A la base, je n’étais pas du tout, du tout, du touuut enclin à participer à cette marche au Mont Skiddo. J’aurais accepté à la rigueur de festoyer autour d’un pique-nique avec mes amis pendant que les pélos rapporteraient la statue du gardien sur les sentiers que j’avais traversé plus d’un an auparavant. J’en connaissais donc les dangers que comportait une telle marche et n’avais pas l’envie de m’investir dedans, alors qu’il me suffisait de grimper à dos de Flambusard et prendre un aller simple pour le sommet. En deux temps trois mouvements, j’agrippais mon iPok pour contacter le reste de la bande d’étudiants de dernière année. Un instant, je marquais une pause en me rendant compte que c’était peut-être la première fois que nous allions participer à un tel événement tous ensemble, sans avoir sur le dos les bêtises d’autres élèves et professeurs de l’académie. Notre amitié n’était même pas vraiment marquée dans le marbre. Nous partagions dans le cadre des cours et notre ancienneté nous liait forcément, mais je n’avais pas plus de détail sur leur vie ni eux sur la mienne. Heureusement, ce n’était pas le cas de tous et j’allais poster mon invitation quand j’en reçu une.
Josh. N’appartenant pas à la bande que j’évoquais, il avait pourtant un âge similaire au nôtre. Nos chemins s’étaient séparés lorsqu’il avait décidé de quitter l’académie pour rejoindre l’armée. Ainsi, nous n’avions eu l’occasion de développer une relation plus intime. Ce n’était que récemment, que j’avais appris à mieux le connaître lors d’un stage recommandé par la Générale Jackie. Il m’avait enjoint à rejoindre son groupe de « promenade ». Je n’avais pas été très emballé au début, mais une randonnée de temps à autre ne pouvait faire de mal et ça me permettait de voir d’anciennes et de nouvelles têtes, notamment des personnes hors de l’académie. Il fallait reconnaître que je n’étais peut-être pas des mieux perçu ces derniers temps avec l’accouchement de Miriam. Avoir un enfant à mon âge, qui plus est avec la mère de Miguel qui me déteste… La nouvelle n’avait fait qu’un tour auprès des autres élèves. Ragots ou vérité, seuls mes amis proches avaient le fin mot de l’histoire, les autres se contentant d’apprécier la saveur particulière de cette découverte.
Puis les vacances sont arrivées et les activités du club de rando se sont atténuées. Il m’était pratiquement sorti de la tête et j’hésitais. Mes potes, je pouvais les voir tous les jours. Josh, c’était un peu moins le cas. Et ce n’était pas comme s’il y avait une sortie tous les week-ends. Par conséquent, je remettais à plus tard notre pique-nique de winners et acceptais son offre.
Le jour venu, j’avais été ébahi de la présence d’autant d’habitants de l’île pour la restitution d’une banale statue. Certes, elle revêtait un caractère mystique pour eux, peut-être même que certains la verrait pour la première et dernière fois de leur vie, mais était-ce vraiment si important ? Et qu’est-ce qui a de l’importance dans la vie ? En soit, les choses n’ont d’importance que celle que l’on souhaite leur attribuer. Donc à mes yeux de jeune adulte pressé et détaché, une statue symbolique ne représentait rien de plus qu’une œuvre d’art à la limite.
Laissant la foule s’amonceler autour de la pièce, je rejoignais mon gang de grimpeurs. Les salutations et explications passées, nous entamions notre montée. Aligatueur se tenait auprès de moi, à l’affût. Lorsque Tabalibungaba leur disait que la montagne avait aussi son mot à dire, il ne mentait pas et j’espérais sincèrement que les habitants ne le prenaient pas pour un vieux fou sénile. De toute façon, ils pourraient en juger d’eux-mêmes sous peu avec l’arrivée de notre premier défi : un champ de Chuchmur. Mais avant, je devais faire face à mon premier ennemi juré de cette traversée. Des lèvres pulpeuses, un regard de braise, le jus d’orange attendait que je craque pour lui, manipulant Josh, afin de me pulvériser l’estomac de l’intérieur. Il était hors de question que je cède à cette abomination de la nature. Avec un sourire, je prenais le verre que mon camarade Caporal me tendait et, tandis qu’il buvait le sien, jetais le mien par-dessus mon épaule avant de m’essuyer la bouche d’un revers de la main.
- Mmh… Raffraîchissant, comme toujours.Nous entamions la procession et notre premier défi, second pour ma part. De notre côté, il suffit à Ali de hurler sur les Chuchmurs pour les effrayer et les obliger à s’écarter de notre chemin. Est-ce que cela diminuait leur cacophonie ? Pas le moins du monde, mais c’était tout de même plus facile d’avancer lorsqu’ils ne traînaient pas dans nos pattes. Profitant de l’accalmie, Josh redescendit à mon niveau pour discuter. Il prenait toujours fièrement le lead de ces expéditions dont il était l’instigateur. Son pas et son ton militaires y étaient pour beaucoup. Il savait comment faire pour motiver les troupes à avancer et c’était le rôle du meneur dans ce genre d’activité, tout comme c’était le rôle des personnes à l’arrière de veiller à ce qu’aucune ne soit abandonnée à la traîne.
