’oublier. Au moins pour ces quelques jours à venir.
Sa réponse parut satisfaire Azalea, qui eut l’air beaucoup moins vexée. Elle retrouva son visage doux et agréable.
- Ah, bon…Elle n’ajouta rien de plus mais Alban vit dans son regard qu’elle semblait beaucoup plus heureuse. Sans qu’il n’ait pu dire quoi que ce soit, la jeune fille s’approcha un peu plus de lui et passa un bras autour du sien pour venir se coller à lui. Fichtre. Les filles de Kalos étaient vraiment du genre rentre-dedans. Enfin… Pas celle qui l’intéressait, malheureusement.
L’arrivée d’Alastor Winchester, le président de la Triple C (Confédération des Coureurs du Ciel) et organisateur de la majorité des courses aériennes, lui fournit néanmoins une distraction parfaite. Se dégageant de l’emprise de la blonde, Alban s’avança en même temps que les autres vers l’homme. Ce dernier, la moustache toujours en brosse, son impeccable costume rutilant au soleil, les embrassa d’un regard bienveillant. Alban avait toujours aimé ce vieil homme. Un Pokéathlète de génie et un organisateur extrêmement compétent. Il aspirait à devenir comme lui, un jour…
Alastor s’éclaircit la gorge et ouvrit ses bras pour les accueillir.
- Bienvenue, bienvenue, dans le célèbre Dôme Pokéathlon ! Je sais que ce n’est pas la première fois pour certains d’entre vous, et je m’excuse d’avance si mon discours pourra paraître redondant. Comme vous le savez tous, je suis Alastor Winchester, président de la Confédération des Coureurs du Ciel. C’est toujours un immense plaisir de voir de jeunes visages prometteurs. Des nouveaux… comme des anciens.Il se tourna vers Alban et ce dernier jura qu’il venait de lui faire un clin d’œil.
- Mais trêve de bavardages. Vous savez tous pourquoi vous êtes dans ce lieu d’exception. Pour la vingt-quatrième fois en vingt-cinq ans, nous avons décidé d’organiser une course aérienne dans le Dôme Pokéathlon. Et pour la première fois depuis la création de la Triple C, nous avons décidé d’ouvrir une épreuve Junior pour les courses aériennes des Jeux Pokélympiques ! C’est une chance pour vous, d’avoir été convié. Votre profil a été sélectionné parmi des dizaines et des dizaines d’autres adolescents ! Nous avons passé du temps à éplucher chaque candidature. Nous avons pris en compte vos anciens résultats en course, évidemment, mais également vos aspirations, vos motivations, votre talent, votre acharnement… Certains d’entre vous n’ont pas encore livré énormément de courses aériennes officielles. Néanmoins, ils sont là car nous avons senti qu’ils étaient prometteurs et avaient un véritable avenir dans cette discipline.Son regard se posa cette fois-ci sur le garçon avec le Flambusard chromatique qu’Alban ne connaissait pas. Avant de revenir au centre de l’audience.
- Quoi qu’il en soit, j’attends de vous beaucoup de fairplay. Et du grand spectacle, également ! Vous aurez très peu de temps pour vous entraîner ici avant le jour J, mais nous avons tout de même fait venir un expert pour votre séjour. Ce dernier vous donnera des conseils pour votre course, et vous coachera si vous le souhaitez. Ceux de la région de Kanto le connaissent très certainement, puisqu’il possède un centre d’apprentissage pour les jeunes Pokéathlètes en devenir. Je vous présente… Nelson Finnigan !Un homme à la trentaine d’année vint rejoindre Alastor. Alban ne le connaissait pas, mais il lui semblait parfaitement digne de confiance. Un Pokéathlète solidement bâti, à la chevelure brune fournie et au physique d’aventurier. Avec sa veste en jean, ses bottines en cuir et son look de Nashville, il ressemblait à une sorte de cow-boy des temps modernes. Finnigan fit une légère courbette devant eux et se présenta.
- Que d’honneurs, mon cher Monsieur Winchester. Enfin ! Les jeunes, je suis vraiment ravi d’avoir été convié pour être votre expert durant ces deux prochains jours. Comme le Président l’a dit, j’ai créé un complexe sportif à Kanto, ma région d’origine. Là-bas, j’y entraîne des gens comme vous qui souhaitent percer dans les courses aériennes. Je leur apprends à gagner la confiance de leur monture, à devenir des dresseurs avant de devenir des Pokéathlètes, et à apprécier pleinement ce beau sport qui nous réunit tous, tout simplement ! Niveau parcours, hm… Disons que j’ai pas mal fait des courses aériennes dans ma jeunesse. J’ai gagné pas mal de prix, d’ailleurs… Dont un ici, il y a de cela cinq ans. Mais maintenant, j’ai décidé de me consacrer à autre chose. Vous le comprendrez peut-être un peu plus tard, mais enseigner ce pour quoi on a dédié une partie de sa vie… c’est juste une expérience incroyable et tellement enrichissante. Alors j’espère que nous pourrons bien travailler, tous ensemble. Si vous avez des questions, n’hésitez surtout pas à me les poser.Alastor hocha la tête avec appréciation, puis repris :
- Bien ! Après ce beau discours, je me permets de repartir sur une note un peu moins réjouissante. Comme d’ordinaire, vous êtes autorisés à concourir uniquement avec la monture que vous avez enregistrée. Vous n’êtes pas autorisés à quitter le Dôme durant ces trois prochains jours et vous aurez accès à trois lieux pour vos entraînements. Ce terrain, qui sera à votre entière disposition pour vos entraînements. Une salle de musculation, où Nelson donnera la majorité de ses enseignements. Et une salle de gym libre, pour vos autres envies. Vous serez logés dans notre résidence intérieure par chambre de deux, avec d’autres Pokéathlètes qui concourent pour d’autres types de courses. Voilà, je pense que j’ai tout dit. Un livret de règles et de bonne conduite vous a été remis, et je vous invite à en prendre connaissance au plus vite. Sur ce… je vous laisse avec votre expert. A bientôt !Après avoir salué une dernière fois ses protégés, Alastor Winchester se retira, laissant le Coach Finnigan sur les devants de la scène. Comment ce dernier allait-il les entraîner ? Alban se sentait fébrile. C’était une opportunité unique, que d’avoir quelqu’un d’aussi expérimenté à leurs côtés. Comment s’y prendrait-il pour leur livrer son savoir ? Le châtain avait complètement oublié le « problème Azalea », à ce stade de l’histoire. A sa grande surprise néanmoins, leur expert se racla la gorge et annonça :
- Bon eh bien. Pour commencer, j’aimerais apprendre à vous connaître tous. Alors nous irons dans mon bureau et vous passerez l’un après l’autre pour un entretien personnel et privé d’une dizaine de minutes. J’ai noté vos noms et vos heures de passage à la suite. Pour ceux qui ne passent pas maintenant, vous pouvez commencer à prendre connaissance des différentes installations, et à prendre vos aises dans les locaux. Ne commencez pas l’entraînement maintenant, ce serait parfaitement inutile. Il afficha ensuite la feuille sur un tableau, puis fit signe à la première - Meilou - de venir avec lui jusqu’au gymnase. Alban échangea un regard avec Azalea. S’il s’était attendu à ça pour un premier entraînement ? Pas vraiment. Les méthodes de Finnigan semblaient… bien différentes des siennes. La blonde haussa les épaules.
