Elle était comme une tempête, un ouragan qu’on ne pouvait calmer. Elle était inarrêtable, instoppable et pour être franc, personne ne voulait l’arrêter. Elle avait en elle ce feu si rare de la détermination. Celle qui est brute, celle qui sort de vos tripes. Elle avait ce courage de sourire à chaque putain de minute. Malgré les problèmes, malgré la crainte qui nous envahissait tous. Elle ne faisait que sourire et nous rappeler qu’il faut continuer. Elle avait beau être la plus jeune du groupe, c’est elle qui a prit la tête du groupe. C’est grâce à elle qu’on est allé aussi loin.

Et maintenant, elle s’en va.

Et là, tout de suite, maintenant, elle s’en va.

Parce qu’elle était comme une tempête, un ouragan qu’on ne pouvait calmer. Elle était inarrêtable, instoppable et pour être franc, personne ne voulait l’arrêter. Elle nous a donné ce feu qui est en elle, elle nous a donné cette détermination brute, qui sort des tripes. Elle nous fait sourire quand le monde dégringole et qu’il n’y a plus d’espoir. Elle nous a dit de croire en nos rêves, alors on a écouté.

On a simplement écouté. C’était la seule chose à faire.

Elle est radieuse, lumineuse, solaire. Elle est devenue ce que nous aurions jamais cru qu’elle deviendrait. Enfin, ça a toujours été son style. Elle dépasse toujours les attentes que les autres ont sur elle. Il faut bien reconnaître que c’est pas très étonnant.

Il aurait fallu la voir, quand elle est arrivée, perdue dans son manteau un peu trop grand. Elle était si petite, si faible, si fragile. Elle n’avait alors rien d’une tempête, rien d’un ouragan. Elle était plutôt une douce brise ou le bruit des vagues qui s’écrasent contre la plage par une jolie matinée d’été. Elle était un soleil timide, tranquille, en retrait.

Voyez comme elle a changé, voyez comme aujourd’hui, elle vous écrase de sa détermination et de sa lumière. Voyez comme elle a grandit, comme sous ses vêtements, il y a sa force qui se dessine. Voyez comme elle est devenu l’une des nôtres et plus encore.

Et maintenant, elle s’en va. Mais on sait que c’est pas pour toujours, que c’est pas à jamais. On sait que même si elle ne revient pas, elle a laissé sur nous un impact qu’on ne peut mesurer. On sait que maintenant, quand on regardera le soleil, c’est elle qu’on verra. On sait que quand on doutera, il y aura toujours sa voix, quelque part, cachée dans notre coeur, qui murmura de croire en nous, en nos rêves.

Qui nous hurlera de pas abandonner.

Elle était une tempête, un ouragan qu’on ne savait calmer. Qu’est ce qu’on a bien fait. Qu’est ce qu’on a bien fait de la prendre avec nous, cette gamine trop fragile aux yeux brillants. Parce que regardez nous, parce que regardez comme nous sommes grands, comme nous sommes fiers. Elle nous a peut-être apprit plus que nous ne lui avons appris et qui l’aurait cru.

Et maintenant, elle s’en va. Maintenant, elle chevauche les dragons et les commande. Maintenant, elle tranche le ciel azur d’une traînée noire. Personne ne sait vraiment si le rugissement qu’on attend vient du dragon ou de la gamine sur son dos.


- Hey dragonneau ?
- Yep Loyd ?
- Tu es prête ? On descend dans quelques minutes.
- Oui, oui, ne t'inquiète pas. Je gère.
- Je sais ça, mais je m'inquiète toujours pour toi.
- Aaaaaaaaaw, trop mignooooon.

La jeune femme colle ses deux mains sur ses joues et se tourne pour faire face au géant brun.

- Qu’est ce que j’ai fait au monde pour te mériter.
- Probablement quelque chose de génial. Je veux dire, tu m’as vu ?

Comme pour appuyer ses propos, la jeune femme pose une main sur sa hanche et rejette de son autre main ses longues mèches roses.

- Tu pourrais pas avoir plus raison. Aller petit dragon, on y va.
- Ayeeee sir !

