Un profond sommeil |
Est-ce que tu es un enfoiré ? Probablement.
Le fait est que durant ces six mois passés loin de la Pokemon Community, tu n'as eu pour ainsi dire aucun contact avec tes amis s'y trouvant encore. Les seules personnes à qui tu parlais encore, c'était ta famille, Nikolas et Alex ainsi que les quelques collègues de mission avec lesquelles tu as évolué et Ryan, qui a enfin réussi à te convaincre de le revoir, un moins un peu. Autant dire que tu es devenu un fantôme pour eux, un déserteur, peut-être même un traître. Certes, tu avais pensé à envoyer un message par Ipok à chacun, mais tu n'avais même pas pris la peine de maintenir un contact avec eux. Y avais-tu seulement penser ou t'étais-tu simplement décidé à les mettre de côté, que ça soit par peur de leur jugement ou simplement pour ne pas leur faire subir plus longtemps ta connerie ? À vrai dire, même toi tu n'en savais rien. Cela pouvait être tout en même temps comme être quelque chose de totalement différent. Le fait est qu'en quittant l'académie, tu avais plus ou moins abandonné toute ta vie – à l'exception faite de tes compagnons Pokémon qui étaient de toute façon bien décidés à te suivre jusqu'au bout de la terre – et ce, de ton propre gré. Le fait est qu'aujourd'hui, tu le regrettes encore. C'était un choix égoïste et conduisant nécessairement à te causer du tort, à en causer aux autres. Peut-être que certains avaient choisi de t'oublier pour ne pas avoir à souffrir de ton départ, ou peut-être s'en fichaient-ils royalement, qui sait ? En tout cas, ce fut une décision qu'après coup, tu regrettas amèrement et qui te travaillas grandement. Malheureusement, plus qu'occupé par les fouilles avec Nikolas et bien trop honteux de ton comportement, tu passas les quatre premiers mois à mettre ceci de côté, omettant même l'existence de certains sans t'en rendre compte.
Puis il y eut les événements de fin Juin.
D'un seul coup, tout ce que tu avais refoulé te revint en pleine face. Que foutais-tu bien pépère chez toi, à Oliville, alors que tes anciens camarades, pour certains des amis – proches ou non - s'étaient retrouvés mêlés à une quasi guerre civile. Tu n'as jamais osé le dire, mais cela t'a extrêmement bouleversé au point d'en être tiraillé plusieurs jours, essayant de ne pas t'arracher les cheveux pour te repentir de ta stupidité. Si seulement tu avais été là … Sans doute que tu n'aurais rien pu changer, mais au moins, tu aurais pu être aux côtés de tes amis, pour les soutenir et les protéger. Tu n'avais pas vécu en direct le chaos qui avait eu lieu sur l'île, mais rien que d'y penser, ton cœur se serrait. La souffrance qui les envahissaient certainement devait être immense. Certains même étaient peut-être traumatisés pour toujours. Quoiqu'il en était, même s'ils avaient sûrement des proches ou d'autres amis pour les soutenir, toi tu n'étais pas là. D'une part, cela te frustrait grandement, d'autre part, tu te sentais encore plus honteux de ne pas être présent. Tu te sentais le pire des salopards à te trouver si loin d'eux dans un moment comme celui-là … Tu eus envie de les rejoindre immédiatement, de ne prendre que l'essentiel avec toi pour aller les retrouver sur Cobaba, où ils avaient élu refuge pour quelques temps, mais était-ce vraiment une bonne idée ? Débarquer comme une fleur et venir les retrouver sans explication ? Tu te rétractas assez vite, gagnant encore un peu de frustration vis-à-vis de la situation.
Heureusement, l'invitation de ton futur maître de stage tomba à pic.