- Je passe en tout dernier, donc j’ai plus d’une heure devant moi. Et toi aussi, Alban. Que dirais-tu d’aller boire un café, histoire de parler du bon vieux temps ? L’attaque par surprise. Damn. Alban jeta un regard à Zéphyr - qui haussa les ailes - et décida de ne pas trop s’embourber dans une situation qui sentait clairement mauvais. Il s’esquiva avec habileté.
- Désolé je ne peux pas, ma Prof veut qu’on aille déballer nos bagages dès que possible… Elle nous a donné rendez-vous dès qu’on aura du temps libre, alors faut pas que je traîne… Mais on se revoit plus tard !Ce n’était pas totalement vrai, mais qu’importe. Alban lui fit un signe de la main puis s’échappa aussi vite qu’il le put. Zéphyr sur son épaule piailla doucement pour lui reprocher d’avoir menti. Le châtain se sentit subitement un peu plus mal. Pour ne pas avoir à avouer qu’il avait honteusement envoyé balader Azalea, il décida d’effectivement rejoindre sa chambre. Peut-être pourrait-il prendre ses aises et se reposer un peu avant son entretien ? Et faire connaissance avec son colocataire, d’ailleurs… Puis retrouver Chell, qui devait déjà l’attendre là-bas - passer les portes sans avoir besoin de clés était décidemment bien pratique, parfois -. Ouais. Il allait faire ça. Gravissant donc la volée de marches, il chercha du regard la porte de sa chambre. Numéro 172… Numéro 172… Ah, il y était. Mettant la clé dans la serrure, il l’ouvrit et…
- ALBAAAANNN IL ME VOIT !!!Le Pokéathlète manqua de peu la crise cardiaque et sursauta violemment. Zéphyr, sur son épaule, s’envola en piaillant de mécontentement. Devant lui, Alban voyait clairement Chell en train de sautiller, surexcité. A travers la transparence de l’esprit, derrière, un jeune garçon d’environ 11 ans était assis sur le lit, un sourire aux lèvres. Le Voltali ne savait pas si c’était parce que l’esprit frappeur lui avait dit que ce garçon le voyait qu’il s’imaginait des choses, mais il avait l’impression que son nouveau colocataire suivait des yeux la silhouette de Chell. Ok. Temps Mort.
Il s’avança dans la chambre et referma la porte derrière lui, faisant taire Chell par la même occasion.
- Heu. Bonjour.
- Salut ! Tu es Alban Abernaty, c’est ça ? Waouh ! Je suis un grand fan de toi ! C’est vrai ce qu’on raconte alors ? Tu es de retour dans le milieu ?!Malaise, j’appelle ton nom.
- Heu. Oui, en quelques sortes. Enchanté de faire ta connaissance… ?
- Oh pardon, je ne me suis pas présenté ! Rory ! Je viens de Mauville. Je fais aussi des courses aériennes, avec Sweetpea, mon Nostenfer. - il montra du doigt un Nostenfer qui s’inclina poliment devant eux -. Enfin… J’en fais pas dans la même catégorie que toi, ahah…Il montra sa jambe droite et Alban eut un choc en constatant que cette dernière était entièrement métallique. Une prothèse. Les Jeux Paralympiques. La catégorie réservée aux gens handicapés.
- Quant à ton ami, eh bien… C’est un fantôme, c’est ça ? Je le vois parce que je fais partie d’une famille d’Exorcistes. J’ai un don pour sentir les esprits… Et celui-là est pas du genre discret, si tu vois ce que je veux dire. J’ai un peu parlé avec lui. C’est drôle, que tu puisses le voir aussi.Ok. Deuxième choc de la journée. Une personne qui pouvait voir Chell sans qu’Alban ne le lui présente ? Il y avait clairement quelque chose d’étrange. Mais visiblement, cette situation semblait ne choquer que lui. Chell avait l’air ravi de s’être trouvé un nouvel ami. Et Rory, bien qu’ayant montré qu’il était plutôt excité par la présence d’Alban, avait l’air paradoxalement réellement serein quant à toute cette situation. Le châtain en conclut qu’il avait besoin d’une douche froide. Là. Tout de suite.
- Enfin bon, je suis ravi d’être avec toi. Tu sais, je te regardais souvent à la télé, avant que tu… enfin… tu sais… Il fit un geste maladroit et Alban comprit qu’il parlait de son accident à Nénucrique.
- Je me suis beaucoup inquiété… Beaucoup de tes fans se sont inquiétés… Je me suis dit qu’avec une chute pareille, tu étais peut-être devenu, erm… comme moi. Mais je ne t’ai jamais croisé dans les courses réservées aux handicapés. Et je n’ai plus entendu parler de toi non plus. Je croyais que tu avais baissé les bras, que tu avais abandonné. Ou pire, que tu étais trop blessé pour reprendre les courses, même en Paralympique. Je suis heureux de voir que tu as su te relever !Etrangement, quand ce discours venait d’un gamin qui était en bien plus mauvais état que lui… cela lui faisait plaisir. Pour la première fois depuis son accident, Alban avait l’impression d’avoir été réellement compris. Par quelqu’un qui avait vécu la même chose. Qui savait ce qu’on pouvait ressentir. Immédiatement, il sut qu’il s’entendrait bien avec Rory. Alors, faisant fi de son déballage de valises, Alban s’assit sur son lit et se mit à discuter avec son nouveau colocataire. C’était comme si un poids qu’il avait traîné depuis trop longtemps venait de disparaître. Pendant plus d’une heure, ils apprirent à se connaître. A parler des courses. A parler d’eux. A parler de tout, et surtout de rien. Il venait vraisemblablement de se faire un nouvel ami. Et, pour une fois, il avait l’impression que cet enfant était comme lui. Avec Rory, il n’était plus ce gars boiteux « différent ». Il était lui. Et ils étaient eux.
