Comme un rossignol en cage.
Ils t'aimeraient muette, sotte et absente -et pour éternité- si seulement ton visage ne se flétrirait point. Car tu es de celles qui sont trop belles pour le réel. De ton visage angelot, se dégage ce parfum d'orchidées et tu enclenches de sinistres raclées lorsque s'étire tes lévres. Faut dire que quand on est belle comme tu est belle, on devient fleur trop rare poussant à l'orée des montagnes et déclenchant batailles - pas pour t'aimer -non jamais- mais pour te cueillir, te posséder, t'exposer dans un vase et te laisser en dépérir.
Il faut croire qu'il y cage qui s'incarne dans tes traits et dans tes manières - délicate, fragile et à protéger. Tu as sans doute fini par les croire. Incapable d'être toi pour toi, il faut que tu t'effaces pour l'autre. Te fasse ombre de ton reflet, murmure de ta beauté. Tu n'es qu'une parure : un manoir en campagne pour tes parents, un collier pour tes prétendants, une lettre sans réponse pour tes frères.
Et ta mélancolie devient caractère charmant, tes souffrances sont moues attendrissantes et ton deuil : une invitation à t'enlacer. On s'émpand sur tes larmes mais sans s'étendre -oh grand non. Un mouchoir devrait suffire à combler ce vide hideux qui traverse ton âme, une main dans les cheveux suffira à te faire oublier l'absence de celui emporté par la mer. Et les ces encerclées rouges ne font que ressortir le gris mirron de tes yeux.
Et tes méninges sont enterrées au fond d'un ravin au profit de considérations bien plus adaptées : coquette, obsédée par tes méches et ta posture, effrayée par l'âge et les blessures. Loin d'être empotée, loin d'être laide et pourtant tu fais la pleureuse. On te dit de ne pas te plaindre, que ta beauté est un privilège qu'il faut savoir apprécier. Et seulement si, si seulement ils prenaient ta place : ils verraient alors que c'est ton coeur qui est devenu hideux et dégeulasse. Que tes murmures ravagent un sens de la tête en pagaille. Incapable de se concentrer, sans cesse ballottée dans tes nuages -inconsistance, ô rage.
Q'ont choisi les dieux pour toi ? Non content de te faire de ton corps un tableau, pétrissent ton esprit d'un foutoir à couleurs ; brumes aux milles nuances. Bien incapable de te repérer aux horaires, lunatique aux humeurs. L'on te dit astronaute, sans cesse dans les étoiles, perdues entre les récits et le réel. Un air parfois idiot sur le visage, une absence dans le regard. Et ton corps voudrait s'exprimer et chanter ce tracas infernal, tes doigts claqueraient un rythme bien à toi, ta jambe tressautante serait bien l'esprit démoniaque de toute cette agitation.
Mais non. Car toi tu es fille et trop belle pour le réel.
Tu n'a pas l'panache des garçons, tes ainés. Pas la patience de leurs coups d'éclats. Tu dois être sage, calme, immobile. Ange en apprentissage. Statue marbrée dans les manières.
Tu n'es qu'une fille. Une jolie fille.
Et ce reflet qui fait tourner ce monde, celui là même que tu hait. Il t'étouffe, t'écrase, te noie. La fille, elle... Finit par recouvrir ce que tu es - couches de merveilles qui cache une âme poussiéreuse. Tu trimballes d'la souffrance que tu ne saurais crier, que tu ne saurais dessiner comme interdite de crayon. Laisse là donc te consumer -sans doute finira t'elle par te carboniser. Alors et alors seulement, ils verront les flammes de ta peine.
En attendant délivrance par les flammes, tu te complait dans ce monde comme une de ces poupée en porcelaine qu'on exposerait en vitrine. Protège ta peau pâlotte des reflets acides du soleil, coiffe cette caractéristique chevelure nuage pendant des heures en humant des vieux chants populaire de ta voix qu'on décrira comme angélique. Évites les hommes et leur fulgurante en te faisant fantôme, discréte et muette. Car tu ne sais que trop bien les ardeurs de ces guerriers qui remonteraient la montagne pour te cueillir.
Pourquoi quand tu les frôle, ils prennent cela pour une caresse ?
Pourquoi quand tu leurs parle, ils te pensent déjà éprise ?
Prisonnière sous ton propre visage, entre les quatres murs de leurs fantasmes. Te voilà déjà qui doutes de tout ce qui est sensé être toi : point drôle, certainement sotte, pas intéréssante pour un sou. Oh bien sûr, tu connais aussi le pouvoir qui vient avec ce fardeau. Bien des fois, on t'invites à faire tourner les yeux et les âmes. Mais pas mince affaire, de céder à ce caprice : trop de fois on a vu des rossignols plumés sur la place publique pour avoir aussi chanté pour eux.
Alors tu te tais. Faye la taiseuse.
Celle qui fait pas de vagues, qui se noieraient certainement pas dans sa mélancolie.
Faye la belle.
Bien trop sotte pour les grandes affaires, pas besoin de s'intéresser aux affaires de grands.
Faye la benjamine.
Celle qui tout pour elle, à qui ne demande rien. Qui n'a être que là. Mais tout ce temps - parfois ton esprit embrumé s'agite- de tout ce temps, qu'en fais tu, Faye ?
Spoiler :
Jolie - Silencieuse - Passive - Bien élevée - Discrete et taiseuse - Tdah non diag - Tête en l'air - Mélancolique - Grande vie intérieure - artiste à ses heures perdues - torturée - joli brin de voix - Coquette - Soignée - Bordélique - Pleutre - Timide - Se laisse marcher dessus - Sourde d'une oreille - mauvaise élève - douce - bienveillante - gentille - a un vrai beau coeur - un peu débile - aime la nature et les grands espaces - l'on ne la surprendra pas à se salir néanmoins - observatrice et perspicace - bonne lecture sociale - a un sens particulier de ce qui est mignon - maladroite - bégaye quand est sous pression - écrasée par le système patriarcal.