Alternance Eleveur #1 (5)
|
RP Solo Ce jour-là, Alban se leva avec une sensation douce-amère en bouche. Parfaitement réveillé néanmoins, il s’assit sur son lit et embrassa du regard la petite chambre qui avait la sienne durant ces deux dernières semaines.
L’odeur du bois de sa maison à Lavandia allait lui manquer. De même que ces rideaux rouges, qu’il ouvrait tous les matins aux aurores. De même que ce petit lit qu’il avait partagé avec ses Pokémon. De même que la présence d’Idalienor au petit déjeuner. On avait beau dire ce qu’on voulait, on ne pouvait nier que deux semaines permettaient de créer des petites habitudes. Le temps était passé en un battement de paupière, mais le châtain avait apprécié chaque seconde en compagnie de sa camarade Pyroli. Et il en était de même pour la Pension de la Route 117.
Après avoir dit au revoir à Idalienor, qu’il n’allait plus revoir jusqu’à qu’ils se retrouvent tous les deux sur Alola ou sur Lansat, le jeune Coach avait pris son chemin habituel jusqu’à son lieu d’Alternance. Il se souviendrait de tout, ici. Du bruissement agréable des feuilles. De la différence de pureté de l’air, lorsqu’il arrivait en plein milieu de la route entre Lavandia et Vergazon. Le gazouillement des Pokémon de la Pension qui se réveillaient lentement.
Il ouvrit la petite porte du bâtiment principal, faisant tinter la clochette. Ce bruit aussi, lui manquerait. Même s’il avait râlé dès qu’il l’entendait, parce qu’il annonçait l’arrivée d’un client plus ou moins mécontent. Alban avait fait de belles rencontres, ici. Il avait passé d’excellents moments.
- Salut, Alban !Il redressa la tête et adressa un sourire à Tomas. Tomas était probablement la personne qui allait le plus lui manquer. Tomas et sa bonne humeur contagieuse. Tomas et ses bons conseils. Tomas et son humour parfois sarcastique, qu’Alban adorait puisqu’il correspondait au sien. Même en deux semaines, le châtain pouvait considérer son aîné comme un « ami ». Le mot était peut-être fort, puisqu’ils n’avaient été que des collègues, au final. Mais c’était celui qui correspondait le mieux à l’Eleveur. Et peut-être celui qu’Alban voulait employer, même s’ils n’avaient jamais vraiment mis de nom sur leur relation.
Après avoir discuté un peu avec Tomas, Alban se dirigea vers le jardin du domaine. L’immense étendue de gazon verdoyant, avec ses arbres, sa petite mare, et les Pokémon paisibles qui s’y reposaient. Il s’approcha des Pokémon et les caressa doucement, leur murmurant des salutations d’un ton serein. Ces Pokémon n’étaient pas les siens. Ils n’avaient d’ailleurs jamais été les siens. Mais au fil du temps, un respect et une confiance mutuelle s’était installée entre eux. C’était comme prendre un Pokémon en Coaching pour quelques semaines. Le Pokéathlète savait que ce n’était que temporaire. Qu’à la fin du temps imparti, il devrait rendre le Pokémon. Mais ça lui faisait toujours un pincement au cœur.
Avec nostalgie, Alban se demanda si Spike allait bien. S’il s’entendait toujours aussi bien avec Orren, et s’il était heureux, où qu’il soit. Le châtain n’avait plus eu trop de contact avec son ancien Préfet, lorsque ce dernier avait quitté l’académie. Il n’avait pas osé le déranger. Pour dire quoi, après tout ? Il ne s’était jamais senti aussi proche d’Orren qu’il pouvait l’être d’Aaron ou de Calliope, par exemple. Il savait qu’il avait pu compter sur lui lorsqu’ils étaient dans le même dortoir, et qu’ils étaient peut-être proches d’être ce qu’on appelait des « amis ». Mais il ne savait pas du tout si leur lien était assez fort pour qu’il n’ait pas l’impression de le déranger. Le brun faisait probablement partie de ces personnes qui vont et qui viennent, laissant une empreinte assez marquante, certes, mais avec qui on perdait tout contact une fois sortis de votre vie.
Il soupira. Ce n’était probablement pas le moment de penser à ça, alors qu’il allait justement se séparer des trois Eleveurs qui s’étaient si bien occupés de lui pendant ces deux dernières semaines. Doucement, il se dirigea donc vers Alicia, dont il voyait la silhouette, au loin. La jeune fille avait réussi à s’habituer à sa présence, après quelques jours à l’éviter. Pour autant, elle était toujours aussi peu bavarde lorsqu’ils n’étaient que tous les deux. Alicia, c’était un peu la grande énigme d’Alban, lors de cette Alternance. Il n’arrivait pas à savoir si elle l’appréciait ou non. Et pourtant, ses sentiments se voyaient comme le nez en plein milieu de la figure. Après tout, il n’y avait qu’à l’observer lorsqu’elle épiait Tomas. Au fond, Alban non plus ne savait pas s’il l’appréciait particulièrement. Elle n’était pas vraiment intéressante et, avouons-le, le fait qu’elle ne lui parle pas coupait court leurs échanges. Elle n’était pas méchante pour autant, mais était-ce suffisant pour dire qu’on appréciait quelqu’un ? Probablement que non.