***
Une heure et demie plus tard, Alban s’excusa auprès de Rory et pris congé car il devait rejoindre Finnigan pour son entretien. Il laissa tous ses Pokémon - à l’exception de Zéphyr et Zénith - à Chell, pour que ce dernier ne se sente pas seul. Puis, le cœur plus léger, il se dirigea vers le grand gymnase où l’expert l’avait convoqué. Rencontrer Rory lui avait fait un bien fou. Il avait l’impression qu’ils auraient tous deux une influence positive l’un sur l’autre, durant ce court séjour. En outre, ils allaient pouvoir s’encourager, puisqu’ils ne jouaient pas dans la même catégorie. De ce qu’Alban avait compris en discutant avec Rory, le natif de Johto aurait sa course un jour avant lui, soit le surlendemain au matin. Il n’était cependant arrivé que le matin même au Dôme, puisque ses finances ne lui avaient pas permis de payer des jours supplémentaires d’entraînement, contrairement aux élèves de Lansat. Alban trouvait ce système un peu grossier. En théorie, ils avaient tous les mêmes chances puisqu’ils pouvaient bénéficier des installations pendant les deux jours réglementaires avant leur course respective. Mais dans les faits, les plus fortunés pouvaient payer des sommes astronomiques pour bénéficier jusqu’à une semaine de plus. Et, même si l’expert ne venait dans tous les cas que deux jours avant la course, ceux qui mettaient la main à la bourse auraient l’avantage de mieux connaître la piste de course et d’avoir le temps d’apprivoiser les salles d’entraînement. M’enfin. Il évita de trop y penser, et poussa les portes du grand gymnase.
Dans un coin de la pièce, Nelson Finnigan avait installé son bureau ; une simple table en bois avec deux chaises. Il fit un sourire à Alban et l’invita à venir s’asseoir en face de lui.
- Bonjour, le salua poliment Alban.
- Salut ! Alors c’est donc toi, le fameux Alban. Le genre de phrases qui le mettait toujours mal à l’aise. Il ne répondit rien. Finnigan attrapa son dossier et l’ouvrit.
- Alors… Ancien champion de courses aériennes Junior, surtout dans la région de Hoenn. Mais tu as fait pas mal de courses mondiales également. Première place à chaque fois, et ce, depuis tes débuts. C’est vraiment impressionnant. Tu t’es cependant arrêté pendant trois ans, et tu comptes reprendre avec un challenge aussi difficile que les Jeux Pokélympiques ? C’est plutôt ambitieux, j’aime ça. Evidemment… Personne dans le milieu n’ignore ton histoire. J’ai appris par ton enseignante que tu avais fait de la rééducation mais que tu n’avais pas osé revoler depuis. Bien, bien… J’aimerais te cerner un peu mieux. Peux-tu me parler de toi ?- Heu… Que voulez-vous que je vous dise sur moi ?- Du genre timide, hein ? Ahaha, ne t’en fais pas, ça se travaille. Bon alors… Dis-moi plutôt qu’est-ce qui t’a motivé à t’inscrire pour les Jeux.Alban déglutit et pris quelques secondes le temps de la réflexion.
- J… J’avais envie de recommencer à voler. Avant mon accident, c’était ma grande passion. Je me voyais faire une carrière dedans. Et puis je me suis blessé. Je n’ai pas eu le courage de revoler depuis, mais je me disais que m’inscrire aux Jeux me permettrait de passer le pas. D’avoir une pression qui me forcerait à prendre cette décision, au lieu de la repousser sans cesse. - L’histoire de la carotte et du bâton, hm ? Pas une mauvaise idée, surtout que je pense que tu connais bien ton caractère et que tu sais ce qui te correspond le mieux. D’accord… Autre question, maintenant : qu’attends-tu de moi ?- Je… suppose qu’après avoir été absent si longtemps du domaine, j’ai besoin d’avoir une vision expérimentée sur le sujet. J’ai besoin de conseils, d’entraînements, et d’expérience. J’ai besoin de tout recommencer depuis le début. Avec une nouvelle monture. Et un nouveau moi.- Ah oui… En parlant de ta monture. Tu as décidé de concourir avec ton Dracaufeu, c’est ça ? Peux-tu me parler de lui ? Pourquoi ce choix ? Le châtain hésita, mais il décida que s’il voulait de l’aide de Finnigan, il allait devoir se montrer sincère avec lui. Alors il lui raconta toute l’histoire. Il lui raconta sa relation actuelle avec Zénith. Il lui raconta son impression d’avoir raté quelque chose. Mais également sa volonté de réparer les fondements de leur confiance. Il avait envie de passer cette étape avec Zénith. Envie que cette course les rapproche de nouveau. Envie de lui permettre d’accepter plus facilement sa nouvelle condition de Dracaufeu. C’était important. Pour tous les deux. Au bout de quelques minutes à tout déballer, Alban s’arrêta enfin, légèrement exténué. C’était toujours aussi difficile de mettre des mots sur ce qu’il ressentait, en face d’une personne qu’il ne connaissait pas énormément. Mais comme lors des séances avec le Docteur Ghost, cela lui faisait du bien.
