Laisser le hasard décider... Sans savoir pourquoi je me suis tout de suite dit que c'était une mauvaise idée. Essayant tant bien que mal de me débarrasser des quelques grains de sables qui s'infiltraient joyeusement dans ma tenue, je décidais de longer la plage et me rendre sur le chemin qui menait loin du sol instable et des rochers pour atteindre de la bonne herbe plus stable.
Une fois en terrain plus propice, je décidais de grimper la colline histoire d’avoir un bon aperçu de l’île et des environs. L’ascension fut relativement tranquille, pour changer. Même en étant attentif, je ne décelais aucun mouvement dans les hautes herbes qui bordaient le sentier. Plusieurs fois, je fus dépassé par un élève courant à perdre haleine, ne me prêtant aucun attention particulière. Le soleil brillait haut mais la température restait peu élevée. Je n’étais donc pas très épuisé en arrivant au sommet. Enfin, sommet, c’est un bien grand mot. J’avais à faire à une collinette plus qu’un véritable mont. Au moins j’avais une vue dégagée sur la crique de débarquement. Je voyais le professeur Potts s’activer sur le bateau. Je me demandais ce qu’elle fabriquait. Il était presque dix heures, cela ne faisait qu’une heure que la sortie avait commencé.
Tu n’es pas sans savoir que j’aurais pu nous téléporter au sommet en quelques instants.
Lin m’avait suivi tranquillement, sans se presser et sans envoyer aucun message télépathique. Elle semblait heureuse de se dégourdir les muscles par ce beau temps. En même temps, après tant de temps en transports divers… Par contre je souriais à sa remarque.
Où serait l’intérêt ? De plus, tu dis cela mais je sais très bien que tu détestes utiliser cette capacité. Puis en vrai… Je l’avais complètement oubliée !
Comme bien souvent d’ailleurs… Moi qui pensais que tu voulais me faire plaisir.
Écoute, maintenant que nous sommes ici, que la vue est belle, que le soleil nous illumine et que le ciel bleuit ne pourrait-on pas justement en profiter ?
Joignant le geste à la parole, je grimpais sur un rocher plutôt imposant, qui dénotait au milieu de ses confrères de tailles moyennes, et contemplait le paysage. Je sentis le soupir télépathique de Lin qui disparut bien vite pour se laisser gagner par la beauté de l’instant. Les élèves se dispersaient toujours dans l’île avec entrain. Finalement, ce n’était pas si mal cette petite sortie. Je me demandais finalement si la manoeuvre punitive de Ghost n’était pas juste là pour me montrer à quel point les pensionnaires de cette académie était dévoués à la cause Pokemon. On sentait une véritable passion et une grande curiosité dans ces jeunes gens. Les voir courir un peu partout était assez revigorant.
Cependant tu as quand même la flemme de partir à la capture, Artemis.
Je descendis de mon nuage de réflexion devant le sarcasme de Linoa. Cependant, elle n’avait pas tord. Elle me lit toujours aussi bien. J’éclatais de rire.
Ahaha oui je suis tellement bien ici à les observer, tu as raison. Je ne suis pas trop fais pour les sorties sur le terrain. J’en perds toute ma motivation.
Et comme à chaque fois, tu t’en rends compte mais tu ne bouges pas. Incorrigible.
Je pris un brin d’herbe dépassant d’une fissure du rocher et le mit joyeusement dans ma bouche avant de me caler confortablement (ou de façon totalement avachie, c’est au choix).
Tu me connais tellement bien, que veux-tu, c’est la rançon d’un intellect aussi développé que le mien…
Tu es désespérant. Enfin... Il y a tant d’esprits sur cette petite île. Je suis heureuse que l’on nous ai obligé à venir dans les environs d’Adala. Tant d’émotions à capter et emmagasiner ! Rien n’est plus motivant que...
Je me redressais doucement. Une tension soudaine venait de naître dans mon esprit. Linoa s’était totalement immobilisée, elle semblait s’être plongée dans une profonde réflexion. Je la connaissais bien, elle venait de repérer quelque chose d’anormal.