Un sourire amusé se dessine sur les lèvres de l’adulte tandis que la demoiselle finit d’attacher le baudrier à sa taille. Avec un regard, l’homme confirme qu’elle est prête. Elle l’est. Elle n’a jamais été plus prête. Avec un sourire et un pseudo salut militaire, elle saute directement dans l’énorme trou.

La salle et son maître de stage s’efface rapidement pour laisser place à de longs murs de pierre brute. Leur manière de descendre n’est peut-être pas la plus sécuritaire mais elle a l’avantage d’être rapide.

Au bout de quelques secondes de chute libre, la corde finit par incliner et la rose se retrouve suspendue au dessus du vide par une tyrolienne. Le reste du trajet ne dure pas plus d’une minute pendant laquelle la scientifique se laisse aller. Elle a suffisamment fait le trajet pour que le vide sous ses pieds ne l'effraye plus.

Et puis bon, quelle mauvaise dracologue ferait-elle si elle était incapable de supporter le vide sous ses pieds. Elle ricane à l’idée de ne pas pouvoir fendre le ciel sur les dos de ses imbéciles de lézards cracheur de feu. Ca serait manquer beaucoup.

Déconcentrée par ses propres pensées, elle ne voit pas l’arrivée et se rate complètement. Trébuchement, chute, tête dans le maletas. Qu’est ce que Marie avait dit déjà ? Ne pas trop montrer son amour pour les sols. Oups ? Désolé Marie, elle a fait de son mieux. Sous les ricanements du reste de l’équipe, la jeune femme se relève et s’enlève juste à temps de la zone d’atterrissage pour se prendre le mastodonte qu’est le chef de l’opération dans la tronche.

- Et bah petit dragon, on titube ? Oooh, tu pensais à ton cher et tendre pas vrai ? Tu es adooooooorable !

Sans même avoir le temps de réagir, elle se retrouve prise dans l'étreinte affectueuse de l’homme qui n’est pas du tout devenu sa figure paternelle. Pas, du, tout. Rougissant comme à chaque mention d’un certain blond, elle se dégage tant bien que mal du câlin qui est d’ailleurs plus une tentative de meurtre si on lui demande son avis.    

- On est pas sensé travailler ?

L’homme sourit vivement avant d’ébouriffer les cheveux de la jeune femme.

- Tu as raison, qu’est ce qu’on ferait sans toi ?
- Pas grand chose, ça, c’est sur.

Nouveaux rires. Elle sourit. L’équipe se met gentiment en route.


- Si tu dois retenir une seule chose de tout ça, petit dragon, retient que tu dois les écouter. Du plus profond des rugissements au plus moindre des mouvements. Rien ne doit échapper à ton regard, à ton oreille. Tu dois entrainer tes sens, être capable de ressentir la moindre différence d’humeur, de météo, d’environnement.

Loyd attrape le bandana rouge que lui tend Minerva. Les deux dracologues se sourient avant de placer les longs morceaux de tissus sur leurs yeux. Ce n’est pas la première fois qu’elle a la chance d’assister à leur entraînement mais ça ne le rend pas moins impressionnant.

- Ce que nous faisons est un bon exercice pour commencer. La vue est le sens que nous avons tendance à trop utiliser. Il faut savoir écouter tes autres sens autant que tu écoutes ta vue. Un bon moyen de faire ça, c’est de te priver de ce sens.

Les premiers coups volent à une vitesse impressionnante pour deux personnes aux yeux bandés. Aucun coup ne touche, le combat cherchant à montrer comment les deux adultes bougent et se déplacent avec un de leurs sens en moins.

- C’est bon pour le combat, mais aussi pour les autres situations de la vie. Ressentir quand tes amis sont tristes ou que quelque chose ne va pas. De même pour ton équipe, surtout pour ton équipe.

Les mots résonnent avec ceux qu’il a prononcé, quelques jours plus tôt, alors qu’il s’envolait sur son Drattac, les yeux là aussi bandés.

- Être capable de ressentir tes partenaires dans chacun de leurs mouvements, de leurs humeurs est indispensable si tu veux devenir dracologue. Tu ne dois être qu’un avec ton équipe. Tu dois leur ouvrir ton âme, entièrement, pour qu’ils t’acceptent comme l’une des leurs.