- Je comprends mieux. J’en connais, des cas, un peu comme le tiens. Alors je vais te proposer la chose suivante : nous allons y aller progressivement, avec ton Dracaufeu et toi. Tous les autres jeunes que j’ai reçus avant sont d’accord pour participer au moins à l’entraînement matinal que je dispenserai au cours des deux prochains jours, et je ne doute pas que ceux qui passeront après toi le souhaiteront aussi. L’après-midi sera plus libre, et permettra à chacun de faire ses propres programmes. Mais si tu le veux, je peux te proposer de passer plus de temps avec toi. J’ai bien conscience du fait que tu ais peur de revoler. Alors on peut y aller un pas après l’autre. Si tu sens que tu n’arriveras pas à monter sur ton Dracaufeu et à prendre de la hauteur, alors on va commencer petit. J’ai des harnais et un système que j’utilise dans mon complexe, pour les gens qui débutent. Cela leur permet de voler tout en étant parfaitement sécurisés, pour ne pas avoir peur de tomber. Ça peut être intéressant de commencer par là. Qu’en penses-tu ?Alban fut impressionné par la vitesse à laquelle Finnigan l’avait cerné. Non seulement il prenait en compte ses doutes et ses craintes, mais en plus il lui proposait un programme sur mesure ? C’était incroyable. C’était ça, un véritable expert. A côté, il faisait bien pâle figure. Normal que tous les autres compétiteurs aient décidé de s’entraîner avec lui, alors qu’ils avaient presque tous refusé de le faire avec Alban.
- Je pense que c’est une bonne idée. Je veux bien tenter l’expérience. - Super ! Alors je te donne rendez-vous comme à tous les autres demain, à 6h pétantes en salle de musculation. Profite de ta soirée pour te reposer et pour amener ton Pokémon jusqu’à son box, s’il en a besoin. Je m’occuperai de le nourrir si tu ne veux pas le faire toi-même. - Merci.Ils se saluèrent et Alban quitta le gymnase. En passant les portes, il se retrouva face à face à Cleith Clinton, le dresseur du Flambusard chromatique. Ce dernier lui fit un sourire.
- Salut ! Tu as fini avec Finnigan ? Je peux rentrer ?- Salut. Oui, tu peux y aller.Cleith le remercia et se dirigea d’un pas allègre à l’intérieur du gymnase. Alban le suivit des yeux quelques secondes, avant de refermer la porte. Cleith Clinton, hein ? Pas bien grand. Cheveux bruns. Visage aussi enthousiaste que celui de Khal ou d’Aaron. Pourtant… Il avait l’air de dégager quelque chose de réel. L’intuition d’Alban lui criait de s’en méfier. Ne souhaitant cependant pas risquer de se trouver en présence d’Azalea - qui passait juste après Cleith -, Alban pris la direction des box. Cela faisait un moment qu’il n’avait pas sorti Zénith. C’était l’occasion…
Sortant dans la partie en extérieur du Dôme, le châtain marcha jusqu’aux différents box qui s’alignaient. Par chance, ces derniers étaient assez larges pour respecter l’intimité de chaque monture. Alban salua vaguement les Pokémon qu’il connaissait de ses précédentes expériences, puis ouvrit la porte du dernier box, le plus à l’écart des autres. Là, il fit sortir Zénith qui se matérialisa dans un éclat rougeâtre.
Le Dracaufeu étendit légèrement ses ailes et ses bras pour s’étirer, puis recula de quelques pas. Alban lui tourna le dos, comme d’ordinaire. Il tendit sa main en arrière puis, après avoir reçu l’autorisation de Zénith de se retourner - signalée par un léger coup de museau dans sa paume -, le Voltali s’assit en face de son Pokémon.
- On y est enfin, hein… Demain, les choses sérieuses commenceront, Zen. Il lui raconta alors le programme qu’ils allaient suivre. Pendant une demi-heure, son Dracaufeu l’écouta sans broncher. Dans ses yeux, on pouvait y lire sa détermination. Ils allaient passer cette étape ensemble.
Un bruissement derrière lui, le fit cependant se retourner. Avec un mélange de surprise et d’exaspération, le châtain reconnut la chevelure et la démarche d’Azalea. Visiblement, cette dernière avait fini son entretien avec Finnigan. Sans y être invitée, elle vint s’asseoir tout près d’Alban.
- Alors c’est avec lui que tu vas participer, hein ? Je ne m’attendais pas vraiment à ça. Mais tu es un garçon plein de surprises, Alban Abernaty.Le Voltali eut un frisson lorsqu’elle vint poser sa tête sur son épaule, dans un geste affectueux et bien trop maîtrisé pour qu’il paraisse naturel. Il ne sut comment réagir. D’un côté, il avait envie de s’enfuir en courant. De l’autre… Azalea devait savoir qu’il n’était pas intéressé par elle, non ? Si c’était juste un geste d’amitié, il n’avait pas envie de la vexer.
Ce fut alors que quelque chose le percuta de plein fouet. Il renifla légèrement l’air pour s’en assurer, mais c’était la dernière chose à faire. Autour de lui, un très léger parfum fruité flottait. C’était une odeur qu’il lui semblait connaître. Une odeur qui le rendit brusquement plus calme, plus apaisé. Comme si la fragrance était exactement celle qu’il aimait le plus. Il ferma les yeux. Son cœur venait progressivement de se réchauffer, sans qu’il ne puisse l’expliquer. Cette odeur le faisait se sentir bien. Incroyablement bien. Doucement, son rythme cardiaque s’accéléra. Alors, Azalea redressa la tête et planta ses yeux océan dans les siens. Elle mordilla légèrement sa lèvre rose pâle et joua avec ses boucles blondes. Elle posa ses mains sur ses épaules et exerça une pression pour l’allonger dans la paille. Etrangement, Alban se laissa faire. Il était gêné par la situation, mais une inspiration supplémentaire et le parfum de la Kalosienne le rendait paralysé.
Il était à présent dos contre le sol. La jeune fille était au-dessus de lui, ses mains toujours posées sur ses épaules. C’était… dangereux. Plus elle se rapprochait, et plus le cerveau d’Alban semblait incapable de réfléchir. Elle était proche. Très très proche.
Zénith à côté d’eux éternua brusquement, et une volute de fumée noire vint les englober tous les deux. Se redressant maladroitement en toussant, Azalea et Alban se séparèrent. Le châtain jeta un bref coup d’œil à son Dracaufeu, qui lui fit un sourire en coin avant de tourner le museau d’un air nonchalant. Sauvé par Zénith.