- C’était la première fois que je dynamaxais un Pokémon. Pour tout te dire, je refusais de le faire et Kabu est parvenu à m’y contraindre sur la toute fin du match, donc il n’a pas démérité son titre de Champion haha. Ça signifie aussi que j’ai encore du travail avant d’atteindre mon niveau max et ça me fait plaisir de savoir que je ne suis pas limité dans ma progression. Il n’y a qu’avec des Champions ou des dresseurs de ce niveau qu’on peut vraiment s’évaluer sur un référentiel commun à tous. Bref, je pourrais t’en parler longtemps mais ça se passe comment de ton côté à la caserne ?Nous parlions de tout et de rien. Surtout de rien. Je n’avais pas très envie d’aborder le sujet de Jackie. Il était sans doute l’une des rares personnes à ne pas être au courant pour ma fille et c’était plaisant de ne pas sentir son regard légèrement biaisé par cette information lorsque nous conversions. Puis survint la phase deux : pop des adds. Une armée de Capumain se mit à nous canarder de projectiles en tout genre, allant de la simple branche, en passant par le fruit, au caillou. Ali se mit en protection du groupe et riposta avec des Pistolet à O, quant à Josh, il s’éloigna pour aider une femm… Kaeko ? … Oui, c’est ça. Euh… Donc je disais, pour aider une fille lambda et un rouquin.
L’air livide. L’allure cadavérique. Une jeune femme me tiqua du coin de l’œil. Elle avançait machinalement sous les projectiles, protégée par une Muplodocus maladroite. Je ne l’avais rencontrée qu’une fois et, même si elle m’avait montré ses faiblesses, elle ne m’était pas apparue aussi abattue qu’aujourd’hui. Son teint pâle en devenait maladif. On aurait simplement dit que son âme s’était extirpée de son corps.
- Reste avec eux Ali, je reviens vite.Il m’était impossible de laisser cette femme que je connaissais, même peu, en proie au désarroi. Je n’osais pas non plus l’accoster trop brutalement, alors je gardais d’abord une petite distance entre nous, le temps de la saluer de la main, puis brisait les dernières mètres à petit pas.
- Aby ?Oui ? Et qu’allais-tu lui dire maintenant ? Le plus basique et safe serait de lui demander si ça va, en espérant qu’elle se confie. Cependant, j’avais l’intime conviction qu’entamer la conversation de cette façon n’était pas la bonne méthode. Je pourrais essayer un rapprochement en faisant abstraction de cet élément, comme deux amis qui ont l’habitude de se côtoyer et qui entament par une private joke avant de passer au sujet sérieux. Sauf que nous n’avions pas cette proximité. La dernière et première fois que nous nous étions vus, nous avions participé ensemble à un tournoi de combat Pokémon. C’était aussi le jour de la Saint Valentin. Et nous avions fini bourrés dans le même lit… Tout ça pour ne plus se revoi… Mais ! Tout ça sans se protéger surtout. Ça faisait quoi ? De février à septembre, il y a un, deux, trois… sept mois. Son ventre n’était pas gonflé, ok, pas d’enfant caché à prévoir ! Ouf. Wait… Et si elle faisait un déni de grossesse et qu’elle venait de l’apprendre ? C’était possible une chose pareille ? J’en savais rien… Tant pis pour le tact, je dois savoir.
- Qu’est-ce qui t’arrive ? Tu veux qu’on marche un peu ensemble à l’écart ?A l’écart ? Ça faisait pas un peu trop « viens, restons que tous les deux, on est hyper proche après tout vu la nuit qu’on a passé ensemble lol ». J’inspirais un bon coup et poursuivais dans le but de désamorcer une situation partiellement gênante. Enfin, elle n’était gênante qu’à condition que l’un de nous éprouve un intérêt particulier pour l’autre, mais ce n’était pas le cas, hein ! … N’est-ce pas ?
- Je suis avec un groupe de randonnée, je te sens patraque et ça pourrait t’aider de respirer à plein poumon l’air frais de la montagne en discutant avec… un ami ?Soudain, un nouveau problème se posa devant nous. Littéralement. Un Ronflex et un Monaflémit barraient le passage de leurs immenses statures. J’étais persuadé d’avoir déjà rencontré le flemmard de type Normal. Instinctivement, je sifflais vers Ali.
- Dégage le Ronflex et vois si tu peux négocier avec Monaflémit qu’il libère la place pour la statue, c’est celui qu’on a rencontré lors de notre première montée.Nouveau jour, cas similaire. Josh et d’autres dresseurs s’étaient déjà empressés de venir écarter les deux Pokémon. Ali n’eut qu’à se faire une place au milieu d’eux, de leur demander de se pousser un peu, puis il utilisa sa puissante musculature pour soulever le Ronflex de quelques centimètres du sol puis le poser à petit pas un peu plus loin, de sorte à ce qu’il ne bloque plus le passage. La route étant étroite, ce n’était pas suffisant, alors il revint négocier selon mes termes auprès du Monaflémit. Pour le coup, je n’étais pas sûr que le Pokémon accepte si facilement d’être délogé.
HRP :
Aligatueur (avec Charme "Aligatueur" 2 ++) +11 en Duel, +5 en Recherche, +4 en Athlétisme, +0 en Beauté (Graou)
Résumé :
Paul marche avec le club de rando.
Il discute un peu avec Josh (et esquive la tentative d'assassinat d'un jus d'orange).
Il voit Aby dans le mal et va lui parler en l'invitant à rejoindre son groupe.
Ali soulève et dépose hors du passage le Ronflex, puis tente de dialoguer avec Monaflémit.