- Bonjour Alban. Dernier jour, pas vrai ?Un sourire se dessina malgré tout sur ses lèvres. Ce n’était pas forcément les meilleurs amis du monde, certes. Ils n’étaient peut-être d’ailleurs même pas amis. Mais le calme et la douceur d’Alicia allaient lui manquer malgré tout. Cette fille était douée pour s’occuper des Pokémon, c’était indéniable. Et pouvait-on vraiment ne pas aimer une personne qui adorait autant les Pokémon ?
Alban s’assit en face d’elle et décida qu’aujourd’hui, il allait peut-être faire l’effort de lui parler un peu plus. Peut-être se heurterait-il à un mur ; il ne savait pas. Mais au moins avait-il envie de se dire qu’il avait tout fait pour que les choses marchent bien entre eux. Et peut-être qu’Alicia sentait également que le moment des adieux impliquait qu’il fallait donner un peu plus de sa personne, d’ailleurs. Car, pour la première fois en deux semaines, elle ne lui répondit pas par monosyllabes.
Et Alban se rendit compte qu’en grattant un peu sous la surface, Alicia aussi pouvait être une personne intéressante.
Après avoir bien parlé avec elle, il se dirigea cependant vers la couveuse. De tout le séjour, ça avait été son lieu favori. Celui où il avait rencontré pour la première fois ses compagnons, avec qui il avait pu travailler sur son sujet d’Alternance. Celui dans lequel il passait peut-être le plus clair de son temps, si on ne prenait pas en compte le jardin du domaine. Un lieu serein, paisible, où flottait constamment un plaisant parfum de tranquilli-
- AAAAAAAAAAAAHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHH !Tranquillité… Enfin. Uniquement lorsqu’Isaac n’était pas dans les parages.
Blasé, Alban regarda impuissant la scène qui se déroulait presque tous les matins, de façon inexorable. Le responsable de la Pension qui se casse la figure en entrant dans le bâtiment des petits. Les bébés Pokémon qui se réveillent en sursaut et pleurent ou hurlent parce qu’évidemment, personne ne souhaite être tiré des bras de Morphée de cette façon. Et Alicia, Tomas et Alban qui se ruent vers eux pour les calmer. Ça aussi, ça allait lui manquer.
- Bonjour Isaac… soupira le châtain, en aidant son tuteur à se relever.
Il lui tendit la main qui ne tenait pas déjà un bébé Azurill, et sourit. Bah. C’était son dernier jour. Il pouvait bien passer outre, pour une fois.
***
La journée était passée comme toutes les autres. Et, le soir venu, Alban et les autres s’étaient réunis dans leur salle de repos, pour se dire au revoir pour la dernière fois. C’était le moment des adieux. Et honnêtement, Alban n’avait jamais été très doué pour ça.
Mal à l’aise, il regarda les trois adultes qui étaient face à lui. Il espérait qu’on ne lui demanderait pas de discours. Simplement partir était déjà assez dur pour lui. Il ne voulait pas qu’on lui rende les choses encore plus difficiles.
Par chance cependant, Isaac et Tomas avaient réussi à bien le cerner lors des deux semaines passées ensemble. Ainsi, il n’y eut pas de discours gênants. Pas de monologues à rallonge, vantant les travaux exceptionnels d’Alban, ou toutes les choses creuses qu’on pouvait vous dire, lorsqu’il était temps de partir. Juste… Un cadeau. De la part des trois Eleveurs. Et une petite carte avec des mots. Ces mêmes mots qu’ils avaient écris pour ne pas qu’ils se perdent. Parce que les dire dans ce genre de situation, finalement, leur ferait perdre la valeur qu’ils avaient.
Le châtain battit des paupières pour ne pas lâcher une petite larme. La seule chose qui lui permettait de ne pas être complètement déprimé était la perspective de retrouver Maxine, d’ici quelques heures, après un long trajet dans son élément. Bon sang… Ces trois lascars allaient lui manquer.
Et, pour ne rien arranger, la porte arrière s’ouvrit et les bébés Pokémon dont il s’était occupé durant tout le séjour déboulèrent vers lui pour le couvrir de câlins. Cette fois, le châtain craqua. Entre rires et larmes, il essaya de blottir tout ce petit monde contre lui. Les Azurill, les Okéoké, les Mélo, les Togépi, et les Rozbouton. Il espérait que ces Pokémon grandiraient bien, et qu’ils auraient une vie heureuse. Après tout, que pouvait-il souhaiter d’autre pour eux ?
C’était enfin le moment des aux revoir définitifs. Ce moment où on se fait la bise, où on se prend parfois dans les bras. Celui où on adresse ses dernières phrases. Ou, comme ici, ou le silence fait foi de l’attachement qu’on avait les uns pour les autres.
Zénith descendit du ciel et vint se poser à côté de lui. Le Dracaufeu, splendide dans le soleil couchant, lâcha une volute de fumée par les narines pour le presser de grimper sur son dos. Il n’y avait plus rien qu’il puisse faire ici, pour le moment. Probablement reviendrait-il. Un jour. S’il le pouvait. Mais en attendant, sa place était autre part.
Alors, enfourchant sa monture, Alban adressa un dernier signe de main à ses collègues. Puis, avec un dernier sourire, il s’envola.
Une page était toujours si dure à tourner. Pour autant, cela ne voulait pas dire que le livre s’arrêtait. Peut-être reviendrait-il un jour à ce chapitre. Qui sait…
Après tout, la suite de l’histoire n’était pas encore écrite.