Se relevant en restant à distance respectueuse d’Azalea, Alban sauta sur l’occasion pour s’éclipser et se sortir de cette situation délicate. Avec un bredouillement maladroit, le châtain salua la jeune fille puis s’en alla avant qu’elle n’ait eu le temps de retenter une attaque sournoise sur lui. Il ne voyait pas le visage qu’elle faisait à cet instant, mais il avait envie de mettre le plus de distance entre elle et lui. Bon sang… Qu’est-ce qui lui avait pris, de se laisser faire ? Il était pourtant sûr et certain des sentiments qu’il éprouvait, non ? Il savait qu’il n’aimait pas Azalea. Et il savait pertinemment qui est-ce qu’il aimait. Mais…
Il s’arrêta en plein milieu d’un couloir. Doucement, il redressa sa chemise et renifla l’odeur qui s’y était déposée. Le parfum fruité d’Azalea. Il ferma les yeux pour se laisser bercer par le moment. Il le savait maintenant ; il était juste dingue de cette odeur. Mais cela voulait-il dire qu’il commençait à avoir des sentiments pour la blonde ? D’un côté, il est vrai qu’il avait plus ou moins tiré un trait sur Maxine. Qui l’empêchait de laisser son cœur libre à qui parviendrait à le faire battre plus fort ? Il hocha la tête de droite à gauche. Il était juste perdu, c’était tout. Cela ne voulait rien dire. Cela ne voulait rien dire.
Alors, retournant dans la chambre qu’il partageait avec Rory, il enleva sa chemise et la jeta dans le bac de linge sale. Il n’avait pas le temps pour ce genre de stupidités. Il n’avait pas le temps de se laisser entourlouper par ses sentiments. Il avait une course à gagner.
***
Le lendemain aux aurores, Alban se présenta en salle de musculation en même temps que ses neuf autres concurrents. Il fit de son mieux pour ne pas être du côté d’Azalea, et alla plutôt se caler entre Jordan et Viktor, qu’il connaissait bien et qui l’accueillirent aussitôt dans leur cercle. Du coin de l’œil, il voyait que la blonde le scrutait. Il essaya de ne pas y faire attention et se concentra plutôt sur Zénith, qui venait de le rejoindre dans la salle en se déplaçant d’une démarche pataude et maladroite. Alban eut un sourire. C’était la première fois depuis longtemps que son Dracaufeu se retrouvait en présence de gens et de Pokémon qu’il ne connaissait pas. Le Voltali voyait bien qu’il était mal à l’aise. Mais d’un côté, ce serait une première étape à passer pour son acceptation de soi.
Finnigan entra à ce moment-là dans la pièce, une caisse dans ses bras. Derrière lui, un magnifique Dracaufeu chromatique doré aux yeux verts le suivait, se déplaçant avec bien plus d’aisance et de grâce que Zénith. Alban sentit immédiatement l’intérêt de Zénith croître derrière lui. Il lui donna un petit coup sur le museau pour qu’il se concentre de nouveau.
- Salut les jeunes ! Prêts pour 6h d’entraînement matinal avec moi ? Vous inquiétez pas, il y aura une pause toutes les deux heures. J’espère que vous avez bien pris votre petit déjeuner ; c’est le repas du guerrier. Bon ! Je suis content de tous vous voir en forme, en tout cas. Je ne l’ai pas précisé hier mais vous pouvez m’appeler simplement Finn. Coach Finnigan, tout ça tout ça, ça fait beaucoup trop formel. Et ça me fout un sacré coup de vieux, aussi. En tout cas, je vous présente Hegoa, mon Dracaufeu. C’est avec lui que j’ai fait toutes les courses qui m’ont rendu célèbre. C’est aussi mon acolyte de toujours et mon partenaire d’entraînement ! Le Dracaufeu chromatique inclina la tête docilement.
- Sur le papier que je vous fais passer, votre programme de la matinée y est inscris. Comme une séance de coaching muscu normale, je serai en face de vous en train de faire la même chose que vous. Il y a un miroir derrière-moi, donc vous pourrez vous voir et vous assurer que vous faites bien tout comme il faut. Sortez vos montures, prenez cinq mètres d’écart avec votre voisin… et en piste !Il appuya sur un lecteur radio, et une musique entraînante s’éleva. Alban s’écarta de Jordan et lu le programme dans son entièreté. Ola. Il risquait d’en baver carrément. Mais à côté de Jackie, ce n’était pas grand-chose. Il n’avait juste jamais eu Jackie en entraînement 6h d’affilée… En face de lui, Finn était déjà en train d’enchaîner la première série de pompes. Tout en continuant de parler et de les observer, ce qui relevait du véritable exploit.
- Eeet c’est parti pour une série de cinquante pompes. On descend bien. Bieeeeen, j’ai dit. Meilou, essaye d’avoir le dos un peu trop droit. Ouais voilà, c’est bien, super ! Les Pokémon, on suit la chorégraphie de Hegoa. Ouais, comme ça !Alban voyait le reflet de Zénith dans le miroir. Ce dernier, en même temps que les autres, suivait les mouvements du Dracaufeu de Finnigan. A savoir des genoux qui se montent, des bras qui s’étirent, des ailes qui se plient et se déplient, des cous qui roulent, des pas de courses sur place… Il semblait encore un peu maladroit mais, au fur et à mesure de l’entraînement, il apprivoisait de plus en plus son corps. Alban, de son côté, poussait sur ses bras pour faire les pompes comme Jackie le lui avait appris.
- Maintenant, on passe sur la série d’abdos. Allez, on y met l’effort et on se relève au maximum. Sentez vos abdos qui se contractent. Bien. Attention à votre cou et on y va !Cela faisait quelques minutes à peine qu’ils avaient commencé, et le t-shirt d’Alban était déjà trempé de sueur. Après les abdos, ils firent des flexions/extensions, ainsi que de la corde à sauter. Contrairement à beaucoup, le châtain se rendit compte qu’il pouvait plutôt bien gérer cet entraînement-là. Mais il lui restait encore plus de 5h dans les mêmes conditions… Déterminé néanmoins, il suivit le rythme de Finn. Au bout d’une heure d’échauffements intenses en tout genre, ils attachèrent des poids aux ailes de leurs Pokémon et ces derniers durent rester en vol stationnaire pendant une demi-heure, ailes bien tendues, pour se muscler. Pendant ce temps, les cavaliers devaient faire du saut de cheval pour leur permettre d’assouplir leurs bras et leurs jambes, ainsi que d’obtenir la détente nécessaire pour rester sur leur monture. Alban fut impressionné du programme d’entraînement de Finn. C’était vraiment différent du sien. Et tellement plus professionnel. Finn savait comment développer toutes les compétences nécessaires pour un cavalier et pour une monture. En dehors des échauffements, il se focalisait sur un point à améliorer, et le travaillait, le polissait, jusqu’à ce que les résultats commencent à apparaître. Alban était certain que 12h en deux jours seraient trop peu pour qu’il puisse récolter pleinement les bénéfices de cet entraînement, mais… c’était follement enrichissant. Il allait s’inspirer de Finn. S’inspirer de son coaching parfait, pour peaufiner le sien.