Quelqu’un appelle à l’aide…
Sans que je puisse capter exactement ce qui l’ennuyait à ce point, elle commença à flotter à toute vitesse vers l’autre versant de la colline, qui descendait vers une autre crique. Je bondis à sa suite, non sans manquer de me faire mal en descendant du rocher. Je n’entendais aucun son, il devait s’agir d’un Pokemon en danger plutôt qu’un humain. Ou alors un humain privé de parole. Au choix. Je dévalais la pente à la suite de mon amie à moindre vitesse, de peur d’à nouveau chuter. Il faut dire que ce côté était beaucoup plus escarpé. Sans encombre majeure, je finis par rejoindre Linoa devant un amoncellement de cailloux assez étrange, comme si une portion de la colline s’était affaissée, juste avant de rejoindre la plage. Lin était immobile et regardait le tout avec insistance.
Un Pokemon est bloqué là-dessous, je n’arrive pas à bien saisir ce qu’il pense, il ne m’envoie que de la peur panique. C’est très peu compréhensible par des mots.
En effet, ma Gardevoir semblait avoir du mal à communiquer, concentrée qu’elle était. J’étudiais le tas de rocher, il n’était pas question de le faire s’effondrer en enlevant tout d’un coup.
Je pourrais faire s’envoler les rochers par télékinésie mais je suis trop perturbée par ces ondes, dépêche-toi de faire quelque chose Artemis !
D’accord, d’accord… Je ne veux pas tout casser et lui faire tomber le tas sur la tête !
Je retroussais mes manches et me mis à l’ouvrage pour dégager la voie.
Ah comme quoi il nous aurait bien fallu un Triopiqueur ! … Ok je me tais, je creuse !
Après quelques instants d’efforts, je finis par dégager le gros de l’éboulis. Il cachait l’entrée d’une espèce de cavité naturelle, creusée par l’érosion. Je restais muet de surprise en constatant que cet endroit avait été aménagé en nid par un étrange Pokemon en forme d’oeuf, assez grand. D’environ 40 cm de hauteur, le petit être semblait en panique absolue et essaya de forcer le passage pour sortir dès que j’eus enlevé les cailloux. Je reconnus avec surprise un Togepi. C’était peut-être un signe du destin.
Hé oh, calme-toi petit, tu vas finir en omelette si tu continues comme ça.
Au son de ma voix, il se réfugia tout au fond de sa cachette, craintif.
Peux-tu le toucher ?
Si je tends la main oui. Il est au fond mais accessible, j’ai juste peur qu’il me morde.
Je ressens une aura féerique de sa part, je peux entrer en communion avec lui et le calmer, mais je risque d’être un peu courte, tu peux servir de catalyseur.
Je ne sais pas si…
Allez hop ! Ce fera l’occasion de capturer ton premier Pokemon de manière douce et sensible. Ce devrait te plaire.
J’avais déjà oublié cette histoire de capture. Mais pour arriver à le capturer, il allait falloir le calmer. Je pris Linoa par la main, si on puit dire, et plongeait l’autre dans le trou pour toucher le petit Togépi. Acculé, celui-ci ne put pas faire grand chose. Linoa sembla se concentrer et elle commença à produire une légère mélopée. Voici comment je me suis retrouvé pris entre deux Pokemon fée. Ce n’est pas une chose à dire dans un certain contexte mais enfin…
Par contre ne fais pas de blague salace, aide-moi plutôt à nous connecter, il est assez récalcitrant pour un Pokemon Bonheur.
T’inquiète, on va bien se connecter tu vas voir, en quelques minutes...
AH.
Quel naïf j’étais. Il nous fallu bien trois bonnes heures de négociations pour tranquilliser le Togépi. Selon Linoa, le pauvre s’est retrouvé abandonné là-dessous par ses congénères ne pouvant pas soulever les rochers. Il s’est buté et a choisi de ne plus avoir confiance en rien. Résultat une crampe au bras et une migraine pour Lin et moi. Au bout de ces trois heures de communication imagée, le Togépi finit par sortir et se placer devant moi, avec un air plus que méfiant. Lin semblait épuisée par ces efforts mentaux. Etait-ce le bon moment de lancer la fameuse balle ? J’espère, après trois heures de négociations, on pouvait dire que l’on se connaissait, le Togépi et moi. J’avais essayé de lui montrer à quel point je voulais aider les gens, les comprendre, savoir utiliser leurs émotions pour les guérir. Je voulais lui faire comprendre à quel point les Pokemons, en particulier ceux de son espèce pouvait servir de catalyseurs et de guide pour nous autres les humains. Soufflant un bon coup, je pris une des trois Pokéballs de mon sac et la regardait bizarrement…
Bon, comment cela fonctionne-t-il ?
Je levais mon bras de façon exagérée, oubliant la douleur qui le traversait, et je lançais l’objet. Le sort en était jeté.
[Lancer une Pokeball]