Le combat n’est plus qu’un fond visuel face aux informations que lui donne Loyd. Elle se laisse bercer par le son de sa voix, écoutant la moindre variation de ton, d’intonation.

- Un dracologue n’est qu’un nom un peu classe pour dire que nous sommes des humains dragons.

Des humains dragons. Des hommes et des femmes, plus proches des grands reptiles volants que du reste de l’espèce humaine.

- Soit attentive à ton environnement, où se situent les objets et les êtres vivants autour de toi, comment les atteindre le plus rapidement possible, comment les mettre hors d’état de nuire le plus rapidement possible, évaluer le danger de chaque situation, savoir comment s’enfuir en toutes circonstances.

Elle sourit légèrement. Ça, c’est des mots qu’elle reconnaît. C’est peut-être la première chose que lui a dit Loyd. Leurs méditations matinales sont censées l’aider à entrer en communion avec la nature, avec son environnement, à mieux le comprendre. Loyd lui pose toujours des questions de ce style aux moments les plus étranges, les plus incongrus.

Et elle fait de son mieux pour être à la hauteur.


- Loyd ?
- Je suis là !

La jeune fille se faufile entre les tentes pour trouver le brun assis au cœur d’une montagne de papiers, notes et autres schémas.

- Besoin d’aide ?
- J’avoue que ça serait pas de refus.
- Ok !

Elle s’installe rapidement à côté de lui et se plonge avec la même passion que lui dans les recherches.

- Tu travailles sur quoi là ?
- J’arrive pas à comprendre pourquoi est-ce que les emplacements des autels sont aussi aléatoires. Il n’y a aucune logique. Regarde, ici, c’est le site météore, là Janusia. Il y a un pattern très identifiable et presque identique dans l’emplacement des constructions. Ici, j’ai juste l’impression que c’est le bordel.

Elle se penche sur les cartes et plonge en réflexion tandis que Loyd fait de même de son côté, le problème désormais posés. Il ne faut pas longtemps à la jeune femme pour reprendre la parole.

- On a des photos des autels de Janusia et du Site Météore ? J’ai peut-être une idée.
- Hm ? Ouais, attend.

Le dracologue fouille quelques instant dans les dossiers étalés autour d’eux. Après quelques minutes de bataille, il pousse finalement un cri de victoire avant de tendre le dossier à son élève.

- Là ! Voilà.
- Merci !

Il ne faut pas très longtemps à la jeune fille pour pointer du doigt un début de solution.

- Regarde, c’est normal qu’ici il n’y ait pas de patterns, on se trouve dans un endroit sacrément plus hostile que les deux autres. Plus sauvage aussi. Ils n’avaient pas les mêmes ressources, les mêmes capacités. Je pense qu’ils ont simplement placés les autels là où ils le pouvait.

Loyd reste un moment bouche bée avec de s’exclamer joyeusement.

- C’est … Pas con du tout ça. S’ils avaient placés leurs autels selon le même pattern, ils auraient dû être ici, là …

Avec un marqueur noir, il dépose avec soin des petites croix sur les emplacements supposés des autels. La jeune fille se rapproche et pointe du doigt une des croix.

- Ici, c’est une faille, donc du vide. Pas possible de faire un autel. Ici, c’est juste de la pierre. Tu vois ! C’est simplement de l’incapacité à les placer là où ils le voulaient ! Ca explique aussi peut-être que ce lieu soit tombé dans l’oubli alors que les deux autres sont devenus des symboles de la culture du peuple draconique.

Loyd semble prêt à exploser. Les lunettes de repos posées sur son nez, il arrive à sautiller alors qu’il est assit. Ce qui est, il faut le dire, très impressionnant.

- Donc le lieu n’aurait pas été abandonné à cause des événements météorologiques mais simplement parce que les autels n’étaient pas au bon endroit ! C’est majeur comme hypothèse ça !

Une grande et belle rousse, en pyjama, l’air épuisé apparaît soudainement devant eux. Le duo échange un regard terrifié avant d’essayer la technique des yeux de dragon battu.

- Non, il est beaucoup trop tard pour que j’essaie de gérer votre merde. Au lit. Vous deux. Maintenant.

Quand Minerva vous dit quelque chose, vous écoutez. C’est tout.