Deux heures plus tard, ils prirent leur première pause et Alban se déshydrata en vidant deux bouteilles. Il était parvenu - contrairement à beaucoup - à suivre parfaitement tout l’entraînement de Finn, mais quelque chose lui disait qu’il allait avoir du mal pour la suite. De son côté, Zénith semblait également épuisé. Alban s’approcha pour lui donner un cocktail sur vitaminé à base de baies qu’il faisait lui-même. Le Dracaufeu sembla récupérer un peu d’énergie grâce à cela. Et puis ils repartirent pour la suite. Finn leur fit travailler leurs fessiers à base de mouvements de danse et de gymnastique, visant à les muscler pour qu’ils puissent rester plus facilement sur le dos de leurs montures. Il se focalisa encore une fois sur le fait de muscler les jambes et les mollets, essentiels car ces derniers permettaient de donner, plus facilement que les mains et les bras, les impulsions nécessaires aux changements de direction en plein vol. Il leur fit boxer sur des sacs de sable pour peaufiner leur détente et leur force dans les bras et les poings. Alban sentait qu’il avait le cœur au bord des lèvres. C’était si intense qu’il devait se retenir de vomir. Heureusement, chaque fois qu’il pensait être à sa limite, Finn ralentissait l’entraînement ou leur demandait de prendre du repos, ou simplement de faire de la marche de récupération.
Du côté des Pokémon, Zénith suivait avec assiduité les différentes directives. Il travaillait pour se muscler les ailes, mais également les autres membres. Finnigan avait adapté le programme à chaque type de morphologie en prenant en compte la présence de pattes, d’ailes à plumes ou d’ailes membraneuses, de queues, de plus ou moins long cou… L’entraînement se passait bien. Quand enfin sonna l’heure de midi, cavaliers et montures s’écroulèrent sur un banc en soufflant de soulagement.
- Bien, vous avez été extra, les félicita leur expert.
Prenez quelques heures pour vous reposer et récupérer, puis entraînez-vous comme vous le souhaitez. Vous êtes tous restés pendant les 6h aujourd’hui, mais demain, vous pouvez choisir d’en faire autant que vous le voudrez. Voire même de ne pas venir, si vous pensez que vous n’en avez pas besoin. Profitez-en pour aller manger. Merci à tous !Ils se saluèrent et quittèrent la salle. Avant qu’Alban ne parte néanmoins, Finnigan posa une main sur son épaule.
- Alban. Rendez-vous dans deux heures, ça te va ? Ou tu veux plus de temps pour récupérer.- Dans deux heures c’est parfait. Je vais juste manger, prendre une douche et souffler un peu. Ça devrait aller.- Super, mon garçon. De toute façon on commencera doucement. Ce sera beaucoup moins physique que ce matin. Plus psychologique, par contre…Alban hocha la tête puis pris congé. Il retourna dans sa chambre, résista à l’envie de s’écrouler sur son lit, puis pris une douche froide. Zénith était retourné dans son box, où il irait sûrement faire une sieste après avoir mangé quelques croquettes. Puis, après s’être changé, Alban se dirigea vers le réfectoire en compagnie de Rory et de Chell. Là-bas, ils remplirent leurs plateaux et s’assirent à l’écart des autres. Azalea, déjà assise avec deux autres filles, lui lança un regard mais n’osa pas venir le rejoindre. Tant mieux. C’était le but.
- Alors, l’entraînement s’est bien passé ? lui demanda Rory en mangeant son coleslaw.
- C’était super intense. Mais c’était enrichissant. Et toi, Rory ?- Plutôt bien, oui. Les entraînements sont adaptés à nos handicaps, donc c’est pas trop dur non plus. Cet après-midi j’irai voler avec Sweetpea. C’est demain ma course, après tout…- Ah oui. Je suis désolé de ne pas pouvoir venir te voir. Mais Chell ira, lui, non ?- Oui !Rory éclata de rire.
- Mes parents seront là également. Chell, tu pourras rester avec eux, si tu veux. Ils seront sans doute en mesure de te voir, donc tu ne te sentiras pas seul. - Mais Rory… Tu n’as pas trop… peur ?Alban posa sa fourchette pour écouter la réponse de son colocataire. Le jeune garçon réfléchit quelques instants, avant de hausser les épaules d’un air désinvolte.
- Ça fait toujours peur. Les compétitions Paralympiques ne sont pas toujours égales. Chacun a un handicap différent. Chacun à un niveau plus ou moins grave. Je sais que le mien est plutôt dérangeant, quand on fait des courses aériennes. Mais je vais continuer de me battre. Parce que je veux gagner. Parce que je veux montrer que même avec une jambe en moins, il faut toujours s’accrocher. Alors toi aussi accroche-toi Alban, ok ?Il hocha la tête lentement, ne sachant que dire d’autre. Voir Rory lutter contre son handicap… ça le motivait. Mais d’un autre côté, ça le faisait se sentir minable. Car ce petit garçon. Cette si frêle chose… était tellement déterminée à se battre malgré tout, qu’il se sentait stupide. Lui qui n’avait eu qu’une blessure au genou, déjà résorbée depuis. Pourquoi avait-il mis autant de temps à récupérer, psychologiquement parlant ? Pourquoi n’avait-il pas eu la même envie de se battre que Rory ?
L’âme en peine, il se sépara de Rory et Chell pour retourner voir Finn. Cette fois-ci, leur entraînement se déroulerait dans le grand gymnase que Finn avait réservé pour lui, pour l’occasion. De toute façon, tous les autres allaient vouloir s’entraîner en extérieur. Les gymnases, ce n’était pas l’installation rêvée pour un coureur du ciel. Quand il le vit, le sourire de Finn s’effaça.
- Oh. Ça n’a pas l’air d’être la grande forme… je me trompe ? Tu as quelque chose sur le cœur, Alban ?- Non rien, tout va bien…Le coach le regarda d’un air suspicieux.