Tu pus donc finalement te rendre sur Cobaba à la mi-Juillet et t'y posas quelques temps pour aller retrouver ceux que tu connaissais. Si tu en retrouvas une bonne partie, recevant au passage quelques remarques plus ou moins acerbes doublées parfois d'une gifle ou d'une attaque dans le style, il en resta tout de même certains manquant à l'appel. Bien sûr, tu t'en doutais pas mal, puisqu'il s'agissait de leurs vacances d'été après tout – ils devaient être rentrés chez eux pour profiter de leurs familles – mais malheureusement pour toi, c'était aussi les plus importants pour toi. Mais surtout, il en manquait un en particulier – enfin deux si on comptait Sirius, mais on te fit savoir qu'il était à l'hôpital et qu'il valait mieux le laisser se remettre de ses blessures donc tu ne cherchas pas plus loin -. Ginji. Impossible de savoir où il se trouvait. Après plusieurs jours passés sur Cobaba, personne n'était en mesure de savoir ce qu'il devenait. Tu tentas de l'appeler plusieurs fois, en vain. À chaque fois, tu tombas sur sa messagerie, ne parvenant pas à trouver l'envie de lui laisser un message vocal. Finalement, tu passas le reste du mois de Juillet et une partie du mois d'Août à essayer de le contacter aussi régulièrement que possible – pas trop non plus, tu ne tenais pas à le harceler non plus – avant de commencer à te résoudre à abandonner.
Sauf qu'un jour, quelque chose changea.
Lançant l'habituel appel, espérant une réponse quelconque, tu tombas presque aussitôt sur la messagerie et lâcha un nouveau soupir de dépit, t'apprêtant à raccrocher. Sauf qu'un détail te retint. Subitement, la voix de Ginji qui jusqu'ici rythmait la messagerie avait été remplacé par une voix autrement plus féminine, plus douce. Plus mature aussi. Il s'agissait de Caroline Labelvi, la sœur de Ginji, qui t'informa via ce message vocal que Ginji était actuellement hospitalisé. À cet instant, ton cœur s'était crispé. Ginji, hospitalisé ? Mais que lui était-il donc arrivé ?! Il n'avait pourtant pas été fait mention de blessés assez graves pour se trouver si longtemps à l'hôpital, si ? Bon, c'était probable que tu aies omis cette partie, mais qu'importe, Le choc et l'inquiétude t'envahit. Presque immédiatement après avoir raccroché, tu appelas au numéro donné pour en savoir plus, obtenant assez facilement cette Caroline au bout du fil avec laquelle tu discutas un peu, pensant tout de même à te présenter comme un ami – du moins un très bon camarade – de Ginji. En disant cela, tu serras intérieurement les lèvres, te demandant si tu n'étais pas en train de mentir à sa sœur mais aussi à toi-même. Tu préféras ne pas te laisser aller au pessimisme et te convainquit que c'était le cas, parlant donc avec la jeune femme comme si c'était le cas. Finalement, tu pus prendre connaissance de la position de Ginji et fit au plus vite pour te rendre là où il se trouvait une fois l'appel terminé. Tu ne pris que le nécessaire, te préparant tout de même éventuellement à passer au moins deux ou trois jours sur place avant de repartir.
Le trajet jusqu'à Rivamar fut relativement court.
Du moins, plus qu'absorbé par Ginji et comment tu allais le trouver en arrivant, tu ne vis pas le temps passer et n'en reprit conscience qu'une fois le fameux phare de la ville en vue. Arrivé sur place, tu ne pris pas la peine de passer par la case hôtel et partit aussitôt rejoindre l'hôpital pour t'enquérir au plus vite de l'état du Voltali. Marchant d'un pas tremblant mais très fougueux, c'est légèrement essoufflé que tu parvins, la gorge à moitié nouée, devant la porte de sa chambre. En y pensant, tu n'avais même pas pris de cadeaux pour le saluer s'il se trouvait réveillé lorsque tu arriverais. Après hésitation à faire demi-tour pour aller régler ce problème, tu te décidas simplement à pénétrer dans la pièce et à aviser ensuite. D'un seul coup, tu sentis l'atmosphère passer de la chaleur de l'hôpital au morbide du calme quasi mortuaire de la chambre. Pas un son, si ce n'est les bips réguliers des cardiogrammes, ne venait perturber le silence accablant qui régnait en ce lieu. Aucun doute pour toi : malheureusement, ce n'est pas avec un sourire que tu retrouverais ce cher Ginji. Affichant une mine dépitée, tu t'avanças dans la pièce et découvrit alors les deux êtres, disposés délicatement sur leurs lits respectives, équipés comme il faut en tuyaux diverses pour les maintenant en état. En les voyant, tu eus un espèce de haut-le-cœur. C'était un spectacle désolant rien que d'y penser, mais ça l'était encore plus en réalité. En les fixant en silence, ne sachant quoi faire d'autre, tu eus une montée de tristesse qui t'obligea à prendre un temps pour empêcher tes larmes de couler. Finalement, après deux bonnes minutes à prendre le temps de contrôler tes émotions, tu finis par poser tes affaires au sol te rapprocha au maximum de Ginji, fixant l'infirmière venue s'assurer que tu n'étais pas un être malveillant. Tu observas alors longuement le visage à la fois calme et bien triste du jeune homme dans le coma, et resta ainsi bloqué plusieurs secondes avant de sourire très légèrement, tentant de relativiser comme tu pouvais.