- En fait si. J’ai dans ma chambre un garçon qui participe aux courses paralympiques. J’ai l’impression de me revoir dans ce garçon. Les mêmes rêves. Les mêmes aléas de la vie. Mais contrairement à moi, lui, n’a jamais arrêté. Malgré son handicap bien plus lourd que celui que j’avais, il a continué. Ça me fait me sentir… je sais pas… minable… faible… lâche… Tout ça à la fois. J’ai l’impression que je me suis apitoyé sur mon sort, alors que d’autres sont dans des cas bien pires que le mien. Mais ils sont plus courageux. Bien plus que je ne le serai jamais.Il baissa la tête, honteux de ce qu’il venait d’avouer. Au lieu de le sermonner néanmoins, Finn posa une main sur son épaule.
- Et alors ? Le simple fait que tu le comprennes et l’avoue prouve que tu ES courageux. Ne reste pas figé dans le passé, Alban. Il ne faut pas que cette personne te fasse te sentir minable. Au contraire… Tu dois t’en inspirer. Tu dois grandir, toi aussi. Il y aura toujours des personnes dans des cas pires que le tien. Il y en a dans des cas pires que celui de ton ami. Mais est-ce pour cela que personne ne doit rien dire, rien ressentir ? Il faut t’en servir pour grandir, mon garçon.Alban regarda Finnigan avec admiration. Cet homme… Il comprenait tellement bien. Il parlait tellement bien. C’était ce genre de personne, qu’il voulait devenir. Il voulait être comme Rory. Il voulait être comme Finn. Il voulait s’inspirer de ces gens, et faire comme eux. L’éclat dans ses yeux sembla changer. L’expert lui sourit avec gentillesse.
- Bien. Maintenant que tu te sens mieux, allons-y.Il expliqua à Alban ce qu’ils allaient faire cet après-midi. Dans la salle rectangulaire, un système de poulies et de câbles avait été installé en hauteur. Alban serait rattaché à un harnais de sécurité, et il grimperait dans cette configuration sur le dos de Zénith. Ils voleraient ensuite autour de la pièce, à trois mètres de hauteur pour commencer, puis augmenteraient progressivement l’altitude. Le but pour Alban étant d’apprendre à vaincre ses craintes. Celui pour Zénith était de s’habituer à la présence d’un cavalier sur son dos.
Enthousiasmé par cette perspective qui lui permettait de reprendre doucement le vol, Alban s’attacha solidement avec l’aide de Finn. Puis, posant une main sur le cou de Zénith, il le regarda.
- Je pense qu’on y est, mon grand. Tu es prêt ?Le Dracaufeu grogna, et ploya les pattes pour être à la hauteur d’Alban. Avec aisance, le Pokéathlète enjamba le corps de Zénith pour aller s’assoir juste derrière son cou et ses ailes. Pour l’instant… ce n’était pas trop effrayant. Pas forcément aussi confortable que sur le dos de Cirrus, mais il se sentait plutôt apaisé. Bien qu’excité, évidemment.
- Ok. Maintenant, Zénith, tu vas te relever doucement. Accroche-toi bien, Alban, comme si tu n’avais pas de harnais. Mais ne t’inquiète pas, tu ne tomberas pas dans tous les cas.Alban hocha la tête et il donna un léger coup avec son pied sur le flanc de Zénith. Le Dracaufeu se leva d’un coup, et le châtain s’accrocha comme si sa vie en dépendait. Wow wow wow. Même ça, ça lui faisait peur. Essayant de se calmer, il prit une grande inspiration avant de demander à Zénith de s’élever.
Et là, ce fut le drame. Il se crispa autour de Zénith, tirant sur les brides du Dracaufeu par pur réflexe. Zénith se mit à grogner de mécontentement et il se cabra sous le coup de la douleur. Alban manqua de tomber en arrière et se rattrapa à ce qu’il put - à savoir un bout d’aile de Zénith -. Dans la confusion, il glissa du dos de sa monture et ses pieds se balancèrent dans le vide. Zénith pris son envol et commença à foncer droit devant lui, Alban toujours raccroché à lui, hurlant comme un possédé.
- Lâche-le Alban, lâche-le ! lui hurla Finn.
Prenant son courage à deux mains, Alban lâcha l’aile de Zénith. Il se sentit tomber mais, aussitôt, le harnais vint le stabiliser dans les airs. Avec un peu trop de violence qui lui déchira les aisselles. De son côté, Zénith eut du mal à freiner et alla s’écraser contre un mur du gymnase. La catastrophe.
- Alban, ça va ?!!!Finn se précipita vers lui et, avec l’aide de son propre Dracaufeu, il l’aida à redescendre. Alban était complètement tremblant. Le visage blanc, il se laissa tomber au sol, le front perlé de sueur.
- Ecoute. Pour un premier test, ce n’était pas aussi mauvais que tu le penses. Tu as réussi à me faire confiance et à lâcher ta monture. Tu dois être rassuré sur le fait que le harnais te retenait bien et que tu n’allais pas tomber, non ?Alban ne répondit pas. Il avait la bouche sèche et pâteuse. Certes, cette fois-ci, le harnais l’avait retenu. Mais que ferait-il si une telle chose se passait lors de la véritable course ? Ferait-il une chute qui lui serait mortelle ? Finn s’assit à côté de lui, tandis que Hegoa allait chercher Zénith pour le remettre sur pattes.
- Tu te sens capable de recommencer, ou as-tu besoin de plus de temps ?Alban regarda sa montre par réflexe. Il lui restait une journée et demie avant le jour fatidique. Il n’avait pas la possibilité de « prendre son temps ». Se forçant à être brave, il se redressa sur ses jambes tremblantes.
- Non. On recommence.***
La séance d’après-midi avait été plutôt compliquée. Après une dizaine d’essais, Alban était enfin parvenu à faire un tour de piste complet sur le dos de Zénith. Ce dernier semblait également s’améliorer dans son vol, qui était beaucoup moins brouillon, beaucoup plus précis. Mais à ce rythme, Alban ne savait pas s’il serait capable de voler lors de la course. Sans filet de sécurité. Sans harnais. Il avait l’impression de tout redécouvrir. Il se sentait crispé sur le dos de Zénith, ce qui ne lui était jamais arrivé avant. Il avait perdu sa faculté à voler sur le dos d’un Pokémon comme s’il y était né. Il n’avait plus cet instinct qui le guidait dans chacune de ses décisions. Il était devenu pire que lambda. Il était un novice complet.
Dépité par la façon dont tout ça s’était passé, il avait raccompagné Zénith jusqu’à son box. Le seul point positif dans cette histoire, était que son Dracaufeu n’avait plus peur de le blesser. Leur relation semblait être redevenue plus amicale. Avançant le museau pour venir réclamer une caresse, Zen ronronna avec puissance. Ce n’était pas comme ça qu’il avait imaginé tout ça. Mais dans les faits, ce n’était pas du côté de son Dracaufeu que tout ça coinçait.
C’était de sa faute. Et uniquement de sa faute.
- Ça va, mon grand… Je t’assure… Je suis juste un peu… fatigué, dit-il à Zénith face à ses grognements d’inquiétude.
Pourtant, au fond, il n’allait pas bien. Il n’allait vraiment pas bien. Il passait par les montagnes russes de l’émotion. Il voulait y parvenir. Il voulait se lancer. Puis tout redescendaIt et il sentait qu’il n’était toujours pas prêt. Malgré l’aide de Finnigan. Malgré les efforts de Zénith. Malgré l’admiration qu’il avait pour Rory. Malgré les encouragements de Chell… Il était nul. Juste nul.
Se dirigeant machinalement vers sa chambre, il l’ouvrit lentement. Chell déboula aussitôt devant lui.
- ALBA-aaaannn…Il s’arrêta en voyant l’expression sur son visage. Derrière lui, assis sur son lit, Rory attendait le verdict de sa première séance de vol.
- Alors, comment ça s’est passé ? lui demanda-t-il avec un grand sourire, qui s’effaça aussitôt lorsqu’il capta le regard d’Alban.
Ce dernier pris une grande inspiration.
- Pas vraiment bien. Ecoute, Rory… Je pense qu’au final… Je n’en suis pas encore capable… Alors je vais simplement demander à me retirer de la course. J’ai besoin d’un peu plus de temps. Je croyais que j’y arriverai, mais je fais encore un blocage psychologique et-…Il s’interrompit lorsqu’il vit l’expression de Rory. Ce dernier se leva d’un bond.
- Non, non, non et non. Tu ne peux PAS dire ça Alban. Pas à moi. Pas juste avant MA course. Il se rua vers Alban et, de toute la force de ses petits bras, le poussa vers l’arrière. Alban recula à peine d’un pas, mais il sentit que la situation dégénérait.
- J’ai toujours été un grand fan de toi, Alban ! Tu étais… tu étais inspirant pour tous les jeunes comme moi. Tu as prouvé qu’on pouvait devenir une étoile même en étant aussi jeune. J’ai toujours voulu te rencontrer. Je me suis dit que ce serait super, lorsque j’arriverai à te parler. Mais toi, toi… tu n’as plus rien du grand champion que tu étais. Tu es juste devenu un lâche, un nul ! Un type qui abandonne. Où sont tes belles paroles ? Celles que tu disais aux journalistes pour inspirer des dizaines d’enfants comme moi ?! Celles qui disaient qu’il ne faut jamais abandonner, qu’il faut toujours s’accrocher, car les efforts payent tôt ou tard. Qu’il n’y avait pas de talent sans travail. Hein ? Il est où, cet Alban-là ?! Devant moi, je n’ai qu’un… qu’un… T’es qu’un LÂCHE ! Je te DETESTE ! Si tout ce à quoi je me raccrochais grâce à toi n’était en fait que du vent. Si tout ce que j’ai fait jusqu’à maintenant était basé sur tes mensonges. Alors à quoi ça sers que moi je CONTINUE ?!Sans lui laisser le temps de réagir, Rory ouvrit la porte à la volée et s’enfuit aussi vite qu’il le pouvait à travers le couloir. Alban ne sut que faire, à cet instant. Il se sentait mal. Mal de ces vérités blessantes que Rory venait de lui hurler. Mal d’avoir blessé ce petit bonhomme qu’il appréciait temps. Mal d’avoir peut-être gâché sa course du lendemain… Il… Il gâchait toujours tout. Toujours tout.
Donnant un grand coup de pied dans la porte, Alban hurla de rage. Ce n’était pas la première fois que ça lui arrivait. Mais il ne voulait pas penser à la dernière fois. Il ne fallait pas qu’il pense à Max. Pas quand il était, dans cet état là…
Une main se posa sur sa joue, et il redressa la tête. Même s’il n’était pas capable de pleurer, ses yeux décrivaient toute sa douleur. Chell, devant lui, le regarda avec un sourire triste.
- Rory a raison, Alban. Il ne faut pas que tu abandonnes. Il faut que tu y arrives. Parce qu’au fond… C’est ça que tu aimes, non ? C’est ça que tu veux faire, pas vrai ? De quoi… as-tu peur ?De quoi avait-il peur ? Les mots firent tilt dans sa tête. Il se figea. Au fond… De quoi avait-il peur ? De beaucoup de choses, c’était certain. Mais quel était le plus gros blocage qu’il avait fait, jusqu’à maintenant ? Au-delà de la peur de tomber. Au-delà de la peur de se blesser à nouveau.
La peur d’être mauvais.
Mais il l’avait dit lui-même. Le talent n’existait qu’avec le travail. Il était redevenu mauvais et novice, et alors ? Avec du travail… Il pouvait rattraper ça. Il ne partait pas vraiment de zéro. Il avait des compétences, un don. Quelque chose qu’il avait refoulé depuis bien trop longtemps. Il avait mis un verrou sur certaines zones de son cœur. S’il arrivait à les lever… Qu’arriverait-il à faire ? Que parviendrait-il à faire si son corps redevenait aussi libre qu’il l’avait été ? Si… S’il se faisait confiance ?
Il ne réfléchit pas une seconde de plus. Rory était probablement sorti quelque part dans le dôme, et Alban serait incapable de le retrouver sans aide. Il prit son courage à deux mains et dévala les escaliers pour se diriger jusqu’au box de Zénith.
Il réveilla son Dracaufeu d’un coup de coude.
- Hey mon grand. J’ai besoin de ton aide.Il attrapa les brides et les passa autour du museau de Zénith. Puis, il grimpa avec souplesse sur son dos.
- Ok. C’est parti.(suite au prochain post)