Content de voir que tu es en vie.
Purée. Lucas. Tu eus de la chance qu'il ne pouvait pas t'entendre, car tu aurais sûrement eu trop honte pour rester aux côtés du Voltali après ça. Enfin, c'était sans doute la seule chose à dire à son propos pour rester positif, mais pour toi, c'était une offense pour lui qui était encore dans le coma. Tu soupiras face à ta propre connerie et tu reculas, te posant sur une chaise proche du lit de Ginji pour respirer un peu. Maintenant que faire ? Tu ne pouvais qu'attendre quelque chose, un signe de la part du jeune homme. Au moins, pour les prochaines heures voir les prochains jours, tu serais présent pour accueillir le spécialiste type électrique s'il venait à revenir à lui.
C'était de toute façon le mieux que tu pouvais faire dans l'immédiat pour lui …
Ginji...Son répondeur Yuna Akabara Musique |
Son sac était lourd de tous les flyers que la rousse devait distribuer aujourd'hui. Et lourd de plantes, des échantillons plein les poches pour donner un avant-goût aux clients de demain peut-être, futurs patients de Carole.
Algernon ouvrait la voie, guidant sa dresseuse à travers ce dédale qu'était Rivamar. Pas le temps de visiter encore mais cela ne saurait tarder. Après avoir prospecté l'hôpital peut-être ? De toute façon, la ville ne semblait pas bien grande, elle en aurait vite fait le tour mais s'orienter relevait toujours de l'exploit pour la rousse, à tel point qu'elle préférait se fier à son starter qu'à son propre sens de l'orientation.
Django fermait la marche. Au cas où qu'un feu quelconque était nécessaire pour les-dits échantillons mais Carole avait été très claire sur la manière de consommer ces herbes : la fumée était plus néfaste même pour ce produit médical, alors les tisanes et autres concoctions étaient à privilégier. Ou avec des vaporisateurs à la limite. Pour les médicaments créés par Carole, il faudrait que les clients se déplacent d'eux-même. Il fallait bien les fidéliser, après tout.
Et à ses côtés, Chayana qui supervisait l'opération de groupe, prenant à cœur cette alternance, plus encore que Salomé elle-même. Même si la Germignon émettait quelques doutes concernant les récoltes de Carole Franck, difficile de nier les vertus thérapeutiques qui accompagnaient ces herbes, au même titre que leur côté récréatif malheureusement. Et c'était cela que le type Plante déplorait le plus.
Le Picassaut s'arrêta face à un immense bâtiment dont le blanc tirait sur le gris. À n'en pas douter, c'était là l'hôpital. La demoiselle ne savait pas comment procéder ; interpeller les patients de manière hasardeuse ? Ou se renseigner sur leurs maladies pour pouvoir les conseiller au mieux ?
Il allait falloir qu'elle improvise. Comme toujours.
La Médecin se faufila à l'intérieur, jetant un coup d’œil sur ceux qui attendaient, depuis longtemps peut-être, et se dirigea vers un panneau indicatif recensant l'intégralité des services.
— Les cancéreux, c'est bien pour ce qu'on vend, déclara la rousse à l'intention de ses Pokemon, ça fait partie des patients que Carole m'a dit de cibler.
Aujourd'hui, Salomé pensait commerce avant tout.
Il n'y avait pas la place pour de l'empathie ou de la compassion pour tous ces malades. Juste la place pour des chiffres et du rendement. La voici commerciale d'un jour pour vendre un peu d'espoir et de rêves à tous ces malades.
Est-ce que cela fonctionnait réellement comme traitement ?
Aucune idée, la rousse n'était pas allée jusqu'à vérifier.
Mais cela restait des plantes avant tout donc rien de nocif ne pouvait en sortir, non ?
La demoiselle grimpa les escaliers quatre à quatre, s'arrêtant au premier niveau qui paraissait être celui des soins intensifs. Pourquoi ne pas faire un léger détour avant de s'occuper de ses futurs clients ? Après tout, il y avait des malades partout, distribuer des échantillons à cet étage ou au suivant, cela revenait un peu au même.
Ses pieds foulaient ce sol trop propre seulement perturbé par des aides-soignants qui ne prêtaient guère attention à la Médecin. Elle ne savait pas bien si elle avait le droit d'être là mais les portes entrouvertes étaient telles des invitations à entrer pour la Médecin. Alors elle n'en attendit pas davantage, se ruant sur la première chambre et sur l'heureux élu de son traitement bio qui ne pourrait qu'apporter un peu de bonheur à ce comateux.
Le bruit des machines ne cessait de briser le silence auquel Salomé s'était peu à peu habituée. Elle s'approcha et avisa le corps étendu sur le lit ; il paraissait dormir et rien d'autre. La gitane fit le tour du lit pour finalement en sortir un échantillon de sa poche ;
— Ça a pas l'air d'être fameux pour toi, l'ami. Mais promis, avec ce cadeau de la part de Carole Franck, tu t'en sortiras... Peut-être, déclara-t-elle tout en glissant un échantillon d'herbes sous l'oreiller du malade telle la petite souris des temps modernes, t'oublieras pas à ton réveil, hein ? C.A.R.O.L.E. F.R.A.N.C.K. Au pire, y a sa carte d’agrafé sur le sachet, comme ça t'auras aucune raison de pas venir faire tes courses chez elle ! En plus pour 100 grammes achetés, t'as 10 grammes d'offert ! Franchement, tu trouveras pas mieux ailleurs.
Seul le bip répétitif lui répondit.
Encore.
Et encore.
Elle ne quittait pas des yeux ce corps inerte. Ou futur cadavre, elle n'aurait su dire. Le pauvre était bien blême, presque déjà mort au vu de sa tête qui faisait peine à voir.
Elle souleva à nouveau l'oreiller, récupérant le sachet finalement.
Elle n'avait peut-être pas choisi le meilleur client.
— Non mais autant que ça serve vraiment à quelqu'un en fait. C'est pas que j'ai pas confiance en tes qualités pour vivre mais... ben si en fait, je crois que tu vas finir par mourir, alors ce serait dommage de gâcher ! J'ai pas envie de faire perdre des clients à Carole en misant sur les mauvais patients ! Puis c'est mon premier jour d'alternance alors si je fais n'importe quoi, ça craint un peu.
Elle rangea le sachet au chaud avec les autres, dissimulant toute trace de son passage avec ce simple geste. Elle s'éloigna du lit, face à la porte pour s'en aller avant de lâcher finalement :
— C'est que Carole vend seulement aux vivants, pas aux morts ou aux presque morts.
Là elle referma la porte complètement, croisant le regard noir de sa Germignon visiblement peu satisfaite de cet échange sans que sa dresseuse ne comprenne où était le problème. Elle se trouvait même bonne prospectrice, même s'il est vrai qu'elle avait mal choisi sa clientèle.
Non vraiment, les comateux étaient à éviter ; c'était Carole qui avait raison, cibler les cancéreux entre autres et oublier tous ceux incapables de respirer sans tuyaux.
Salomé n'avait même pas fait un pas qu'aussitôt les bips s'accélérèrent dans la chambre qu'elle venait de quitter. Elle leva les yeux au ciel en voyant des infirmiers se précipiter auprès du malade.
— Là ! Tu vois bien que je l'avais dit qu'il allait pas vivre encore longtemps ! Et après c'est toi qui me reproche de mal faire mon travail... Pfft !
La rousse s'éloigna, ne laissant pas même le temps à cette frénésie de bips de se taire ou à défaut de ralentir le rythme. Cela lui vrillait suffisamment les tympans, hors de question de rester plus longtemps pour savoir le fin mot de l'histoire. Non, mieux valait monter d'un étage, le bon, celui avec ses futurs clients et s'éloigner de ce secteur maudit.
Le corridor n'en finissait pas de s'étendre et la valse endiablée qui avait strié ses oreilles quelques minutes plus tôt avait fini par s'éteindre. Ce doux silence la reposait.
Mais une voix interrompit ce flot de calme. La demoiselle s'arrêta face à une porte complètement fermée cette fois-ci. Il lui semblait avoir reconnu une voix familière. Une voix un peu pleurnicharde. Et un peu peureuse aussi. Difficile de faire comme si de rien n'était et même si Chayana tentait de faire avancer sa dresseuse en la poussant, la Germignon faisait du sur place avant tout et ses efforts étaient bien inutiles. La Médecin posa son oreille contre la porte trop blanche à son goût, tentant de percevoir des bribes de conversations. Et surtout l'identité de son interlocuteur.
De nouveaux mots s'échappèrent à travers la chambre, juste suffisamment pour confirmer le pressentiment premier de Salomé. Elle ouvrit la porte, sans toquer, sans s'imaginer une seule seconde qu'elle interrompait peut-être là une conversation privée.
Qu'est-ce que le blondinet pouvait bien avoir de si confidentiel à dire à un comateux, après tout ?
— Haru !
Et c'était bien lui. Ses sens ne l'avaient pas trompée. Et à ses côtés, des Pokemon plus que familiers à la rousse. À commencer par le Roigada qui n'avait rien perdu de ses bonnes manières, s'avançant déjà vers la rousse pour un potentiel baise-main qui fut accueilli par une Salomé trop préoccupée par la présence de son ami ici pour s'attarder plus longtemps sur le Pokemon, l'ignorant royalement malgré elle.
— Tu devrais pas trop traîner dans les hôpitaux, c'est un coup à te filer le cafard, fit la demoiselle en s'avançant d'abord vers un lit accueillant un Pikachu, oh je suis désolée pour ton Pokemon. J'espère que c'est pas trop grave.
Elle ne se rappelait pas avoir déjà croisé un Pikachu dans l'équipe du Phyllali mais il paraissait avoir tant de Pokemon que peut-être certains étaient inconnus à la rousse. À moins que le type Electrik ne soit récent ? Une capture estivale, peut-être ?
Mais ce n'était pas près du lit du Pikachu qu'Haru se tenait.
Mais près d'un autre, suffisamment grand pour accueillir un humain cette fois-ci. Salomé s'approcha, pensant trouver un inconnu.
Pour finalement apercevoir une tête qu'elle avait déjà croisée à plusieurs reprises pendant son précédent semestre à l'académie.
— Ah merde... Je comprends mieux.
Non, pas vraiment.
Mais il y avait peu de chances pour que ce Pikachu soit celui du Coordinateur désormais.
À ses pieds, Chayana tentait d'escalader la structure du lit mais en vain. Salomé savait bien ce qu'elle avait en tête et se doutait que ce serait voué à l'échec ; ce n'était pas des Vibra Soin qui allaient pouvoir sortir cet étudiant du coma. Mais la rousse se plia de bonne grâce au caprice du type Plante, la portant auprès du patient pour qu'elle puisse s'en donner à cœur joie, laissant Salomé discuter un peu plus avec le blondinet.
— Tu sais quoi sur son cas ? Après tout, je suis Médecin moi-aussi... Enfin quasiment... Enfin je suis le parcours à la Pokemon Community... C'est pareil.
Si vous voulez que Ginji meurt, laissez Salomé s'en occuper.
Ah tiens, il s'appelait Ginji ? Au moins la rousse ne serait pas venue pour rien mais au vu de l'état du garçon, connaître ou non son identité n'aurait peut-être aucune utilité dans le futur. ; le pauvre paraissait plus près de la mort que de la vie en cet instant.
Elle referma la porte derrière elle avant de faire quelques pas de plus dans cette chambre exiguë. Certes elle avait du travail mais Carole n'était pas là pour vérifier si la rousse exécutait ses tâches de manière autonome, alors pourquoi ne pas en profiter pour prendre une pause bien méritée en compagnie de Haru ?
— Non, je suis pas là pour lui, fit la Médecin en pointant du doigt le garçon endormi, tu te souviens de Carole Franck, l'activiste A2P complètement tête en l'air que l'on avait aidé un peu avant l'été ?
Et un peu avant la fuite de Lansat.
Comment l'oublier ?
La demoiselle se rendit compte à quel point ses paroles étaient stupides et naïves ; bien sûr qu'il s'en souvenait, c'était l'évidence même. Elle eut un soupir, laissant le silence s'installer pendant de profondes secondes :
— Enfin... ex-activiste A2P désormais. Elle est herboriste sur Rivamar maintenant. Rien d'étonnant vu la serre qu'elle possédait après tout ! Et vu que je m'intéresse beaucoup à la médecine alternative, c'est chez elle que j'effectue une alternance !
Au moins sa clientèle était-elle différente de celle qui paraissait se fournir chez elle sur Lansat. Pas de Bob ici. Rien d'étonnant au vu du séjour en prison qu'il tirait désormais. Pas de sainte Mystherbe ni rien d'aussi mystique. Juste Carole Franck et ses élucubrations toujours aussi étranges et perchées que six mois plus tôt.
La rousse piocha dans son sac l'un des échantillons pour le montrer à Haru sous la lumière artificielle de la lampe. Des herbes en apparence mais un puissant médicament en vérité. Ou du moins une tisane au goût délectable, c'était ce que la rousse supposait, à défaut d'avoir pu goûter les produits qu'elle vendait.
— C'est ça qu'elle cultive. Bon, là c'est pour des infusions mais à la boutique y a d'autres dérivés de cette plante, sous d'autres formes !
Elle contourna le lit pour déposer l'échantillon sous l'oreiller du malade. Ce serait toujours ça de distribué, même si cela ne serait pas d'une grande utilité dans l'immédiat au comateux. Et peut-être qu'il n'en verrait jamais la couleur mais le cardiogramme paraissait tranquille, contrairement à celui qu'elle venait de quitter quelques minutes plus tôt.
— Je suis là pour une douzaine de jours encore, déclara la demoiselle tout en arrangeant l'oreiller de manière à dissimuler un peu mieux l'échantillon au corps médical, toi tu fais l'aller-retour dans la journée ?
La gitane attrapa la chaise qui traînait dans la chambre et s'y posa dessus, observant sa Germignon qui terminait de s'affairer avec Ginji, descendant du lit pour s'occuper maintenant du Pikachu qui paraissait dans un état similaire à celui de son dresseur. Là encore, la Médecin se doutait que cela ne servirait pas à grand chose mais elle la laissa continuer son manège, reportant son attention sur Haru.
— Tu pourrais venir rendre visite à Carole à l'occasion si tu veux. Je suis sûre qu'elle sera ravie de t'accueillir chez elle !
Ravie ? Vraiment ?
C'était plus ou moins à cause des étudiants que l'ancienne activiste avait appris de sombres secrets autour d'A2P. Les enfants avaient contribué à la reconversion professionnelle de la jeune femme, d'une certaine manière. Etait-ce une bonne chose ? Elle ne paraissait pas de plaindre de sa nouvelle vie et prenait à cœur cette ville différente et cette passion qui l'animait et la faisait vivre au jour le jour. Alors peut-être le duo avait-il bien fait de semer un peu de chaos en retrouvant ce maudit journal. Oui, Salomé préférait repenser à ces événements de la sorte, cela évitait de culpabiliser.